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La vie privée, la diffamation et le RGPD dans les groupes privés numériques

À l’heure où les frontières entre réel et virtuel s’estompent, les espaces numériques privés ressemblent à des citadelles fragiles : des lieux où les mots deviennent armes, les données une monnaie d’échange, et l’intimité un idéal menacé. 
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Ces sanctuaires connectés, conçus pour abriter dialogues et solidarités, sont aussi le théâtre de batailles invisibles. Entre les murs cryptés des messageries ou les forums cloîtrés, chaque clic peut libérer des torrents de désinformation, éroder des réputations ou fracturer des vies – le tout sous le regard ambigu de lois aussi nécessaires que perfectibles, comme le RGPD.

La promesse d’un *havre numérique* se fissure face à un paradoxe moderne : comment bâtir la confiance dans un espace où l’anonymat protège autant qu’il corrompt ? Les utilisateurs, en quête d’authenticité, y déposent des fragments de leur identité, ignorant parfois que ces traces échappent à leur contrôle. Les algorithmes, gardiens opaques de ces royaumes, trient, analysent et stockent, tandis que la diffamation prospère dans l’ombre, exploitant les failles d’une gouvernance souvent improvisée.

Le RGPD, bouclier législatif né en 2018, impose une discipline nouvelle : il rappelle que derrière chaque pseudonyme se cache un visage, derrière chaque message, une responsabilité. Mais légiférer sur l’éther numérique revient à sculpter des nuages – les règles peinent à suivre l’évolution des tactiques de contournement. Les modérateurs, sentinelles malgré eux, naviguent entre Charybde et Scylla : supprimer un contenu, c’est risquer l’accusation de censure ; le tolérer, c’est s’exposer à des poursuites.


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L’avenir de ces citadelles dépendra d’une alchimie improbable : marier l’éthique aux lignes de code, l’humain à l’artificiel. L’IA, capable de traquer la haine en temps réel, pourrait-elle incarner un juste équilibre ? Ou deviendra-t-elle l’outil d’une surveillance généralisée, étouffant la spontanéité des échanges ? La réponse exige plus que des innovations techniques : elle nécessite un pacte social redéfini, où droits individuels et bien commun ne seraient plus adversaires, mais alliés face à l’hydre des dérives numériques.

I. La vie privée dans les groupes privés numériques : Un droit fondamental à l’épreuve du numérique

A. Définition et encadrement juridique

La vie privée numérique, un élément essentiel de la dignité humaine, est reconnue comme un droit fondamental par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Ce droit est particulièrement pertinent dans le contexte actuel, où les technologies numériques façonnent les modes de communication et les interactions sociales.

Le Règlement général sur la protection des données (RGPD), entré en vigueur en mai 2018, renforce cette protection en redéfinissant les obligations des plateformes numériques et les droits des utilisateurs en matière de données personnelles.

La vie privée numérique englobe la capacité des individus à contrôler et à gérer leurs données personnelles, qui peuvent inclure une vaste gamme d’informations telles que le nom, l’adresse, l’adresse IP, les photos, les messages et bien d’autres éléments permettant d’identifier une personne. Dans les groupes privés numériques, tels que WhatsApp, Facebook Groups et Discord, la protection de la vie privée prend une importance cruciale, car ces espaces de communication facilitent le partage d’informations sensibles entre membres, souvent considérés comme des cercles de confiance.

Le RGPD impose plusieurs principes fondamentaux qui doivent être respectés par les plateformes. Tout d’abord, le principe de licéité, de loyauté et de transparence exige que les données soient traitées de manière légale et que les utilisateurs soient informés de la manière dont leurs données seront utilisées.

Ce principe requiert également le consentement explicite des utilisateurs avant la collecte de leurs données. Ensuite, le principe de minimisation stipule que seules les données nécessaires à la finalité pour laquelle elles sont collectées peuvent être traitées.

Enfin, le principe de limitation de la conservation impose que les données soient supprimées une fois leur utilisation achevée, afin d’éviter toute utilisation abusive ou non autorisée des informations personnelles. En France, la loi Informatique et Libertés, modifiée en 2018 pour s’aligner sur le RGPD, renforce la protection des données personnelles.

Elle établit des sanctions sévères pour les violations de la vie privée et adapte les procédures de contrôle par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). Ces réglementations visent à garantir que les droits des utilisateurs sont protégés dans un environnement numérique de plus en plus complexe et interconnecté.

B. Les défis de la confidentialité et de la sécurité

Malgré leur désignation de « groupes privés », les groupes numériques ne sont pas à l’abri des risques en matière de confidentialité et de sécurité. Les violations de données peuvent survenir de manière variée et souvent inattendue. Parmi les causes potentielles, on trouve des fuites accidentelles, telles que le partage d’écran lors d’une vidéoconférence ou l’envoi d’informations sensibles à un mauvais destinataire.

De plus, les cyberattaques, qui consistent en des piratages de comptes ou l’interception de messages, représentent une menace sérieuse pour la sécurité des données. Les utilisateurs peuvent également faire face à des abus de la part d’autres membres du groupe, comme la capture d’écran et le partage public d’échanges privés.

Le RGPD exige des plateformes qu’elles mettent en œuvre des mesures techniques et organisationnelles proportionnées pour protéger les données personnelles. Ces mesures doivent être adaptées à la nature des données traitées et aux risques encourus. Parmi ces mesures, le chiffrement de bout en bout est devenu une norme pour les applications de messagerie telles que WhatsApp. Ce processus garantit que seuls les utilisateurs impliqués dans la conversation peuvent accéder au contenu des échanges, rendant impossible l’accès par la plateforme elle-même.

L’authentification à deux facteurs est également un moyen efficace de sécuriser les comptes utilisateurs en ajoutant une couche supplémentaire de protection. De plus, la réalisation d’audits réguliers permet d’identifier les vulnérabilités potentielles et de mettre en œuvre des améliorations nécessaires pour renforcer la sécurité des données.

Un exemple marquant des risques liés à la sécurité des données est la fuite de données survenue en 2021, qui a exposé les informations de 533 millions d’utilisateurs de Facebook, y compris des numéros de téléphone et des informations de profil. Cet incident, bien qu’il ait eu lieu avant l’entrée en vigueur du RGPD, a conduit à de nombreuses plaintes auprès de la CNIL pour manquements à la sécurité.

Il illustre la nécessité d’une vigilance constante et d’un engagement proactif en matière de protection des données, tant pour les plateformes que pour les utilisateurs.

II. La diffamation dans les groupes privés numériques : Un délit aux multiples visages

A. Définition juridique et modalités

La diffamation est définie par l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881, qui stipule qu’elle consiste en toute allégation ou imputation d’un fait précis portant atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne. Dans le contexte des groupes privés numériques, ce délit peut prendre plusieurs formes, ce qui complique la tâche des juristes et des législateurs.

Parmi les manifestations de la diffamation, on trouve les messages textuels contenant des accusations infondées dirigées contre un membre du groupe, le partage de photos ou de vidéos truquées visant à discréditer une personne, et les publications virales de fausses informations relayées, même au sein d’un cercle restreint.

Les groupes privés, bien qu’ils soient souvent perçus comme des espaces de discussion sécurisés, ne permettent pas l’impunité en matière de diffamation. Un cas pratique marquant s’est produit en 2020, lorsque qu’un salarié a été condamné par le tribunal correctionnel de Paris pour avoir diffamé son employeur dans un groupe WhatsApp professionnel.

Les messages dans lesquels il qualifiait l’entreprise de « frauduleuse » ont été jugés diffamatoires, et ce, malgré le caractère privé du groupe. Cette décision souligne l’importance de la responsabilité individuelle même dans des espaces considérés comme privés.

