A propos de Murielle Cahen

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Articles de Murielle Cahen:

Le droit à l’image dans les films pornographiques

Le droit à l’image est un principe fondamental du droit français, ancré dans l’article 9 du Code civil, qui dispose que « chacun a droit au respect de sa vie privée ».  Ce droit, qui garantit à chaque individu le contrôle sur l’utilisation de son image, se voit particulièrement mis à l’épreuve dans le cadre des films pornographiques, où la représentation de la nudité et de l’intimité des personnes est non seulement fréquente, mais souvent essentielle à la nature même du produit. À l’intersection de la liberté d’expression, du droit à l’image et de la protection des individus, ce sujet soulève des questions juridiques complexes et délicates.

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Les producteurs de contenus pornographiques doivent donc obtenir le consentement explicite des acteurs avant de diffuser leurs images, garantissant ainsi que ces derniers sont conscients des implications de leur participation. Cependant, au-delà des considérations légales, il est nécessaire d’explorer les dimensions éthiques qui entourent le droit à l’image dans ce contexte.

La pornographie peut souvent véhiculer des stéréotypes et des représentations déformées des relations humaines, influençant la perception des rôles de genre et des attentes en matière de sexualité. Les acteurs, en particulier, peuvent se retrouver dans des situations où leur image est exploitée sans leur consentement éclairé, soulevant des questions sur leur autonomie et leur dignité.

De plus, le débat autour du droit à l’image dans les films pornographiques est alimenté par des considérations sociologiques. Les dynamiques de pouvoir au sein de l’industrie pornographique, où des inégalités peuvent exister entre les producteurs et les acteurs, posent des défis importants. Il est essentiel d’examiner comment ces relations peuvent mener à des abus et à la violation du droit à l’image, affectant la santé mentale et le bien-être des acteurs impliqués.


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L’aspect économique de l’industrie pornographique ne peut également être ignoré. C’est un secteur lucratif, où les acteurs sont souvent en compétition pour être sélectionnés, ce qui peut les amener à consentir à des conditions d’utilisation de leur image qui ne respectent pas toujours leur intégrité personnelle.

La question de savoir comment les acteurs peuvent protéger leur droit à l’image tout en cherchant à réussir dans cette industrie est un dilemme constant.

En somme, le droit à l’image dans les films pornographiques est un sujet qui mérite une attention particulière, tant sur le plan juridique que sociétal. Il nécessite une analyse approfondie des lois en vigueur, des implications éthiques et des dynamiques de l’industrie pornographique, tout en tenant compte des droits fondamentaux des individus. Cette réflexion doit aboutir à une approche équilibrée qui protège les droits des acteurs tout en respectant les libertés individuelles dans le cadre de la production et de la consommation de contenus pour adultes.

I. Le droit à l’image : principes fondamentaux

A. Définition et portée du droit à l’image

Le droit à l’image est un concept juridique complexe et fondamental qui s’inscrit dans le cadre plus large du respect de la vie privée. Selon l’article 9 du Code civil français, « chacun a droit au respect de sa vie privée », ce qui implique que chaque individu a la faculté de contrôler la représentation de son image. Ce droit est reconnu comme étant personnel et inaliénable, ce qui signifie qu’il ne peut être cédé ni transféré à un tiers sans le consentement explicite de l’individu concerné.

La portée de ce droit est vastement étendue, englobant non seulement les images photographiques, mais aussi les représentations vidéo, les illustrations, les avatars numériques et même les enregistrements vocaux. Cela signifie qu’une personne peut revendiquer son droit à l’image dans un large éventail de contextes, qu’il s’agisse de publications dans des médias imprimés, en ligne, à la télévision ou dans des œuvres artistiques. La nécessité d’un consentement préalable pour toute utilisation de l’image d’une personne souligne l’importance de la protection de la dignité humaine et du respect de la vie privée. La jurisprudence française a été claire sur ce sujet.

Dans un arrêt de la Cour de cassation, la Haute juridiction a affirmé que l’utilisation de l’image d’une personne sans son accord constitue une violation de son droit à la vie privée. Cet arrêt a été fondamental dans la clarification des contours du droit à l’image, en précisant que le consentement doit être libre, éclairé et donné dans des conditions où la personne est consciente des implications de son accord. Cette décision a également établi que le non-respect de ce droit peut entraîner des dommages-intérêts pour la personne dont l’image a été utilisée sans autorisation.

En outre, le droit à l’image peut être considéré comme étant intimement lié à la notion d’identité personnelle. Non seulement une personne a le droit de contrôler son image, mais elle a également le droit de déterminer comment son identité est perçue par les autres. Cela comprend des éléments tels que le style vestimentaire, les expressions faciales et même le langage corporel.

Par conséquent, toute utilisation de l’image d’une personne qui pourrait altérer ou déformer cette perception sans son consentement constitue une atteinte à son droit à l’image. Les implications de cette protection sont particulièrement significatives dans le contexte des médias sociaux et des plateformes numériques, où la diffusion et le partage d’images se font à une vitesse sans précédent.

La question du consentement devient alors plus complexe, car il est fréquent que des images soient partagées sans que les personnes concernées en aient eu connaissance. Cela soulève des enjeux éthiques et juridiques qui nécessitent une attention particulière, car les conséquences d’une utilisation non autorisée de l’image peuvent être dévastatrices pour la réputation et la vie personnelle des individus concernés.

B. Consentement et limites du droit à l’image

Le consentement est un élément central du droit à l’image, et il est impératif de comprendre les diverses nuances qui l’entourent. Son principe, toute exploitation de l’image d’une personne sans son consentement est prohibée. Ce principe est énoncé clairement dans le Code civil, et la jurisprudence a systématiquement renforcé cette approche. Ainsi, il a été jugé que l’utilisation de l’image d’une personne dans une publicité sans son accord préalable constituait une atteinte à son droit à l’image, entraînant une condamnation de l’éditeur. Cependant, il existe des exceptions à cette règle, notamment en ce qui concerne les personnalités publiques.

Le droit à l’image peut être limité dans le cadre de l’information du public. Cela signifie que lorsque des personnalités publiques sont représentées dans des contextes d’actualité ou lors d’événements publics, leur image peut être utilisée sans autorisation préalable, tant que cela ne porte pas atteinte à leur dignité. Cette exception est particulièrement importante dans le domaine du journalisme, où la couverture d’événements d’actualité nécessite parfois l’utilisation d’images de personnes sans leur consentement explicite. Un exemple emblématique de cette exception est l’affaire « Bolloré » en 2011, où la Cour de cassation a confirmé qu’un homme d’affaires, en tant que personnalité publique, avait un droit limité à la protection de son image lorsqu’il était photographié lors d’un événement public.

La Cour a ainsi statué que l’intérêt du public à être informé prévalait sur l’intérêt personnel de la personnalité publique à contrôler l’utilisation de son image dans ce contexte. Cette décision a été accueillie avec des opinions divergentes, certains soutenant qu’elle affaiblissait le droit à l’image, tandis que d’autres affirmaient qu’elle était essentielle pour garantir la liberté d’information.

Il est également important de noter que le consentement peut être implicite dans certains cas, particulièrement dans des contextes où une personne se trouve dans un lieu public et où son image est capturée de manière fortuite.

Les limites au droit à l’image se posent également dans le contexte des œuvres artistiques. Les artistes peuvent parfois utiliser des images de personnes sans leur consentement dans le cadre de leur création, en invoquant la liberté d’expression. Cependant, cette exception est strictement encadrée. La jurisprudence a établi que l’utilisation d’une image dans une œuvre artistique doit être justifiée par un but artistique légitime et ne doit pas porter atteinte à la dignité de la personne représentée.

