Rapport entre dénigrement et concurrence déloyale et contrefaçon

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Quels rapports entretiennent le dénigrement, la concurrence déloyale et la contrefaçon ?

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Le dénigrement peut être défini comme une affirmation malveillante dirigée contre un concurrent dans le but de détourner sa clientèle ou plus généralement de lui nuire dans un esprit de lucre (Cour d’Appel de Lyon, 21 mai 1974 : JCP éd. G 1974, IV, p. 336). Concrètement, il désigne toute action exercée auprès du public en vue de jeter le discrédit sur un commerçant, sur le fonctionnement de son entreprise ou sur ses produits.

En ce qui concerne la concurrence déloyale, c’est le fait, dans le cadre d’une concurrence autorisée, de faire un usage excessif de sa liberté d’entreprendre, en recourant à des procédés contraires aux règles et usages, occasionnant un préjudice.

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S’agissant de la contrefaçon, c’est l’atteinte portée à un droit de propriété intellectuelle. Une action en justice permet de la sanctionner et d’y mettre un terme, l’action en contrefaçon.

Pour faire la différence entre ces trois notions, il y a lieu de les étudier chacune et de faire ressortir les rapports qu’elles entretiennent juridiquement entre elles.

  • I. Rapport entre dénigrement et concurrence déloyale et contrefaçon

La contrefaçon est caractérisée lorsqu’une personne reproduit, voire utilise, sans l’autorisation de son titulaire, une œuvre protégée, un logiciel, un brevet d’invention, un dessin ou modèle, une marque de fabrique…

En propriété littéraire et artistique, la contrefaçon sera retenue en cas, par exemple, de reproduction d’une photographie dans un livre sans l’autorisation du photographe ou de diffusion d’une chanson via le réseau Internet sans l’accord du compositeur et de l’interprète.

Les exemples d’actes contrefacteurs dans le domaine de la propriété industrielle sont nombreux et variés et concernent parfois des marchés très importants, notamment, dans le secteur du luxe ou du médicament.

La contrefaçon peut être définie comme toute atteinte à un droit de propriété intellectuelle. Cette atteinte peut être constituée par la reproduction totale ou partielle d’un élément protégé, sa diffusion, ou encore sa représentation. La définition et le régime juridique de la contrefaçon diffèrent selon le droit concerné. Seront brièvement exposés ici les actes constitutifs de contrefaçon pour le droit d’auteur, le brevet et la marque.

Le monopole d’exploitation de l’auteur comprend essentiellement le droit de reproduction et le droit de représentation, mais aussi toute autre modalité d’exploitation. En conséquence, toute édition d’écrits, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs, est une contrefaçon tout comme toute représentation, toute reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur, ou de ses ayants droit, est illicite et constitue une contrefaçon sans qu’il soit besoin d’établir la mauvaise foi du contrefacteur (Code de la Propriété intellectuelle art. L. 335-2 et L. 335-3).

Il en va de même pour la traduction, l’adaptation, la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque (Code de la Propriété intellectuelle art. L. 122-4).

Toute atteinte portée aux droits du propriétaire du brevet, tels qu’ils sont définis aux articles L. 613-3 et L. 613-6, constitue une contrefaçon (Code de la Propriété intellectuelle article L. 615-1). Il peut s’agir de :

– la fabrication, l’offre, la mise dans le commerce, l’utilisation ou bien l’importation ou la détention aux fins précitées du produit objet du brevet ;

– l’utilisation d’un procédé objet du brevet ou, lorsque le tiers sait ou lorsque les circonstances rendent évident que l’utilisation du procédé est interdite sans le consentement du propriétaire du brevet, l’offre de son utilisation sur le territoire français ;

-l’offre, la mise sur le marché, l’utilisation, l’importation, l’exportation, le transbordement ou la détention aux fins précitées du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet;

– l’offre, la mise dans le commerce ou l’utilisation ou bien l’importation ou la détention aux fins précitées du produit obtenu directement par le procédé objet du brevet.

Pour la marque, on distingue les actes de contrefaçon constitués sans qu’il existe un risque de confusion avec la marque protégée des actes pour lesquels la preuve d’un tel risque doit être nécessairement rapportée.

Selon l’article L. 713-2 du Code de la propriété intellectuelle, il est interdit, sans l’autorisation du titulaire de la marque de, l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services d’un signe :

  • identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée.
  • identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque.

En revanche, aux termes de l’article L. 713-3 du même code, est interdit l’usage dans la vie des affaires, pour des produits ou des services, d’un signe identique ou similaire à la marque jouissant d’une renommée et utilisé pour des produits ou des services identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, si cet usage du signe, sans juste motif, tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque, ou leur porte préjudice, et ce, sans l’autorisation du titulaire de la marque.

La preuve de la contrefaçon incombe, en principe, au titulaire du droit de propriété incorporelle auquel il a été porté atteinte (auteur d’un ouvrage, breveté, créateur d’un modèle, propriétaire d’une marque). Toutefois, lorsqu’il s’agit de la contrefaçon d’un brevet ayant pour objet un procédé d’obtention d’un produit, l’article L. 615-5-1 du code de propriété intellectuelle autorise le tribunal saisi de la procédure à renverser la charge de la preuve en ordonnant au défendeur d’établir que le procédé utilisé pour obtenir un produit identique est différent du procédé breveté. Faute pour le défendeur d’apporter cette preuve, tout produit identique fabriqué sans le consentement du titulaire du brevet sera présumé obtenu par le procédé breveté dans les deux cas suivants :

– le produit obtenu par le procédé breveté est nouveau ;

– la probabilité est grande que le produit identique a été obtenu par le procédé breveté, alors que le titulaire du brevet n’a pas pu, en dépit d’efforts raisonnables, déterminer quel procédé a été en fait utilisé.