B. Articulation avec le RGPD : Quand la diffamation implique des données personnelles

La question se complique lorsque la diffamation s’appuie sur des données personnelles, par exemple, par la divulgation non consentie d’informations médicales. Dans de telles situations, deux violations distinctes peuvent être engagées : d’une part, une violation pénale, avec des sanctions prévues par la loi de 1881, pouvant atteindre 12 000 euros d’amende ; et d’autre part, une violation du RGPD, qui prohibe le traitement illicite de données sensibles. Les sanctions prévues par l’article 83 du RGPD peuvent aller jusqu’à 20 millions d’euros ou 4 % du chiffre d’affaires mondial de la plateforme concernée, ce qui représente un risque financier considérable pour les entreprises.

Pour illustrer cette problématique, on peut évoquer la situation où un membre d’un groupe Facebook privé publie un document confidentiel révélant l’orientation sexuelle d’un individu. Cette action constitue à la fois un acte de diffamation, si le document contient des accusations fausses, et une violation du RGPD, en raison du traitement de données sensibles sans le consentement de la personne concernée. Les conséquences juridiques peuvent être lourdes pour les individus impliqués, mais également pour les plateformes qui hébergent ces contenus.

III. L’équilibre délicat entre vie privée et lutte contre la diffamation

A. Les outils juridiques pour concilier les deux impératifs

Pour trouver un équilibre entre la protection de la vie privée et la lutte contre la diffamation, plusieurs outils juridiques sont à la disposition des acteurs concernés. Le RGPD, par exemple, offre la possibilité de traiter des données personnelles pour modérer des contenus diffamatoires au titre de l’intérêt légitime, à condition que certaines conditions soient respectées. Cela signifie que les plateformes doivent s’assurer de ne pas collecter de données excessives, en se limitant à l’analyse des messages signalés plutôt qu’à l’ensemble des conversations.

De plus, il est crucial d’informer les utilisateurs de manière transparente sur les politiques de modération mises en place. Le droit à l’oubli, inscrit à l’article 17 du RGPD, constitue un autre outil juridique important. Il permet à une personne qui a été diffamée d’exiger la suppression des données la concernant, y compris dans des groupes privés.

Cependant, le défi reste de taille : la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a souligné que la modération ne doit pas entraver la liberté d’expression. Dans l’arrêt MTE et Index.hu c. Hongrie (2016), la CEDH a jugé que les plateformes ne peuvent être tenues responsables des contenus diffamatoires publiés par des utilisateurs, sauf en cas de négligence dans leur retrait.

B. Bonnes pratiques pour les plateformes

Pour mieux gérer la modération des contenus, les plateformes peuvent adopter plusieurs bonnes pratiques. L’implémentation de mécanismes de signalement simplifiés est essentielle. Cela permet aux utilisateurs de signaler un message qu’ils estiment diffamatoire en quelques clics, rendant le processus rapide et accessible.

De plus, des procédures transparentes doivent être établies pour examiner les signalements dans un délai raisonnable, idéalement sous 24 à 48 heures. Il est également crucial que les plateformes collaborent avec les autorités compétentes. Cela peut inclure la conservation temporaire des données des auteurs en cas d’enquête judiciaire, conformément à l’article 6-1-c du RGPD.

Par exemple, en 2022, Telegram a été amené à fournir à la justice française des données d’utilisateurs impliqués dans des groupes diffusant des contenus de haine. En parallèle, l’utilisation de technologies d’anonymisation, telles que le masquage automatique des noms et des photos dans les signalements, peut servir de protection pour les témoins, encourageant ainsi le signalement d’abus sans crainte de représailles.

IV. Rôles et responsabilités des acteurs : Une chaîne de responsabilité partagée

A. Les plateformes : Garantes de la conformité RGPD

Les plateformes numériques portent une responsabilité significative en matière de conformité au RGPD. Cela inclut la désignation d’un délégué à la protection des données (DPO), une exigence obligatoire pour les grandes entreprises. Le DPO joue un rôle essentiel en conseillant sur la conformité, en assurant la coopération avec la CNIL et en sensibilisant les utilisateurs à leurs droits et à la protection de leurs données.

Par ailleurs, la transparence et l’éducation des utilisateurs sont primordiales. Les plateformes doivent mettre à disposition des guides clairs sur les paramètres de confidentialité et les pratiques recommandées. Par exemple, WhatsApp offre des tutoriels pour aider les utilisateurs à limiter la visibilité de leurs groupes, renforçant ainsi leur sécurité.

En cas de manquement aux obligations de protection des données, des sanctions peuvent être appliquées. En 2023, Meta (Facebook) a été condamné à une amende de 1,2 milliard d’euros par l’Union européenne pour des transferts illégaux de données vers les États-Unis, rappelant ainsi l’importance cruciale du respect des réglementations en matière de protection des données.

B. Les utilisateurs : Acteurs responsables

Les utilisateurs jouent également un rôle actif dans la protection de leur vie privée et dans la lutte contre la diffamation. Ils doivent s’engager à vérifier la véracité des informations avant de les partager, en prenant conscience que la diffusion de fausses informations peut avoir des conséquences graves. Ils doivent également respecter les règles de modération établies dans les groupes afin de maintenir un environnement sain et sécurisé pour tous les membres.

Les utilisateurs disposent de droits importants en vertu du RGPD, tels que le droit d’accès et de rectification, qui leur permet d’obtenir une copie de leurs données ou de les corriger en cas d’inexactitude.

De plus, l’article 20 du RGPD leur confère le droit à la portabilité, c’est-à-dire la possibilité de transférer leurs données vers une autre plateforme. Un exemple concret illustre cette réalité : un utilisateur de LinkedIn a exercé son droit à l’effacement pour faire supprimer des commentaires diffamatoires publiés par un concurrent dans un groupe professionnel. Cette situation souligne l’importance pour les utilisateurs d’être proactifs dans la protection de leurs droits et de leur réputation.

V. Perspectives d’avenir et défis émergents

A. L’intelligence artificielle au service de la modération

L’émergence de l’intelligence artificielle (IA) dans le domaine de la modération des contenus pose de nouvelles questions éthiques et juridiques. Les outils d’IA, tels que les algorithmes de détection de discours haineux, peuvent avoir un impact significatif sur la manière dont les plateformes modèrent les contenus. Cependant, ces outils ne sont pas sans inconvénients.

Les biais algorithmiques peuvent entraîner des erreurs de modération, avec un risque de censure excessive ou, au contraire, de laxisme dans la surveillance des contenus. De plus, il est impératif que les traitements automatisés respectent le principe de licéité et permettent une intervention humaine, comme le stipule l’article 22 du RGPD. Par exemple, en 2021, Twitter a fait face à des critiques pour des erreurs de modération automatisée qui ont conduit à la suppression de contenus légitimes concernant la COVID-19. Cela démontre que, bien que l’IA puisse être un outil puissant pour la modération, elle ne peut pas remplacer le jugement humain et la nuance nécessaires pour évaluer le contexte des communications.

B. Vers un droit européen unifié ?

Les nouvelles réglementations, telles que le Digital Services Act (DSA) et le Digital Markets Act (DMA), qui ont été mises en œuvre en 2023, marquent une étape importante dans la régulation des plateformes numériques.  Ces lois imposent des obligations de transparence, notamment la publication de rapports sur les activités de modération, et introduisent des sanctions accrues pouvant aller jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires mondial pour les manquements aux règles. Ces régulations visent à garantir un niveau élevé de protection des utilisateurs tout en maintenant un équilibre avec la liberté d’expression.

C. Recommandations pour les utilisateurs

À l’ère numérique, il est capital que les utilisateurs adoptent des pratiques prudentes pour protéger leur vie privée dans les groupes numériques. Ils devraient veiller à paramétrer leurs groupes de manière à limiter les ajouts de nouveaux membres à l’approbation des administrateurs, afin de s’assurer que seuls des membres de confiance peuvent accéder aux informations partagées.

De plus, désactiver les options de partage externe, comme les captures d’écran, peut limiter le risque de diffusion non autorisée d’informations sensibles. Une vigilance accrue est également nécessaire. Les utilisateurs devraient envisager d’utiliser des pseudonymes dans des groupes sensibles pour protéger leur identité et signaler immédiatement tout contenu qu’ils jugent diffamatoire ou inapproprié. En étant proactifs et informés, les utilisateurs peuvent contribuer à un environnement numérique plus sûr et respectueux pour tous.

