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Selfie, réseaux sociaux et propriété intellectuelle

Le  » selfie  » représente la réalisation d’un autoportrait photographique avec l’aide d’un  » smartphone « . Phénomène grandissant, il s’accompagne la grande majorité du temps de la publication de la photographie sur les réseaux sociaux. Cela pose des problèmes tant quant au droit à l’image que quant au droit d’auteur.

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L’autoportrait pris à bout de bras avec son smartphone ou sa tablette est devenu un rituel incontournable. Mais ce phénomène apparemment inoffensif se révèle aussi néfaste tant au regard du droit à l’image qu’au droit d’auteur.

Le  » selfie  » consiste à se prendre en photo afin de réaliser un autoportrait.

Il apparait dès le début du XXème siècle, où même la grande-duchesse Anastasia Nikolaïevna se prend en photo devant son miroir en 1914. Le  » selfie  » traversera le siècle jusqu’à exploser à l’ère d’Internet et des  » smartphones « .

Aujourd’hui, c’est toute une économie qui se développe autour du seul  » selfie « . Beaucoup de  » start-up  » californiennes en font l’élément central de leur succès. On connait l’exemple de l’application  » Instagram « , réseau social promouvant le  » selfie « , qui a été acheté au prix d’un milliard de dollars par le site Facebook

On comprend donc vite que le  » selfie  » pose des problèmes juridiques de différents ordres, et atteint particulièrement le droit à l’image, mais aussi la propriété intellectuelle. De plus, les interrogations sur le  » selfie  » sont ancrées dans l’actualité, non seulement car c’est un phénomène qui semble perdurer, mais car en plus la loi  » République Numérique  » le prend en considération de manière directe ou détournée.


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I. Selfie et propriété intellectuelle

A. La question de l’auteur du selfie

Le Code de la Propriété Intellectuelle protège  » toutes les oeuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination  » (art. L.112-1). Le  » selfie « , en tant que photographie, est protégé par sa simple originalité. L’article suivant insère dans la liste des oeuvres protégées les  » oeuvres photographiques et celles réalisées à l’aide de techniques analogues à la photographie  » (L.112-2).

Alors, si le  » selfie  » est une oeuvre, elle a un auteur .
Une première affaire célèbre date de 2011. Un singe avait volé l’appareil photo d’un photographe, et avait appuyé sur le déclencheur, se prenant en  » selfie « . Se posait la question de savoir qui était l’auteur de la photographie : le singe ou le photographe ?

Olivier Pignatari, Docteur en droit et avocat, se pose la question de savoir quelle serait la solution en droit français dans son article  » Le  » selfie  » d’un singe saisi par le droit « .

Le singe ne peut être l’auteur de la photo en France. En effet, la qualification d’  » oeuvre de l’esprit  » suppose son  » originalité « , l’empreinte de la personnalité de l’auteur. Même en admettant qu’il en soit capable, il reviendrait au singe lui-même de rapporter la preuve de l’originalité de l’oeuvre.

D’autant plus, que la Cour d’appel américaine a été claire sur le sujet et prive l’animal de tous droits de propriété intellectuelle, le macaque ne peut pas être l’auteur du selfie.

Les textes du Copyright Act ainsi que la jurisprudence en vigueur se référent exclusivement à des auteurs-personnes humaines. La solution qui a été retenue aurait été la même devant une juridiction française, qui considère que l’originalité implique la personnalité de son auteur, or les animaux sont dépourvus d’une personnalité juridique. Cette exigence d’une intervention humaine signifie ainsi que le selfie est dépourvu de droits de copyright/auteur, qui ne peuvent être revendiqués ni par le singe ni par le propriétaire de l’appareil photo.

Quant au photographe, la propriété de l’appareil photo ne lui confère pas la paternité de l’oeuvre. Il pourrait réclamer des indemnités car il reste cependant propriétaire de l’oeuvre.

On pourrait aussi se poser la question de la paternité du  » selfie  » pris aux Oscars en 2014. Une présentatrice de télévision américaine confia son téléphone à un acteur, qui prit une photo

L’arrêt  » Painer  » rendu en 2011 par la Cour de Justice de l’Union Européenne détermine l’originalité à travers plusieurs critères : le choix de la mise en scène, de la personne à photographier, le cadrage, l’angle de prise de vue … Ces critères peuvent s’appliquer tant à l’acteur qu’à la propriétaire du téléphone du  » selfie  » des Oscars. Cette affaire montre bien la complexité nouvelle qu’apporte les  » selfies  » dans le droit.