Par exemple, dans une affaire où un artiste avait utilisé des images de célébrités dans une œuvre satirique, la Cour de cassation a tranché en faveur de l’artiste, arguant que la nature de l’œuvre et son intention satirique justifiaient l’utilisation des images sans consentement. En outre, la question du droit à l’image se complique dans le contexte numérique et des médias sociaux. La facilité avec laquelle les utilisateurs peuvent partager des images en ligne pose des défis uniques en matière de consentement. Il est fréquent que des photos soient partagées sans que les personnes concernées aient été informées ou aient donné leur accord. Cela soulève des questions éthiques et juridiques sur la responsabilité des plateformes numériques et des utilisateurs en ce qui concerne le respect du droit à l’image. Une affaire marquante à cet égard est celle de l’utilisation de photos d’individus dans des campagnes publicitaires sur les réseaux sociaux sans consentement. Plusieurs décisions judiciaires ont confirmé que les entreprises qui exploitent des images d’individus sans leur accord s’exposent à des poursuites pour atteinte à la vie privée. Cela a conduit à un débat sur la nécessité d’une réglementation plus stricte concernant la protection du droit à l’image sur les plateformes numériques.

Enfin, il convient de souligner que le droit à l’image est également influencé par la législation européenne, notamment le Règlement général sur la protection des données (RGPD). Ce règlement renforce la protection des données personnelles, y compris les images, et impose des obligations strictes aux entreprises en matière de consentement et de traitement des données. Le RGPD a ainsi un impact significatif sur la manière dont les entreprises doivent gérer l’utilisation des images des individus, en s’assurant que le consentement est obtenu conformément aux exigences légales.

II. Le droit à l’image dans l’industrie pornographique

A. Obligations des producteurs et des diffuseurs

  1. Responsabilité légale

Les producteurs et diffuseurs de contenu pornographique ont des obligations légales qui visent à protéger les droits des acteurs et à garantir que le contenu diffusé respecte la législation en vigueur. Ces obligations varient selon les juridictions, mais elles englobent généralement les aspects suivants :

– Obtention du consentement éclairé : Avant toute production, il est impératif que les producteurs obtiennent un consentement explicite et éclairé de tous les participants. Cela implique une communication claire sur le type de contenu qui sera filmé, les conditions de travail, ainsi que la manière dont le contenu sera diffusé. Les producteurs doivent veiller à ce que les acteurs comprennent pleinement les implications de leur participation.

– Contrats clairs : Les producteurs doivent établir des contrats écrits qui définissent les droits et responsabilités de chaque partie. Ces contrats doivent inclure des clauses sur l’utilisation de l’image, le droit à l’édition, et les modalités de rémunération. Il est également crucial que les contrats stipulent les recours possibles en cas de litige concernant l’utilisation du contenu.

– Protection des données personnelles : Les producteurs et diffuseurs doivent également se conformer aux lois relatives à la protection des données personnelles. Cela inclut le traitement des informations personnelles des acteurs avec soin et respect, ainsi que la mise en place de mesures pour protéger ces données contre toute exploitation abusive.

  1. Éthique et responsabilité sociale

Au-delà des obligations légales, les producteurs et diffuseurs ont une responsabilité éthique envers les acteurs et la société en général. Cette responsabilité inclut :

– Respect de la dignité humaine : Les producteurs doivent s’assurer que le contenu qu’ils produisent ne dégrade pas les acteurs. Cela signifie éviter les stéréotypes nuisibles, les représentations dégradantes et les scénarios qui pourraient porter atteinte à la dignité des individus. La création de contenu éthique implique une réflexion sur les messages véhiculés et les répercussions sociales de ces représentations.

– Sensibilisation et formation : Les producteurs ont la responsabilité de former leurs équipes, y compris les réalisateurs, les scénaristes et les techniciens, sur les questions de consentement et de respect des droits des travailleurs du sexe. Cela peut inclure des ateliers sur la dynamique de pouvoir, la diversité et l’inclusivité, ainsi que sur la manière de créer un environnement de travail sûr et respectueux.

– Promotion de la diversité : Les producteurs doivent également veiller à promouvoir la diversité et à éviter de reproduire des représentations homogènes des genres, des races et des sexualités. En intégrant une variété de voix et de perspectives dans la production, les producteurs peuvent contribuer à une représentation plus équilibrée et juste dans l’industrie.

  1. Obligations en matière de sécurité

La sécurité des acteurs et des membres de l’équipe de production est primordiale. Les producteurs et diffuseurs doivent mettre en place des mesures concrètes pour garantir un environnement de travail sécurisé :

– Protocoles de sécurité : Des protocoles clairs doivent être établis pour assurer la sécurité physique et émotionnelle des acteurs. Cela peut inclure des vérifications de sécurité pour les membres de l’équipe, des procédures d’urgence en cas de problème sur le plateau, et la mise à disposition de ressources de soutien, telles que des conseillers ou des travailleurs sociaux.

– Tests de santé réguliers : Dans le contexte de l’industrie pornographique, la santé sexuelle est une préoccupation majeure. Les producteurs doivent exiger des tests de santé réguliers pour tous les acteurs afin de prévenir la transmission d’infections sexuellement transmissibles (IST). Cela nécessite la mise en place de protocoles de santé clairs et la garantie que tous les acteurs soient informés des résultats des tests.

  1. Responsabilité des plateformes de diffusion

Les diffuseurs, qu’ils soient des plateformes de streaming, des sites de contenu pour adultes ou des réseaux sociaux, partagent également des responsabilités importantes :

– Surveillance du contenu : Les diffuseurs doivent effectuer une surveillance rigoureuse du contenu qu’ils hébergent afin de s’assurer qu’il respecte les droits des acteurs et les normes éthiques. Cela inclut la vérification que le contenu a été produit légalement et avec le consentement éclairé des participants.

– Mécanismes de signalement : Les plateformes doivent établir des systèmes clairs permettant aux acteurs de signaler les violations de leurs droits. Ces mécanismes doivent être accessibles, efficaces et permettre un retrait rapide du contenu en cas de plainte.

– Engagement envers la transparence et la responsabilité : Les diffuseurs doivent s’engager à être transparents sur leurs pratiques de contenu. Cela inclut la communication sur la manière dont le contenu est sélectionné, les critères utilisés pour le classement et la promotion, ainsi que les efforts faits pour garantir que le contenu respecte les normes éthiques. En étant ouverts sur ces processus, les diffuseurs peuvent renforcer la confiance avec les acteurs et le public.

  1. Éducation et sensibilisation du public

Les producteurs et diffuseurs ont également un rôle à jouer dans l’éducation du public sur les enjeux liés à la pornographie. Cela comprend :

– Sensibilisation aux réalités de l’industrie : Les producteurs peuvent contribuer à éduquer le public sur les réalités de l’industrie pornographique, y compris les défis auxquels sont confrontés les acteurs et la nécessité de traiter ces travailleurs avec respect et dignité. La production de contenu informatif et éducatif peut aider à démystifier l’industrie et à réduire les stéréotypes nuisibles.

– Promotion de la consommation responsable : Les diffuseurs peuvent encourager une consommation responsable de la pornographie en fournissant des ressources et des informations sur les pratiques éthiques. Cela peut inclure des conseils sur la manière de soutenir des productions respectueuses des droits des acteurs et des recommandations sur les contenus produits de manière éthique.

