dépôt de marque

Contrefaçon : point de départ de la prescription

Quel est le point de départ quand la contrefaçon est continue ?

En 1985, l’artiste Frédéric Jager avait conçu pour le Musée du cheval vivant aux Grandes écuries de Chantilly, une sculpture monumentale de trois mètres de hauteur représentant trois chevaux dans une demi-vasque circulaire intitulée « Fontaine aux chevaux » ou « La Prueva ».

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Après avoir eu connaissance de l’existence de reproductions illicites de son œuvre, l’artiste a lancé une procédure afin de déterminer leur origine et localisation.

C’est ainsi qu’a été découverte une reproduction exposée dans le Potager des Princes à Chantilly. Son caractère contrefaisant a été définitivement reconnu par arrêt de la Cour d’appel de Paris du 17 décembre 2008.


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En 2021, à la suite d’une tentative de règlement amiable infructueuse, l’artiste a finalement assigné la société le Potager des Princes et son gérant, en référé, afin de faire cesser le trouble manifestement illicite résultant de l’atteinte à ses droits de propriété intellectuelle.

Le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille ayant fait droit à ses demandes, la société Le Potager des Princes a interjeté appel devant la Cour d’appel de Douai. La Cour a infirmé l’ordonnance du juge des référés et rejeté l’ensemble des demandes de l’artiste au motif que son action était prescrite.

C’est dans ce contexte que Frédéric Jager a formé un pourvoi devant la Cour de cassation.

Pour démontrer que l’action n’était pas prescrite, il a soutenu qu’en présence d’un délit continu (en l’occurrence constitué par la détention et l’exposition de l’exemplaire contrefait), le point de départ du délai de prescription se situait au jour de la cessation des actes contrefaisants.

La société Le Potager des Princes soutient quant à elle que le délai de prescription commençait à courir au jour où l’artiste a eu connaissance de la contrefaçon : au plus tard, le 15 octobre 2008. L’action était donc prescrite depuis le 16 octobre 2013.

En réponse, la Cour de cassation dans son arrêt du 15 novembre 2023 rappelle d’abord l’article 2224 du Code civil selon lequel « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. »

La Cour reconnait que la présence de la statue litigieuse dans le Potager des Princes a été connue de l’artiste dès le dépôt du rapport d’expertise du 3 septembre 2004 et que son caractère contrefaisant a définitivement été reconnu par arrêt de la Cour d’appel de Paris du 17 décembre 2008.

Ainsi, elle fixe le point de départ du délai au 17 décembre 2008 ; son expiration est donc intervenue le 17 décembre 2013.

L’auteur est désormais impuissant pour faire cesser l’exposition de cette statue contrefaisante dans le Potager des Princes.

C’est le lieu de rappeler qu’En droit français, la question de la contrefaçon et de la prescription en cas de délit continu suscite un intérêt juridique crucial. La contrefaçon, en tant qu’acte de reproduction ou d’utilisation non autorisée de biens protégés par des droits de propriété intellectuelle, soulève des interrogations complexes quant à la durée de la prescription.

Lorsqu’un délit est considéré comme continu, c’est-à-dire qu’il perdure dans le temps, la détermination du point de départ de la prescription devient un enjeu majeur pour les parties impliquées. Dans ce contexte, l’analyse des textes de loi, des jurisprudences et des doctrines spécialisées s’avère essentielle pour appréhender les spécificités de la prescription en matière de contrefaçon. Cette dynamique juridique exige une compréhension approfondie des mécanismes temporels et des principes fondamentaux régissant la prescription en droit français, afin d’appréhender de manière adéquate les implications et les conséquences de la perpétuation d’un délit de contrefaçon.

I. Qu’est-ce que la contrefaçon ?

A. Définition de la contrefaçon

La contrefaçon en droit français se réfère à la violation des droits de propriété intellectuelle tels que les droits d’auteur, les brevets, les marques, les dessins et modèles.  Voici un aperçu de ce que couvre généralement la définition de la contrefaçon en droit français :

  1. Contrefaçon en matière de droit d’auteur :

– La reproduction, la représentation ou l’exploitation d’une œuvre protégée sans l’autorisation de l’auteur.

– Cela peut inclure la reproduction totale ou partielle, la traduction, l’adaptation ou la distribution de l’œuvre sans consentement.

  1. Contrefaçon en matière de marques :

– L’usage non autorisé d’une marque identique ou similaire pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux protégés par la marque enregistrée.

  1. Contrefaçon en matière de brevets :

– La fabrication, l’utilisation, la vente ou l’importation d’un produit ou d’un procédé breveté sans l’autorisation du titulaire du brevet.

  1. Contrefaçon en matière de dessins et modèles :

– L’imitation ou la reproduction non autorisée d’un dessin ou modèle enregistré. En général, la contrefaçon est considérée comme une violation des droits de propriété intellectuelle et est sujette à des sanctions civiles et pénales.

Les tribunaux peuvent ordonner des dommages-intérêts, la cessation des actes de contrefaçon, voire des peines d’emprisonnement en cas de contrefaçon grave.

B. Importance du délai de prescription dans les affaires de contrefaçon

Il est essentiel de comprendre l’importance du délai de prescription dans les affaires de contrefaçon.

Le délai de prescription est le laps de temps pendant lequel une partie peut intenter une action en justice pour une infraction. Dans le contexte de la contrefaçon, il joue un rôle crucial pour garantir la protection des droits de propriété intellectuelle et la poursuite des contrevenants.