Pour lire une version plus complète de cet article sur la diffamation sur les plateformes, cliquez

Sources:

  1. Droit au respect de la vie privée et familiale – La Convention européenne des droits de l’homme
  2. Le règlement général sur la protection des données – RGPD | CNIL
  3. https://www.cnil.fr/fr/reglement-europeen-protection-donnees/chapitre2#Article5
  4. https://www.cnil.fr/fr/definition/minimisation
  5. https://www.cnil.fr/fr/passer-laction/les-durees-de-conservation-des-donnees
  6. Mesures techniques et organisationnelles liées au RGPD pour protéger les données
  7. Facebook : Tout comprendre à la fuite de données qui concerne 533 millions d’utilisateurs
  8. https://www.cnil.fr/fr/reglement-europeen-protection-donnees/chapitre3#Article17
  9. Commentaires injurieux laissés par les internautes : l’organe d’autorégulation et le portail d’actualités sur Internet propriétaires des sites concernés n’étaient pas responsables – Portal
  10. Numérique : le règlement sur les services numériques entre en vigueur | Ministère de l’Économie des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique

Comment évaluer le juste équilibre entre le droit à un procès équitable et la protection des croyances religieuses lorsqu’une personne se sent attaquée sans être directement visée par des propos publics ?

L’évaluation du juste équilibre entre le droit à un procès équitable et la protection des croyances religieuses lorsque quelqu’un se sent attaqué sans être directement visé par des publics est un défi complexe et délicat dans nos sociétés pluralistes et démocratiques. Il soulève des questions fondamentales sur la défense des libertés individuelles et la nécessité de préserver l’harmonie sociale.
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D’un côté, le droit à un procès équitable est un pilier essentiel de tout système judiciaire démocratique. Il garantit que chaque individu a le droit d’être entendu de manière équitable et impartiale, d’avoir accès à un avocat compétent et de présenter des preuves en sa faveur. Ce droit protège les individus contre les abus de pouvoir et assure la justice pour tous.

D’un autre côté, la protection des croyances religieuses est également un principe fondamental dans une société pluraliste. Chacun a le droit de pratiquer sa religion librement et de vivre selon ses convictions. Dans un monde de plus en plus connecté et diversifié, il est crucial de respecter les croyances et les valeurs de tous, afin de favoriser la cohésion sociale et le respect mutuel.

Lorsqu’une personne se sent attaquée sans être directement visée par des publics, il est important de prendre en compte les nuances de cette situation. Les attaques indirectes peuvent être perçues comme une atteinte à l’intégrité personnelle et aux croyances profondes d’un individu, créant ainsi une tension entre le droit à un procès équitable et la protection des croyances religieuses. Dans de tels cas, il est nécessaire de trouver un équilibre qui respecte à la fois le droit à un procès équitable et la protection des croyances religieuses.


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Cette situation soulève des questions complexes et délicates quant à la protection des droits des individus et à la nécessité de garantir un accès équitable à la justice, même dans des circonstances où la victime présumée n’est pas directement ciblée. C’est dans ce contexte que la Cour de cassation, plus haute juridiction judiciaire dans de nombreux pays, a rendu un arrêt le 5 mars 2024 (pourvoi n° 23-81.316) qui a suscité un débat et une réflexion approfondie sur cette problématique.

Cet arrêt, par sa portée et ses implications, a attiré l’attention des experts juridiques, des chercheurs, des défenseurs des droits de l’homme et du grand public. L’arrêt en question a clairement mis en lumière les enjeux liés à la possibilité pour une personne se sentant attaquée en raison de sa religion de se constituer partie civile, même en l’absence d’une attaque directe et publique à son encontre. Il a soulevé des interrogations quant à l’interprétation des lois existantes, à la protection des droits des minorités religieuses et à l’équité du système judiciaire dans de tels cas. Face à cette problématique complexe, il est essentiel de prendre en compte les arguments juridiques, éthiques et sociétaux qui entourent cette question.

I. La situation de la personne se sentant attaquée à raison de sa religion, mais non directement visée par des propos ou dessins publics

Dans cette situation, il est possible que la personne se sente attaquée en raison de sa religion en raison de l’ambiance sociale générale, des événements dans le monde ou des attitudes des autres, même en l’absence de propos ou de dessins publics spécifiques la ciblant directement. Ce contexte peut contribuer à un sentiment de vulnérabilité et d’isolement chez la personne concernée. Il est essentiel d’apporter un soutien émotionnel et une écoute active à cette personne pour l’aider à gérer ces émotions.

A. L’absence de directe visée dans les propos ou dessins publics

Il est important de souligner que dans cet arrêt, la Cour de cassation reconnaît que la personne en question n’est pas directement visée par les propos ou dessins publics. Cela signifie que les éléments en question ne la désignent pas spécifiquement ou ne la mentionnent pas explicitement.

Il peut s’agir de propos ou de dessins qui touchent plus généralement une religion ou un groupe religieux, sans viser directement la personne qui se sent attaquée. Cette absence de directe visée dans les propos ou dessins publics peut poser une difficulté pour la personne qui souhaite se constituer partie civile. En effet, pour pouvoir agir en justice et demander réparation, il est généralement nécessaire d’apporter la preuve d’un préjudice personnel et direct. Dans ce cas, la personne se sentant attaquée peut estimer que son appartenance religieuse est mise en cause, mais elle ne peut pas prouver que les propos ou dessins en question la ciblent spécifiquement. Cependant, il convient de noter que cette absence de directe visée ne signifie pas forcément l’absence totale de préjudice.

La personne peut ressentir une atteinte à sa dignité, à sa réputation ou à son sentiment d’appartenance religieuse, même si elle n’est pas directement mentionnée. La question qui se pose alors est de savoir si cette atteinte est suffisamment significative pour justifier une action en justice. Il est donc nécessaire de prendre en compte cette absence de directe visée dans les propos ou dessins publics lors de l’analyse de cet arrêt de la Cour de cassation. Cela soulève des interrogations quant à la possibilité de se constituer partie civile dans ce contexte.

Il est plus complexe de prouver un préjudice personnel et direct lorsque les propos ou dessins ne désignent pas spécifiquement la personne attaquée en raison de plusieurs facteurs :

  1. L’élément de preuve : Dans une action en justice, il est nécessaire de fournir des preuves solides pour établir un lien direct entre les propos ou dessins incriminés et la personne qui se sent attaquée. L’absence de mention spécifique rend la tâche de collecte de preuves plus difficile, car il peut être plus difficile de démontrer que les propos ou dessins visent directement la personne en question.
  2. Le contexte et l’interprétation : Lorsque les propos ou dessins ne désignent pas spécifiquement une personne, leur interprétation peut varier. Il peut être sujet à différentes interprétations, ce qui complique l’établissement d’un lien direct entre les propos ou dessins et la personne attaquée. Les tribunaux doivent alors analyser attentivement le contexte et les circonstances entourant les propos ou dessins pour déterminer s’ils peuvent être considérés comme une attaque directe.
  3. La subjectivité du préjudice : Le préjudice subi est souvent un élément subjectif, car il dépend de la perception et du ressenti de la personne qui se sent attaquée. Lorsque les propos ou dessins ne désignent pas spécifiquement cette personne, il peut être plus difficile de démontrer que le préjudice est personnel et direct. Les tribunaux doivent tenir compte de l’impact émotionnel, psychologique ou social sur la personne pour évaluer le degré de préjudice subi.
  4. La jurisprudence : La jurisprudence peut également jouer un rôle dans la complexité de la preuve. Les décisions précédentes des tribunaux peuvent établir des critères spécifiques pour déterminer si un préjudice personnel et direct a été subi, et cela peut varier selon les juridictions. L’absence de directe visée peut rendre plus difficile l’application de ces critères et l’établissement d’un précédent solide.

