action en contrefaçon; contrefaçon;

La déchéanche de la marque

La procédure en nullité ou en déchéance à l’encontre d’une autre marque appartenant à un tiers permet aux acteurs économiques à compter du 1er avril 2020 de faire valoir leurs droits plus simplement, plus rapidement et à moindre coût, en simplifiant des actions ouvertes auparavant dans le seul cadre d’un contentieux judiciaire.

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Instruite à l’INPI par une équipe de juristes spécialisés, la procédure permet de rendre disponibles des marques non exploitées pour permettre à d’autres acteurs de les utiliser et de supprimer des marques en cas de défaut de validité ou d’atteinte à l’ordre public.

Le propriétaire d’une marque française a l’obligation de l’exploiter pour les produits et services désignés dans son dépôt. Il risque sinon de la perdre.

La déchéance d’une marque est prononcée par l’INPI ou par les tribunaux, sous certaines conditions. Elle peut être demandée par toute personne, si son propriétaire :

N’a pas commencé à exploiter sa marque alors qu’elle est enregistrée depuis 5 ans au moins

Ou s’il a abandonné l’exploitation de sa marque depuis plus de 5 ans.


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La déchéance d’une marque peut être totale ou partielle, c’est à dire pour tout ou partie des produits et services désignés au dépôt.

C’est au regard des preuves d’exploitation apportées par le propriétaire que l’INPI ou les juges apprécieront si la marque a été sérieusement exploitée.

I. Conditions de fond de l’action en déchéance pour cause de dégénérescence

A. La dégénérescence s’applique quand la marque est devenue après son enregistrement

Selon l’article L.714-6 du Code de la propriété intellectuelle, encourt la déchéance de ses droits le titulaire d’une marque devenue de son fait :

1.La désignation usuelle dans le commerce du produit ou du service

En fait, les plaideurs qui ont eu recours à l’action en déchéance pour cause de dégénérescence ne se sont pas attaqués exclusivement à des marques qui étaient devenues la désignation usuelle du produit ou du service au sens de l’ancien article 12 de la directive (ce qui créait finalement un certain lien avec la notion de marque notoire, lien factuel). Ils ont aussi tenté d’obtenir la déchéance de marques composées de termes qui ne remplissaient pas ou plus les conditions minimales de la distinctivité d’une marque au regard des autres causes exposées à l’ancien article L. 712-2.

Une telle demande apparaît de prime abord comme étant contraire au texte même de la directive, du règlement et de la loi française, alors applicables, qui limitent les possibilités d’application de la dégénérescence au cas de la marque devenue la désignation usuelle du produit ou du service.

En effet, seule la marque devenue la désignation usuelle d’un produit ou d’un service est apte à paralyser l’intervention des autres opérateurs économiques sur le marché considéré. Les autres causes de refus d’enregistrement ou de nullité de la marque sont, sur ce plan, un peu moins contraignantes pour les concurrents.

La société Candia a déposé la nuance de couleur Rose Pantone 212 à titre de marque pour désigner des produits laitiers. Elle assigne en contrefaçon les sociétés BSA et Lactel, qui utilisent une nuance très proche, le rose fuchsia, sur des produits identiques ; celles-ci répliquent en invoquant la dégénérescence de la marque au motif que cette nuance est devenue usuelle dans le domaine des produits laitiers.

La cour d’appel de Lyon (CA Lyon, 23 mars 2006, n° 04/08055 : JurisData n° 2006-311182 ; PIBD 2006, n° 831, III, p. 403 ; Propr. industr. 2006, comm. 93, P. Tréfigny) fait droit à cette demande :

[…] les sociétés appartenant à l’activité laitière font usage de la couleur « rose fuchsia » qui sans être toujours identique à la couleur « rose pantone 212 » est une nuance très proche ne permettant pas à un consommateur d’attention moyenne d’opérer une distinction ; […] cette nuance de rose qui est une modernisation de la couleur rose layette ou rose buvard qui identifiait autrefois les produits infantiles est devenue usuelle pour les sociétés commercialisant les produits laitiers.

La société Lactel avait exercé des actions en contrefaçon, dont elle se prévaut pour démontrer qu’elle a tenté d’empêcher la dégénérescence de son signe. La cour estime qu’elle n’a pas pris « des mesures suffisantes pour éviter cette généralisation de l’emploi par des tiers de sa marque déposée rose pantone 212 et éviter la banalisation de celle-ci ». La cour de Lyon rappelle la solution retenue par la Cour de cassation dans l’arrêt Pina Colada du 28 avril 2004.

La chambre commerciale de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre cette décision dans un arrêt du 10 juillet 2007. Elle confirme donc qu’une marque figurative peut faire l’objet d’une action en déchéance pour dégénérescence et que l’usage par des tiers de signes similaires et non pas identiques à cette marque ne fait pas obstacle à la déchéance, dès lors que le consommateur d’attention moyenne ne peut pas les distinguer.

2. Propre à induire en erreur, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service

L’article L. 714-6, b) dispose qu’encourt la déchéance de ses droits le propriétaire d’une marque devenue de son fait « propre à induire en erreur, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service » (v. aussi dir., art. 12, § 2, b) et RMC, art. 51, § 1, c)) 1350. Par hypothèse, la marque n’était, au jour de son dépôt, pas trompeuse à l’égard des produits ou services visés dans la demande et a donc été valablement enregistrée.

Mais elle est devenue trompeuse en raison des circonstances de son exploitation par son titulaire ou un tiers autorisé ou, comme dit la directive, « par suite de l’usage qui en est fait par le titulaire ou avec son consentement ». Si l’enregistrement est refusé, ou la marque enregistrée susceptible d’être annulée, lorsque le signe était trompeur au moment du dépôt, il est assez logique que le droit de marque puisse disparaître si le signe devient trompeur en raison de l’usage qui en est fait dans le commerce. L’idée est que nul ne doit avoir de droit exclusif sur l’instrument d’une tromperie.

Cette action sanctionne, par hypothèse, une marque dont le vice n’est pas originel. M. Colombet avait précisé dans son rapport (Rapp. devant l’Assemblée nationale au nom de la Commission des lois, n° 1301, annexe au procès-verbal de la séance du 26 avr. 1990) qu’il s’agit de « (…) l’hypothèse où une marque, pendant le cours de la protection, devient trompeuse.

Il peut en être ainsi lorsque, compte tenu de la transformation des esprits ou des usages une marque non déceptive à l’origine devient ultérieurement trompeuse ». Lors de son dépôt, ou lors d’une action en nullité, la déceptivité de la marque est appréciée par rapport au libellé du dépôt, en tenant strictement compte des produits et services visés. Lors d’une action en déchéance, c’est la déceptivité de la marque, telle qu’elle est utilisée, au moment où l’action en déchéance est introduite, qui est examinée (sur ce point, V. RLDI 2006, p. 6, B. Humblot. – Et B. Humblot : « de la nécessité de ne pas confondre marque trompeuse et marque trompeuse » : RLDI 2015, n° 121, p. 40). L’INPI n’a pas, lors du renouvellement de la marque, la possibilité de relever un vice qui affecterait la marque. C’est pourquoi il est important de prévoir la déchéance d’une marque qui serait devenue trompeuse.

B. Du fait de l’activité ou de l’inactivité de son titulaire

La déchéance (« perte d’un droit, encourue à titre de sanction (…) pour incurie », Vocabulaire Cornu) pour défaut d’exploitation.

L’« usage sérieux » doit ainsi s’entendre d’un usage qui n’est pas effectué à titre symbolique, aux seules fins du maintien des droits conférés par la marque. Il doit s’agir d’un usage conforme à la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine d’un produit ou d’un service, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance.

Il en résulte qu’un « usage sérieux » de la marque suppose une utilisation de celle-ci sur le marché des produits ou des services protégés par la marque et pas seulement au sein de l’entreprise concernée. La protection de la marque et les effets que son enregistrement rend opposables aux tiers ne sauraient perdurer si la marque perdait sa raison d’être commerciale, consistant à créer ou à conserver un débouché pour les produits ou les services portant le signe qui la constitue, par rapport aux produits ou aux services provenant d’autres entreprises.

L’usage de la marque doit ainsi porter sur des produits et des services qui sont déjà commercialisés ou dont la commercialisation, préparée par l’entreprise en vue de la conquête d’une clientèle, notamment dans le cadre de campagnes publicitaires, est imminente. Un tel usage peut être le fait tant du titulaire de la marque que, comme le prévoit l’article 10, paragraphe 3, de la directive, d’un tiers autorisé à utiliser la marque.

L’article L.714-5 du Code de la propriété intellectuelle dispose qu’encourt la déchéance de ses droits le titulaire de la marque qui, sans justes motifs, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits ou services pour lesquels la marque est enregistrée, pendant une période ininterrompue de cinq ans. Le point de départ de cette période est fixé au plus tôt à la date de l’enregistrement de la marque suivant les modalités précisées par un décret en Conseil d’État.

Le délai de cinq ans visé au texte doit être considéré comme commençant à courir lorsque la procédure d’enregistrement est achevée, soit à compter de la publication de l’enregistrement au BOPI (Paris, 4e ch., 5 juin 2002,

Le délai de cinq ans est un délai ininterrompu qui doit être considéré indépendamment des faits d’exploitation qui ont pu exister avant et après (Paris, 2 juill. 1975 : Ann. propr. ind. 1976, 57).