  1. Protéger les droits de propriété intellectuelle : Le délai de prescription permet de protéger les droits de propriété intellectuelle des entreprises. Les entreprises investissent des ressources considérables dans la création et le développement de produits originaux, et la contrefaçon peut gravement compromettre leur rentabilité. En fixant un délai de prescription, les lois sur la propriété intellectuelle permettent aux entreprises de prendre des mesures légales contre les contrefacteurs et de faire valoir leurs droits en justice.
  2. Encourager la répression de la contrefaçon : Un délai de prescription adéquat encourage la répression de la contrefaçon en permettant aux entreprises de prendre des mesures légales rapidement. La contrefaçon peut se propager rapidement et causer des dommages considérables en peu de temps. En limitant le délai de prescription, les tribunaux peuvent traiter les affaires de contrefaçon de manière plus efficace, dissuader les contrefacteurs potentiels et minimiser les pertes subies par les entreprises.
  3. Préserver l’intégrité du marché : Le délai de prescription joue également un rôle crucial dans la préservation de l’intégrité du marché. En prenant des mesures rapides contre les contrefacteurs, les entreprises peuvent protéger la réputation de leurs marques et éviter la confusion des consommateurs. Un délai de prescription approprié permet de maintenir un environnement commercial équitable et de garantir que les entreprises qui respectent les lois sur la propriété intellectuelle sont protégées contre les pratiques déloyales.

Le délai de prescription est crucial car il détermine la période pendant laquelle le titulaire des droits peut engager des poursuites pour contrefaçon.

C. Bases légales du délai de prescription en droit français

  1. Référence aux articles pertinents du Code de la propriété intellectuelle

Les articles du Code de la propriété intellectuelle français qui réglementent le délai de prescription en matière de contrefaçon sont les suivants :

– Article L. 716-4 : Cet article énonce que l’action en contrefaçon se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

– Article L. 716-6 : Cet article concerne les cas où l’infraction de contrefaçon est dissimulée. Il stipule que le délai de prescription court à compter du jour où le titulaire du droit d’auteur ou du droit voisin a eu connaissance de l’infraction ou aurait dû en avoir connaissance, même si cette connaissance intervient après l’expiration du délai de cinq ans.

– Article L. 716-7 : Cet article traite des cas d’actions en contrefaçon exercées par un ayant droit postérieur au titulaire initial du droit d’auteur ou du droit voisin. Il énonce que l’action en contrefaçon se prescrit par cinq ans à compter du jour où l’ayant droit postérieur a eu connaissance de l’existence de son droit et de l’identité du contrefacteur.

– Articles L. 716-8 à L. 716-11 : Ces articles fournissent d’autres précisions et dispositions relatives au délai de prescription en matière de contrefaçon, notamment en ce qui concerne les cas spécifiques liés aux droits voisins.

Il est important de se référer à ces articles pour comprendre les dispositions légales relatives au délai de prescription en matière de contrefaçon en droit français.

  1. Explication du principe de prescription en droit français

En droit français, le principe de prescription désigne la durée au-delà de laquelle une action en justice ne peut plus être engagée. Il vise à garantir la sécurité juridique en empêchant les litiges de ressurgir de manière indéfinie.

Les délais de prescription varient en fonction de la nature de l’action en justice (civile, pénale, commerciale, etc.) et sont prévus par la loi. Une fois le délai de prescription écoulé, le droit d’agir en justice est éteint.

 

II. Délai de prescription de l’action en contrefaçon

A. Durée du délai de prescription

En France, le délai de prescription de l’action en contrefaçon est de cinq ans.

L’article 2224 du Code civil dispose que « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».

Cela signifie que, sauf exceptions prévues par la loi, les actions personnelles se prescrivent au bout de cinq ans à partir du moment où la personne concernée a eu connaissance des faits lui permettant d’agir en justice.

  1. Moment à partir duquel le délai commence à courir

Ce délai commence à courir à partir du jour où le titulaire d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

L’article 2224 du Code civil dispose que « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».

  1. Cas particuliers et exceptions

Des cas particuliers peuvent modifier le point de départ ou la durée de ce délai, notamment en cas de contrefaçon continue ou de dissimulation de l’infraction.

Dans ce cas, la prescription ne commence à courir qu’à partir du jour où la contrefaçon a cessé. Par exemple, si une œuvre protégée par le droit d’auteur est continuellement reproduite sans autorisation, la prescription de l’action en contrefaçon ne commence qu’à partir du jour où la reproduction cesse.

Toutefois, selon la Cour de cassation dans son arrêt du 15 novembre 2023 qui rappelle d’abord l’article 2224 du Code civil selon lequel « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. », reconnait que la présence de la statue litigieuse dans le Potager des Princes a été connue de l’artiste dès le dépôt du rapport d’expertise du 3 septembre 2004 et que son caractère contrefaisant a définitivement été reconnu par arrêt de la Cour d’appel de Paris du 17 décembre 2008.

Ainsi, elle fixe le point de départ du délai au 17 décembre 2008 ; son expiration est donc intervenue le 17 décembre 2013.

Il existe enfin des exceptions à la prescription de l’action en contrefaçons. Par exemple, dans certains pays, il n’y a pas de prescription pour les contrefaçons de marques. Cela signifie que le titulaire de la marque peut engager des poursuites même après de nombreuses années. De même, il peut y avoir des exceptions pour les contrefaçons intentionnelles ou répétées, où la prescription peut être prolongée.

Il est également important de souligner que la prescription de l’action en contrefaçons peut varier d’un pays à l’autre et dépendre des lois nationales en matière de propriété intellectuelle. Il est donc essentiel de consulter les lois spécifiques de chaque pays pour connaître les délais de prescription applicables.

B. Conséquences du dépassement du délai de prescription

  1. Perte du droit d’agir en contrefaçon

En droit français, le dépassement du délai de prescription en matière de contrefaçon peut entraîner la perte du droit d’agir en justice. En général, l’action en contrefaçon se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer, conformément à l’article 2224 du Code civil. Si le titulaire d’un droit d’auteur, par exemple, découvre une contrefaçon plusieurs années après les faits, il peut se voir opposer la prescription et perdre son droit d’agir en justice contre le contrefacteur.