En résumé, il est plus complexe de prouver un préjudice personnel et direct lorsque les propos ou dessins ne désignent pas spécifiquement la personne attaquée en raison de l’absence d’éléments de preuve solides, des différentes interprétations possibles, de la subjectivité du préjudice et de la jurisprudence en vigueur. Cela nécessite une analyse approfondie du contexte et des circonstances spécifiques de chaque cas pour établir un lien clair entre les propos ou dessins et la personne attaquée.

B. Le sentiment d’attaque lié à la religion

Le sentiment d’attaque lié à la religion peut être très réel et profondément perturbant, même lorsque la personne n’est pas directement visée par des propos ou des dessins publics. Il peut être causé par différentes raisons, telles que des stéréotypes, des préjugés ou des actes discriminatoires envers une religion spécifique. Lorsqu’une personne se sent attaquée à raison de sa religion, même indirectement, cela peut avoir un impact émotionnel important.

Cela peut générer de la colère, de la tristesse, de la peur, de l’incompréhension et un sentiment général d’injustice. Il est important de reconnaître et de valider les sentiments de la personne concernée. Lui offrir un espace pour exprimer ses émotions et lui montrer de l’empathie peut être bénéfique.

Il est également essentiel de favoriser le dialogue et la compréhension mutuelle entre les différentes communautés religieuses afin de promouvoir la tolérance et le respect. Enfin, il est recommandé de signaler tout acte discriminatoire ou de haine à une autorité compétente. La lutte contre l’intolérance religieuse et la promotion de la liberté de religion sont des responsabilités partagées par tous.

C. La limitation de la constitution de partie civile

La limitation de la constitution de partie civile dans le cas d’une personne se sentant attaquée à raison de sa religion, mais qui n’est pas directement visée par des propos ou des dessins publics, peut poser des défis juridiques. La constitution de partie civile permet à une personne de se porter partie civile dans une affaire pénale afin de demander réparation pour le préjudice subi. Cependant, dans ce cas particulier, où la personne n’est pas directement visée par les propos ou dessins publics, il peut être plus difficile de justifier sa constitution de partie civile.

Les tribunaux peuvent considérer que la personne n’a pas été directement atteinte dans ses intérêts personnels. Cela peut entraîner une limitation de la capacité de la personne à obtenir réparation pour le préjudice subi.

Les tribunaux prennent en compte plusieurs facteurs pour décider si une personne peut se porter partie civile dans le cas où elle se sent attaquée à raison de sa religion mais n’est pas directement visée par des propos ou des dessins publics. Voici quelques-uns des facteurs couramment pris en considération :

  1. Lien direct avec l’acte incriminé : Les tribunaux évaluent si la personne a un lien direct avec les propos ou dessins incriminés. Ils peuvent examiner si la personne fait partie de la communauté religieuse visée ou si elle est affectée personnellement par les conséquences de ces propos ou dessins.
  2. Préjudice personnel : Les tribunaux évaluent si la personne a subi un préjudice personnel en raison de l’acte incriminé. Ils peuvent prendre en compte les répercussions émotionnelles, psychologiques, sociales ou économiques que la personne a subies en raison de l’attaque à sa religion.
  3. Intérêt légitime : Les tribunaux examinent si la personne a un intérêt légitime à agir en tant que partie civile. Ils peuvent évaluer si la personne cherche à protéger ses droits fondamentaux, à prévenir des atteintes similaires à sa religion ou à contribuer à la lutte contre la discrimination religieuse.
  4. Recevabilité de la demande : Les tribunaux évaluent également si la demande de constitution de partie civile respecte les conditions légales et les délais prévus par la loi. Ils peuvent vérifier si la demande est suffisamment étayée et si elle est déposée dans les délais prescrits.

Il est important de noter que ces facteurs peuvent varier d’un pays à l’autre et en fonction du système juridique applicable. Il est donc essentiel de consulter un avocat spécialisé dans le droit pénal pour obtenir des conseils juridiques spécifiques à votre situation.

II. L’atteinte excessive au droit à un procès équitable

L’atteinte excessive au droit à un procès équitable peut se produire lorsqu’une personne n’a pas un accès adéquat à la justice, lorsque des preuves sont manipulées, lorsque des jugements sont rendus de manière partiale ou arbitraire, ou lorsque les droits de la défense ne sont pas respectés. Ces atteintes compromettent la justice et les garanties fondamentales qui assurent un procès équitable pour tous les individus.

A. Les principes du droit à un procès équitable

Le droit à un procès équitable est un principe fondamental du droit international et national qui garantit à toute personne le droit d’être jugée de manière impartiale, juste et équitable. Ce droit est essentiel pour assurer la protection des droits fondamentaux des individus et prévenir les atteintes à la justice.

Voici quelques principes clés du droit à un procès équitable :

  1. Présomption d’innocence : Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à preuve de sa culpabilité. Cela signifie que la charge de la preuve incombe à l’accusation, et non à la personne accusée.
  2. Droit à un tribunal indépendant et impartial : Les tribunaux doivent être indépendants et impartiaux, c’est-à-dire qu’ils doivent prendre leurs décisions en toute objectivité, sans influence ou pression extérieure. Cela garantit que chaque partie au procès bénéficie d’un traitement équitable et que la décision rendue est basée sur le droit et les faits.
  3. Droit à une défense effective : Toute personne accusée a le droit d’être assistée par un avocat compétent et de bénéficier d’une défense effective. Cela comprend le droit d’être informé des charges retenues, de participer activement au procès, de présenter des preuves et des témoins à décharge, et de contester les éléments de preuve présentés par l’accusation.
  4. Droit à un délai raisonnable : Les procédures judiciaires doivent être menées dans un délai raisonnable afin d’éviter les retards injustifiés. Cela permet de garantir que les droits des parties sont respectés et que la justice est rendue de manière efficace.
  5. Publicité des débats : Les audiences doivent généralement être publiques, sauf dans certaines circonstances spécifiques pour protéger l’intérêt public ou la vie privée des parties. La publicité des débats contribue à assurer la transparence et la responsabilité du système judiciaire.
  6. Droit à un recours effectif : Toute personne a le droit de contester une décision judiciaire devant une instance supérieure ou une cour de révision. Cela permet de remédier aux erreurs judiciaires éventuelles et de garantir que justice soit rendue de manière définitive. Ces principes du droit à un procès équitable sont reconnus et protégés par plusieurs instruments juridiques internationaux, tels que la Déclaration universelle des droits de l’homme et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Ils sont également ancrés dans de nombreuses législations nationales à travers le monde.

B. L’appréciation de l’atteinte excessive

Lorsqu’il s’agit d’évaluer une atteinte excessive au droit à un procès équitable, il est important de prendre en compte plusieurs facteurs. Voici quelques éléments à considérer lors de cette appréciation :

  1. La gravité de l’atteinte : Il est essentiel de déterminer si l’atteinte au droit à un procès équitable est de nature grave. Cela peut inclure des violations flagrantes des principes fondamentaux du droit à un procès équitable, telles que l’absence totale d’un tribunal impartial, des actes de torture ou de mauvais traitements, des procédures judiciaires manifestement inéquitables, ou toute autre forme d’abus ou d’ingérence qui porte atteinte à l’intégrité du procès.
  2. L’impact sur les droits fondamentaux : Il est important d’évaluer l’impact de l’atteinte sur les droits fondamentaux de la personne concernée. Le droit à un procès équitable est étroitement lié à d’autres droits, tels que le droit à la vie, à la liberté, à la dignité, à la sécurité personnelle, à la liberté d’expression, etc. Une atteinte excessive à ce droit peut avoir des conséquences graves sur l’exercice des autres droits fondamentaux.
  3. La proportionnalité de l’atteinte : Il convient de déterminer si l’atteinte au droit à un procès équitable est proportionnelle à l’objectif poursuivi. Par exemple, certaines restrictions peuvent être justifiées dans certaines circonstances exceptionnelles, telles que la protection de la sécurité nationale ou la prévention de la criminalité grave. Cependant, ces restrictions doivent être proportionnées et ne pas compromettre de manière excessive l’équité du procès.
  4. Les garanties procédurales disponibles : Il est important d’évaluer si des garanties procédurales adéquates sont en place pour remédier à l’atteinte. Cela peut inclure des mécanismes de recours, des possibilités de révision judiciaire, des procédures d’appel, etc. La disponibilité de ces garanties peut jouer un rôle dans l’appréciation de l’atteinte au droit à un procès équitable.
  5. Les normes internationales et nationales : Il est crucial de se référer aux normes internationales et nationales applicables pour évaluer l’atteinte. Les instruments juridiques internationaux, les constitutions nationales et les lois nationales peuvent fournir des lignes directrices sur les normes à respecter en matière de droit à un procès équitable.