  1. Engagement envers le changement positif

Enfin, il est essentiel que les producteurs et diffuseurs s’engagent activement à promouvoir des changements positifs au sein de l’industrie :

– Collaboration avec les acteurs : En établissant des partenariats avec les acteurs et les organisations de défense des droits des travailleurs du sexe, les producteurs et diffuseurs peuvent contribuer à la création de normes de travail plus justes et plus éthiques. Ces collaborations peuvent également aider à donner une voix aux acteurs et à les impliquer dans les décisions qui les concernent.

– Adaptation aux évolutions sociétales : L’industrie pornographique, comme toute autre industrie, doit s’adapter aux évolutions des valeurs sociétales. Les producteurs et diffuseurs doivent être à l’écoute des préoccupations du public et des acteurs, et être prêts à modifier leurs pratiques pour mieux répondre aux attentes en matière de respect, d’inclusivité et de justice.

B. La protection des acteurs et actrices

La protection des acteurs et actrices dans l’industrie pornographique est devenue un enjeu majeur dans le débat public sur le travail du sexe. Les préoccupations autour des droits des travailleurs dans ce secteur ont conduit à une mobilisation croissante d’organisations de défense des droits, qui s’efforcent de garantir des conditions de travail sûres et respectueuses.

Les acteurs et actrices font souvent face à des défis uniques, tels que la stigmatisation sociale, l’exploitation, et le risque de violence, tant sur le plateau que dans leur vie quotidienne. Les réglementations mises en place dans certains pays visent à établir des normes minimales pour la protection des travailleurs du sexe. Ces lois peuvent inclure des exigences sur la formation au consentement, où les acteurs doivent être informés de leurs droits et des pratiques sécurisées avant de participer à une production.

Les droits d’auteur sur les images et vidéos sont également d’une importance cruciale. Les acteurs doivent avoir le contrôle sur l’utilisation de leur image et être en mesure de revendiquer des recours en cas de violation de leurs droits. Les syndicats de travailleurs du sexe jouent un rôle essentiel dans cette protection. Ils militent pour des changements législatifs, offrent des ressources aux membres, et travaillent à la sensibilisation du public concernant les réalités de l’industrie.

Ils promeuvent également des standards de sécurité, incluant des protocoles pour éviter l’exploitation et les abus sur le lieu de travail. Par exemple, des mesures peuvent être mises en place pour assurer que tous les tournages soient filmés dans des environnements sûrs, avec des équipes respectueuses et formées aux questions de consentement.

C. Les limites de la représentation et du consentement

Les limites de la représentation et du consentement dans l’industrie pornographique sont souvent un sujet de débat éthique. Les œuvres produites doivent être examinées pour déterminer si elles respectent la dignité des individus représentés. Dans certains cas, ce qui peut sembler être un consentement clair peut être en réalité le résultat de pressions ou de circonstances coercitives. Cela soulève des questions sur la nature du consentement dans un environnement où les acteurs peuvent se sentir obligés d’accepter des scénarios ou des représentations qui ne leur conviennent pas.

De plus, la notion de représentation peut également être problématique. Les stéréotypes raciaux, de genre et d’orientation sexuelle sont souvent amplifiés dans le contenu pornographique, ce qui peut renforcer des préjugés et des idées fausses sur certaines communautés. Les acteurs qui choisissent de participer à ces productions peuvent se retrouver à perpétuer des narratifs dégradants, ce qui soulève la question de la responsabilité éthique des producteurs et des scénaristes. Les décisions judiciaires sur ces questions ont mis en lumière la nécessité d’une approche nuancée qui considère à la fois les droits des producteurs et ceux des acteurs. Les tribunaux ont souvent statué que le consentement ne peut pas être considéré comme absolu si le contenu produit est intrinsèquement dégradant ou s’il porte atteinte à la dignité des personnes impliquées. Ce point de vue reconnaît que le contexte dans lequel le consentement est donné est tout aussi important que le consentement lui-même.

D. La responsabilité des plateformes de diffusion

La responsabilité des plateformes de diffusion en ligne est un élément fondamental dans la protection du droit à l’image dans l’industrie pornographique. Les sites qui hébergent et diffusent du contenu pornographique doivent être vigilants dans le contrôle de ce qui est publié. Cela inclut l’instauration de systèmes robustes de vérification du consentement, afin de garantir que tout contenu diffusé a été produit légalement et avec l’accord explicite des personnes représentées.

Les plateformes doivent également mettre en place des mécanismes permettant aux acteurs de signaler les violations de leur droit à l’image. Ces systèmes doivent être accessibles et efficaces, permettant un retrait rapide du contenu en cas de plainte. De nombreuses plateformes ont commencé à adopter des politiques proactives pour protéger les droits des acteurs, mais des lacunes persistent. Les acteurs peuvent se retrouver dans des situations où leur image est utilisée sans leur consentement, et les recours peuvent être longs et compliqués.

En outre, il est crucial que les plateformes prennent conscience de leur rôle en tant que médiateurs dans la diffusion de contenu. Elles doivent agir de manière responsable en refusant de promouvoir des contenus qui exploitent ou dégradent les individus. Cela nécessite une vigilance continue et une volonté de repenser les modèles commerciaux qui reposent souvent sur l’exploitation des acteurs et des actrices.

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Sources :

  1. Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 2 juin 2021, 20-13.753, Publié au bulletin – Légifrance
  2. Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 15 janvier 2015, 13-25.634, Publié au bulletin – Légifrance
  3. Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 20 février 2001, 98-23.471, Publié au bulletin – Légifrance
  4. Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 29 mars 2017, 15-28.813, Publié au bulletin – Légifrance
  5. Comprendre le RGPD | CNIL

Droit d’auteur et partage

L’arrivée d’internet a bouleversé le droit d’auteur, notamment grâce à la fluidité des échanges que permet internet. En effet, est apparue depuis quelques années « les boutons de partage » particulièrement mise en place sur les réseaux sociaux ceux-ci permettant la transmission de données par les internautes.

Les fonctionnalités des sites internet n’ont cessé de s’accroitre au fil des années.

Or l’ouverture au numérique de la publication d’œuvresprotégées par le droit d’auteur a rendu nécessaire une confrontation entre les droits de propriété intellectuelle et la possibilité d’échanger des données via internet.

En effet la fluidité résultant de la dématérialisation pousse à se poser la question de savoir comment adapter le droit d’auteur à ces nouveaux moyens de communication et de transmission.

Dans les pays de copyright et notamment aux États-Unis les exceptions aux droits des auteurs sont, par le biais de la notion defair use, traditionnellement entendues de manière large par faveur pour les utilisateurs.

A l’inverse en droit français ce sont les prérogatives des auteurs qui sont définies de manière large. L’essor de l’internet a ainsi suscité des pressions dans le sens d’une augmentation des droits des usagers au détriment de ceux des auteurs.

Nous n’analyserons pas ici le cas d’œuvres numérisées mises en ligne sans le consentement de leur auteur, qui a fait l’objet d’une jurisprudence ayant précisé les règles applicables.

Toutefois le problème reste posé concernant l’utilisation des boutons de partage présents sur de nombreux sites internet.

 

I. Le partage confronté au droit d’auteur

A ) Le mécanisme du bouton de partage

Un bouton de partage a pour but de faciliter le « bookmarquage » ou le « sharing » des articles, ou plus généralement de toute sorte de donnée, sur les réseaux sociaux.

C’est ainsi une façon d’améliorer la visibilité de ces articles et d’augmenter leur influence.

Le bouton de partage est une fonctionnalité d’un site internet, mis en place par le titulaire du site lui-même, vous permettant de partager les informations contenues dans le site sur les réseaux sociaux.

Ainsi c’est l’auteur lui-même qui rend possible, en mettant à disposition ce bouton de partage, la transmission des données sur les réseaux sociaux.