 B.  » Selfie  » et immeubles protégés

Les nouveaux réseaux sociaux  comme  » Instagram  » se développent autour de la photographie, mais surtout autour du  » selfie « . La nouvelle mode est de poster des autoportraits dans diverses situations, divers endroits sur ces plateformes.

Cependant, les photographies peuvent être prises devant des immeubles, considérés comme des oeuvres protégées par le droit d’auteur. L’article L.112-2 du CPI protège en effet   » Les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture et aux sciences « , donc les immeubles. Aussi, le droit d’auteur protège l’oeuvre pendant toute la vie de l’auteur, et pendant 70 ans après sa mort (L.123-1 CPI).

Certaines de nos plus célèbres constructions, comme la Philharmonie de Paris, ne sont pas encore dans le domaine public. Dès lors, chaque utilisation publique de l’oeuvre est censée être soumise à autorisation de l’auteur. La plupart des touristes qui se prennent en photo devant ces bâtiments datant du début du XXème siècle sont donc considérés par le droit français comme des contrefacteurs.

Sur ce point, le droit français parait tout à fait anachronique, et assez peu efficace. C’est pourquoi le projet de loi  » République Numérique  » cherche à introduire la  » Liberté de Panorama  » permettant de reproduire sur internet une oeuvre se situant dans l’espace public. Cependant cette loi précise que l’usage doit être à but  » non-lucratif « .

Devant la complexité de la mise en oeuvre d’une telle législation, la Cour Suprême américaine a adopté la doctrine du  » Fair Use  » qui ne sanctionne pas la publication de la photographie d’une oeuvre sur les réseaux sociaux, considérant que la publication n’est pas à but commercial. Il semble évident que la Cour de cassation l’imitera.

Les doutes ont été levé par l’article 39 de la loi pour une République numérique qui a permis de compléter l’article 122-5 du Code de la propriété intellectuelle afin de préciser dans quelle mesure une œuvre peut être reproduite.

Promulguée le 8 octobre 2016 la loi pour une République numérique apporte de nouvelles précisons sur la liberté de panorama. Elle stipule ainsi que l’auteur d’œuvres architecturales ne peut en interdire les reproductions et représentations, uniquement si elles sont réalisées par des personnes physiques à l’exclusion de tout usage à caractère commercial.

Concrètement, il est désormais permis pour les seuls particuliers et dans un usage dénué de tout caractère commercial de diffuser en ligne son selfie devant une œuvre architecturale sans obtenir l’accord préalable de son auteur ou de ses ayants-droits. En revanche, la diffusion sans autorisation de la photographie d’une œuvre architecturale protégée sur des portails commerciaux ou hébergeant de la publicité, notamment les réseaux sociaux, reste à l’inverse interdite.

Par ailleurs, cette liberté concerne également les sculptures et les installations publiques, qui sont considérés comme faisant partie du patrimoine culturel et visuel accessible à tous.

Les œuvres d’art contemporain, les installations temporaires et les monuments historiques ne sont pas couverts par cette liberté et nécessitent l’autorisation préalable de leurs auteurs ou de leurs ayants droit.

En Europe, la liberté de panorama est reconnue par la directive européenne sur le droit d’auteur en date du 26 mars 2019, qui permet aux États membres de l’Union européenne d’adopter une législation nationale autorisant l’utilisation de ces images sans demander l’autorisation préalable des détenteurs de droits d’auteur. Toutefois, les modalités d’application de cette liberté varient selon les pays.

II.  » Selfies  » et droit à l’image

A.  » Selfies  » de groupe et consentement au droit à l’image

Le  » selfie  » est une photographie, il est donc naturellement protégé par le droit à l’image .
Le droit à l’image découle de l’article 9 du Code civil, qui fonde le droit à la vie privée, et est consacré à l’article 226-1 du Code Pénal.

Quand une pluralité de personne apparait sur la photo – ou  » selfie de groupe  » – la question mérite du droit à l’image se pose. Il faut en effet le consentement de chaque personne du groupe pour publier la photographie sur Internet.