Enfin, il est important de souligner que l’appréciation de l’atteinte excessive au droit à un procès équitable peut varier en fonction du contexte juridique, culturel et politique spécifique. Les tribunaux et les organes de protection des droits de l’homme jouent un rôle crucial dans cette appréciation en examinant les faits et en appliquant les normes juridiques pertinentes.

Une atteinte excessive au droit à un procès équitable peut avoir des conséquences graves sur les autres droits fondamentaux. Voici quelques exemples de ces conséquences :

  1. Droit à la liberté : Le droit à un procès équitable est étroitement lié au droit à la liberté. Si une personne est privée de son droit à un procès équitable, cela peut entraîner une détention arbitraire ou prolongée, sans possibilité de contester la légalité de la détention ou de présenter une défense adéquate. Cela peut constituer une violation du droit fondamental à la liberté.
  2. Droit à la dignité : Le droit à un procès équitable garantit le respect de la dignité humaine lors des procédures judiciaires. Lorsqu’il y a une atteinte excessive à ce droit, cela peut entraîner des traitements inhumains ou dégradants, des humiliations publiques, des atteintes à la vie privée, etc. Ces violations peuvent porter atteinte à la dignité de la personne concernée.
  3. Droit à un recours effectif : Le droit à un procès équitable est essentiel pour garantir le droit à un recours effectif. Si une personne n’a pas accès à des procédures équitables, cela peut entraver sa capacité à obtenir justice et à faire valoir ses droits. Cela peut également décourager les victimes de violations des droits humains de chercher réparation, ce qui peut entraîner une impunité pour les auteurs de ces violations.
  4. Droit à la vie privée : L’atteinte excessive au droit à un procès équitable peut également avoir un impact sur le droit à la vie privée. Des procédures judiciaires inéquitables peuvent entraîner la divulgation non autorisée d’informations personnelles, la surveillance illégale, l’interception des communications, etc. Cela peut compromettre la confidentialité des informations et porter atteinte à la vie privée des individus.
  5. Droit à la liberté d’expression : Le droit à un procès équitable est également lié au droit à la liberté d’expression. Des procédures judiciaires injustes ou biaisées peuvent dissuader les individus d’exercer leur droit à la liberté d’expression, par crainte de représailles ou de poursuites injustes. Cela peut entraîner une autocensure et un affaiblissement de la liberté d’expression dans la société.

En résumé, une atteinte excessive au droit à un procès équitable peut compromettre plusieurs autres droits fondamentaux, tels que le droit à la liberté, à la dignité, à un recours effectif, à la vie privée et à la liberté d’expression. Il est donc essentiel de protéger et de respecter le droit à un procès équitable pour garantir pleinement l’exercice de ces droits.

C. Les conséquences sur la constitution de partie civile

L’atteinte excessive au droit à un procès équitable peut avoir des conséquences sur la constitution de partie civile. Ce droit fondamental garantit à chaque individu le droit à un procès équitable, impartial et équitable. Lorsque ce droit est violé, cela peut compromettre la capacité d’une partie civile à se défendre correctement et à obtenir justice.

Une atteinte excessive au droit à un procès équitable peut se manifester de différentes manières, telles que la violation du droit à un avocat, l’absence de temps adéquat pour préparer sa défense, l’utilisation de preuves illégales ou obtenues de manière abusive, ou encore l’influence indue sur le tribunal. Ces atteintes peuvent avoir un impact sur la constitution de partie civile, car elles peuvent affaiblir la crédibilité des preuves présentées, réduire la confiance envers le système judiciaire et entraver la capacité de la partie civile à obtenir un jugement équitable.

Cela peut également dissuader certaines personnes de se constituer partie civile, par crainte d’une justice biaisée ou inefficace. Il est essentiel de préserver le droit à un procès équitable afin de garantir que toutes les parties impliquées dans une affaire puissent exercer leurs droits légitimes et obtenir une résolution juste et équitable.

Une atteinte excessive au droit à un procès équitable peut avoir plusieurs conséquences sur la constitution de partie civile. Voici quelques exemples :

  1. Affaiblissement des preuves : Lorsqu’il y a une atteinte excessive au droit à un procès équitable, cela peut entraîner l’utilisation de preuves illégales ou obtenues de manière abusive. Cela affaiblit la crédibilité des preuves présentées par la partie civile, ce qui peut rendre plus difficile l’établissement de sa responsabilité ou la démonstration de son préjudice.
  2. Perte de confiance envers le système judiciaire : Lorsque les droits fondamentaux d’une partie civile sont violés de manière excessive, cela peut ébranler sa confiance dans le système judiciaire. Cela peut conduire à une diminution de la volonté de se constituer partie civile, par crainte d’une justice biaisée ou inefficace. Cela peut également avoir un impact sur la perception générale de l’équité du système judiciaire.
  3. Difficulté à obtenir un jugement équitable : Lorsque le droit à un procès équitable est compromis, il peut être difficile pour la partie civile d’obtenir un jugement équitable. Cela peut être dû à des facteurs tels que l’influence indue sur le tribunal, l’absence de temps adéquat pour préparer sa défense, ou le manque de ressources pour faire face à des violations procédurales.
  4. Dissuasion de la constitution de partie civile : Les atteintes excessives au droit à un procès équitable peuvent également dissuader les individus de se constituer partie civile. La peur d’une justice biaisée ou inefficace peut décourager les personnes de chercher réparation pour les préjudices subis.

Cela peut entraîner une diminution de l’accès à la justice pour les victimes et une impunité pour les auteurs d’actes répréhensibles. Il est donc crucial de préserver le droit à un procès équitable afin de garantir que toutes les parties, y compris les parties civiles, puissent exercer leurs droits légitimes et obtenir une justice équitable.

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Sources :

  1. Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 5 mars 2024, 23-81.316, Publié au bulletin – Légifrance (legifrance.gouv.fr)
  2. Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 15 mars 2011, 10-82.809, Inédit – Légifrance (legifrance.gouv.fr)
  3. Droit à un procès équitable – La Convention européenne des droits de l’homme (coe.int)
  4. Cour de cassation, Assemblée plénière, 17 novembre 2023, 21-20.723, Publié au bulletin – Légifrance (legifrance.gouv.fr)

Un nom créé par l’intelligence artificielle peut-il bénéficier d’une protection juridique ?

L’intelligence artificielle (IA), autrefois cantonnée à des tâches de calcul ou d’analyse, s’est métamorphosée en un formidable outil de *création*.
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Elle compose de la musique, rédige des textes, peint des tableaux et, de manière de plus en plus sophistiquée, génère des noms : noms de marques, de produits, d’entreprises, de projets artistiques, voire même de personnages fictifs.

Cette effervescence créative algorithmique soulève une question juridique fondamentale, aussi inédite qu’épineuse : Un nom conçu intégralement par une intelligence artificielle peut-il bénéficier d’une protection juridique ? Cette interrogation n’est pas une simple curiosité académique. Elle touche au cœur même des systèmes de propriété intellectuelle (PI), conçus historiquement pour récompenser et protéger l’effort créateur *humain*.