Des constats d’huissiers établissant une utilisation ponctuelle de la marque ne suffisent donc pas à établir l’exploitation continue requise au texte (Cour de cassation, chambre commerciale, 9 mars 2010, Alimex : PIBD 2010, 917, III, 272).

Dès lors qu’un usage sérieux de la marque a été repris plus de trois mois avant la demande de déchéance, celle-ci ne peut être prononcée (Cour de cassation, chambre commerciale 9 juin 2009, Armand Thierry : PIBD 2009, 901, III, 1273).

La déchéance est normalement encourue pour tous les produits, ou services, qui n’ont pas été effectivement exploités (Paris, 4e ch., 14 avr. 1995 : PIBD 1995, 592, III, 354). Si seul un produit fait l’objet d’une exploitation, la déchéance doit être prononcée pour les autres produits ou services (Paris, 4e ch., 26 janv. 2001, Azzaro : PIBD 2001, III, 313).

Le prononcé de la déchéance de la marque n’empêche évidemment pas que puissent être toujours poursuivis les actes de contrefaçon antérieurs à celle-ci (Paris, 4e ch., 5 juin 1998, n° 94/28160 : JurisData n° 1998-022799 ; PIBD 1998, 661, III, 465) ou ceux auxquels peut être opposée la marque dans la mesure où celle-ci n’a été que partiellement déchue (Cour de cassation, chambre commerciale 6 nov. 2007)

II. Conditions procédurales de l’action en déchéance pour cause de dégénérescence

A. Compétence

D’un point de vue procédural il convient tout d’abord de relever qu’auparavant les tribunaux judiciaires français avait compétence exclusive pour déclarer une marque française déchue pour cause de non-usage.

Désormais, en vertu de certaines dispositions de la loi PACTE (entrées en vigueur le 1er avril 2020), une nouvelle compétence est attribuée à l’Institut national de la propriété intellectuelle (« INPI »), pour statuer en la matière.

D’un point de vue procédural il convient tout d’abord de relever qu’à ce jour les tribunaux de grande instance français ont compétence exclusive pour déclarer une marque française déchue pour cause de non-usage.

La demande de déchéance pour cause de non-usage d’une marque française peut être formée devant une juridiction française à titre principal ou à titre reconventionnel (en réponse à une action en contrefaçon). La très grande majorité des dossiers de déchéance résulte de demandes reconventionnelles dans le cadre d’actions en contrefaçon. Le mécanisme des 3 mois de la période suspecte permet en effet d’éviter bon nombre d’actions à titre principal, favorisant le rachat de marque ou la négociation d’un accord de coexistence, sous la pression d’une action en déchéance.

La déchéance peut être invoquée pour la première fois en appel sans pour autant constituer une demande nouvelle (par exemple, CA Paris, 14 avr. 1995 : PIBD 1995, III, p. 354). En effet, la déchéance, en tant que moyen de défense à l’action en contrefaçon, ne constitue pas une demande nouvelle au sens des articles 564 et 565 du Code de procédure civile.

La situation est différente lorsque la déchéance est demandée à titre principal. La Cour de cassation a refusé en ce cas d’accepter une demande en déchéance d’une marque de l’Union européenne pour la première fois en appel, alors même que cette marque de l’Union européenne était identique à la marque française objet de la demande en déchéance principale.

La compétence est dédoublée concernant les demandes de déchéance mises en œuvre à l’encontre des marques de l’Union européenne.

En effet, l’article 58-1, a) du règlement (UE) 2017/1001 dispose que l’EUIPO est compétent pour connaître des demandes en déchéance pour cause de non-usage à titre principal.

B. Intérêt à agir

Toute personne qui y a un intérêt peut agir en déchéance (Paris, 4e ch., 20 mars 1998 : JurisData n° 1998-021898), et ce tant au regard de ses activités principales que de ses activités accessoires (Paris, pôle 5, 1re ch., 27 févr. 2013, Soc. Swinger International Spa : Propr. ind. 2013, comm. 13, note Tréfigny).

Le demandeur en déchéance justifie d’un intérêt à agir lorsque sa demande tend à lever une entrave à l’utilisation du signe dans le cadre de son activité économique (Cass. com., 18 mai 2010 : D. 2010, act. p. 1343 ; D. 2011, étude 913, obs. Durrande.  Paris, 4e ch., 6 déc. 1990 : JurisData n° 1990-025848 ; PIBD 1991, 501, III, 350). Il en va particulièrement ainsi quand les deux entreprises en cause exercent leur activité dans le même secteur (Paris, 4e ch., 27 nov. 1990 : PIBD 1991, 501, III, 348).

Mais ne justifie pas d’un intérêt à agir celui qui ne pourrait pas procéder à la réservation du signe éventuellement libéré en raison d’un risque de confusion potentiel avec la dénomination sociale et le nom commercial de l’entreprise titulaire de la marque (Orléans, ch. com. et fin., 17 oct. 2002, Sté Inter Service : JCP E 2003, chron. 1468, n° 12, obs. Boespflug ; RD propr. intell. 2003, n° 151, p. 9 ; Propr. intell. 2003, n° 7, p. 212, obs. Buffet-Delmas ; Propr. ind. 2003, comm. 4, note Tréfigny).

« La règle “Nemo auditur” n’a pas d’incidence sur le droit à agir en déchéance d’une marque, ce droit étant reconnu à toute personne intéressée par l’article L. 714-5, CPI » ( Paris, pôle 5, 2e ch., 18 nov. 2011, préc.).

C. Preuve

1.Type de preuve

En déchéance devant un tribunal français – La question du type de preuve pouvant être apporté ne soulève guère de difficulté, car, en matière civile, la preuve des faits juridiques est, en principe, libre. D’ailleurs, en la matière, l’article L. 714-5, alinéa 5, du Code de la propriété intellectuelle précise expressément que la preuve peut être apportée par tous moyens. Par conséquent, tout mode de preuve de nature à emporter la conviction du tribunal est acceptable.

L’appréciation des preuves soumises relève de l’appréciation souveraine des juges du fond (Cass. com., 7 oct. 1986 : Bull. civ. 1986, IV, n°  192). Autre principe classique en la matière : la déchéance de la marque pour défaut d’exploitation doit être prononcée si les éléments versés aux débats à titre de preuves d’exploitation ne sont pas datés (TGI Paris, 25 nov. 1994 : PIBD 1995, n° 401, III, p. 128) ou encore « que tous les documents non datés ou portant des dates qui ne se situent pas dans la période de référence ou qui font état d’une exploitation à l’étranger sont dénués de toute pertinence » (CA Paris, 26 janv. 2001 : PIBD 2001, n° 722, III, p. 312).

Les preuves d’usage en question doivent montrer un usage tourné vers l’extérieur comme le rappelle le tribunal de grande instance de Paris le 10 octobre 2008(PIBD 2008, n° 885, III, p. 660) :

Qu’en revanche, les documents intitulés (…) ne sauraient être utilement invoqués pour faire la démonstration d’une telle exploitation pour les autres produits concernés dès lors qu’ils constituent, ainsi que le souligne justement la société défenderesse, des documents internes destinés aux seuls franchisés, en vue de l’agencement des vitrines et de la mise en valeur des articles de linge de maison commercialisés sous la marque.

En déchéance à titre principal devant l’EUIPO – Les moyens de preuve de l’usage sérieux dans les procédures devant la division d’annulation sont les mêmes que ceux qui s’appliquent à l’examen de la preuve de l’usage des marques communautaires dans la procédure d’opposition. Il convient dès lors de se référer aux dispositions détaillées contenues dans la partie 6 de la directive relative à la procédure d’opposition (revue en date du 01/10/2017 par l’EUIPO).

Cette directive interne à l’EUIPO s’avère être une source d’information d’une particulière richesse et il convient évidemment de s’y référer pour de plus amples détails à ce sujet. La règle 10 du règlement délégué (UE) 2017/1430 de la Commission du 18 mai 2017 portant modalités d’application du règlement (UE) du Conseil sur la marque de l’Union européenne est le texte de base fixant le type de document en principe acceptable devant l’EUIPO :

  • les indications et les preuves à produire afin de prouver l’usage de la marque comprennent des indications sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque antérieure pour les produits et services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ces indications devant être fournies, preuves à l’appui, conformément au paragraphe 4 (pour un exemple, Trib. UE, 5 oct. 2010, aff. T-92/09, Stratégi Group LTD c/ OHMI (Strategic c/ Strategies), pts 41 à 43) ;
  • les preuves sont produites conformément aux règles 55, paragraphe 2, 63 et 64 et se limitent, en principe, à la production de pièces justificatives comme, par exemple, des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 97, paragraphe 1, point f) du règlement (UE) 2017/1001. Le nouveau règlement délégué (UE) 2017/1430 introduit aussi des exigences de forme en matière de présentation et de structuration des preuves, qui doivent être clairement identifiées et indexées.

2. Charge de la preuve

En déchéance devant un tribunal français – La charge de la preuve est inversée, car ce n’est pas au demandeur à la déchéance (par voie d’action ou d’exception) de prouver que le propriétaire n’a pas exploité, mais au titulaire de la marque, défendeur de prouver qu’il a effectivement exploité. L’article L. 714-5, alinéa 5, du Code de la propriété intellectuelle, le précise expressément.

Ce renversement de la charge de la preuve s’impose par le fait que conserver la règle traditionnelle actori incumbit probatio (CPC, art. 6 et 9) conduirait à solliciter du demandeur l’administration d’une preuve négative (absence d’exploitation), par définition très difficile, voire impossible, à rapporter.