C’est sur Facebook qu’ont été lancés les boutons liés à la recommandation sociale tels que « J’aime » ou« Je partage ». Aujourd’hui, ces boutons sont présents sur un grand nombre de sites, de blog ou de plateformes interactives.

Les deux réseaux sociaux les plus utilisateurs de ce type de mécanisme sont Facebook et Twitter.

B) Confrontation avec le droit d’auteur

L’auteur d’une œuvre de l’esprit dispose en premier lieu de droits patrimoniaux sur son œuvre, il s’agit des droits de représentation, de reproduction et du droit de suite.

Il est admis que la mise à disposition en ligne des œuvres de l’esprit est soumise aux règles régissant les droits de l’auteur sur son œuvre.

Or en vertu de l’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droits est illicite ».(1)

Le droit de reproduction de l’auteur lui permet ainsi de s’opposer à « toute fixation matérielle de l’œuvre par tout procédés qui permettent de la communiquer au public de manière indirecte » (article L122-3 alinéa 1 CPI).(2)

En outre l’acte de reproduction peut se réaliser y compris en cas de changement de support.

Ainsi dès 1985 la Cour de cassation a reconnu par exemple que l’apparition d’un tableau dans une publicité constitue une reproduction illicite et donc une contrefaçon du droit d’auteur (Cour cass, 15 octobre 1985).(3)

Il est donc clair que si vous reproduisez sur un site internet une œuvre sans le consentement de l’auteur, cette reproduction sera jugée illicite et vous serez donc contrefacteur.

La réponse est clairement posée par la jurisprudence depuis 1985dans cette hypothèse, mais lorsque la reproduction a été consentie par le mécanisme du bouton de partage l’analyse se fonde non plus sur le droit de reproduction mais sur la titularité des droits d’auteur.

 

II. Application des principes classiques du droit d’auteur

A) Référence aux droits moraux de l’auteur et à la titularité de l’œuvre

Lorsqu’un média en ligne intègre à son site un bouton de partage, non seulement il consent à la diffusion de l’article mais en plus il l’encourage.

On ne peut cependant pas parler de cession de droit d’auteur car une cession nécessite un formalisme particulier et notamment la rédaction d’un contrat.

Dans un arrêt en date du 5 décembre 2023 (CA Rennes, 1re ch., 5 déc. 2023, no 22/04884), la cour d’appel de Rennes a jugé que n’emporte pas cession des droits d’auteur des photographies, la cession du fonds de commerce comportant un fonds photographique constitué par des plaques de verre et négatifs. (9)

Malgré le fait qu’il rende possible le partage l’article, et donc que le consentement à la reproduction soit avéré, l’auteur demeure titulaire des droits moraux sur son œuvre (article L121-1 CPI).

Les droits moraux de l’auteur implique notamment le droit au respect de l’œuvre et le droit à la paternité.(4)

En vertu de ces droits moraux l’auteur pourra, malgré le fait qu’il ait consenti à la reproduction grâce au bouton de partage, agir sur le fondement d’une atteinte à son droit moral.

Concernant le droit au respect de l’œuvre cela permet à l’auteur de s’opposer à une utilisation de son œuvre dans un contexte qui porte atteinte à son esprit même en l’absence de toute modification de l’œuvre (CA Paris, 7 avril 1994).

A titre d’exemple de méconnaissance au droit au respect de l’œuvre on peut citer le fait d’inclure l’œuvre sur une page contenant d’autres œuvres de moins bonne qualité, ou provenant d’auteurs différents aux opinions radicalement opposées.

Si l’auteur estime que le contexte dans lequel vous intégrer son œuvre grâce au partage la déprécie, il peut exiger la fin de l’atteinte portée à l’esprit de son œuvre par un retrait de la publication.

Dans un arrêt en date du 14 septembre 2022, la Cour d’appel de Paris (CA Paris, 5-1, 14 sept. 2022, no 20/13716, Sté Lobster Films c/ M. T.) a jugé que ne porte pas atteinte au droit au respect de l’œuvre, l’utilisation d’extraits d’une musique pour la sonorisation d’une publicité. (10)

De plus le droit à la paternité permet à l’auteur de revendiquer à tout moment la mention de son nom et de ses qualités dans le cadre de votre publication.

Ainsi le meilleur moyen d’éviter une action sur le fondement d’une atteinte au droit à la paternité de l’œuvre est de toujours préciser le nom de l’auteur lorsque vous partager un article sur les réseaux sociaux.

Concernant l’hypothèse où vous rajoutez un contenu original à l’œuvre première dont vous avez bénéficié du partage.(5)

Dans ce cas ce sont les règles classiques de titularité des droits d’auteurs qui s’appliquent.

En vertu de l’article L 113-2 CPI on parle d’œuvre composite lorsqu’une œuvre nouvelle a été créée par l’incorporation d’une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de l’œuvre première.(6)

Certes vous serez alors l’auteur de l’œuvre composite mais sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre préexistante (article L 113-4 CPI).(7)

L’autorisation de l’auteur de l’œuvre originaire est donc obligatoire, sauf si cette dernière est tombée dans le domaine public.

Si vous souhaiter rajouter un contenu original et ainsi être l’auteur d’une œuvre composite, il vous faudra donc impérativement obtenir le consentement de l’auteur premier, à défaut vous risquerez des poursuites.

En outre, sachez que dans ce cas aussi vous devez respecter le droit moral de l’auteur de l’œuvre première.

Dans un arrêt du 14 décembre 2021 (CA Paris, pôle 5, ch. 1, 14 déc. 2021, no 19/12865) , la cour d’appel de Paris a jugé que l’appréciation des atteintes portées au droit moral d’auteur d’œuvres musicales, doit se faire en tenant compte de la liberté de l’auteur du spectacle incorporant ces dernières comme éléments de sonorisation. (11)

B) une vigilance nécessaire de la part des internautes

Beaucoup d’internautes pensent être à l’abri de poursuite du fait de la notoriété et de l’utilisation mondiale des divers réseaux sociaux.

Cependant sachez que ces réseaux sociaux, dans le but d’échapper aux poursuites, ont habilement prévu des limitations de leur responsabilité dans leurs conditions générales d’utilisation.

Il est ainsi stipulé dans la plupart des conditions d’utilisations des réseaux sociaux que les internautes sont seuls responsables des atteintes portées aux droits de propriété intellectuelle.

Comme vous avez adhéré aux conditions générales d’utilisations lors de votre inscription à ces réseaux, vous ne pourrez pas invoquer votre bonne foi consistant en la méconnaissance de ces conditions.

Les réseaux n’ont, eux, qu’une obligation de contrôle du contenu, facilement respectée.

A titre d’exemple voici un extrait des conditions générales d’utilisation du réseau social Facebook : « Vous ne publierez pas de contenu et vous n’entreprendrez rien sur Facebook qui pourrait enfreindre les droits d’autrui ou autrement enfreindre la loi… Pour le contenu protégé par les droits de propriété intellectuelle, comme les photos ou vidéos (« propriété intellectuelle »), vous nous donnez spécifiquement la permission suivante, conformément à vos paramètres de confidentialité et paramètres d’applications : vous nous accordez une licence non-exclusive, transférable, sous-licenciable, sans redevance et mondiale ».