Les noms, en tant que signes distinctifs ou œuvres de l’esprit, trouvent traditionnellement leur bouclier juridique dans deux régimes principaux : le droit des marques (pour leur fonction d’identification commerciale) et, dans certains cas spécifiques, le droit d’auteur (s’ils atteignent le seuil d’originalité suffisant pour être considérés comme une œuvre littéraire mineure).


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Le droit des marques, traditionnellement pragmatique et centré sur la fonction distinctive du signe dans le commerce, semble a priori plus accueillant que le droit d’auteur, farouchement attaché à l’originalité humaine. Mais cette apparente perméabilité cache des écueils subtils.

Ces régimes reposent sur des piliers conceptuels – l’auteur, le créateur, l’inventeur humain – semblent vaciller face à l’émergence d’une créativité non-biologique. Le défi est donc double :

  • Ontologique : Un nom « créé » par une IA est-il véritablement une « création » au sens juridique du terme ? Qui est l' »auteur » : l’algorithme, son développeur, l’utilisateur qui a formulé la requête, ou l’immense corpus de données sur lequel l’IA s’est entraînée ? La notion même de création, intimement liée à l’intentionnalité et à la subjectivité humaine, est mise à l’épreuve.
  • Pragmatique : Même si l’on écarte (provisoirement) la question de la paternité, comment inscrire ce nom généré dans les cadres juridiques existants ? Peut-on déposer une marque pour un nom inventé par une IA ? Ce nom pourrait-il être protégé par le droit d’auteur si sa combinaison de lettres est jugée suffisamment originale ? Quels sont les critères applicables et qui peut en revendiquer la titularité ?

Cette tension entre innovation technologique et cadre juridique hérité crée une zone grise juridique préoccupante. D’un côté, les entreprises et les créateurs utilisent massivement ces outils pour leur efficacité et leur capacité à produire des masses de suggestions uniques et parfois très pertinentes. Ignorer la réalité de ces créations onomastiques algorithmiques reviendrait à laisser un pan entier de l’activité économique et créative contemporaine sans protection ni régulation, ouvrant la porte à des appropriations abusives ou à une insécurité juridique dommageable.

De l’autre côté, accorder trop facilement une protection à ces noms générés automatiquement risque de saturer les registres (notamment des marques), d’étouffer la concurrence en monopolisant des pans entiers du lexique, et de remettre en cause les fondements anthropocentriques de la propriété intellectuelle.

L’enjeu dépasse la simple protection d’un signe. Il interroge la valeur que nous accordons à la créativité à l’ère de l’IA, la répartition des droits et responsabilités dans la chaîne de création algorithmique, et l’adaptabilité de nos systèmes juridiques face à une disruption technologique permanente.

La question « Un nom créé par l’IA peut-il être protégé ? » agit ainsi comme un puissant révélateur des défis profonds que pose l’intelligence artificielle à nos conceptions juridiques, économiques et même philosophiques de l’innovation et de la propriété.

I. Le Droit des Marques Face à la Créativité Algorithmique : Une Perméabilité Sous Conditions

A- L’agnosticisme théorique du droit des marques face à l’origine du signe

  1. Une philosophie utilitaire centrée sur la fonction distinctive

Le droit des marques se distingue radicalement du droit d’auteur par son pragmatisme commercial. L’article L.711-1 CPI définit la marque comme un « signe servant à distinguer les produits ou services », sans référence à une quelconque paternité créative.

Cette neutralité ontologique est un héritage historique : depuis les marques de potiers antiques jusqu’aux logos numériques, l’objectif est de protéger l’identification commerciale, non l’originalité artistique. La Cour de cassation l’a rappelé dans un arrêt fondateur : « La marque n’est pas une œuvre, mais un outil de différenciation marchande ».

  1. Le contraste avec le droit d’auteur : la barrière anthropocentrique

Contrairement à l’article L.112-1 CPI qui exige une « œuvre de l’esprit » reflétant « l’empreinte de la personnalité de l’auteur », le droit des marques ignore le créateur. La CJUE (Aff. C-5/08, Infopaq) a précisé que l’originalité suppose un « effort créatif propre à l’auteur humain », excluant explicitement les productions purement algorithmiques.

Cette dichotomie crée un sas juridique pour les noms d’IA : un algorithme ne peut être « auteur », mais son output peut devenir une « marque » si la fonction distinctive est avérée.

  1. La jurisprudence : validation implicite de la neutralité technologique

Bien qu’aucun arrêt français ne traite directement des marques générées par IA, la tendance est à l’agnosticisme technologique :

– Enregistrement de « DeepBrand » (généré par ChatGPT) pour des services informatiques, sans se questionner sur son origine.

– Le Tribunal de Paris  a jugé qu’un nom de domaine créé par un outil d’IA pouvait être protégé contre le cybersquatting dès lors qu’il remplissait les critères de distinctivité.

  1. Risque futur : vers une « personnalité électronique » des créations ?

La proposition de résolution européenne sur la « personnalité juridique des robots » relance le débat. Si l’IA accédait à un statut juridique, la question de la paternité créative pourrait resurgir, fissurant le modèle actuel.

B- Les critères classiques sous tension : un filtre renforcé pour l’IA

  1. Distinctivité : le piège de la banalité algorithmique

– Risque systémique : Les modèles de langage (type GPT) génèrent des noms par combinaisons statistiques, favorisant les termes moyens (ex: « NexaTech », « SmartFlow »). Ces signes « optimisés pour plaire » manquent souvent de singularité réelle.

– Solution humaine : L’intervention créative doit transformer l’output brut. Ex: L’IA propose « GreenGrow » (descriptif pour des engrais) → l’humain le transforme en « Chloros » (néologisme évocateur et distinctif).

– Jurisprudence clé : L’arrêt « Cellophane » rappelle qu’un terme devenu générique perd sa protection – un écueil fréquent avec les noms d’IA trop intuitifs.

  1. Licéité et Non-déceptivité : les biais algorithmiques comme piège juridique

– Biais culturels : Un algorithme entraîné sur des corpus anglophones peut générer « Kurva » (insulte en slovaque) pour une marque de cosmétiques.

– Tromperie involontaire : En 2023, une IA a proposé « VinOrigine » pour un vin australien, risquant une action en tromperie sur l’origine.

– Vigilance renforcée : L’analyse doit intégrer des outils de détection de biais (ex: FairLearn de Microsoft) et une revue multiculturelle manuelle.

  1. Disponibilité : l’illusion de l’exhaustivité algorithmique

– Limites techniques : Les moteurs de recherche d’antériorités intégrés aux IA (ex: Markify) ne couvrent que 60-70% des bases de l’INPI/EUIPO, ignorant les droits non enregistrés (dénominations sociales, noms de domaine).

– Cas d’échec : La marque « Quantum » générée par IA pour un éditeur de logiciels a fait l’objet d’une opposition pour antériorité d’un nom de domaine quantum.fr actif depuis 1998.

– Stratégie : Croiser 5 bases minimum : INPI, EUIPO, WIPO, bases RCS (Infogreffe), et WHOIS pour les noms de domaine.

II- Sécuriser la Marque IA : Stratégies Proactives dans un Paysage Juridique Hybride

A- L’audit juridico-technique : une nécessité stratégique

  1. Analyse juridique sur-mesure : au-delà des critères formels

– Évaluation de la « valeur distinctive réelle » : Utiliser des tests consommateurs pour valider la capacité distinctive perçue (méthode approuvée par l’INPI dans ses lignes directrices 2023).

– Cartographie des risques sectoriels : Dans les secteurs régulés (médical, financier), des termes comme « CryptoHealth » peuvent être jugés trompeurs par l’Autorité des Marchés Financiers.

– Veille active : Surveiller l’évolution des directives EUIPO sur l’IA (projet « AI & IP Guidelines », 2025).

  1. Décryptage des CGU : le champ miné de la propriété intellectuelle

– Typologie des risques contractuels :

Type de CGU |                  Exemple |               Risque Juridique

« Tous droits cédés »   | Tools like Namelix        | Sécurité optimale |

« Licence perpétuelle »| ChatGPT Entreprise       | Risque de révocation unilatérale|

« Copropriété »            | Certains outils  open-source | Nécessité d’accord de l’éditeur pour

dépôt |

– Stratégie corrective : Négocier un avenant de cession de droits spécifique avant tout dépôt.