En ce qui concerne la concurrence déloyale, à défaut de pouvoir avoir recours à l’action en contrefaçon, réservée aux seuls éléments de la Propriété intellectuelle déposés, il est possible de protéger par exemple en droit des marques les signes distinctifs, quels qu’ils soient, par l’action en concurrence déloyale.

Fondée sur les articles 1240 et suivants du Code civil qui régissent l’action en responsabilité civile, l’action en concurrence déloyale permet de sanctionner des actes de déloyauté ou de parasitisme (usurpation ou atteinte à un signe distinctif). Conformément au droit commun de la responsabilité, cette action ne peut aboutir que si les 3 conditions suivantes sont réunies :

– l’auteur de l’atteinte au signe distinctif doit avoir commis une faute ;

– la victime doit avoir subi un préjudice ;

– il doit exister un lien de causalité entre la faute et le préjudice.

Quant au dénigrement, il ne constitue un acte de concurrence déloyale et ne peut être poursuivi que si la clientèle est en mesure de reconnaître le commerçant ou le groupe de commerçants qui en est victime. Si le commerçant n’est pas nommément désigné, il suffit que l’étroitesse du marché permette de reconnaître celui auquel s’adressent les critiques (Cour de cassation, chambre commerciale du 5 octobre 1982 : D. 1983, IR, p. 210, obs. Gavalda et Lucas de Leyssac Cour d’Appel de Versailles, 12 février 1990 : D. 1990, jurispr., p. 264, note Serra).

Il doit être clairement identifiable. A l’inverse, celui qui dévoile qu’un concurrent a fait l’objet d’une condamnation, par le biais d’informations malveillantes, se rend coupable de concurrence déloyale par dénigrement. Tel est la solution rendue par la Cour de cassation, chambre commerciale, 9 janvier 2019, 17-18.350.

Par un arrêt rendu le 4 mars 2020, la Cour de cassation précise que : « même en l’absence d’une situation de concurrence directe et effective entre les personnes concernées, la divulgation, par l’une, d’une information de nature à jeter le discrédit sur un produit commercialisé par l’autre constitue un acte de dénigrement, à moins que l’information en cause ne se rapporte à un sujet d’intérêt général et repose sur une base factuelle suffisante, et sous réserve qu’elle soit exprimée avec une certaine mesure ».

En d’autres termes, il est à noter que le dénigrement peut être constitué même en l’absence d’une situation de concurrence.

  • II. Arrêt Cour de cassation, civile, Chambre commerciale du 9 janvier 2019, 17-18.350 : Dénigrement fautif d’un partenaire commercial

La dénonciation faite à la clientèle d’une action en justice, n’ayant pas donné lieu à une décision de justice, constitue un dénigrement fautif.

La divulgation par une personne d’une information de nature à jeter le discrédit sur un produit commercialisé par une autre, constitue un acte de dénigrement, et ce même en l’absence d’une situation de concurrence directe et effective entre ces personnes.

Le dénigrement ne sera pas constitué en revanche si l’information en cause se rapporte à un sujet d’intérêt général et repose sur une base factuelle suffisante, sous réserve que cette information soit exprimée avec une certaine mesure.

C’est ce que rappelle un arrêt rendu par la Cour de cassation le 9 janvier 2019 dans une affaire où l’action en contrefaçon d’une société à l’encontre d’un tiers avait été divulguée par un agent commercial en charge de vendre ses produits. Considérant que la divulgation de l’existence d’une action en justice lui avait fait perdre des clients, le tiers a assigné la société en paiement de dommages et intérêts pour concurrence déloyale.

On rappellera que le dénigrement désigne toute action exercée auprès du public en vue de jeter le discrédit sur un commerçant, sur le fonctionnement de son entreprise ou sur ses produits.

Mais le dénigrement ne constitue un acte de concurrence déloyale et ne peut être poursuivi que si la clientèle est en mesure de reconnaître le commerçant ou le groupe de commerçants qui en est victime, ce dernier devant être clairement identifiable.

Dans l’affaire jugée le 9 janvier dernier, la demande du tiers est rejetée en appel, la cour relevant au vu des pièces produites que la dénonciation en question manquait d’objectivité, était excessive et soulignant que n’était pas démontré  » le caractère non objectif, excessif ou dénigrant, voire mensonger, des informations communiquées visant le tiers ou celui menaçant des propos tenus à l’égard des distributeurs, seul susceptible de caractériser un procédé déloyal ».

C’est au visa des articles 1382 (devenu 1240) du Code civil et 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés Fondamentales, que la chambre commerciale casse l’arrêt : la divulgation à la clientèle d’une action en contrefaçon n’ayant pas donné lieu à une décision de justice,  » dépourvue de base factuelle suffisante en ce qu’elle ne reposait que sur un seul acte de poursuite engagé par le titulaire des droits » constituait bien un dénigrement fautif.  

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SOURCES :

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