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SOURCES

  1. Article L122-4 du CPI https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006278911
  2. Article L122-3 alinéa 1 du CPI https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006278907
  3. Cour de cassation, Cambre civile 1, 15 octobre 1985, 84-12.291 https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007015591
  4. Article L121-1 du CPI https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006278891
  5. CA Paris, 7 avril 1994 https://rida-ca2.ideesculture.fr/index.php/Detail/objects/164-CJP_FR
  6. Article L113-2 du CPI https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006278882/
  7. Article L113-4 du CPI https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006278884
  8. TJ Paris, 3e, 31 janv. 2024, no20/03574, OGF c/ SACEM et SPRE https://www.doctrine.fr/d/TJ/Paris/2024/TJP4AE0C7316EFD29EB5C4B
  9. CA Rennes, 1re, 5 déc. 2023, no22/04884 https://www.doctrine.fr/d/CA/Rennes/2023/CAP5A59B35327F02860B2C4
  10. CA Paris, 5-1, 14 sept. 2022, no20/13716, Sté Lobster Films c/ M. T. https://www.dalloz.fr/documentation/Document?id=CA_PARIS_2022-09-14_2013716
  11. CA Paris, pôle 5, ch. 1, 14 déc. 2021, no19/12865 https://www.nomosparis.com/la-sonorisation-dun-spectacle-musical-quels-droits-en-jeu/
  12. conc., déc., 12 juill. 2021, no21-D-17 https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/decision/relative-au-respect-des-injonctions-prononcees-lencontre-de-google-dans-la-decision-ndeg

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LA PROTECTION D’UNE APPLICATION MOBILE

Chaque jour, des milliers d’applications sont créées afin de satisfaire les besoins et les plaisirs des mobinautes. En effet, téléphones mobiles et tablettes sont aujourd’hui devenus des accessoires indispensables des consommateurs et les applications proposées étendent considérablement le champ des possibles. Les acteurs de tous les secteurs d’activité confondus ont bien compris la demande et ne cessent de se conformer au marché pour bénéficier de l’intérêt économique que présente ce nouvel outil de communication performant. Mais quid du cadre juridique applicable à la protection d’une application mobile ?

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Tout d’abord, une application mobile, qui est par définition adaptée au format mobile, est un logiciel téléchargeable et exécutable sur des téléphones intelligents dits « smartphones », ou sur d’autres appareils mobiles tels que les tablettes électroniques que sont par exemple les iPads et les iPod Touch. Une telle application peut être installée sur l’appareil dès sa conception (on parlera alors d’applications « natives »), ou bien, si l’appareil le permet, téléchargée par l’utilisateur lui-même via une boutique en ligne telle que le Play Store des appareils Google ou l’App Store chez iOS qui cumuleraient 175 milliards d’applications téléchargées en 2017, nombre qui ne cesse d’augmenter chaque année.


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La France a par ailleurs su s’adapter rapidement en matière d’applications. Si elle disposait déjà d’outils nationaux comme le minitel qui, s’il n’est pas un objet mobile, fonctionnait déjà sur la base d’applications, elle a vu naître ses premières applications mobiles dès les années 90, faisant d’elle une des sociétés dites « numérisées ».

C’est véritablement au tournant des années 2000 que les applications mobiles ont connu leur essor, lorsque des entreprises célèbres comme Apple en ont fait un outil marketing identitaire fort, axant leurs produits sur cette « interopérabilité » des services. Dès lors, il importe de prévoir une protection efficace pour les applications mobiles afin d’encadrer les pratiques de ce marché en plein essor.

Parmi les applications mobiles, plusieurs types existent. Certaines sont gratuites, auquel cas les créateurs se rémunèrent grâce à la publicité et aux achats « in-app » alors que d’autres sont payantes.

La Commission européenne a condamné Apple à une amende de plus de 1,8 milliard pour avoir abusé de sa position dominante sur le marché de la distribution d’applications de diffusion de musique en continu auprès des utilisateurs d’iPhone et d’iPad. (7)

D’autres entreprises, dans le domaine du jeu vidéo mobile, adoptent le modèle du « free-to-play » qui consiste à proposer une application mobile de jeu au téléchargement gratuit, mais proposant, au sein même de l’application, du contenu additionnel facturé pour quelques euros (on parle dès lors de « micro-paiements »).

Cette pratique, tout comme le modèle du « pay-to-win » (qui pousse à l’excès le concept en proposant des achats presque « nécessaires » à la poursuite des objectifs proposés par le jeu), sont des systèmes économiques extrêmement rentables pour ces entreprises.

En matière de revenus et à titre d’exemple, l’application gratuite Candy Crush Saga (avec ses options payantes) générerait à son heure de gloire un revenu de plus de 600 000 dollars par jour.

Malgré tout cela, selon les données récoltées par l’entreprise Sensor Tower, en 2019 l’application mobile la plus rentable pour ses créateurs ne serait pas un jeu, mais bel et bien l’application de rencontre Tinder enregistrant environ 261 millions de dollars de revenus au premier trimestre 2019, devant.

Concomitamment avec l’explosion des ventes de smartphones, de plus en plus d’applications mobiles sont téléchargées. Selon le cabinet d’analyse IDC, les Smartphones avoisineraient les 65 % du total des mobiles en 2017 avec 1,5 milliard d’unités dans le monde. L’avantage le plus considérable de ces appareils est leur capacité à communiquer, à envoyer et à transmettre des fichiers sur Internet par les réseaux 3 G, 4 G et désormais 5 G, si bien qu’en 2019, 53 % des pages web sont consultées depuis un smartphone, contre 44 % depuis un ordinateur selon les données de l’entreprise StatCounter.

La plupart des applications nécessitent une connexion Internet (réseaux sociaux, GPS, navigateur, etc.) pour fonctionner alors que d’autres, telles qu’une calculatrice, un carnet de contacts, ou une boussole, vont œuvrer en toute autonomie.

Une application mobile est proposée par un « éditeur » (le concepteur) pour un « utilisateur », le plus souvent grâce à un « intermédiaire » ou « fournisseur ». L’éditeur peut également développer pour le compte d’un tiers, notamment pour une société souhaitant distribuer une nouvelle application professionnelle, ou pour le compte de son employeur dans le cadre d’un contrat de travail.

Les applications mobiles s’apparentant à des logiciels sont soumises à des règles de droit et notamment au droit de la propriété intellectuelle qui encadre les applications mobiles.

En effet, comment protéger ce logiciel mobile ? Et quels sont les éléments de cette application mobile que la propriété intellectuelle protège ?

Ces applications sont régies par un cadre juridique existant avant leur création, mais qui leur est cependant bel et bien applicable. Ainsi, le cas des applications mobiles n’est pas fondamentalement différent de celui des applications informatiques classiques.

Une application pouvant être composée de bases de données, d’éléments logiciels, d’une interface graphique, mais aussi d’autres éléments comme un nom, un logo et des contenus multimédias comme de la musique, nous verrons dans une première partie la protection des bases de données (I), puis, dans une seconde partie, la protection des codes sources, de l’interface graphique et des autres éléments qui peuvent composer une application mobile (II) pour enfin voir dans une troisième partie comment prévenir et réagir en cas d’atteinte aux droits d’un créateur sur son application mobile (III).

I- La protection du contenu des bases de données

Conformément à un projet d’incitation et de récompense de ceux qui, dans la société d’information, n’ont pas créé les informations, mais les collectent et les organisent en bases de données, le législateur européen a, par une directive du 11 mars 1996, créé un droit sui generis pour protéger ces créations (B) bien qu’elles bénéficient d’abord d’une protection par le droit d’auteur (A).

A) La protection par le droit d’auteur des bases de donnée

Les bases de données sont définies dans l’article L112-3 al 2 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) comme étant « un recueil d’œuvres, de données ou d’autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique, et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou par tout autre moyen ». Trois objets de droits se distinguent : premièrement les données brutes ou traitées, deuxièmement le contenant, c’est-à-dire la base elle-même, et troisièmement le contenu informationnel de la base, c’est-à-dire le fait que des données dispersées aient été rassemblées pour ajouter une plus-value.