En déchéance à titre principal devant l’EUIPO – La règle 19 du règlement (UE) 2017/1430 de la Commission du 18 mai 2017 portant modalités d’application du règlement (UE) 2017/1001 du Conseil sur la marque de l’Union européenne impose au titulaire de la marque de l’Union européenne contestée d’apporter la preuve de l’usage de la marque au cours de la période indiquée. Si la preuve n’est pas apportée dans le délai imparti, la déchéance de la marque de l’Union européenne est prononcée.

Il en va de même de la preuve de l’existence de justes motifs pour le non-usage. Le rôle de l’EUIPO consiste à apprécier les preuves qui lui sont présentées à la lumière des moyens des parties. Il n’appartient pas à l’EUIPO de recueillir lui-même des éléments de preuve d’usage.

Pour lire une version plus détaillé de cet article sur la déchéance de marque , cliquez

Sources :
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006069414/LEGISCTA000006161690?init=true&page=1&query=L.711-1+&searchField=ALL&tab_selection=all&anchor=LEGIARTI000039381546#LEGIARTI000039381546
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007525749?init=true&page=1&query=06-15.593+&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000035149079?init=true&page=1&query=13-11.513&searchField=ALL&tab_selection=all
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A32015L243https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGITEXT000006069414/
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32017R1001&from=FR
https://euipo.europa.eu/ohimportal/fr/invalidity-and-revocation

PARODIE ET CONTREFAÇON

La « propriété littéraire et artistique » (ou « PLA ») est une branche de la propriété intellectuelle, l’autre branche étant la propriété industrielle (droit des marques, droit des brevets, droit des dessins et modèles).

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Le droit de la propriété littéraire et artistique se subdivise lui-même en trois grandes parties : le droit d’auteur (ensemble des règles qui protègent les œuvres de l’esprit), les droits voisins (c’est-à-dire : les droits voisins du droit d’auteur) qui concernent les artistes-interprètes et les producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes, et le droit des producteurs de bases de données (parfois appelé « droit sui generis »).

Le droit d’auteur qui est la branche principale de la PLA est l’ensemble des règles de droit relatives à la protection des œuvres de l’esprit. Cette protection s’attache aux œuvres de l’esprit à condition qu’elles soient « originales ».


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L’auteur de l’œuvre seconde poursuivi en contrefaçon ne saurait, en l’absence d’exception de parodie, se prévaloir de la liberté d’expression pour justifier la reproduction « substantielle » d’une œuvre première s’il ne peut prétendre avoir voulu susciter un débat d’intérêt général ou sur l’art (TGI Paris, 8 nov. 2018, no 15/02536, Davidovici c/ Koons).

Ainsi, toute exploitation d’œuvres sans l’autorisation de son auteur constitue un acte de contrefaçon, engageant la responsabilité civile et/ou pénale de l’auteur de l’exploitation et/ou éventuellement de ses partenaires.

Toutefois, l’article L 122-5 du Code de la Propriété intellectuelle aménage certaines exceptions à ce droit exclusif de l’auteur.

Il faut bien distinguer la situation dans laquelle le droit exclusif cède par dérogation aux principes gouvernant la matière, qui renvoie au sens propre à la notion d’exception, et celle dans laquelle l’exclusivité est bornée par l’objet et la nature du droit, qui renvoie plutôt à la notion de limite.

L’exception de parodie, par exemple, suppose une intention humoristique. Le détournement d’une photographie dans le dessein de dénoncer un régime politique ne peut rentrer dans le cadre d’application de l’exception de parodie (TGI Paris, réf., 18 juill. 2003 : Légipresse 2003, n° 205, I, p. 138).

La parodie suppose une intention humoristique. Elle doit, pour que l’exception soit admise, se démarquer suffisamment de l’œuvre moquée pour éviter de lui faire concurrence. Elle trouve sa limite naturelle, comme le précise l’article L. 122-5, 4°, dans les « lois du genre ». La Cour de justice a précisé qu’il appartient aux juridictions nationales de faire respecter un juste équilibre entre les intérêts et les droits de l’auteur et la liberté d’expression de l’utilisateur.

L’utilisation d’un buste de Marianne réalisé par un artiste pour illustrer un article sur le déclin de la France peut être légitimée par l’exception de parodie dès lors que la reproduction partielle de l’œuvre première constitue une métaphore humoristique du naufrage prétendu de la République, destinée à illustrer le propos de l’article, peu important le caractère sérieux de celui-ci.

I. Les conditions pour caractériser la parodie

La doctrine et la jurisprudence françaises ont, de longue date, défini les critères de l’exception de parodie, qui doit, pour être caractérisée, comporter deux éléments :

B. Élément matériel de la parodie : un emprunt distancié

Le droit d’auteur a vocation à protéger les créations de l’esprit, à condition qu’elles soient originales. Toute exploitation d’une œuvre de l’esprit, sans l’autorisation de l’auteur ou de ses ayants droit, est constitutive du délit de contrefaçon sanctionné par le Code de la propriété intellectuelle.

Cela étant, le droit français vise à l’article L122-5 du Code de la propriété intellectuelle un certain nombre d’exceptions au monopole des auteurs. Parmi ces exceptions, nous retrouvons « la parodie, le pastiche et la caricature, compte tenu des lois du genre ».

En conséquence, dès lors que l’œuvre est utilisée dans un sens dérivé relevant de la parodie, du pastiche ou de la caricature, l’auteur ne peut en principe l’interdire.

Cette exception est une illustration du droit à la liberté d’expression de chaque individu consacré par l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 (DDHC). Néanmoins, la liberté, à l’instar de toutes libertés, et dès lors qu’elle s’oppose au droit de la propriété, ne peut s’exercer que dans certaines limites.

Selon la jurisprudence française, le parodiste doit effectuer un réel travail de démarquage et de travestissement de l’œuvre première. Il ne s’agit pas de reproduire l’œuvre première, mais de créer une œuvre distincte ayant sa propre originalité.

Néanmoins, selon la CJUE, il n’est pas nécessaire que l’œuvre présente un caractère original propre (autre que celui de présenter des différences perceptibles par rapport à l’œuvre originale parodiée). Elle doit pouvoir raisonnablement être attribuée à une personne autre que l’auteur de l’œuvre originale lui-même.

La difficulté réside dans l’appréciation des « différences perceptibles par rapport à l’œuvre originale parodiée ».

Ainsi, les personnages ne peuvent repris quasi à l’identique (choix des couleurs, caractéristiques proches). Le parodiste doit se poser la question de savoir si les personnages caricaturaux sont suffisamment éloignés des personnages originaux.

À défaut, si les personnages ne sont considérés comme non suffisamment retravaillés ou que la distanciation humoristique non suffisante pour différencier la parodie de l’œuvre première, il s’agira d’un acte de contrefaçon.

La parodie doit évoquer une œuvre préexistante, tout en s’en démarquant suffisamment pour éviter tout risque de confusion dans l’esprit du public. La parodie a pour caractéristiques essentielles, d’une part, d’évoquer une œuvre existante, tout en présentant des différences perceptibles par rapport à celle-ci, et, d’autre part, de constituer une manifestation d’humour ou une raillerie (CJUE, gde ch., 3 sept. 2014, aff. C-201/13, Deckmyn et a. c/ Vandersteen). Pour être qualifiée de parodie, l’œuvre seconde doit revêtir un caractère humoristique, éviter tout risque de confusion avec l’œuvre parodiée et ne pas porter une atteinte disproportionnée aux intérêts légitimes de l’auteur.

Le propos parodique doit être perçu sans difficulté ce qui suppose à la fois une référence non équivoque à l’œuvre parodiée et une distanciation recherchée qui vise à travestir ou à subvertir l’œuvre dans une forme humoristique, avec le dessein de moquer, de tourner en dérision pour faire rire ou sourire.

Ne peuvent alors relever de l’exception de parodie les œuvres qui empruntent les ressorts d’œuvres premières pour s’attribuer le bénéfice de leur notoriété et vivre ainsi de leur rayonnement ; que l’adjonction à ces emprunts de traits d’humour secondaires est dénuée d’effet, car elle ne modifie pas la nature d’une entreprise littéraire construite sur un détournement de notoriété.

Si l’exception de parodie n’existait pas, toute imitation humoristique d’une œuvre de l’esprit serait incontestablement qualifiée d’acte de contrefaçon. Et nul ne pourrait donc rire (et faire rire) en reprenant la forme d’une œuvre protégée. Mais force est de constater que, depuis bien longtemps, le droit d’auteur décide que, tant les droits patrimoniaux que le droit moral de l’auteur, doivent s’effacer au profit d’une sorte de droit à l’humour, bénéficiant de surcroît de la légitimité (et de la protection) d’une liberté d’expression à valeur constitutionnelle. Aussi l’article L. 122-5, 4°, du Code de la propriété intellectuelle dispose-t-il que « l’auteur ne peut interdire (…) la parodie, le pastiche et la caricature, compte tenu des lois du genre ».