  1. Impact sur les recours disponibles pour le titulaire des droits

Lorsque le délai de prescription est dépassé, cela a un impact significatif sur les recours disponibles pour le titulaire de droits. En général, le dépassement du délai de prescription entraîne la perte du droit d’engager une action en justice pour faire valoir ses droits.

Tout d’abord, il est important de comprendre que le délai de prescription varie en fonction du pays et du type de droit en question. Par exemple, en matière de propriété intellectuelle, les délais de prescription peuvent varier pour les droits d’auteur, les marques commerciales, les brevets, etc. Lorsque le délai de prescription est dépassé, le titulaire de droits n’est généralement plus en mesure de demander des réparations financières pour la violation de ses droits. Cela signifie qu’il ne peut plus réclamer de dommages-intérêts ou de compensation financière pour le préjudice subi.

De plus, le dépassement du délai de prescription peut également entraîner la perte du droit d’obtenir d’autres mesures, telles que l’injonction pour faire cesser la violation des droits, la saisie des produits contrefaits ou même la suppression des contenus en ligne.

Il est donc essentiel pour le titulaire de droits de prendre des mesures dès qu’il a connaissance de la violation de ses droits, afin de respecter les délais de prescription et de pouvoir exercer pleinement ses recours en justice. Cela peut inclure l’envoi d’une mise en demeure à l’auteur de la violation, le dépôt d’une plainte ou la recherche de conseils juridiques spécialisés.

En résumé, le dépassement du délai de prescription a un impact significatif sur les recours disponibles pour le titulaire de droits. Il peut entraîner la perte du droit d’obtenir des réparations financières et d’autres mesures pour faire valoir ses droits. Il est donc important d’agir rapidement et de respecter les délais de prescription pour protéger ses intérêts.

Pour lire une version plus courte de cet article sur les délais de départ de la prescription en matière de contrefaçon, cliquez

Sources :

  1. Délai de prescription de l’action en contrefaçon : la Cour de cassation ne lâche pas la bride – TAoMA Partners (taoma-partners.fr)
  2. Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 15 novembre 2023, 22-23.266, Publié au bulletin – Légifrance (legifrance.gouv.fr)
  3. Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 13 octobre 2009, 08-12.270, Publié au bulletin – Légifrance (legifrance.gouv.fr)
  4. Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 10 septembre 2013, 12-20.489, Inédit – Légifrance (legifrance.gouv.fr)
  5. Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 13 octobre 2021, 18-11.805, Inédit – Légifrance (legifrance.gouv.fr)
  6. Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 28 mars 2006, 05-11.686, Publié au bulletin – Légifrance (legifrance.gouv.fr)

Comment protéger des vêtements de marques contre la contrefaçon ?

Pour évaluer efficacement tous les risques juridiques liés à votre marque, vous pouvez utiliser le service de dépôt de marque mis en place par le cabinet Murielle-Isabelle CAHEN.

Vous voulez savoir comment pouvez protéger vos vêtements de marques contre la contrefaçon ?  Le cabinet d’avocat de Maître Murielle-CAHEN, spécialisée tant en propriété littéraire et artistique qu’en propriété industrielle, vous conseil et vous accompagne dans toutes vos démarches pour vous prémunir contre la contrefaçon.

Le droit des marques est placé sous l’égide du principe de spécialité , en vertu duquel une marque n’est réservée et protégée que pour désigner des produits ou services déterminés..

Par définition, la marque est un signe servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale de ceux d’autres personnes physiques ou morales. (Code de la propriété intellectuelle article L. 711-1).  

La contrefaçon de marque est l’atteinte illicite portée au droit du propriétaire de la marque de vêtement. Cette atteinte peut être constituée par la reproduction totale ou partielle d’un élément protégé (ici, la marque de vêtement) sa diffusion, ou encore sa représentation. Ainsi, la contrefaçon présuppose l’existence d’un droit de marque.

Le 6 juin 2018, l’Office de l’Union Européenne pour la propriété intellectuelle (l’EUIPO) a publié une étude sur les atteintes aux droits de propriété intellectuelle (DPI) dans les différents pays de l’Europe. Selon l’agence, la contrefaçon fait perdre chaque année 6,8 milliards d’euros à treize secteurs économiques clés en France. Pour cette étude, les pertes économiques dues à la contrefaçon dans le secteur du vêtement s’élèvent à plus de 2795 millions d’euros soit 6,8%.

Dans un communiqué de presse du 6 juin 2019, l’EUIPO avait déclaré que la contrefaçon coûtait 60 milliards d’euros à l’Union européenne chaque année, et ce, dans onze secteurs économiques clés. Le secteur des vêtements, chaussures et accessoires étant le plus important de tous les secteurs au niveau du volume de ventes et d’emploi, enregistre à l’échelle de l’UE un manque à gagner d’environ 28,4 milliards d’euros par an, soit 9,7 % de l’ensemble des ventes.

La contrefaçon de marque de vêtements constitue dès lors l’un des secteurs les plus ciblés par les contrefacteurs. Ces agissements illicites nous invitent donc à réfléchir sur la question de la protection des vêtements de marque contre la contrefaçon.

Ainsi, pour protéger les vêtements de marque contre la contrefaçon, il faut faire un dépôt préalable à l’institut National de la Propriété Industrielle « INPI » (I). En outre, le droit à la marque étant limité par le principe de « spécialité », il faut indiquer lors du dépôt pour quels types d’activités on entend déposer. La protection conférée par la marque ne donne un droit exclusif que dans le champ d’activité défini. Toutefois, en cas de contrefaçon de la marque de vêtement, la saisie-contrefaçon sera un moyen pour établir la preuve de ladite contrefaçon (II).

 


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I. LE DEPÔT PREALABLE DE LA MARQUE A L’INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE

Le mode naturel d’appropriation des droits sur la marque repose sur son usage dans le commerce. Néanmoins, la recherche d’une plus grande sécurité juridique a conduit le législateur à poser comme principe que pour être protégée, la marque devait être déposée et enregistrée.