En vertu de l’article 10 al 2 de l’accord sur les ADPIC, il y a également indépendance des objets protégés : « Cette protection, qui ne s’étendra pas aux données ou éléments eux-mêmes, sera sans préjudice de tout droit d’auteur subsistant pour les données ou éléments eux-mêmes ». En conséquence, plusieurs titulaires peuvent exister. Ainsi, les bases de données qui, par le choix ou la disposition des matières, constituent une création intellectuelle propre à leur auteur sont protégées comme telles par le droit d’auteur. A l’inverse, la Cour de cassation, par deux jugements du 22 septembre 2011 (5) et du 14 novembre 2013 (6), a estimé qu’un logiciel issu d’une « logique automatique et contraignante » ne résultera pas de « choix libres et créatifs de son auteur » et ne sera pas protégé par le droit d’auteur.

L’objet de la protection se situe dans l’architecture de la base à condition qu’elle soit originale par le choix ou la disposition des matières. Les titulaires de cette protection peuvent être autant la personne physique qui a créé l’application, que la personne morale. En effet, certaines applications constituent des œuvres complexes et peuvent être jugées comme des œuvres de collaboration (comme l’application Instagram) ou des œuvres collectives. L’auteur va ainsi pouvoir interdire aux tiers de reproduire la structure de la base. Cependant, on peut constater que les concurrents sont souvent bien plus intéressés par le contenu de la base que par la structure, d’où l’existence d’une protection complémentaire par un droit sui generis.

Dans un arrêt en date du 22 décembre 2023, le tribunal judiciaire de Paris (TJ Paris, 3e ch., 22 déc. 2023, no 22/03126) a précisé que ne confère pas la qualité statut de producteur de bases de données, la réalisation d’investissements pour développer un logiciel associé, à moins que ces investissements ne soient directement liés au contenu des bases, créés par les utilisateurs du logiciel. (8)

B) La protection des bases de données par un droit sui generis

Conformément à l’article L341-1 du CPI, l’objectif de la protection sui generis des applications mobiles est d’accorder un retour sur investissement en protégeant le contenu de la base c’est-à-dire le rassemblement des données. Sera titulaire du droit des bases de données le fabricant, c’est-à-dire celui qui a eu l’initiative du projet, ou bien le producteur, c’est-à-dire celui qui supporte le risque des investissements et qui peut être différent du créateur.

Pour qu’il y ait protection, il faut faire preuve d’un investissement substantiel d’un point de vue qualitatif ou quantitatif. Là où l’appréciation quantitative fait référence à des moyens chiffrables, l’appréciation qualitative fait quant à elle référence à des efforts non quantifiables tels qu’un effort intellectuel ou une dépense d’énergie conformément à la décision de l’ancienne Cour de justice des Communautés européennes du 9 novembre 2004, dans l’affaire The British Horseracing Boar.

Ainsi, le titulaire du droit se verra la possibilité d’interdire l’extraction ou la réutilisation de la totalité ou d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu de la base ou l’extraction ou la réutilisation répétée et systématique de parties non substantielles qui causent un préjudice au producteur. La durée de protection est de 15 ans à compter de l’achèvement de la base, mais tout investissement substantiel fait repartir le délai. Par ailleurs, ces droits sui generis naissent sans aucune formalité de dépôt.

Au demeurant, il convient d’envisager la mise en place de procédures simples visant à constituer des moyens de preuve dans le cas où il serait nécessaire de reconnaître un droit d’auteur ou des droits de producteurs de base de données (enveloppe Soleau, services de l’APP, dépôt auprès d’une société d’auteurs…)

Dans un arrêt en date du 5 octobre 2022 (Cass. 1re civ., 5 oct. 2022, no 21-16307), la première chambre civile a précisé la possibilité pour un producteur de données d’interjeter l’appel sur la base d’une sous-base de données à condition que les investissements concernent l’obtention, la vérification et la présentation du contenu de cette sous-base, et ce, contre toute personne ayant extrait l’intégralité des données de la sous-base. (9)

II- La protection des codes sources, de l’interface graphique et du reste

À la base de toutes applications se trouve un logiciel dont l’exécution d’un code source assure le bon fonctionnement de l’application.  L’utilisateur interagit avec le logiciel par le biais d’une interface graphique se décomposant en divers pictogrammes. Une première protection concernera donc ces différents éléments (A), mais également d’autres éléments tels le logo, le nom ou les fichiers multimédias composant l’application (B).

A) La protection des codes sources et de l’interface graphique

Le droit de la propriété intellectuelle protège par le droit d’auteur « les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire ». Les codes sources sont ainsi susceptibles de pouvoir en bénéficier : « Les programmes en langage source sont différents, leurs structures diffèrent ainsi que leurs styles de programmation ».

Cependant, le critère d’originalité est requis pour que la protection soit effective. Ce critère a été défini par un arrêt d’assemblée plénière du 7 mars 1986 de la façon suivante : « leur auteur avait fait preuve d’un effort personnalisé allant au-delà de la simple mise en œuvre d’une logique automatique et contraignante… la matérialisation de cet effort résidait dans une structure individualisée… les logiciels conçus par M. Pachot portaient la marque de son apport intellectuel… »

Bien qu’ils soient limités, la protection par le droit d’auteur confère des droits patrimoniaux et moraux. La titularité de ces droits de propriété intellectuelle sur une œuvre de commande n’est cependant pas transmise par simple paiement des prestations par un utilisateur. En d’autres termes, sans précision écrite, la cession de droits de propriété intellectuelle n’est pas effective lors de l’achat du produit par un client.

C’est l’article L131-3 al 1 du CPI qui fixe les conditions de cession des droits de propriété intellectuelle. Dans un contrat de travail, c’est l’employeur qui hérite initialement des droits d’auteur selon l’article L113-9 du CPI, le créateur n’étant donc en principe pas le détenteur de ces derniers. Il est toutefois nécessaire de prévoir des conditions de concession de droits de propriété intellectuelle à l’employeur concernant les autres éléments tels que le contenu éditorial, les musiques et vidéos, etc…

Enfin, une protection par brevet est envisageable pour les codes sources dans le cas où l’application finale aboutit à l’émergence de caractéristiques techniques nouvelles pour un effet technique particulier.

Un arrêt du 22 décembre 2010 de la CJUE a consacré la privation pour l’interface graphique d’une protection par le droit d’auteur spécifique aux logiciels sans pour autant qu’aucune forme de droit d’auteur ne puisse la protéger. Cette solution avait déjà été admise par les juridictions françaises dans un arrêt de la 1ère chambre civile de la Cour de cassation en date du 27 avril 2004. L’apport de la Cour de justice de l’Union européenne a permis de définir l’interface graphique comme un élément du logiciel permettant aux utilisateurs d’user des différentes fonctionnalités du programme. C’est cela qui justifie alors l’impossibilité d’appliquer le droit d’auteur spécifique aux logiciels à l’interface graphique permettant simplement une utilisation du logiciel.

Les interfaces graphiques peuvent tout de même bénéficier d’une protection par le droit commun du droit d’auteur dès lors que le critère d’originalité est rempli. En pratique, cette décision n’a eu d’impact que sur les questions de titularité des droits. Des brevets sur peuvent également être accordés aux interfaces graphiques comme cela a pu être le cas pour celles des applications natives (e-mails, messages, appareil photo, etc…) de la marque Apple.