Quand une pluralité de personne apparait sur la photo – ou « selfie de groupe » – la question mérite du droit à l’image se pose. Il faut en effet le consentement de chaque personne du groupe pour publier la photographie sur Internet. En effet, il faut garder en tête que cette pratique n’est pas sans incidence et il arrive que des personnes se trouvant dans l’entourage immédiat soient prises en photo à leur insu et découvrent leur photo sur internet, parfois dans des postures qui portent atteinte à leur image, leur réputation et leur dignité.

Le consentement est tacite pour le droit à l’image. Cependant, ce consentement s’étend t-il à la publication de l’image sur les réseaux sociaux ? Ces deux droits sont distincts, et donc les consentements aussi.

Encore une fois, ici il y a peu de contentieux. Le  » selfie  » implique souvent autant la prise de la photographie que sa publication sur les réseaux sociaux, et donc le consentement est tacite. De plus, le  » selfie  » est souvent réalisé avec des proches, et donc si le consentement n’était pas tacite, le problème sera la plupart du temps réglé à l’amiable. La seconde personne dispose néanmoins de son droit à l’image et pourrait s’en prévaloir devant un juge, il est donc recommandé de demander l’autorisation de poster le  » selfie  » de groupe à chacun des individus présent sur la dite photographie.

Bien que de ce principe est né la jurisprudence sur le Revenge Porn, qui est  le fait de rendre publiques des images intimes d’un partenaire, obtenues initialement pour son seul usage personnel avec le consentement de la personne représentée, puis rendues publiques aux fins de nuire à celle-ci, généralement à la suite d’une séparation. Bien que l’action sur le fondement de l’article 226-1 du Code pénal a été condamnée par l’arrêt de 2016, cela a permis l’introduction dans le Code pénal de l’article 226-2-1 condamnant une telle pratique. Une décision du TGI de Bobigny du 20 novembre 2018 avait également retenu que le revenge porn était une atteinte à la vie privée.

De cette application est née la protection relative à la pornodivulgation, introduite dans le Code pénal à la suite de la promulgation de la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016. La pornodivulgation consiste à publier sur internet des images ou des vidéos pornographiques de son ancien compagnon souvent après une rupture amoureuse.

Cette pratique constitue à présent un délit sévèrement sanctionné. Désormais condamné par l’article 226-2-1 du Code pénal, le Revenge porn n’a pas toujours fait l’objet de sanction par les juridictions pénales.

Dans un arrêt rendu le 16 mars 2016, la chambre criminelle de la Cour de cassation refusait, en vertu de l’article 111-4 du Code pénal, de procéder à une interprétation extensive de la loi pénale.

La Cour d’appel avait relevé que le fait d’avoir accepté d’être photographiée ne signifie pas, compte tenu du caractère intime de la photographie, que la personne avait donné son accord pour que celle-ci soit diffusée.

La Cour de cassation a cassé l’arrêt au motif que « n’est pas pénalement réprimé le fait de diffuser, sans son accord, l’image d’une personne réalisée dans un lieu privé avec son consentement. »

Le fait de porter à la connaissance du public ou d’un tiers l’image d’une personne se trouvant dans un lieu privé n’était punissable que si la captation avait été réalisée sans le consentement de la personne concernée.

Or, la photo intime est souvent prise, ou obtenue avec le consentement de la personne concernée, mais diffusée sans son accord, et ceci pour lui nuire. Cette interprétation stricte de la loi pénale avait particulièrement remué le monde politique, ce qui avait conduit quelques mois après à l’adoption de la loi pour une République numérique.

B.  » Selfies  » et image de marque

La marque , elle aussi, est une propriété intellectuelle. Selon l’article L.711-1 du CPI, elle est  » un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale « . Elle comprend donc autant les signes figuratifs (logos …), que les mots (nom de la marque …).

Une marque peut dès lors être représentée dans un  » selfie « , par son logo ou son nom, sur le fondement du droit à l’image peut demander réparation si ce  » selfie  » porte préjudice à la marque.

Cependant, une des principales limites au droit des marques est l’utilisation de la marque sans son accord quand c’est dans un but  » non commercial « . La Cour de Justice de l’Union Européenne précise avec l’expression  » lorsque ce n’est pas dans la vie des affaires « .