B. Élément moral de la parodie : la parodie ne peut être invoquée qu’en présence d’une intention de faire rire, de moquer ou de railler

La parodie doit en outre respecter les « lois du genre » : elle ne doit pas dégénérer en abus, ce qui serait par exemple le cas en présence d’un message discriminatoire, d’un dénigrement ou d’un avilissement de l’œuvre première. Les auteurs rappellent à cet égard que « l’excès chasse la parodie ». Pour accueillir l’exception de parodie opposée aux droits voisins de l’artiste interprète dans l’affaire Bruno Crémèr, la cour d’appel – approuvée par la Cour de cassation – retient que les deux éléments constitutifs de la parodie sont réunis et prend le soin d’ajouter que « l’intention des auteurs n’a pas été d’offrir une version dégradée de l’interprétation qu’assumait avec application et sérieux Bruno Y… et d’avilir le jeu de l’acteur », ce qui aurait excédé les lois du genre. La question de savoir si telle ou telle parodie excède les lois du genre et peut ou non faire exception au monopole de l’auteur relève du pouvoir d’appréciation du juge, qui pourrait donc écarter l’exception de parodie, même si ses éléments matériel et moral sont constitués.

La Cour de justice de l’Union européenne rappelle que, même si la transposition de cette exception est facultative pour les États membres, elle doit néanmoins être interprétée de façon uniforme dans les pays qui accueillent cette exception au monopole de l’auteur

. Et, comme toute exception, la parodie est d’interprétation stricte, illustration de l’adage exceptio est strictissimae interpretationis, même si la Cour de justice rappelle que la notion doit être interprétée dans toute la mesure de sa raison d’être. Ces notions communes à toutes les exceptions étant précisées, la Cour de Luxembourg s’intéresse plus précisément à la parodie. Et, d’emblée, elle souligne que ce concept constitue un subtil équilibre entre deux droits fondamentaux : le droit d’auteur, d’une part, et la liberté d’expression, d’autre part.

Puis, et c’est l’apport principal de l’arrêt, la Cour mentionne les trois conditions de la parodie. Tout d’abord, la parodie doit évoquer une œuvre préexistante. C’est même sa fonction première car, sans l’évocation d’une œuvre, point de parodie ! Mais l’évocation ne doit pas entraîner un risque de confusion. C’est pourquoi la seconde condition de la parodie exige que cette dernière présente « des différences perceptibles par rapport » à l’œuvre parodiée.

Le droit français ne dit pas autre chose lorsqu’il exige l’absence d’un risque de confusion entre l’œuvre parodiée et la parodie (V. par ex., à propos de Tintin, CA Paris, 18 févr. 2011, n° 09/19 272, SAS Arconsil c/ Sté de droit belge Moulinsart SA « l’absence de risque de confusion », V.Crémer c/ Dargaud). En effet, il est impératif que le public n’ait pas le sentiment d’être en relation avec l’œuvre préexistante lorsqu’il découvre la parodie. C’est le cas, par exemple, lorsqu’il regarde le dessin animé « Tarzoon, la honte de la jungle », car il ne peut pas confondre le minable Tarzoon avec le vrai Tarzan.

Et, enfin, la Cour de justice de l’Union européenne mentionne la finalité de la parodie qui doit « constituer une manifestation d’humour ou une raillerie ». Il est vrai que la finalité première de la parodie est de faire rire. Ainsi, un récent arrêt a classiquement souligné la « finalité humoristique » de la parodie.

Mais la jurisprudence française a aussi pu accepter des finalités bien plus sérieuses en admettant qu’une parodie puisse rendre hommage à une personne décédée (CA Paris, 11 mai 1993, n° 93-000117 : JurisData n° 1993-022067 ; RTD com. 1993, p. 501, obs. A. Françon), contribuer à la lutte contre le tabagisme (CA Versailles, 17 mars 1994, n° 10041/92) ou constituer un message syndical (CA Riom, 15 sept. 1994 : JurisData n° 1994-049661 ; D. 1995, jurispr. p. 429, note B. Edelman).

Désormais, il n’est pas du tout certain que de telles finalités sérieuses puissent être admises, car la parodie à la mode européenne ne les goûte guère ! En effet, en droit de l’Union européenne, la notion autonome de parodie, qui doit s’appliquer de façon uniforme, est dédiée uniquement à l’humour, à la raillerie et au rire. Il faut donc que la parodie respecte ces trois conditions. Et il n’est pas nécessaire d’en respecter d’autres.

En résumé, la parodie doit faire rire et évoquer une œuvre préexistante sans pour autant susciter une confusion avec cette dernière. Et, surtout, elle ne doit pas cautionner les abus de la liberté d’expression. En d’autres termes, le droit à l’humour qui justifie l’exception de parodie ne saurait être absolu.

II. Sanction au droit exclusif du droit d’auteur

A. La contrefaçon de l’œuvre de l’auteur

Selon l’article L335-3 du Code de la propriété intellectuelle « Est également un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une œuvre de l’esprit en violation des droits de l’auteur, tels qu’ils sont définis et réglementés par la loi.

Est également un délit de contrefaçon la violation de l’un des droits de l’auteur d’un logiciel définis à l’article L. 122-6.

Est également un délit de contrefaçon toute captation totale ou partielle d’une œuvre cinématographique ou audiovisuelle en salle de spectacle cinématographique ».

La contrefaçon d’une œuvre de l’esprit résulte de sa seule reproduction.

La contrefaçon doit avoir pour but de sanctionner une reprise ou une imitation non autorisée par le titulaire des droits. Mais cette reprise, cette imitation, ne peut être condamnée que si elle porte véritablement sur l’objet que le législateur souhaitait protéger.

La contrefaçon d’une œuvre résulte de sa seule reproduction « et ne peut être écartée que lorsque celui qui la conteste démontre que les similitudes existantes entre les deux œuvres procèdent d’une rencontre fortuite ou de réminiscences résultant notamment d’une source d’inspiration commune ». C’est en effet « au contrefacteur prétendu qu’il incombe de prouver qu’il n’a pu accéder à l’œuvre ».

Caractérise encore « la contrefaçon par diffusion, prévue par l’article L. 353-3, la mise sur le marché de l’art d’une œuvre originale, même abandonnée par son auteur, lorsqu’elle est faite en violation du droit moral de divulgation qu’il détient sur celle-ci ».

Il y a contrefaçon quand la reproduction a été “intégrale ou partielle” (CPI, art. L. 122-4). Ainsi, a-t-il été jugé « que la publication sans autorisation d’extraits et d’un résumé de ce scénario ainsi que d’une partie non négligeable des dialogues qui le composent constitue un acte de contrefaçon » (TGI Paris, 1re ch., 17 févr. 1999 : RIDA juill. 1999, p. 331). Il en va de même pour la reprise de plusieurs passages d’une thèse de doctorat dans un ouvrage scientifique.

L’action civile de la contrefaçon tend à la réparation du préjudice subi par l’octroi de dommages et intérêts. Leur montant n’est pas déterminé par les textes législatifs, mais selon les principes généraux de la responsabilité civile. En effet, selon la loi du 29 octobre 2007 qui transpose la directive du 29 avril 2004, la contrefaçon engage « la responsabilité civile de son auteur », ceci n’était pas nouveau.

En revanche, la nouveauté se situe dans le régime d’évaluation des dommages et intérêts, régime spécifique des atteintes aux droits intellectuels. La directive du 29 avril 2004 prévoyait d’une part la possibilité pour les États membres de mettre en place un système d’indemnisation plus clément lorsque le contrefacteur avait agi de bonne foi, et d’autre part un mode spécifique d’évaluation des dommages et intérêts.

En transposant la directive, la France n’a retenu que la deuxième disposition en prévoyant deux façons d’évaluer les dommages et intérêts pour l’ensemble des droits de propriété intellectuelle : une évaluation forfaitaire indiquant que la victime peut obtenir une somme forfaitaire correspondant à ce qui aurait été dû si le contrefacteur avait obtenu l’autorisation d’exploiter le bien protégé ; et une évaluation ordinaire prenant en compte trois éléments qui sont les conséquences économiques négatives subies par la partie lésée, le préjudice moral causé au titulaire des droits du fait de l’atteinte et les bénéfices réalisés par le contrefacteur. Les deux premiers éléments sont classiquement utilisés par la jurisprudence alors que le troisième mérite des précisions.

Traditionnellement, le principe de la réparation intégrale suppose de réparer tout le préjudice, mais rien que le préjudice. Or, les bénéfices réalisés par le contrefacteur ne font pas partie du préjudice subi par la victime ; la victime pouvant parfaitement subir un préjudice sans que le contrefacteur ne réalise de bénéfice et inversement. Avec la loi de 2007 se trouve ainsi instauré un régime de responsabilité nouveau, sui generis, prenant en compte le bénéfice réalisé par le contrefacteur.

B. Les actes de concurrences déloyales

Lorsque la création reproduite par l’agent est dans le domaine public, soit que le droit privatif dont elle était investie est expiré, soit qu’elle ne puisse pas être protégée par le droit d’auteur (simple idée, information de caractère scientifique ou administratif, défaut d’originalité…), sa reproduction est libre. Elle ne peut entraîner aucune sanction sur le fondement des droits privatifs : toute action en contrefaçon est donc exclue. Pour autant, l’action en concurrence déloyale peut être accueillie.

En effet, une jurisprudence constante admet que « l’action en concurrence déloyale peut être intentée par celui qui ne peut se prévaloir d’un droit privatif ». Toutefois, conformément au principe de liberté du commerce et de l’industrie, l’exploitation d’un objet non protégé par un droit de propriété intellectuelle ne saurait être considérée comme une faute per se.

L’action en concurrence déloyale persistera donc s’il apparaît que, en procédant à cette reproduction, l’agent a enfreint la loyauté nécessaire à l’exercice du commerce ou que cette reproduction s’accompagne d’actes déloyaux distincts de la reproduction elle-même (Cass. com., 29 nov. 1960 : Bull. civ. 1960, IV, n° 389. – Cass. com., 18 janv. 1982 : Bull. civ. 1982, IV, n° 19. – Cass. com., 15 juin 1983 : Bull. civ. 1983, IV, n° 174).