Si la marque française doit faire l’objet d’un dépôt auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), le déposant d’une marque internationale s’adressera à l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) ; tandis que le candidat à la marque communautaire effectuera le dépôt de sa demande d’enregistrement auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO). Outre ces dépôts visant simultanément plusieurs pays, le déposant a toujours la possibilité de procéder à des dépôts nationaux pays par pays auprès des offices nationaux étrangers.

La demande d’enregistrement doit contenir l’énumération des produits ou services auxquels elle s’applique, ainsi que l’indication des classes correspondantes, par référence à l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services. Le déposant ne peut se contenter de citer les classes dans lesquelles il souhaite être protégé. Il est dans l’obligation d’énumérer précisément et clairement les produits ou services qu’il souhaite revendiquer .

Depuis 2018, les dépôts de marque se font exclusivement en ligne. Par conséquent, les marques sont archivées sous forme électronique.

Le fait d’être propriétaire d’une marque de vêtement déposée permet non seulement de l’utiliser mais également d’en avoir une utilisation exclusive. En effet, le dépôt préalable d’une marque de vêtement permet d’obtenir un droit privatif dès sa conception, avant même qu’elle ne soit commercialisée. Possédant un droit privatif sur la marque, son titulaire pourra par conséquent empêcher quiconque d’utiliser sa marque à son insu. La demande d’enregistrement de la marque française est publiée au Bulletin officiel de la propriété industrielle (BOPI) dans les 6 semaines à compter de la réception de la demande par l’INPI, que le dépôt ait été effectué par voie électronique à partir du site de l’Office ou bien sur formulaire papier adressé par courrier postal.

Cette publication officielle permettant l’information des tiers fait courir un délai de 2 mois durant lequel toute personne intéressée peut formuler des observations à l’INPI. En outre, tout propriétaire d’une marque antérieure en application du 1° du I de l’article L. 711-3 ou d’une marque antérieure jouissant d’une renommée en application du 2° du I de l’article L. 711-3, peut former opposition devant le directeur de l’INPI, ainsi qu’en dispose l’article L. 712-4 du Code de la propriété intellectuelle.

Parallèlement, l’lNPI procède à un examen de fond afin de s’assurer de la licéité et de la validité du signe pour lequel une marque est demandée. Aucune vérification des antériorités éventuelles n’est faite par l’office français.

A l’issue de cet examen et sans opposition des tiers, la marque est enregistrée au nom du déposant. L’enregistrement est publié au BOPI . Un certificat original d’enregistrement de marque est adressé au déposant ou à son mandataire.

L’original de ce titre de propriété doit être conservé soigneusement par le titulaire de la marque.

Par ailleurs, le dépôt permet de donner une date précise à la « création » de la marque. Grâce à cette date, il sera possible de déterminer quelle marque est ou n’est pas antérieure à la vôtre, si elle est ou non contrefaite.

De ce qui précède, il y a lieu d’affirmer que le dépôt de la marque est un mécanisme juridique de protection préalable pour le titulaire de la marque d’un vêtement. Ce dépôt qui se caractérise par l’enregistrement de la marque, lui accorde ainsi tous les droits exclusifs sur la marque et qui lui permettent d’interdire tous actes illicites des tiers. Toutefois, le législateur n’est pas resté à ce seul mécanisme de protection. Il a ainsi mis en place un autre outil juridique pour faire cesser les actes de contrefaçons en établissant la preuve lorsqu’ils sont effectués par le tiers : c’est la saisie-contrefaçon.

II. LA SAISIE-CONTREFACON, UN MOYEN D’ETABLIR LA PREUVE DE LA CONTREFACON

Autrefois, le propriétaire d’une marque, lorsqu’il s’en est assuré la propriété en remplissant les formalités exigées par les lois spéciales, peut requérir tout officier ministériel ou de police pour faire saisir les fausses marques. Il sera fait droit à sa réquisition sans autre formalité et sur simple présentation d’un acte de dépôt.

Aujourd’hui, la victime d’une contrefaçon de marque de vêtements qui veut agir en contrefaçon se voit conférer la faculté (et nullement l’obligation) de solliciter une autorisation judiciaire pour collecter des preuves des agissements qu’elle reproche en faisant procéder à une saisie-contrefaçon dans la perspective de son procès à venir.

La saisie-contrefaçon  est une procédure exceptionnelle autorisée par ordonnance d’un tribunal de grande instance qui donne le droit, dans certaines conditions, à un huissier, de se rendre dans une entreprise ou chez un particulier, éventuellement escorté d’un représentant de la force publique, à se faire communiquer des documents, à prendre des photos, à se faire remettre des échantillons et à en dresser l’inventaire (Code de la propriété intellectuelle article L. 615-5). C’est le mode de preuve le plus rigoureux.

En pratique, l’avocat de la victime présente une requête au président du tribunal de grande instance compétent matériellement et territorialement pour obtenir une ordonnance prévoyant des modalités d’exécution de la mesure qu’un huissier de justice exécutera ensuite. La victime requérante a alors l’obligation d’engager son action “par la voie civile ou pénale” (Code de la propriété intellectuelle, article L. 521-4 et L. 716-7) dans un délai relativement court (de vingt jours ouvrables ou, tout au plus, de trente et un jours civils) à compter de l’exécution de la saisie-contrefaçon.

Pour celui qui s’estime victime d’une contrefaçon, il s’agit de faire jouer un avantage en bénéficiant de cet effet de surprise provoqué par l’exécution d’une mesure intrusive ordonnée à l’insu de celui qui la subit.

En outre, le législateur a prévu des sanctions tendant à punir ou faire cesser les actes de contrefaçon.

Les sanctions civiles sont non seulement l’interdiction de poursuivre ou de reprendre les actes de contrefaçon, mais permettent également d’obtenir des dommages et intérêts et contraindre le contrefacteur à publier le jugement de condamnation.