Ainsi, de la même façon que pour les immeubles, il semble évident que les  » selfies  » postées sur les réseaux sociaux comportant une marque pourront être publiées sans l’autorisation de la marque car la doctrine du Fair Use américain considère que ça n’est pas un usage commercial, et que dans le cas des marques, la Cour de cassation a déjà reconnu pour des associations comme Greenpeace utilisant l’image de marque d’entreprises pour une campagne publicitaire de sensibilisation que ça n’était pas un usage commercial.

III. Les accessoires du selfie et les interdictions

A. Interdiction de prendre des « selfies »

  1. Festival de Cannes

Depuis 2018, il n’est plus question de prendre des selfies sur le tapis rouge du Festival de Cannes. La raison : éviter un « désordre intempestif » durant la montée des marches.

  1. Les isoloirs

Est-ce autorisé de prendre un selfie dans l’isoloir au moment de voter ? En France, il n’y a pas de règle explicite qui l’interdit, mais il y a une condition importante à respecter : la photo ne doit en aucun cas dévoiler le choix de votre vote. Bien que la prise de photo elle-même soit légale, le vote secret est protégé par la Constitution et ne doit par conséquent pas être violé. Par conséquent, il existe une zone grise juridique concernant cette question. Cependant, le risque principal est de se faire expulser du bureau de vote. Nos voisins britanniques ont pris la question très au sérieux et appliquent une amende de plus de 6 000 euros en cas d’infraction à la confidentialité du vote.

D’autres pays, tels que les Philippines et certains États américains, interdisent strictement les selfies dans l’isoloir. Certains pays vont même jusqu’à interdire l’utilisation de téléphones portables dans tout le bureau de vote, car une photo pourrait être utilisée comme preuve de vote pour soumettre certains électeurs à des pressions.

  1. La tour Eiffel

Tombée dans le domaine public, notre très chère tour Eiffel peut être prise et diffusée partout en plein jour. La nuit cependant, les choses sont nettement différentes. En effet, une autorisation est nécessaire pour toute publication, l’éclairage étant protégé au titre du droit d’auteur.

B. Les interdictions concernant les perches à selfies

Depuis 2015, les perches à « selfie », bras télescopiques qui permettent de se prendre en photo avec du recul, sont interdites dans différents lieux culturels, comme le château de Versailles.

En effet, la perche est considérée comme un danger, entre les lustres et les objets précieux qui pourraient être détériorés. Enfin, le risque concerne également les touristes, qui en utilisant leur perche à « selfie » deviennent une proie facile pour les voleurs de portables.

A titre d’exemple le MoMa à New-York ou la National Gallery à Londres ont également banni les perches à « selfie » de leurs allées.

Bien entendu ces interdictions ne dépendent pas d’un cadre juridique légal en vigueur mais des règlements adoptés par les lieux culturels. Il vous est donc conseillé de vous renseigner avant d’envisager de prendre votre matériel.

Pour lire une version plus détaillée et complète de cet article sur les selfies, cliquez

Sources :

– http://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/poster-un-selfie-devant-la-tour-eiffel-illuminee-est-illegal_1779362.html
– Olivier Pignatari,  » Le  » selfie  » d’un singe saisi par le droit « , 2014
–   http://www.dreyfus.fr/nouvelles-technologies/le-casse-tete-juridique-du-selfie/
–   Le Figaro Madame 2015, Article  » Selfie
– Northen District of California Naruto et al. v. Slater et al., case No. 15-cv-04324-WHO, 28 janv. 2016 et United States Court Of Appeals For The Ninth Circuit 23 avril 2018.
– TGI de Bobigny, ch.5/sec.3, jugement contentieux du 20 novembre 2018
https://www.legalis.net/jurisprudences/tgi-de-bobigny-ch-5sec-3-jugement-contentieux-du-20-novembre-2018/

 

Noms de domaine

Afin d’identifier plus rapidement une page web il a été nécessaire de mettre en place les noms de domaine, ceux-ci permettent en effet aux visiteurs de se rappeler de l’adresse d’un site. Sans les noms de domaine la navigation sur le web serait devenue trop compliquée, particulièrement aujourd’hui avec le nombre important de noms de domaine. Cependant, le nom de domaine est souvent en conflit avec le droit des marques ou des noms de domaine, il a alors fallu mettre en place des règles afin que les droits de chacun soient protégés.