Comme l’écrivait Desbois (RTD com. 1961, p. 610) : « ce sont les circonstances dans lesquelles le défendeur a procédé à une reproduction, en elle-même licite, qui donnent prise à la critique ». Il s’agit donc de sanctionner un comportement anticoncurrentiel et non de reconstituer de façon indue un monopole légal (V. sur ce point, C. Caron, L’irrésistible décadence du domaine public en droit de la propriété intellectuelle, in Études offertes à J. Dupichot : Bruylant, 2004, p. 61).

Il est rare qu’une œuvre inconnue soit parodiée puisque personne ne pourrait déceler la parodie. Il en résulte donc que ce sont généralement les œuvres connues qui font l’objet de parodies. Mais grand est le risque que la parodie soit utilisée comme étant un bon prétexte afin de bénéficier à bon compte de la notoriété d’une œuvre afin de promouvoir gratuitement la sienne.

La cour n’est pas dupe et évoque ceux qui, sous couvert de parodie, vivent dans le sillage des œuvres célèbres afin de tenter de sortir de leur anonymat. Elle évoque ainsi ceux qui « s’attribuent le bénéfice de leur notoriété [des œuvres connues] et vivent ainsi de leur rayonnement », ainsi que « l’entreprise littéraire construite sur un détournement de notoriété ». Il faut apporter la preuve que la parodie n’est qu’un prétexte pour bénéficier indûment de la notoriété de l’œuvre parodiée, ce qui entraîne la violation des lois du genre (ce qui, dit autrement, permet de retenir un abus de la parodie et un abus de la liberté d’expression).

Pour lire une version plus complète de cet article sur la parodie et la contrefaçon, cliquez

Sources :

https://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=83635&pageIndex=0&doclang=FR&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=6208997
https://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=157281&pageIndex=0&doclang=FR&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=6209675
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000038567387?init=true&page=1&query=18-12.718&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007052169?init=true&page=1&query=02-17.196&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000029453424?init=true&page=1&query=13-14.629&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007052427?init=true&page=1&query=05-11.780+&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007068335?init=true&page=1&query=93-85.256&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000022457665?init=true&page=1&query=09-84.034+&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007507823?init=true&page=1&query=04-15.612&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007468880?init=true&page=1&query=03-10.136&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.village-justice.com/articles/droit-propriete-intellectuelle-autorise-les-parodies,35755.html
https://www.jurisexpert.net/les-limites-parodie/#:~:text=L%27exception%20de%20parodie%20n,%2C%20toutefois%2C%20pas%20sans%20limite.&text=Néanmoins%2C%20selon%20la%20CJUE%20%2C%20il,l%27œuvre%20originale%20parodiée).

HEBERGEMENT ET CONTREFAÇON

NOUVEAU : Utilisez nos services pour faire retirer un contenu dénigrant ou de contrefaçon en passant par le formulaire !

Toute édition d’écrits, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs, est une contrefaçon et toute contrefaçon est un délit.

La contrefaçon en France d’ouvrages publiés en France ou à l’étranger est punie de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende.

Seront punis des mêmes peines le débit, l’exportation, l’importation, le transbordement ou la détention aux fins précitées des ouvrages contrefaisants.

Lorsque les délits prévus par le présent article ont été commis en bande organisée, les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 750 000 euros d’amende.

La contrefaçon d’œuvres littéraires et artistiques ensuite, dont l’actualité réside dans la présentation en Conseil des ministres, le 8 avril 2021, du projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique qui envisage de fusionner le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) avec la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI) au sein d’une autorité unique, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) et qui a donné lieu à un avis du Conseil d’État n° 402564, le 1er avril 2021.

L’arsenal répressif est d’autant plus sévère qu’aux peines pénales s’ajoutent, le cas échéant, des sanctions douanières, aux termes duquel il est possible de retenir les qualifications d’importation sans déclaration de marchandises prohibées et d’importation, détention et mise en vente de marchandises présentées sous une marque contrefaisante, « qui sont susceptibles d’être appliquées concurremment dès lors qu’elles résultent de la mise en œuvre d’un système intégrant poursuites et actions pénales et douanières, permettant au juge pénal de réprimer un même fait sous ses deux aspects, de manière prévisible et proportionnée, le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne devant pas dépasser le montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues »


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Par un jugement très motivé du 23 avril 2021, le tribunal correctionnel de Nancy a condamné un hébergeur et son représentant légal pour complicité de fourniture de moyens de contrefaçon par reproduction, pour contrefaçon par représentation ou diffusion et par mise à disposition d’œuvres de l’esprit sans autorisation des auteurs.

Ils étaient poursuivis pour ne pas avoir promptement empêché l’accès à des informations stockées sur leurs serveurs, à la demande d’un tiers, susceptibles de constituer des actes de contrefaçon d’œuvres de l’esprit et de vidéogrammes. L’hébergeur, personne morale, a été condamné à une peine principale de 100 000 € d’amende et le dirigeant social à une peine d’emprisonnement d’un an de prison avec sursis et 20 000 € d’amende ainsi qu’au versement de dommages-intérêts aux ayants droit.

La société DStorage, créée en 2009, exploite le site Internet 1fichier.com qui propose des services de stockage de fichiers sur ses propres serveurs avec une possibilité de diffusion de liens de téléchargement pour les abonnés. Les agents assermentés de la Fédération nationale des éditeurs de films (FNEF), de la Société civile des producteurs phonographiques (SCPP) et de la SACEM et SDRM ont constaté la présence de liens pointant vers des fichiers hébergés vers DStorage reproduisant sans autorisation des œuvres de leurs ayants droit.

Ces dernières ont adressé des notifications de retrait de ces contenus à DStorage, sans succès. L’hébergeur considérait que la procédure de notification instaurée par la LCEN ne s’appliquait qu’aux seuls contenus manifestement illicites et non aux contenus contrefaisants violant un droit de propriété intellectuelle. Les ayants droit ont porté plainte pour contrefaçon par reproduction et représentation. Un expert informatique saisi par le ministère public pour analyser les données de téléchargement de fichiers notifiés fournis sur réquisition par DStorage a permis de déterminer que 3 478 fichiers notifiés avaient fait l’objet de 7 277 381 téléchargements.

I. Le prononcé des notifications

A. Connaissance du contenu illicite

La contrefaçon en matière littéraire et artistique permet, en reproduisant une œuvre au préjudice de son auteur, de réaliser un profit souvent considérable. La propriété littéraire et artistique englobe à la fois le droit d’auteur, mais également les droits voisins du droit d’auteur. Si l’œuvre est originale, elle est protégée du seul fait de sa création.

Le Code de la propriété intellectuelle énumère les différentes pratiques susceptibles de constituer une atteinte aux droits d’auteur.

La première consiste en l’« édition imprimée ou gravée » (article L. 335-2, alinéa 1 du Code de la Propriété intellectuelle), la loi précisant en outre que la contrefaçon peut être totale ou partielle et surtout insiste sur son illicéité, l’édition se faisant « au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs ».

La deuxième forme de contrefaçon, qui se démultiplie, est « le débit, l’exportation, l’importation, le transbordement ou la détention des ouvrages contrefaits » (article L. 335-2, alinéa 3 du Code de la Propriété intellectuelle).

La troisième forme de contrefaçon est « la reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une œuvre de l’esprit en violation des droits de l’auteur » (article L. 335-3, alinéa 1 du Code de la Propriété intellectuelle).

Quatrième forme de contrefaçon, limitée aux œuvres audiovisuelles : leur « captation totale ou partielle en salle de spectacle cinématographique » (article L. 335-3, dernier alinéa du Code de la Propriété intellectuelle).

Les nouvelles technologies d’échange via internet pouvant servir de vecteur à la contrefaçon ont fait l’objet de longs débats au Parlement.

Parmi elles, les réseaux de « pair à pair » (dits aussi « poste à poste » ou « Peer to Peer »), mode d’utilisation d’un réseau dans lequel chaque utilisateur est en mesure de mettre certaines ressources de son ordinateur à la disposition des autres, ont tout particulièrement retenu l’attention, en raison de leur forte notoriété et de l’usage massif qui en est fait actuellement.

Cependant, d’autres systèmes comme les serveurs de nouvelles (serveurs de « news » ou réseau « Usenet ») ou de partage se développent. Ces systèmes permettent un accès très rapide à l’œuvre convoitée, allant jusqu’à rendre possible un visionnage immédiat sans téléchargement préalable.

Ainsi, trois niveaux de responsabilités peuvent être distingués selon la portée de l’action incriminée et la gravité de l’atteinte aux droits protégés qui en résulte : l’offre de moyens de mise à disposition du public illicite, la mise à disposition du public prohibée et l’usage de cette mise à disposition par le téléchargement. La fermeté de la répression exercée à leur encontre mérite en conséquence d’être graduée à due proportion.

Le fournisseur d’hébergement est irresponsable du seul fait des contenus qu’il stocke. Cependant, aux termes de l’article 6, I, 2 et 3, ce dernier devient responsable lorsqu’une faute d’abstention peut lui être imputée. Ce texte impose au fournisseur d’hébergement d’agir dès lors qu’à la suite d’une notification de contenu il a eu effectivement connaissance de l’illicéité de ce contenu. Ce n’est donc pas l’activité d’hébergement, mais l’inaction de l’hébergeur suite à une notification de contenu qui est source d’engagement de responsabilité. Le comportement fautif provient en d’autres termes d’une omission. L’hébergeur est responsable dès lors qu’il n’a pas mis un terme à la consultation de l’information manifestement illicite une fois que ce contenu lui a été notifié.