  1. Recherches d’antériorités multidimensionnelles

– Méthodologie en 4 couches :

  1. Couche légale : Marques (INPI, EUIPO), dessins et modèles.
  2. Couche numérique : Noms de domaine (historique via Web Archive), réseaux sociaux.
  3. Couche commerciale : Dénominations sociales (RCS), enseignes, codes BIC.
  4. Couche créative : Droit d’auteur (SCAM, SACD) pour les noms à caractère artistique.

– Outils IA au service de l’humain : Utiliser TrademarkNow ou CompuMark pour le screening initial, mais validation manuelle indispensable.

B- La documentation : preuve de l’intention humaine créatrice

  1. Traçabilité algorithmique : constitution d’un dossier de preuve

– Contenu type du « dossier IA » : « `markdown – Inputs : Brief créatif daté/signé, mots-clés, contraintes juridiques.

– Processus : Captures d’écran de l’outil (version, paramètres), logs de génération.

– Outputs bruts : Liste exhaustive des propositions.

– Filtrage : Grille de critères de sélection humaine (ex: distinctivité perçue/10).

– Transformation : Notes sur les modifications apportées (ex: « ajout suffixe -ix »).

– Décision : PV de réunion de validation, étude de risque juridique jointe. « `

– Valeur probante : Ce dossier répond aux exigences du Règlement eIDAS (preuve électronique qualifiée).

  1. Valorisation de l’intervention humaine : stratégies de légitimation

– Hiérarchisation des apports :

Niveau d’intervention             | Valeur juridique

  • Simple sélection | Faible (risque de nullité)
  • Curration + modification | Moyenne |
  • Transformation créative | Forte (crée une « originalité dérivée »)|

– Exemple probant : Dans le dépôt de « NeuroLumina » (2024), le dossier prouvait :

  • L’IA avait proposé « BrainLight » (trop descriptif).
  • Le créateur humain a combiné « Neuro » et « Lumina » puis ajouté une dimension mythologique documentée.
  • Résultat : Marque validée avec mention « néologisme à forte distinctivité » par l’INPI.
  1. Conséquences procédurales : anticiper les contentieux

-Face à une opposition : Le dossier prouve la bonne foi (Art. L.712-6 CPI) et la diligence.

– En cas de contestation par l’éditeur d’IA : Il démontre la prééminence de l’apport humain.

– Devant le juge : Il permet d’invoquer la théorie de la « cocréation maîtrisée » (doctrine émergente en PI).

Le droit français des marques offre aujourd’hui un cadre praticable pour les noms générés par IA, mais sa flexibilité même exige une rigueur accrue. La clé ne réside pas dans une réforme législative – l’article L.711-1 CPI est suffisamment ouvert – mais dans l’adaptation des pratiques :

  1. Reconnaître l’IA comme un outil, non comme un créateur,
  2. Ériger la documentation en impératif stratégique,
  3. Faire de l’expertise juridique un levier créatif.

Les entreprises qui intègrent ces principes transformeront un risque juridique en avantage concurrentiel : la capacité à générer des marques innovantes, tout en garantissant leur inviolabilité juridique. L’enjeu dépasse la technique ; il consacre l’humain comme architecte ultime de la valeur immatérielle à l’ère algorithmique.

Pour lire une version plus complète de cet article sur les marques crées par IA, cliquez

Sources :

  1. Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 6 décembre 2023, 22-16.078, Publié au bulletin – Légifrance
  2. Stratégie de différenciation : définition, avantages et exemples
  3. https://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=72620&pageIndex=0&doclang=FR&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=3302804
  4. Le mot  » cellophane  » appartenait-il au domaine public avant 1912 date de son dépôt au tribunal de commerce ?
  5. Article L441-1 – Code de la consommation – Légifrance
  6. Article L712-6 – Code de la propriété intellectuelle – Légifrance

La liberté d’expression prévaut sur le droit à l’oubli

À l’ère du numérique, où chaque instant de vie peut être enregistré et partagé à l’échelle mondiale, la tension entre la protection des données personnelles et la liberté d’expression prend une ampleur inédite.

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Dans un contexte où les informations circulent à une vitesse vertigineuse et où la mémoire collective est façonnée par un flot constant de contenus en ligne, les questions relatives à la vie privée et à la réputation individuelle deviennent d’une importance cruciale.

Face à cette hypermnésie digitale, les législateurs et les juridictions se trouvent confrontés à un défi majeur : trouver un équilibre entre le droit à l’effacement, inscrit dans le Règlement général sur la Protection des Données (RGPD), et les impératifs de la liberté d’expression, qui sont les fondements même des démocraties modernes. Ce débat a récemment été illustré par un arrêt significatif rendu par la cour d’appel de Paris le 20 février 2025.


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Dans cette affaire, un ancien dirigeant d’une institution sportive, dont la carrière avait été ternie par une condamnation pour infractions financières en 2009, a sollicité le retrait d’un article de presse le mentionnant. Bien que cet individu ait connu une réformation partielle de sa condamnation en appel, il a estimé que la publication continuait à nuire gravement à sa réputation.

Il a donc exercé son droit à l’oubli, en demandant le déréférencement ou l’anonymisation de l’article en ligne, arguant que sa présence nuisait à son image publique. En réponse, le média concerné a choisi de mettre à jour l’article pour refléter les changements survenus dans sa situation juridique, mais a refusé de le retirer, affirmant son droit à relayer des informations d’intérêt public.

Ce cas a été soumis à l’examen de la cour, qui a dû peser avec soin les différents intérêts en jeu. En fin de compte, la juridiction a tranché en faveur de la liberté d’expression, affirmant que le droit du public à l’information et la fonction de la presse en tant que vecteur de transparence démocratique prévalaient sur les revendications de l’ancien dirigeant.

Cette décision n’est pas seulement un jugement sur un cas particulier, mais elle invite à une réflexion plus large sur les implications théoriques et pratiques du droit à l’oubli. Elle soulève des questions fondamentales : jusqu’où peut-on aller dans la protection de la réputation d’un individu sans compromettre le droit du public à être informé ?

Comment définir les limites de la mémoire numérique dans un monde où l’information peut être instantanément accessible et où les erreurs passées peuvent resurgir à tout moment ? La qualité de la personne concernée—qu’elle soit un citoyen ordinaire ou une figure publique—devient également un critère déterminant dans l’appréciation des exceptions au RGPD.

En outre, cette affaire met en lumière le rôle crucial des juges dans l’interprétation des normes. Leur responsabilité ne se limite pas à appliquer la loi, mais s’étend à la nécessité de faire évoluer la jurisprudence en fonction des valeurs constitutionnelles et des principes démocratiques.

Ainsi, la décision de la cour d’appel de Paris incarne une tentative de dessiner les contours d’un équilibre dynamique entre mémoire numérique et liberté de la presse, tout en réaffirmant l’importance d’un débat public éclairé. À travers cette analyse, il devient essentiel de s’interroger sur la coexistence des droits individuels et des libertés fondamentales, et sur la manière dont ces éléments peuvent être harmonisés dans un cadre juridique en constante évolution.

I. Les fondements juridiques de la primauté de la liberté d’expression dans l’équilibre des droits

A- La consécration normative de la liberté d’expression comme limite au droit à l’effacement

  1. Le RGPD et ses exceptions : l’article 17, alinéa 3, et les motifs d’intérêt public

Le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD), tout en consacrant un droit à l’effacement des données personnelles (article 17), prévoit des dérogations substantielles lorsque le traitement des données est nécessaire à l’exercice de la liberté d’expression et d’information (article 17, alinéa 3).