En ce qui concerne les sanctions pénales,  les articles L. 716-9 et L. 716-10 du Code de la propriété intellectuelle prévoient des amendes et des peines de prison pour les auteurs d’actes de contrefaçon. Ainsi, importation, exportation, production, instructions données en vue de commettre des infractions, sont punies de 4 ans d’emprisonnement et de 400 000 € d’amende (Code de la propriété intellectuelle, article L. 716-9).

Sont sanctionnées par 3 ans d’emprisonnement et de 300 000 € d’amende, la détention, l’ offre à la vente, la vente, la reproduction, l’imitation, l’apposition, la suppression, la substitution (Code de la propriété intellectuelle article L. 716-10).

En outre, il est précisé au dernier alinéa de cet article que : « Lorsque les délits prévus aux a à d ont été commis en bande organisée ou sur un réseau de communication au public en ligne ou lorsque les faits portent sur des marchandises dangereuses pour la santé ou la sécurité de l’homme ou l’animal, les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 750 000 euros d’amende. ».

Si vous voulez lire une version plus complète de cet article cliquez sur marque :

Sources :

ATTEINTE A LA MARQUE ET DEMANDE DE BLOCAGE

L’introduction d’une action en contrefaçon de marque est soumise à des conditions de forme strictes tenant à la preuve de la qualité à agir du demandeur. L’action est ouverte au propriétaire de la marque qui doit justifier de sa qualité en produisant un certificat d’enregistrement de sa marque dès l’introduction de l’action.

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Le demandeur à l’action doit s’assurer de ce qu’il est bien inscrit en tant que titulaire de la marque sur laquelle l’action est fondée dans l’hypothèse où il a acquis la marque et que ses coordonnées inscrites sont exactes. Seul le licencié exclusif est recevable à agir en contrefaçon de marque à la triple condition que le contrat de licence soit inscrit au Registre national des marques, que le contrat ne stipule pas l’interdiction pour le licencié d’agir en contrefaçon et que le licencié ait mis préalablement en demeure d’agir le propriétaire de la marque.

La juridiction exclusivement compétente pour connaître des actions en contrefaçon de marques est la juridiction civile. Cette compétence exclusive du tribunal de grande instance s’étend aux questions connexes de concurrence déloyale. Depuis 2009, seuls dix tribunaux de grande instance sont compétents pour connaître des actions en matière de marques. Ils sont visés à l’article D. 211-6-1 du Code de l’organisation judiciaire. Seul le tribunal de grande instance est compétent pour statuer sur les actions en contrefaçon de marque communautaire.

L’action en contrefaçon de marque peut être portée soit devant le tribunal civil soit devant le tribunal pénal. Elle se prescrit par trois ans. Le point de départ de la prescription est la commission de l’infraction, étant entendu de la contrefaçon est une infraction continue ce qui signifie que le délai de prescription ne commence qu’une fois l’acte incriminé terminé.


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L’action en contrefaçon nécessite la collecte de preuves. La contrefaçon se prouve par tous moyens. Cependant le Code de la propriété intellectuelle prévoit une procédure de collecte des preuves exorbitante du droit commun, la saisie-contrefaçon. Elle est régie par l’article L. 716-7 du Code de la propriété intellectuelle.

Elle doit être autorisée sur requête par le Président du tribunal de grande instance. Elle permet à un huissier de décrire les objets revêtus de la marque arguée de contrefaçon et de saisir réellement des échantillons et voire le stock des produits argués de contrefaçon de marque. Cette saisie réelle peut porter sur les matériels et instruments utilisés pour fabriquer ou distribuer ou fournir les services prétendument contrefaisants.

L’existence d’un fondement propre au droit des marques quant aux demandes de blocage adressées aux fournisseurs d’accès à internet n’impose pas d’écarter le fondement issu de la loi pour la confiance dans l’économie numérique. Tel est l’enseignement de l’ordonnance de référé rendue le 8 janvier 2020 par le Tribunal judiciaire de Paris.

Dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019, l’article L. 711-1 du Code de la propriété intellectuelle définit la marque de fabrique, de commerce ou de service comme un signe susceptible de représentation graphique servant à identifier les produits ou services d’une personne physique ou morale (Code de la propriété intellectuelle art. L. 711-1, anc.).

Avec la directive 2015/2436 du 16 décembre 2015 rapprochant les législations des États membres sur les marques, et le règlement 2015/2424 du 16 décembre 2015, le critère de la représentation graphique disparaît, changeant la définition de la marque (Dir. (UE) 2015/2436 du Parlement européen et du Conseil 16 déc. 2015Règl. (UE) 2015/2424 du Parlement et du Conseil, 16 déc. 2015).

L’article 4 du règlement (UE) n° 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne (qui remplace le Règlement (UE) 2015/2424 précité) reprend cette modification et précise que peuvent constituer des marques tous les signes propres à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises et pouvant être représentés dans le registre des marques de l’Union européenne « d’une manière qui permette aux autorités compétentes et au public de déterminer précisément et clairement l’objet bénéficiant de la protection conférée à leurs titulaires » (Règl. n° (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil 14 juin 2017, art. 4 : JOUE n° L 154, 16 juin 2017).

Ces changements ont été pris en compte dans la loi française par l’adoption de l’ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019, prise en application de l’article 211 de la loi Pacte, qui transpose ces textes du « paquet marques » (Ord. n° 2019-1169, 13 novembre 2019 : JO, 14 nov.) (L. n° 2019-486, 22 mai 2019 : JO, 23 mai, art. 201).

À compter de son entrée en vigueur, l’article L. 711-1 du Code de la propriété intellectuelle précité disposera que : « la marque de produits ou de services est un signe servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale de ceux d’autres personnes physiques ou morales. Ce signe doit pouvoir être représenté dans le Registre national des marques de manière à permettre à toute personne de déterminer précisément et clairement l’objet de la protection conférée à son titulaire. » (Code de la propriété intellectuelle, art. L. 711-1, mod. par Ord. n° 2019-1169, 13 nov. 2019) .