La notification de contenu illicite doit toutefois respecter un certain formalisme pour être en mesure d’engager la responsabilité de l’hébergeur. L’article 6, I, 5° précise que la connaissance des faits litigieux est présumée acquise par l’hébergeur lorsque la notification comporte les éléments suivants :

« - si le notifiant est une personne physique : ses nom, prénom, adresse électronique ; si le notifiant est une personne morale : sa forme sociale, sa dénomination sociale, son adresse électronique ; si le notifiant est une autorité administrative : sa dénomination et son adresse électronique. Ces conditions sont réputées satisfaites dès lors que le notifiant est un utilisateur inscrit du service de communication au public en ligne mentionné au même 2, qu’il est connecté au moment de procéder à la notification et que l’opérateur a recueilli les éléments nécessaires à son identification ;

– la description du contenu litigieux, sa localisation précise et, le cas échéant, la ou les adresses électroniques auxquelles il est rendu accessible ; ces conditions sont réputées satisfaites dès lors que le service de communication au public en ligne mentionné au dit 2 permet de procéder précisément à cette notification par un dispositif technique directement accessible depuis ledit contenu litigieux ;

– les motifs légaux pour lesquels le contenu litigieux devrait être retiré ou rendu inaccessible ; cette condition est réputée satisfaite dès lors que le service de communication au public en ligne mentionné au même 2 permet de procéder à la notification par un dispositif technique proposant d’indiquer la catégorie d’infraction à laquelle peut être rattaché ce contenu litigieux ;

-la copie de la correspondance adressée à l’auteur ou à l’éditeur des informations ou activités litigieuses demandant leur interruption, leur retrait ou leur modification, ou la justification de ce que l’auteur ou l’éditeur n’a pu être contacté ; cette condition n’est pas exigée pour la notification des infractions mentionnées au troisième alinéa du 7 du présent I ainsi qu’à l’article 24 bis et aux troisième et quatrième alinéas de l’article 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. ».

Le caractère manifestement illicite, selon le tribunal, découle notamment du nom des fichiers eux-mêmes, mais également des liens pointant vers des fichiers litigieux diffusés par des sites notoirement connus pour être des fermes de liens. Pour chacun des faits portés à sa connaissance, le juge va déterminer si l’hébergeur a réagi dans un délai prompt estimé à 7 jours, en se livrant à une appréciation in concreto pour conclure que l’hébergeur a engagé sa responsabilité pénale en n’empêchant pas leur accès.

B. Appréciation du caractère manifestement illicite du contenu

Internet est devenu un terrain de création artistique. Dès 1998 un blog a ainsi été qualifié d’œuvre de l’esprit engageant sa protection au titre du droit de la propriété intellectuelle. Le juge a retenu une telle qualification en relevant que l’auteur du blog l’avait suffisamment personnalisé et qu’il en ressortait l’empreinte de sa personnalité (T. com. Paris, 9 févr. 1998 . – Dans le même sens : CA Versailles, 1re ch., 1re sect., 25 mars 2004, n° 03-00782  : JurisData n° 2004-241245 .

Plus généralement, internet est source d’œuvre multimédia regroupant toute création comportant, sous forme numérique, du texte, de l’image et/ou du son et interrogeable à distance de façon interactive.

L’hébergeur est tenu de retirer un contenu qui lui est notifié lorsqu’il apparaît comme « manifestement » illicite. Ce critère provient d’une réserve d’interprétation du Conseil constitutionnel (Cons. const., 10 juin 2004, n° 2004-496 DC : JO 22 juin 2004, p. 11182). Dans le but d’introduire davantage d’objectivité dans l’appréciation de la notion d’illicéité, les sages ont exigé que seuls les contenus apparaissant comme ostensiblement contraires au droit peuvent être de nature à engager la responsabilité des hébergeurs. Cette notion vise principalement les contenus d’une certaine gravité et dont le caractère illicite apparaît comme évident à savoir, les images de violences, la pédopornographie, les actes de terrorisme, les provocations à la discrimination, à la haine ou à la violence. Ces contenus dits « sensibles » ou « odieux » entraînent une obligation de retrait immédiat et volontaire de l’hébergeur indépendamment d’une décision judiciaire.

Le droit d’auteur a entièrement vocation à s’appliquer aux contenus diffusés sur internet. En conséquence, toute utilisation ou diffusion d’un contenu protégé par ces dispositions nécessite une autorisation préalable du titulaire des droits (TGI Paris, réf., 14 août 1996  : – TGI Paris, 3e ch., 4 déc. 2014, n° 14/03236, X c/ Les Éditions Gynethic).

Les droits patrimoniaux, particulièrement le droit de reproduction, s’appliquent sur internet, de même que les droits moraux de l’auteur tels que le droit de divulgation, le droit à la paternité, le droit au respect et le droit de repentir.

Ainsi, pour la première fois, dans une ordonnance de référés du 28 novembre 2013, le tribunal de grande instance de Paris a fait droit aux demandes de professionnels du cinéma fondées sur l’article L. 336-2 du Code de propriété intellectuelle et a ordonné aux FAI et aux moteurs de recherches de bloquer l’accès et de déréférencer le réseau de sites « allostreaming ». Selon les juges du fond, ces sites portaient une atteinte au droit de représentation des auteurs en proposant le visionnage d’œuvres sans autorisation des titulaires de droit (TGI Paris, réf., 28 nov. 2013, n° 11/60 013, APC et a. c/ Auchan Telecom et a.).

La création d’un lien hypertexte est condamnable dès lors qu’elle « procède d’une démarche délibérée et malicieuse, entreprise en toute connaissance de cause par l’exploitant du site d’origine, lequel doit alors répondre du contenu du site auquel il s’est, en créant ce lien, volontairement et délibérément associé dans un but déterminé » (CA Paris, 4e ch., sect. A, 19 sept. 2001, n° 1999/21382).

L’article 6 de la LCEN impose à l’hébergeur d’agir « promptement » pour retirer les données sans toutefois préciser un délai. C’est alors au juge, par son pouvoir d’interprétation, de déterminer la promptitude de l’hébergeur dans la suppression du contenu litigieux. Par exemple, la société Dailymotion a été reconnue responsable du fait de son inaction pour ne pas avoir supprimé des vidéos qui lui avaient été notifiées 5 à 7 jours auparavant (CA Paris, pôle 5, ch. 1, 2 déc. 2014, n° 13/08052, TF1 et a. c/ Dailymotion et a.).

Il a également été jugé qu’un délai de réaction de 2 semaines était excessif (CA Paris, pôle 5, ch. 2, 4 févr. 2011, n° 09/21 941, Google et a. c/ Aufeminin.com et a.). Enfin, en première instance, les juges du fond ont considéré que YouTube n’avait pas satisfait à son obligation en supprimant le contenu dans un délai de 5 jours (TGI Paris, 3e ch., 1re sect., 29 mai 2012, n° 10/11 205, TF1 et a. c/ YouTube).

II. Qualification pénale des faits reprochés à l’hébergeur

A. La connaissance présumée du caractère contrefaisant de l’activité, par l’application du 5 du I de l’article 6 de la LCEN

Aux termes de l’article 6, I, 5 de la LCEN, la connaissance des faits litigieux est présumée acquise par l’hébergeur lorsque lui sont notifiés les éléments suivants :

la date de la notification ;

si le notifiant est une personne physique : ses noms, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ; si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement ;

-les nom et domicile du destinataire ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social ;

-la description des faits litigieux et leur localisation précise ;

-les motifs pour lesquels le contenu doit être retiré, comprenant la mention des dispositions légales et des justifications de faits ;

-la copie de la correspondance adressée à l’auteur ou à l’éditeur des informations ou activités litigieuses demandant leur interruption, leur retrait ou leur modification, ou la justification de ce que l’auteur ou l’éditeur n’a pu être contacté.

La directive (UE) 2019/790 du Parlement européen du 17 avril 2019 sur le droit d’auteur a instauré à son article 17 une obligation spécifique à l’égard des fournisseurs de services de partage en ligne comparable à une obligation de police. Cette obligation qui tend à empêcher l’apparition de contenus contrefaisants sur les plateformes de partage en ligne se superpose à celle déjà existante de modération des contenus manifestement illicites signalés à ces dernières.

Il ne s’agit toutefois pas d’une obligation générale de surveillance, le fournisseur de service n’étant en aucun cas tenu à un résultat absolu. Ce dernier engage sa responsabilité comme contrefacteur du fait de la présence d’une œuvre non autorisée sur ses services lorsqu’il ne peut prouver qu’il a accompli ses meilleurs efforts et qu’il s’est montré suffisamment diligent.

Il considère qu’en maintenant le lien de téléchargement actif et en conservant le fichier sur ses serveurs, l’hébergeur fournit à l’internaute le moyen de commettre une contrefaçon par reproduction. L’intention complice, c’est-à-dire la connaissance du caractère contrefaisant de l’activité, résulte de la connaissance présumée du caractère contrefaisant de l’activité, par l’application du 5 du I de l’article 6 de la LCEN.