Le paquet « dessins et modèles » a été adopté le 14 mars 2024 par le Parlement européen. Il inclut dans son champ d’application la protection des interfaces graphiques. (10)

B) La protection des autres éléments

Sous réserve d’originalité, le nom et le logo d’une application mobile peuvent bénéficier d’une protection par le droit d’auteur. À cela s’ajoute la possibilité de faire un dépôt à titre de marque auprès de l’INPI afin de pouvoir opérer une distinction entre les produits ou services du déposant et ceux de potentiels concurrents dans le cadre d’une exploitation commerciale de ceux-ci.

À noter que la protection des musiques et autres contenus multimédias d’une application tombe aussi sous la protection du droit d’auteur si la condition d’originalité est remplie.

III- La prévention et sanction d’atteintes à une application mobile

En pratique, il peut être judicieux de se prémunir contre de potentielles atteintes (A), mais il est tout aussi utile de savoir comment réagir en cas d’atteintes à ses droits de propriété intellectuelle sur une application mobile (B)

A) La prévention contre les atteintes

Bien que le dépôt d’une application mobile ne soit pas nécessaire pour protéger par le droit d’auteur les différents éléments composant l’application, il est conseillé en cas de contrefaçon de la création d’effectuer un dépôt « probatoire » permettant plus facilement d’apporter la preuve des droits de l’auteur.

Effectué auprès de l’Agence pour la Protection des Programmes (APP), ce dépôt permet de revendiquer des droits et de préparer la preuve de sa titularité sur ces droits, ce qui est une prévention de taille pour anticiper de potentiels problèmes probatoires, notamment concernant la date et la paternité de la création.

Tous les éléments, protégeables ou non par le droit d’auteur, composant une application mobile peuvent être déposés auprès de l’APP du moment qu’ils ont une valeur économique pour l’éditeur (le cahier des charges, le business plan ou encore la documentation marketing et commerciale par exemple).

Seul le titulaire de droits doit déposer l’application mobile à l’APP, mais il est également possible de déposer en « co-titularité » en cas de pluralité d’auteurs.

B) Faire sanctionner les atteintes

En cas d’atteinte à ses droits de propriété intellectuelle, le titulaire des droits sur une application mobile peut agir sur le fondement de la contrefaçon, de la concurrence déloyale et/ou du parasitisme qui sont des pratiques déloyales ou anticoncurrentielles contraires au droit des affaires, aux usages et à l’éthique du commerce.

En effet, dans un jugement du TGI de Paris en date du 30 juin 2017, un éditeur, la société Prizer, a été condamné au paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts à son concurrent AppiMédia en réparation du préjudice résultant de la concurrence déloyale de s’être largement inspiré de l’application d’AppiMédia.

En l’espèce, la juridiction a estimé qu’avait été repris « un procédé certes différent, mais assurant la gratuité du jeu et le financement de la cagnotte, une même fréquence de loteries (par jour, semaine, mois et spéciale), une ergonomie proche, traduisant une démarche volontaire afin de ressembler à l’application développée initialement et caractérisant un comportement fautif contraire aux usages des affaires et générant un risque de confusion dans l’esprit de l’internaute, qui sera amené à associer les applications concurrentes ».

Conclusion :

L’obtention d’une protection par brevet nécessite une formalité de dépôt devant intervenir avant toute divulgation de l’invention (même sur une plateforme de distribution). Bien que les taxes de dépôt d’un brevet s’avèrent non négligeables, le brevet peut être intéressant pour sa portée de protection plus large que celle du droit d’auteur. Le brevet protégeant une combinaison technique qui permet de résoudre un problème technique, l’expression de cette combinaison est souvent généralisée de façon à couvrir différents modes de mise en œuvre.

Dans un arrêt en date du 17 mai 2023 (Cass. com., 17 mai 2023, no 19-25007), la chambre commerciale précise que la simple publication d’une demande de brevet ne libère pas le débiteur de son obligation de confidentialité concernant les éléments non divulgués par cette publication. (11)

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Sources:

  1. « Propriété intellectuelle et applications mobiles » https://www.marketing-professionnel.fr/tribune-libre/marketing-mobile-propriete-intellectuelle-applications-mobiles-04-2011.html
  2. Applications mobiles : du développement à la distribution, les droits et obligations du développeur https://www.journaldunet.com/ebusiness/internet-mobile/1102143-applications-mobiles-du-developpement-a-la-distribution-les-droits-et-obligations-du-developpeur/
  3. La protection juridique d’une application mobile https://www.app.asso.fr/centre-information/base-de-connaissances/les-grands-themes/applications-mobiles/focus-la-protection-juridique-dune-application-mobile
  4. TGI Paris, 3èmechambre, 3ème section, 30 juin 2017, Appimédia / Prizer https://www.doctrine.fr/d/TGI/Paris/2017/KFV28F65C5A401FD38F57CD
  5. Cour de cassation, 1ère chambre civile, 22 septembre 2011, 09-71.337 https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000024589105
  6. Cour de cassation, 1èrechambre civile, 14 novembre 2013, 12-20.687 https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000028205619/
  7. Commission européenne 4 mars 2024, https://www-labase-lextenso-fr.ezpum.scdi-montpellier.fr/node/6687?em=apple&source=4
  8. TJ Paris, 3e, 22 déc. 2023, no22/03126  https://www.doctrine.fr/d/TJ/Paris/2023/TJP0A6AAE143F514B659B72
  9. 1re civ., 5 oct. 2022, no21-16307 https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000046389113
  10. Paquet dessins et modèles https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2024-0165_FR.html
  11. com., 17 mai 2023, no19-25007, https://www-labase-lextenso-fr.ezpum.scdi-montpellier.fr/jurisprudence/CC-17052023-19_25007

 

Différence entre injure, diffamation et cyberharcélement

L’ensemble des infractions pénales commises sur la toile sont généralement des infractions déjà réprimées par les articles du Code pénal dont l’application a été étendue à la cybercriminalité. Tel est le cas des infractions de presse telles que l’injure et la diffamation réprimées par la loi de presse du 29 juillet 1881.

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Toutefois, un délit général de cyberharcélement a été créé par la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes  et qui incrimine « le fait, par tout moyen, de soumettre une personne à des humiliations ou à des intimidations répétées, ou de porter atteinte de façon répétée à sa vie privée » par le biais de « nouvelles technologies de communication et d’information » et prévoit plusieurs circonstances aggravantes.

Dans un arrêt en date du 5 septembre 2023, la chambre criminelle a jugé que lorsque l’auteur de propos diffamatoires estime qu’il est de bonne foi, le juge doit rechercher si les propos s’inscrivent dans un débat d’intérêt général et reposent sur une base factuelle suffisante. Ce n’est qu’après vérification de ces conditions qu’il peut décider d’apprécier moins strictement les critères de l’absence d’animosité personnelle et de la prudence et mesure dans l’expression. (8)

Ce délit de cyberharcèlement (I) peut être assimilé légitimement aux délits de diffamation ou d’injures (II) parfois difficiles à distinguer.

I- Le cyberharcèlement :

A- les victimes de cyberharcèlement :

Toute personne, peu importe son sexe ou son âge, peut se retrouver victime de cyberharcèlement. Ce danger répandu sur internet ne se limite pas aux réseaux sociaux. Ce phénomène touche également les forums, chats, courriers électroniques, mais aussi les jeux ce qui étend le cercle des victimes.

Ce qui caractérise le cyberharcèlement, c’est la répétition. Ces victimes se retrouvent tout comme en matière de harcèlement confrontées presque quotidiennement à ces faits, mais ce type d’harcèlement est, dans la majorité des cas, totalement anonyme. Les victimes ne peuvent pas mettre de nom ni de visage sur le malfaiteur et ce dernier peut continuer ses agissements en toute impunité. Et parfois, quand bien même l’harcèlement prend fin, les actes peuvent demeurer en ligne. Pourtant, il existe bien une répression à ces agissements qui, selon l’article 222-33-2-2 du code pénal, est de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende (1).