Les dispositions de l’article L. 713-2 du Code de la propriété intellectuelle interdisent « l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services :  1° D’un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée ; 2° D’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque. »

L’article 5 de la directive CE n° 2008/95 du Parlement et du Conseil du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres sur les marques habilite le titulaire de la marque à interdire aux tiers « de faire usage, dans la vie des affaires, d’un signe identique à la marque pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée (…) ».

Concrètement, la reproduction consiste donc à confectionner ou reproduire la marque.

La bonne ou mauvaise foi du contrefacteur n’est pas prise en considération, seule compte la comparaison des signes en présence.

Toute marque portant atteinte à un droit antérieur régulièrement protégé peut être annulée. L’exercice de l’action est réservé au titulaire du droit antérieur (titulaire d’une marque, d’un dessin ou modèle, d’un droit à une appellation d’origine).

L’annulation d’un dépôt de marque pour fraude ne suppose pas la justification des droits antérieurs de la partie plaignante sur le signe litigieux, mais la preuve de l’existence d’intérêts sciemment méconnus par le déposant.

I. Fait et procédure

En l’espèce, des sociétés ont constaté que des sites internet commercialisaient des contrefaçons de montres sur lesquelles étaient reproduites les marques dont elles étaient titulaires. Ces sociétés ont donc fait assigner en référé les fournisseurs d’accès à internet (FAI) Orange, Bouygues Telecom, Free et SFR sur le fondement de l’article 6.I.8 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) du 21 juin 2004, lequel dispose que « l’autorité judiciaire peut prescrire en référé ou sur requête, à toute personne mentionnée au 2 [i.e. les fournisseurs d’hébergement] ou, à défaut, à tout personne mentionnée au 1 [i.e. les fournisseurs d’accès à internet], toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne ».

La demande porte ainsi sur le blocage de l’accès, depuis la France et par les abonnés des FAI, aux sites concernés.

Cependant, l’un des fournisseurs d’accès à internet invoque le fait que cet article, sur lequel la demande des sociétés est fondée, n’est pas applicable en l’espèce : en effet, il existe au sein du Code de la propriété intellectuelle une disposition spécifiquement applicable à l’atteinte au droit sur la marque, à l’article L. 716-6 (devenu art. L. 716-4-6 depuis l’ord. n° 2019-1169, 13 novembre 2019, relative aux marques de produits ou de services qui transpose en droit français la directive (UE) 2015/2436 du 16 décembre 2015).

L’article dispose en effet que « toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l’encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon.

La juridiction civile compétente peut également ordonner toutes mesures urgentes sur requête lorsque les circonstances exigent que ces mesures ne soient pas prises contradictoirement, notamment lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur.

Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu’il est porté atteinte à ses droits ou qu’une telle atteinte est imminente » (al. 1er) et que, « lorsque les mesures prises pour faire cesser une atteinte aux droits sont ordonnées avant l’engagement d’une action au fond, le demandeur doit, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit se pourvoir par la voie civile ou pénale, soit déposer une plainte auprès du procureur de la République.

À défaut, sur demande du défendeur et sans que celui-ci ait à motiver sa demande, les mesures ordonnées sont annulées, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés » (al. 5).

Dès lors, la question porte sur le point de savoir si l’existence de l’article L. 716-6 du Code de la propriété intellectuelle doit amener à écarter l’application du « référé-internet » de l’article 6.I.8 de la LCEN.

L’enseignement de l’ordonnance de référé est clair : le fournisseur d’accès à internet ne démontre pas que le législateur (européen comme français) aurait eu la volonté d’exclure le référé-internet par la création de la règle figurant désormais à l’article L. 716-4-6 du Code de la propriété intellectuelle. Partant, les demandes de blocage de l’accès à certains noms de domaine faites par les sociétés titulaires des marques peuvent être fondées sur l’article 6.I.8 de la LCEN.

Le juge n’a donc pas été convaincu par l’argumentaire développé par le fournisseur d’accès à internet, selon lequel il y avait lieu d’appliquer en l’espèce l’adage specialia generalibus dérogeant pour écarter l’article 6.I.8 au bénéfice exclusif de l’article L. 716-6. Dans l’absolu, la référence au droit commun et au droit spécial pour envisager les articles respectivement issus de la LCEN et du Code de la propriété intellectuelle ne va pas de soi.

Il est en effet possible de considérer les règles comme étant toutes deux des règles spéciales, l’une étant issue de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000, dite « e-commerce » ou « commerce électronique », l’autre de la directive 2004/48/CE du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle.

La réserve n’est pas d’ordre purement terminologique, mais justifie peut-être, au moins partiellement, la solution retenue : en effet, le juge semble avoir été convaincu par l’analyse des sociétés demanderesses, au terme de laquelle l’article L. 716-6 du Code de la propriété intellectuelle « n’est pas une lex specialia » dérogeant à la règle contenue dans la LCEN, « puisqu’il s’agit de deux régimes distincts […] par leur nature, leurs modalités et leurs objectifs », « tous deux [étant] susceptibles de s’appliquer en matière d’atteinte aux marques en fonction des circonstances de chaque espèce ».

II. La portée de l’ordonnance du tribunal judiciaire de Paris du 8 janvier 2020, n° 19/58 624

La solution retenue par l’ordonnance dont il est ici question n’est d’ailleurs pas sans rappeler des débats similaires en matière de droit d’auteur et de droits voisins. Notamment, par un arrêt rendu le 15 septembre 2016 (CJUE 5 septembre 2016, aff. C-484/14, Tobias Mc Fadden c. Sony Music Entertainment), la Cour de justice de l’Union européenne avait également retenu le fondement de la directive « e-commerce », alors même que la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information prévoit un référé propre au droit d’auteur (la règle étant transposée en droit français à l’article L. 336-2 du Code de la propriété intellectuelle).