Il retient donc la culpabilité de DStorage en requalifiant les faits en complicité par fourniture de moyens de stockage des serveurs lui appartenant et le maintien des liens permettant l’accès à ces moyens de stockage, de contrefaçon par reproduction. La qualité de coauteur de l’infraction de contrefaçon par représentation, diffusion, communication et de mise à disposition du public des œuvres de l’esprit et des vidéogrammes est donc retenue et ce à compter de la date de notification, plus sept jours.

B. Répressions pénales

L’article 14 de la directive « commerce électronique » définit l’activité d’hébergement comme la « fourniture d’un service de la société de l’information consistant à stocker des informations fournies par un destinataire du service ». L’article 6-I, 2° de la LCEN détermine également la prestation d’hébergement comme une activité purement technique.

Selon le législateur français, les hébergeurs sont « les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ».

La Cour de justice de l’Union européenne est venue préciser son interprétation de l’activité d’hébergement dans son arrêt Google Adwords. Selon le juge de Luxembourg, l’hébergeur ne doit pas avoir joué « un rôle actif de nature à lui confier une connaissance ou un contrôle des données stockées » (CJUE, 23 mars 2010, aff. C-236/08 à C-238/08, Sté Google c/ Sté Louis Vuitton Malletier). Cette nouvelle position jurisprudentielle est reprise par les juridictions nationales, notamment par la première chambre civile de la Cour de cassation qui dans une série de trois arrêts rappelle que le régime de responsabilité aménagée « s’applique au prestataire d’un service de référencement sur internet lorsque ce prestataire n’a pas joué un rôle actif de nature à lui confier une connaissance ou un contrôle des données stockées » Sté Nord-Ouest, Sté UGC Images et a. c/ Sté Dailymotion , SA Google France c/ Sté CNRRH., Google Inc et Google France c/ Louis Vuitton Malletier.

Le tribunal a écarté certains constats, mais a finalement condamné le chargeur des fichiers à un an de prison avec sursis avec vingt mille euros d’amende et Dstorage à cent mille euros d’amende ainsi qu’à la publication du jugement sur son site. Les deux prévenus ont été condamnés solidairement à près d’un million et demi d’euros de dommages et intérêts et dédommagements divers, avec exécution provisoire. Bien entendu, la suppression des fichiers litigieux doit être aussi réalisée aux frais de l’hébergeur.

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Sources :

https://www.oecd.org/fr/presse/lancement-du-rapport-de-l-ocde-et-de-l-euipo-sur-le-commerce-de-produits-contrefaits-le-lundi-18-mars-2019-a-12h00-avec-webcast-en-direct.htm
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000036584445
https://www.legalis.net/actualite/un-hebergeur-condamne-pour-contrefacon/
https://www.legifrance.gouv.fr/loda/article_lc/LEGIARTI000037526491/2020-06-25/#:~:text=Le%20fait%2C%20pour%20toute%20personne,15%20000%20Euros%20d%27amende
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000023607235?init=true&page=1&query=09-13.202&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000022488616?init=true&page=1&query=06-15.136&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000022488612?init=true&page=1&query=06-20.230&searchField=ALL&tab_selection=all

3 RAISONS DE FAIRE UN PROCES POUR CONCURRENCE DELOYALE

Le développement ininterrompu de création d’entreprise de tout genre, la création de marques, dessins & modèles, les invitent sans fin dans le domaine industriel ainsi que les créations artistiques invitent les différents acteurs ou titulaires des droits exclusifs à se protéger contre tout acte de concurrence en l’occurrence contre les actes de concurrence déloyale.

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La concurrence déloyale est un acte très hostile pour les titulaires de droit exclusif. En effet, ces actes détournent l’attention des consommateurs profanes et plombent les chiffres d’affaires des victimes potentielles.

Ces actes se sont accrus avec le développement spectaculaire des nouvelles technologies qui ont pris encore plus d’ampleurs pendant cette crise sanitaire que le monde traverse cela depuis un an.

Qu’on se le dise, la concurrence déloyale est une difficulté majeure pour les entreprises.


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Fondée sur le droit commun de la responsabilité civile, l’action en concurrence déloyale permet de sanctionner les actes contraires à la loyauté commerciale, qu’ils interviennent entre concurrents ou entre non-concurrents.

L’action en concurrence déloyale peut être mise en œuvre par celui qui n’est pas titulaire d’un droit privatif ou par celui qui ne remplit pas les conditions pour exercer l’action fondée sur son droit privatif. L’action est ainsi souvent exercée en même temps que l’action en contrefaçon.

En outre, la création d’un risque de confusion avec l’entreprise ou les produits d’un concurrent est un cas d’ouverture de l’action. L’action peut être engagée par celui qui est victime d’une désorganisation de son entreprise ou de son réseau de distribution.

De plus, le principe de la liberté du commerce autorise le salarié à se faire embaucher chez le concurrent. Le débauchage du personnel du concurrent n’est sanctionné que si la volonté de nuire et l’existence de manœuvres sont démontrées.

En présence d’une clause de non-concurrence, il doit être établi la connaissance de cette dernière par le nouvel employeur. La théorie du parasitisme permet de sanctionner celui qui tente de profiter des investissements et de l’image de marque d’autrui, à moindre prix.

Par ailleurs, il peut y avoir concurrence déloyale en cas de dénigrement de l’entreprise concurrente ou de ses produits. L’action peut être mise en œuvre pour sanctionner des pratiques commerciales désorganisant le marché. Le demandeur à l’action doit se prévaloir d’une faute et d’un préjudice, mais ce dernier est apprécié libéralement. Il peut consister en un trouble commercial.

I. Un procès pour concurrence déloyale pour risque de confusion avec l’entreprise d’un concurrent

Le titulaire d’un droit exclusif déposé est normalement protégé par l’action en contrefaçon. Cependant, cette action obéit à des conditions strictes de mise en œuvre. Par exemple, l’action ne peut être engagée pour protéger le déposant contre des utilisations de sa marque pour des produits ne figurant pas dans les catégories précisées lors du dépôt. Il faut respecter le principe de spécialité. L’action en concurrence déloyale peut alors être exercée. Il est tenu compte de la renommée de la marque et du risque de confusion pour un produit donné.

L’action en concurrence déloyale peut être engagée en complément de l’action en contrefaçon. Le titulaire de la marque a intérêt à agir ainsi quand il n’est pas sûr de son droit privatif ou lorsqu’il peut se prévaloir de faits distincts. Ainsi, commets un acte de concurrence déloyale le restaurant qui continue à contrefaire la marque d’un concurrent après condamnation pour contrefaçon, en gardant une dénomination identique à celle d’un restaurant de luxe, dès lors que, bénéficiant de la mutation de son quartier d’implantation en raison de la création d’un opéra et se présentant comme un restaurant de luxe, il entraîne une confusion dans l’esprit de la clientèle.

De même il peut y avoir risque de confusion en cas de ressemblance entre deux marques. Le seul dépôt d’une marque ne constitue pas en soi un acte de concurrence déloyale.

L’action en concurrence déloyale est facilitée dès lors que la Cour de cassation n’exige plus un rapport de concurrence. Les moteurs de recherche peuvent ainsi être condamnés sur le terrain de l’action en concurrence déloyale.

Pour la protection du nom commercial, il n’existe pas d’action particulière. Dès lors, c’est l’action en concurrence déloyale qui doit être exercée par celui qui s’estime victime d’une utilisation fautive de son nom que celui-ci ait été reproduit totalement ou partiellement. Il doit exister un risque de confusion (Cass. com., 14 janv. 2003, n° 00-21.782 : JurisData n° 2003-017361).

Pour que la confusion soit possible, il est nécessaire que le signe distinctif présente une certaine originalité. Ce n’est pas le cas d’un nom générique, par exemple la dénomination « cuirs et peaux » pour un magasin d’articles de cuir (CA Versailles, 12e ch., 5 déc. 1991 : D. 1993, p. 153, obs. M.-L. Isorche).

Il a été jugé que « constitue un acte de concurrence déloyale, le choix d’un nom commercial et d’une dénomination sociale prêtant à confusion avec le nom commercial et la dénomination sociale du concurrent, notamment le choix pour une société informatique du nom commercial et de la dénomination d’une société de forte notoriété » (CA Paris, 3 juill. 1998, n° 96/84408 : JurisData n° 1998-022376).

Le nom de domaine est également protégé par l’action en concurrence déloyale. Il doit être suffisamment distinctif et le risque de confusion doit être établi. L’originalité du nom de domaine n’est pas une condition de l’action en concurrence déloyale (Cass. com., 8 avr. 2008 ; Propr. intell. juill. 2008, p. 359, obs. J. Passa).

Le propriétaire d’une enseigne est protégé par l’action en concurrence déloyale, si elle est distinctive, disponible et licite. En application du principe de spécialité, l’enseigne n’est protégée que dans le domaine d’activité de l’entreprise qu’elle désigne. L’étendue territoriale de la protection dépend de son rayonnement.

L’action en concurrence déloyale peut être exercée dès qu’il y a risque de confusion en raison d’une imitation ou de reproduction à l’identique.

L’action en concurrence déloyale peut également sanctionner l’atteinte à la dénomination sociale d’une entreprise concurrente, tout particulièrement lorsqu’est créé un risque de confusion entre deux commerces.

Les dessins et modèles font l’objet d’une protection spécifique prévue par le Code de la propriété intellectuelle. Cependant l’action en contrefaçon n’est conférée que si le prétendu contrefacteur est de mauvaise foi. Dans le cas contraire, l’action en concurrence déloyale peut être exercée.