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Le but du cyberviolent est l’humiliation, l’intimidation de la victime. Pour atteindre son but, le cyberharceleur peut procéder par divers moyens.

La loi du 21 mai 2024 (LOI n° 2024-449 du 21 mai 2024 visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique) visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique a notamment pour objectif d’améliorer la cybersécurité. Une peine de bannissement des réseaux pour les cyberharcèlements a été institué à cet effet ainsi qu’un filtre de cybersécurité anti-arnaque à destination du grand public. (9)

B- les différentes formes de cyberharcèlement :

Les cyberharceleurs ne manquent pas de moyens pour atteindre leur but et ainsi provoquer une angoisse chez la victime tout en portant atteinte à son bien-être.

Il y a d’abord la pratique du « Flaming » qui consiste à intimider la victime via de brefs messages d’insultes, de moqueries ou encore de menaces. Cette pratique est très répondue sur les réseaux sociaux par le biais de la messagerie instantanée permettant ainsi le partage de ces intimidations entre plusieurs personnes.

Ensuite, la « Dénigration » consiste en une propagation de rumeurs afin de nuire à la réputation de la personne et en faire une «Persona non grata ». Cela peut se produire aussi par plusieurs messages incitant à la haine via un groupe ou une page sur les réseaux sociaux.

Existe aussi ce qu’on appelle le « Happy slapping » qui consiste à filmer l’agression, l’humiliation ou encore l’abus sexuel infligé à une victime déterminée puis partager la vidéo via la toile. Cette liste n’est pas exhaustive, il existe d’autres formes de cyberharcèlement comme la publication d’une photo ou d’une vidéo montrant la victime en mauvaise posture ou encore « sexting », usurpation d’identité digitale, piratages de comptes….

D’ailleurs, la CNIL a dressé une liste de comportements constitutifs de cyberharcèlement tels que le lynchage en groupe puis publication de la vidéo sur un site ( appelé également le Happy slapping), la propagation de rumeurs par téléphone ou sur internet, la création d’une page, d’un groupe ou d’un faux profil à l’encontre de la personne, la publication de photographies sexuellement explicites ou humiliantes, les messages menaçants, insulte via messagerie privée et la commande de biens et services pour la victime grâce à ses informations personnelles.

Le cyberharcèlement nécessite la répétition des faits. Cependant d’autres délits tels que l’injure ou la diffamation peuvent être incrimés alors qu’ils n’ont eu lieu qu’une seule fois.

 

II- Distinction entre la diffamation et l’injure :

A. La diffamation

La diffamation est définie à l’article 29 alinéa 1 de la loi de presse du 29 juillet 1881 qui dispose que « Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. ».

Pour caractériser l’élément matériel de la diffamation, il faut la réunion de deux conditions. La diffamation nécessite d’abord l’imputation d’un fait précis à une personne. La caractérisation de ce fait précis est souvent délicate parce que cela peut être confondu avec une opinion. Ensuite, ce fait doit porter atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne.

L’élément intentionnel est présumé du simple fait de l’existence d’un élément matériel. L’intention de publication suffit donc à caractériser l’élément intentionnel. Nul besoin de prouver l’intention de nuire de l’auteur de l’infraction.

Selon l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881, le délai de prescription de l’action de diffamation est de « trois mois révolus, à compter du jour où les faits auront été commis ». La diffamation étant une infraction instantanée, le point de départ de ce délai est fixé au jour de l’infraction. Cette action nécessite un dépôt de plainte de la victime ou une citation directe devant le tribunal correctionnel.

La diffamation publique qui constitue un délit au sens de l’article 29 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 est passible d’une amende de 12 000€.

Dans un arrêt rendu le 26 mai 2021, la Cour de cassation a apporté des précisions sur les conditions dans lesquelles un prévenu présente sa défense dans la mesure où des poursuites sont engagées à son encontre pour des faits de diffamation publique envers un particulier. Ainsi, la Cour réaffirme que les propos doivent renfermer l’allégation d’un fait précis pour être qualifiés de diffamatoires.

Cependant, une autre forme de diffamation peut aussi constituer une infraction pénale, c’est la diffamation non publique qui constitue une contravention et est passible d’une amende de 38€. La différence réside donc dans l’acte de publication.

Dans un arrêt en date du 1er février 2022 (Cass. crim., 1er févr. 2022, no 21-83124), la chambre criminelle a jugé que si l’élément de publicité fait défaut, les accusations diffamatoires relèvent de la contravention de diffamation non publique, que le juge correctionnel doit examiner. Par conséquent, l’absence de publicité peut entrainer l’irrecevabilité de l’action. (10)

B. L’injure

Selon l’article 29 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881, « Toute expression outrageante, terme de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait est une injure ».

Contrairement à la diffamation, l’injure n’impute pas un fait précis à une personne, mais un terme isolé. Cette distinction n’est pas toujours évidente et dans les cas où les deux infractions sont indivisibles, selon un arrêt de la chambre criminelle du 12 juin 1956, c’est la diffamation qui prévaut.

Comme pour la diffamation, l’élément intentionnel est présumé et l’acte de publication à lui seul suffit à caractériser l’infraction.

Le délai de prescription est le même que pour le délit de diffamation.

Selon l’article 33 al 2, l’injure est « punie d’une amende de 12 000 euros».

Lorsque l’injure est commise à l’encontre d’une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou leur appartenance ethnique, nationale, raciale ou une religieuse, celle-ci est punie d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

La loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a rajouté un alinéa, dans ce même article, disposant que : « Lorsque les faits mentionnés aux troisième et quatrième alinéas du présent article sont commis par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, les peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende ».

Dans un arrêt en date du 26 janvier 2021, (Cass. crim., 26 janv. 2021, no 19-85762,) la chambre criminelle a considéré que lorsqu’on ne peut dissocier des expressions injurieuses poursuivies d’imputations diffamatoires non poursuivies contenues dans le texte qui les renferme, la qualification de diffamation absorbe celle d’injure. (11)

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Sources :

(1)     https://www.cnil.fr/fr/reagir-en-cas-de-harcelement-en-ligne
(2)     Crim., 26 mai 2021, n°20–80.884
(3)    https://www.legifrance.gouv.fr/loda/article_lc/LEGIARTI000043982443/2021-08-26/#LEGIARTI000043982443
(4)http://www.clg-chartreux.ac-aix-marseille.fr/spip/sites/www.clg-chartreux/spip/IMG/pdf/cyber_harcelement.pdf
(5)http://www.20minutes.fr/societe/2010919-20170208-video-cinq-chiffres-cyber-harcelement-france
(6)https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000029334247&cidTexte=LEGITEXT000006070719
(7)http://www.justice.gouv.fr/include_htm/pub/rap_cybercriminalite.pdf
(8)crim., 5 sept. 2023, no22-84763, https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000048059181?page=1&pageSize=10&query=22-84763&searchField=ALL&searchType=ALL&sortValue=DATE_DESC&tab_selection=juri&typePagination=DEFAULT
(9)LOI n° 2024-449 du 21 mai 2024 visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique
(10)https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000049563368
(11)crim., 1erfévr. 2022, no 21-83124 https://www.dalloz.fr/documentation/Document?id=CASS_LIEUVIDE_2022-02-01_2183124
(12)crim., 26 janv. 2021, no19-85762, https://www.courdecassation.fr/en/decision/601427e85b34856017551fd5