Certes, la Cour de justice prenait soin dans cet arrêt de préciser que la directive « e-commerce » devait être interprétée notamment compte tenu des exigences découlant des règles prévues par les directives 2001/29 et 2004/48.

Néanmoins, le fondement retenu était bien, comme en l’espèce, celui issu de la directive « e-commerce », de sorte qu’une application sélective des textes fondée sur specialia generalibus derogant n’était pas de mise dans l’esprit de la Cour.

C’est un raisonnement similaire qui est retenu au terme de la présente ordonnance : le juge se réfère notamment au considérant 45 de la directive « e-commerce » (« les limitations de responsabilité des prestataires de services intermédiaires prévues dans la présente directive sont sans préjudice de la possibilité d’actions en cessation de différents types.

Il est à noter qu’en matière de droits d’auteurs, par un arrêt du 22 juin 2021, la Cour de Justice de l’Union européenne avait confirmé sa position jurisprudentielle sur la question de la responsabilité des plateformes en ligne, en ce qui concerne de la mise en ligne illicite par les utilisateurs de celles-ci de contenus protégés par le droit d’auteur.

Au sens de l’article 3 de la directive 2001/29, les juges ont estimé que les exploitations des plateformes en ligne ne font pas une communication au public eux-mêmes des œuvres qui bénéficient de la protection du droit d’auteur, et qui sont mises en ligne illicitement par leurs utilisateurs. Par ailleurs, une exonération de responsabilité des plateformes intermédiaires est prévue par la directive 2000/31 sur le commerce électronique, dans la mesure où elles ne jouent pas un rôle actif lui conférant une connaissance et un contrôle des contenus accessibles sur sa plateforme.

Ces actions en cessation peuvent notamment revêtir la forme de décisions de tribunaux ou d’autorités administratives exigeant qu’il soit mis un terme à toute violation ou que l’on prévienne toute violation, y compris en retirant les informations illicites ou en rendant l’accès à ces dernières impossible ») et au considérant 23 de la directive 2004/48 (« sans préjudice de toute autre mesure, procédure ou réparation existante, les titulaires des droits devraient avoir la possibilité de demander une injonction à l’encontre d’un intermédiaire dont les services sont utilisés par un tiers pour porter atteinte au droit de propriété industrielle du titulaire.

Les conditions et procédures relatives à une telle injonction devraient relever du droit national des États membres ») ainsi qu’aux travaux parlementaires internes. Il ressort de ces éléments, pour le juge, que la coexistence des deux fondements n’implique pas une exclusion automatique de l’article 6.I.8 de la LCEN.

Il est vrai que la pluralité de possibilités existant en ce domaine rend le choix du type de référé plus délicat ; dans cette perspective, la solution retenue en l’espèce n’est pas totalement surprenante.

Toutefois, il faut malgré tout de convenir du fait que le fondement issu du Code de la propriété intellectuelle (en l’espèce, l’article L. 716-4-6, anc. L. 716-6) est sans doute plus adapté et devrait, dès lors, avoir vocation à être mis en œuvre prioritairement lorsqu’est en cause une atteinte à une marque, dans la mesure où la disposition est précisément prévue pour ce type spécifique d’atteinte.

Néanmoins, l’incontestable proximité des règles explique sans doute la souplesse de l’interprétation : puisque les deux référés, bien que distincts, sont très similaires, le juge n’est pas tenu par une logique d’exclusion d’une disposition.

En conséquence, et puisque la loi pour la confiance dans l’économie numérique est applicable en l’espèce, les sociétés demanderesses n’avaient pas à introduire une action au fond, comme le requiert l’article L. 716-4-6 in fine du Code de la propriété intellectuelle.

Une fois l’argument du fournisseur d’accès à internet écarté, le juge considère que l’article 6.I.8 de la LCEN constitue un fondement opportun et ordonne à tous les fournisseurs d’accès à internet défendeurs de mettre en œuvre, dans un délai de quinze jours à compter de la signification de l’ordonnance et pour une durée de douze mois, toutes mesures propres à empêcher l’accès par leurs abonnés depuis le territoire français des sites litigieux.

Pour lire une version plus complète de l’article sur le blocage de marque, cliquez

SOURCES :

Dépôt d’une marque en France

Le droit des marques est une branche importante du droit de la propriété intellectuelle et plus particulièrement du droit de la propriété industrielle. La marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique qui permet de distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale de ceux des concurrents et dont le droit des marques permet l’appropriation. Ainsi, la marque a une fonction essentiellement distinctive. Elle permet de garantir l’origine des produits. Le droit des marques confie alors à son titulaire un droit exclusif d’exploitation.

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Pour qu’un signe soit qualifié de marque, il doit remplir certaines conditions de fond et de forme. Tout d’abord, il doit être licite, susceptible de représentation graphique, distinctif et disponible. Le caractère distinctif signifie que le signe doit permettre de différencier les produits qu’il désigne. Le caractère disponible signifie que le signe ne doit pas avoir fait l’objet d’une appropriation antérieure.


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Nous allons voir comment il est possible d’acquérir une marque, ce qu’est l’opposition à l’enregistrement d’une marque et comment s’effectue la transmission d’une marque.

I – L’acquisition d’une marque par l’enregistrement

Une loi du 31 décembre 1964 a instauré dans le droit français l’enregistrement comme système unique d’acquisition du droit sur une marque. En effet, l’article L712-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose ainsi :  » La propriété de la marque s’acquiert par l’enregistrement.  » Le droit sur une marque s’acquiert donc par l’enregistrement, lequel produit ses effets pour une période de dix ans indéfiniment renouvelable, dès la date de dépôt de la demande auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI).