La faute doit alors être caractérisée. Il ne suffit pas que les produits aient été vendus à un prix très inférieur dans les mêmes lieux (Cass. com., 17 juin 2003, n° 01-17.242).

L’action en concurrence déloyale peut-elle être exercée lorsque celui qui l’invoque n’est pas titulaire d’un droit privatif.

Le logiciel est aujourd’hui protégé par le droit d’auteur (CPI, art. L. 112-2). En cas de copie servile, l’action en concurrence déloyale peut être exercée en même temps que l’action en contrefaçon (CA Grenoble, 1re ch. civ., 19 sept. 1989 : JurisData n° 1989-043694). La théorie du parasitisme peut aussi être mise en œuvre

Imitation des caractéristiques du produit. Pour exercer l’action en concurrence déloyale, le demandeur doit établir la similitude existant entre ses propres produits et ceux du prétendu imitateur, et apporter la preuve que cette similitude a eu pour effet, en l’absence d’intention de nuire, de créer dans l’esprit du public une confusion entre les produits.

C’est par référence à un consommateur moyen que le juge doit se déterminer. Il faut principalement s’attacher à l’impression d’ensemble, tenir compte des ressemblances qui ne sont dues à aucune nécessité et qui sont de nature à créer une confusion dans l’esprit du consommateur.

L’originalité prise en compte lorsqu’il s’agit d’apprécier la contrefaçon n’est pas exigée pour l’action en concurrence déloyale (V. pour des lunettes : Cass. com., 12 juin 2007 : D. 2008, pan. 253, obs. Y. Picod).

Le comportement parasitaire n’est cependant condamnable que lorsqu’il est établi que celui à qui il est reproché a, en connaissance de cause, copié ou capté les éléments essentiels et significatifs d’un produit concurrent. Celui qui est poursuivi peut donc démontrer que le produit commercialisé résulte uniquement de son travail, de ses efforts et de ses investissements financiers, que son travail de recherche était antérieur à la mise sur le marché d’un produit concurrent (CA Paris, 4 mars 1998 : JurisData n° 1998-022147).

II. Un procès pour concurrence déloyale pour débauchage de salarié en présence d’une clause de non-concurrence

Le salarié qui ne respecte pas la clause de non-concurrence figurant dans son contrat de travail engage sa responsabilité contractuelle à l’égard de son ex-employeur. En raison du principe de l’effet relatif, seul le créancier de l’obligation peut invoquer la violation de la clause. Mais un tiers peut agir sur le fondement de la concurrence déloyale.

Le tiers, qui en connaissance de cause, aide le débiteur de non-concurrence à méconnaître son obligation se rend coupable de tierce complicité à la violation d’une obligation contractuelle et peut s’il est concurrent du créancier, être poursuivi pour concurrence déloyale (CA Toulouse, 25 juin 2013 : JurisData n° 2013-015588).

Le nouvel employeur se rend coupable de concurrence déloyale s’il embauche des salariés d’un concurrent alors qu’il connaissait l’existence de la clause de non-concurrence (Cass. com., 5 févr. 1991 : JCP E 1991, pan. 338). Peu importe que la connaissance ait été concomitante ou postérieure à l’engagement. Est indifférent le moyen par lequel le nouvel employeur a été mis en connaissance de la clause.

La chambre commerciale privilégie ainsi une conception libérale favorable à l’employeur. Un autre courant doctrinal et jurisprudentiel est plus sévère : il sanctionne l’employeur de mauvaise foi ; tel est le cas lorsqu’il omet de se renseigner (Cass. com., 3 mai 2000 : D. 2001, somm. p. 1312, obs. Y. Serra).

La preuve de la connaissance de la clause de non-concurrence par le nouvel employeur incombe à celui qui se prévaut de l’existence d’une telle clause (Cass. com., 18 déc. 2001 : D. affaires 2003, p. 1029, obs. Y. Picod).

Il peut aussi être reproché à un employeur qui a embauché un salarié de ne pas s’être assuré qu’il n’était lié par aucune clause de non-concurrence envers une société concurrente (CA Toulouse, 19 oct. 1992 : JurisData n° 1992-048068). Il est en effet du devoir d’un nouvel employeur de s’enquérir de la situation du salarié qu’il embauche au regard des engagements qu’il a pu contracter avec le précédent employeur (cas où, malgré l’absence de notification de l’existence de la clause de non-concurrence, la société ne pouvait prétendre l’ignorer.

La faute du nouvel employeur est génératrice d’un préjudice économique et moral distinct de celui provoqué par la faute contractuelle du préposé à l’égard de son ancien employeur.

L’action dirigée contre la société créée par l’ancien salarié, fondée sur la complicité de celle-ci dans la violation de la clause de non-concurrence relève de la compétence du tribunal de commerce et suppose que soit tranchée la question préalable de la violation de la clause de non-concurrence laquelle relève de la compétence exclusive de la juridiction prud’homale (Cass. com., 6 mai 2003 : D. affaires 2004, somm. p. 1154, obs. Y. Picod).

La nullité de la clause de non-concurrence ne fait pas obstacle à l’action en responsabilité engagée par l’ancien employeur contre son salarié s’il démontre que ce dernier s’est livré à des actes de concurrence déloyale (Cass. com., 20 janv. 2005, n° 02-47.527).

Lorsqu’un employeur agit en manquement d’une clause de non-démarchage et en concurrence déloyale, le conseil des prud’hommes est compétent (Cass. com., 15 nov. 2011, n° 10-26.028).

III. Un procès pour concurrence déloyale pour dénigrement

Le dénigrement est une affirmation malicieuse contre un concurrent dans le but de détourner sa clientèle, ou plus généralement de lui nuire. Le discrédit peut être jeté soit sur les produits de l’entreprise, soit sur l’entreprise elle-même. Le dénigrement peut être direct ou être réalisé par omission. Ce dénigrement indirect consiste dans l’attitude laissant croire que seuls une entreprise ou un produit présentent certaines qualités. La jurisprudence admet que l’action puisse être exercée en l’absence d’un rapport de concurrence dès lors qu’il existe une atteinte au libre jeu de la concurrence (Cass. com., 20 nov. 2007, n° 05-15.643).

Il doit aussi être tenu compte du principe de la liberté d’expression (Cass. 2e civ., 19 oct. 2006 : D. 2008). Le dénigrement doit ainsi être distingué de la diffamation qui relève de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 (Cass. com., 2 déc. 2014, n° 13-23.114).

Le concurrent doit être visé nommément ou doit être facilement identifiable. Tout dépend donc du marché en cause. Plus le marché est étroit, plus l’identification est aisée. Parfois, il est admis que le dénigrement puisse être collectif, quand l’ensemble d’une profession est visé. Un commerçant peut cependant se dire encore moins cher que les autres à condition de ne pas dénigrer distinctement une personne ou un produit (CA Riom, 5 févr. 1992 : JurisData n° 1992-042798).

Le dénigrement peut être constitué alors même que les allégations rapportées sont exactes. Il s’agit là d’une différence avec l’action en diffamation (Cass. com., 12 oct. 1966 : Bull. civ. III, n° 393). Une critique déloyale sur les biens et services d’un concurrent est suffisante (Cass. 1re civ., 5 déc. 2006, n° 05-17.710).

Par exemple, le dénigrement réalisé par envoi de lettres missives, peu important leur diffusion (Cas d’une lettre adressée par une société créée par d’anciens salariés aux clients de l’ancien employeur, Cass. com., 12 mai 2004, n° 02-19.199).

Est condamnable la campagne publicitaire lancée par un producteur de phosphates dénigrant les lessives sans phosphates, dès lors que, par des formules outrageusement simplificatrices et au mépris de toute objectivité, il y a dépassement du droit d’informer et volonté de ruiner ces produits dans l’esprit du consommateur (CA Versailles, 1er févr. 1990 : D. 1990, Jur., p. 264, note Y. Serra).

Est condamnable, une publicité tendancieuse qui vise à éliminer de façon déloyale un concurrent (exemple un éditeur de logiciels qui tente de faire croire que ses produits ne sont compatibles qu’avec un seul type de consoles, T. com. Paris, 26 janv. 1993 : JurisData n° 1993-040084).

Peut-être condamnable la diffusion d’informations économiques et financières sur une entreprise concurrente lorsque les dossiers sont établis sur des bases manquant d’objectivité (Cass. com., 18 mai 1993, n° 91-19.829).

Constitue un acte de dénigrement destiné à jeter le discrédit sur son concurrent et sur les produits qu’il fabrique, le fait pour une entreprise de diffuser auprès des centrales d’achat un tableau comparatif comportant des indications erronées, tendancieuses ou non démontrées relatif au processus de fabrication de la société concurrente (CA Versailles, 30 janv. 1997 : D. 1999, somm. p. 93, obs. M.-L. Isorche).

Est fautive la dénonciation faite à la clientèle d’une action n’ayant pas donné lieu à une décision de justice (Cass. com., 12 mai 2004, 2 arrêts : JCP E 2004, 997 et 998).

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SOURCES :

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007445896?init=true&page=1&query=00-15.107+&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000028208606?init=true&page=1&query=12-26.439&searchField=ALL&tab_selection=all
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https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000030240093?init=true&page=1&query=13-24.979&searchField=ALL&tab_selection=all
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https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007620795?init=true&page=1&query=97-17.233&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000032415267?init=true&page=1&query=15-18.494&searchField=ALL&tab_selection=all