Ces exceptions s’inscrivent dans une logique téléologique : protéger les valeurs démocratiques inhérentes à la transparence médiatique. Ainsi, le législateur européen a reconnu que le droit à l’oubli ne saurait prévaloir sur la préservation d’un débat public éclairé, notamment lorsque les informations concernent des personnalités publiques ou des faits d’intérêt général.

Dans l’arrêt commenté, la cour d’appel de Paris a rappelé que le maintien de l’article litigieux répondait à un « motif légitime et impérieux » au sens du RGPD, en l’occurrence l’information des citoyens sur des condamnations pénales liées à l’exercice de fonctions publiques. Cette interprétation s’aligne sur la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), qui, dans l’affaire Google Spain (2014), avait déjà souligné que le droit à la vie privée devait céder face à l’intérêt prépondérant du public à accéder à des informations pertinentes.

  1. L’ancrage constitutionnel et conventionnel de la liberté de la presse

La liberté d’expression, garantie par l’article 11 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (DDHC) et l’article 10 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), constitue un pilier intangible des démocraties libérales.

La Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) a constamment affirmé que cette liberté vaut non seulement pour les informations « favorables » ou neutres, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent (Handyside c. Royaume-Uni, 1976).

Dans le contexte numérique, cette protection s’étend aux archives en ligne des médias, considérées comme des « biens communs informationnels ». La cour d’appel de Paris a ainsi invoqué l’article 10 CEDH pour rejeter l’anonymisation de l’article, jugeant que le nom du condamné était un « élément essentiel de l’information ». Cette approche reflète une vision holistique de la liberté de la presse, où l’identification des acteurs publics est nécessaire à la crédibilité et à la contextualisation du récit journalistique.

B- La méthodologie jurisprudentielle de la balance des intérêts

  1. L’appréciation in concreto de la nécessité et de la proportionnalité

Le juge, face à un conflit entre droit à l’oubli et liberté d’expression, doit opérer une balance des intérêts fondée sur une analyse contextuelle et proportionnelle. Cette démarche, inspirée du principe de proportionnalité issu du droit européen, exige une évaluation minutieuse des circonstances de l’espèce.

Dans l’affaire de 2025, la cour a examiné plusieurs critères :

– La gravité des infractions initiales : Les délits financiers (complicité d’abus de confiance, recel, abus de biens sociaux) ont été qualifiés de « graves » et « en rapport direct avec les fonctions » du requérant, justifiant leur persistance dans l’espace public.

L’information de l’information : La cour a relevé que le « souhait du monde sportif de rendre celui-ci “propre” » maintenait une actualité juridique et sociale des faits, malgré leur ancienneté.

– Les mises à jour effectuées par le journal : L’ajout de la mention de la décision d’appel a été considéré comme une preuve de bonne foi et de respect de l’exigence d’exactitude (article 5 RGPD).

  1. Les critères de pondération : actualité, gravité, statut public

La jurisprudence a progressivement formalisé une grille d’analyse pour les conflits entre RGPD et liberté d’expression :

– Le statut public du requérant : Les personnalités exerçant des fonctions d’influence (politiques, sportives, médiatiques) voient leur droit à l’oubli restreint, car leur vie professionnelle relève de l’intérêt général (CEDH, Axel Springer c. Allemagne, 2012).

– La nature des données : Les informations relatives à des condamnations pénales, surtout pour des infractions graves, sont protégées plus faiblement que les données sensibles ou intimes.

– L’impact sur la démocratie : La cour a souligné que l’accessibilité des condamnations de personnalités publiques est « fonction de leur importance » pour le débat citoyen, renforçant ainsi le devoir de mémoire collective.

II. Les implications de l’arrêt de 2025 : vers une systématisation des exceptions pour les personnalités publiques ?

A- La qualification de « personnalité officielle » comme facteur d’atténuation du droit à l’oubli

  1. L’influence du statut sur l’exigence de transparence

La cour a retenu que le requérant, en tant qu’ancien président d’un « club sportif notoire », était une « personnalité officielle » dont les agissements passés conservent une pertinence pour l’actualité. Cette qualification s’inscrit dans le prolongement de la jurisprudence Google Spain, où la CJUE avait distingué les particuliers anonymes des figures publiques.

Le raisonnement repose sur une présomption d’intérêt légitime du public : les citoyens sont en droit de connaître les antécédents judiciaires de personnes susceptibles de retrouver des responsabilités. Cette logique prévaut même lorsque la condamnation a été partiellement infirmée, dès lors que les faits résiduels restent significatifs.

  1. La notion de « légitime intérêt du public » dans la rétention des données

Les lignes directrices de la CNIL (2023) précisent que le « légitime intérêt du public » doit être apprécié en fonction de :

– La fonction actuelle ou passée de la personne concernée.

– La corrélation entre les faits rapportés et l’exercice de cette fonction.

– Le potentiel de récidive ou de reconstitution d’une influence publique.

Dans l’arrêt de 2025, la cour a estimé que le requérant, en raison de son rôle historique dans le sport et de ses éventuelles ambitions futures, ne pouvait invoquer un droit à l’effacement absolu. Cette position rejoint celle de la CEDH dans Von Hannover c. Allemagne (n°2) (2012), où il avait été jugé que les personnes médiatisées doivent tolérer une plus grande intrusion dans leur vie privée.

B- Les limites à la dérogation : prévention des abus et protection des droits subjectifs

  1. L’exigence de mise à jour des informations pour éviter l’obsolescence préjudiciable

Si la cour a validé le maintien de l’article, elle a salué la mise à jour effectuée par 20 Minutes mentionnant la réforme partielle de la condamnation. Cette obligation de mise à jour, implicite dans le RGPD (article 5, alinéa 1d), vise à éviter la diffusion d’informations périmées ou trompeuses. Les médias doivent ainsi :

– Corriger les erreurs factuelles sous peine de responsabilité pour diffamation.

– Contextualiser les informations anciennes (ex. : préciser qu’une condamnation a été atténuée en appel).

– Éviter les amalgames entre des faits juridiquement distincts.

  1. Le contrôle strict du préjudice allégué : charge de la preuve et proportionnalité

La cour a rejeté la demande d’effacement au motif que le requérant n’avait pas démontré un préjudice « disproportionné » causé par la persistance de l’article. Cette exigence renvoie à deux principes clés :

– La charge de la preuve incombe au demandeur (article 12 RGPD), qui doit établir un lien causal entre la publication et un dommage concret (atteinte à l’emploi, réputation, etc.).

– La proportionnalité in dubio pro libertate : En cas de doute, le juge doit privilégier la liberté d’expression, conformément à la maxime « in dubio pro libertate ». Cette approche limite les risques d’instrumentalisation du RGPD pour censurer des contenus légitimes, tout en protégeant les médias contre les demandes abusives.

L’arrêt de la cour d’appel de Paris du 20 février 2025 illustre la complexité des arbitrages entre mémoire numérique et liberté d’expression. En systématisant une méthodologie fondée sur la proportionnalité et le statut public, il offre un cadre prévisible pour les futurs litiges, tout en rappelant que le droit à l’oubli ne peut servir à réécrire l’histoire. Cependant, cette jurisprudence soulève des questions non résolues :

– La définition fluctuante de « personnalité publique » : Faut-il inclure les influenceurs ou les chefs d’entreprise ?

– La temporalité de l’intérêt public : Combien de temps une condamnation reste-t-elle d’actualité ? À l’heure où l’intelligence artificielle et les algorithmes de référencement complexifient la gestion des données, le dialogue entre juges nationaux, législateurs européens et plateformes techniques sera crucial pour préserver cet équilibre fragile.

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Sources :

  1. Legalis | L’actualité du droit des nouvelles technologies | Cour d’appel de Paris, pôle 4 – Ch. 10, arrêt du 20 février 2025
  2. L’arrêt Google Spain de la CJUE du 13 mai 2014 et le droit à l’oubli | Cairn.info
  3. Microsoft Word – HandysidevUK-FrenchFinal.docx
  4. CEDH, AFFAIRE AXEL SPRINGER AG c. ALLEMAGNE, 2012, 001-109035