Le dossier de dépôt comprend notamment la demande d’enregistrement avec le nom du demandeur, le modèle de la marque, la liste des produits et services désignés. L’enregistrement confère un droit de propriété sur la marque qui permet au titulaire de ce droit d’agir contre les tiers qui utilisent le signe sans autorisation. Ainsi, lorsqu’un tiers utilise une marque concurrente enregistrée, il peut être poursuivi pour contrefaçon par le titulaire du droit sur la marque.

Dans le cadre du référencement sur internet, l’utilisation d’une marque concurrente pour le référencement de son site crée un risque de confusion sur l’origine des produits, et est donc constitutive de contrefaçon. Une décision du 3 mars 2020, la Cour d’appel de Paris a reconnu la contrefaçon d’une marque enregistrée, quand cette marque a été réservée par une autre société proposant des services identiques. La Cour a considéré que cette utilisation de la marque en tant que mot clé crée un risque de confusion dans l’esprit du consommateur quant à la provenance des services.

Une fois la demande d’enregistrement effectuée, l’INPI l’examine et un délai s’ouvre pour permettre l’ouverture d’une procédure d’opposition, si le titulaire d’une marque antérieure se manifeste.

II – L’opposition à l’enregistrement d’une marque

La Directive du 11 décembre 2019 est venue modifier la procédure d’opposition à une marque, pour toutes les marques déposées à compter du 11 décembre 2019.

L’organisme officiel examine les conditions de fond et de forme que le signe doit remplir puis il publie le dépôt au Bulletin officiel de la propriété industrielle (BOPI). À compter de ce dépôt, s’ouvre une période de deux mois au cours de laquelle toute personne intéressée peut formuler des observations transmises au déposant. Il y a alors une phase contradictoire où le déposant et l’opposant pourront partager leurs observations, jusqu’à trois fois, dans un délai d’un à deux mois entre chaque nouvelle observation. Il s’agit d’une procédure d’opposition qui est ouverte aux propriétaires de tous droits antérieurs, en effet la directive a élargi les bénéficiaires du droit d’opposition. Là où ce droit n’était ouvert auparavant qu’aux propriétaires de marques bénéficiant d’un droit de priorité, au propriétaire d’une marque notoire ou au bénéficiaire d’un droit exclusif d’exploitation.

La procédure est intentée directement devant l’INPI par le titulaire de la marque antérieure. Ce dernier doit fournir la preuve de son droit antérieur et exposer les motifs qui l’amènent à penser que l’opposition est justifiée. Si l’opposition est justifiée, la demande d’enregistrement de la nouvelle marque est rejetée. Sinon, l’enregistrement de la nouvelle marque est admis et l’acquisition du droit validée. L’INPI dispose d’un délai de 3 mois après la fin de la phase contradictoire, pour rendre sa décision.

L’objectif de cette procédure d’opposition est la prévention et non la sanction. L’opposition ne permet pas à celui qui l’introduit d’obtenir des dommages et intérêts. C’est en cela que cette procédure se distingue de l’action en contrefaçon, action qui vise pour le titulaire de la marque antérieure à obtenir réparation par le biais de dommages et intérêts.

Pour faire une demande d’opposition, le titulaire de la marque antérieure dispose d’un délai de deux mois à partir de la publication par l’INPI de la demande d’enregistrement au BOPI de la nouvelle marque. Une fois ce délai écoulé, le titulaire de la marque antérieure ne peut plus agir en opposition devant l’INPI et devra saisir un tribunal d’une action en nullité de la marque. Il est donc important de réagir rapidement.

III – La transmission de la propriété du droit sur la marque

Une marque est un droit de propriété industrielle qui peut être exploité. Elle peut donc être vendue, louée ou apportée en société. En droit de la propriété industrielle, une transmission ou une modification des droits attachés à une marque qui a été enregistrée auprès de l’INPI, doit être inscrite au Registre National des Marques. Cette inscription est une formalité de publicité qui rend la transmission opposable aux tiers.

Un arrêt du 15 février 2018 précise également qu’en cas de fusion-absorption d’une société, il doit y avoir une demande d’inscription de la transmission totale de propriété des marques auprès de l’INPI.

Si une marque est transmise sans accomplissement de cette formalité de publicité, la transmission pourra rester valable mais elle sera inopposable aux tiers. Le nouveau titulaire de la marque ne pourra alors pas agir en contrefaçon à l’égard de ses concurrents, ce qui revient à limiter le droit du nouveau titulaire sur sa marque.

La cession des droits attachés à une marque peut se faire totalement ou partiellement et ne porter que sur une zone géographique déterminée. Ces conventions doivent être rédigées par écrit, sous peine de nullité.

En conclusion, une marque s’acquiert, en droit français, par le biais de l’enregistrement. C’est l’INPI qui examine cette demande d’enregistrement et la publie au BOPI. Un délai s’ouvre alors pour permettre au titulaire d’une marque antérieure de s’opposer à l’enregistrement de la nouvelle marque. Enfin, les droits attachés à une marque peuvent se transmettre : être vendus, apportés en société ou bien loués.

Pour lire l’article sur le dépôt de marque en version plus complète, cliquez ici

Sources :
– http://www.loncle-avocat.fr/actualite-130-principes-du-droit-des-marques.php#oppositions
– Marques de fabrique, de commerce ou de service – Joanna SCHMIDT-SZALEWSKI – octobre 2006
– https://www.jesuisentrepreneur.fr/faq-juridique/protection-des-marques-et-creations/proteger-sa-marque/comment-transmettre-sa-marque.html
– https://www.legalstart.fr/fiches-pratiques/depot-marque/opposition/#ancre1
– https://www.inpi.fr/fr/proteger-vos-creations/proteger-votre-marque/les-etapes-cles-du-depot-de-marque
– https://www.eurojuris.fr/articles/la-transmission-de-marque-8815.ht
– CA Paris, 3 mars 2020 n° 18-09051
– Directive (UE) 2015/2436 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2015 rapprochant les législations des États membres sur les marques
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000031891662
– Cour d’appel de de Douai, 15 février 2018, n° 17/04714