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Les noms de domaine qui représentent l’adresse des sites Web ont un rôle important car c’est cette adresse qui permet aux visiteurs de se rappeler l’adresse du site. Il faut aussi souvent gérer des conflits relatifs à ces noms de domaine qui se heurtent souvent au droit des marques ou à d’autres noms de domaine.


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I. Le principe des noms de domaine

A) Définition

Chaque ordinateur est identifié sur Internet par un numéro dit adresse IP (de la forme 194.52.34.67) or pour des raisons évidentes de lisibilité et de mémorisation, des adresses textuelles de type www.domaine.com ont été attribuées à ces adresses IP, or pour que le domaine renvoie vers l’adresse IP de l’ordinateur correspondant, il faut enregistrer ce nom dit nom de domaine.

Le nom de domaine est divisé en 2 parties : le nom qui est le nom de domaine proprement dit et l’extension qui est la partie derrière le point (.com , .fr ).

Le nom de domaine n’est pas acheté, il est  » loué  » pour une durée renouvelable, cependant il est cessible par son titulaire. Il est à noter que dans la jurisprudence allemande, le nom de domaine est un élément du fonds de commerce immatériel de l’entreprise.

B) L’organisation des noms de domaine

Classement par zone d’activité et/ou zone géographique qui varie selon l’extension, divers organismes gèrent l’attribution des noms de domaine en fonction de l’extension choisie, les extensions génériques du type .com, .org, … sont gérées par l’InterNIC aux États-Unis et les extensions régionales : .fr pour la France, .be pour la Belgique, … sont gérées par des organisations nationales.

C) La procédure d’enregistrement des noms de domaine

1) Le choix du nom et de la zone

a) Choix de la zone

Zone  » fr  » ou zone  » com  »

La zone  » fr  » est définie géographiquement, ceci peut constituer un handicap pour une société qui souhaite ou qui a un rayonnement mondial, mais constitue un atout pour une société qui ne s’adresse qu’à cette zone géographique.

La zone  » com  » indique un site commercial sans délimitation régionale..

b) Choix du nom

– Le choix d’un nom à caractère générique

En  » .fr « , les noms à caractère générique sont a présent autorisés par la nouvelle charte de nommage de l’AFNIC, mais selon les même conditions que les noms de domaines non génériques c’est à dire la présentation d’un extrait Kbis correspondant. Pour les  » .com  » les noms à caractère générique sont autorisés sans restrictions particulières.

– S’assurer de la disponibilité

Le nom de domaine devra être disponible. Il faut également vérifier qu’il ne porte pas atteinte aux droits d’ une marque ou de signes proches.

2) L’enregistrement du nom de domaine

a) L’enregistrement en  » .com « 

Le choix du prestataire est facultatif. Il convient de donner au « Registrar » choisi et:/ou à l’interNIC deux Domain Name Servers fournis par le fournisseur d’accès.

b) La signature du contrat de nom de domaine

Tous les Registrars proposent d’acheter directement des noms de domaine sur leurs sites web. Le contrat est signé de facto dés le paiement.

c) L’enregistrement en  » .fr « 

En zone  » fr  » il est nécessaire de passer par un prestataire de services qui a passé une convention avec l’AFNIC. Une fois le prestataire choisi, il conviendra de signer une lettre d’engagement pour le nom de domaine.

Les sous-domaines correspondent à des domaines publics comme  » .tm.fr  » pour les marques,  » .presse.fr  » pour un journal, ou bien à des domaines sectoriels  » gouv.fr  » pour le gouvernement,  »  …

Les sociétés ne peuvent pas déposer plus de trois domaines dans la zone fr. basé sur sa dénomination ou son enseigne.

d) L’enregistrement en « .eu »

L’Union européenne dispose d’un domaine national de premier niveau (ccTLD) à savoir .eu.

En effet, toute entreprise, toute organisation ou  tout individu établis dans l’Union européenne, au Liechtenstein, en Norvège ou en Islande, dispose de la faculté d’enregistrer un nom de domaine assorti de l’extension .eu. Cet enregistrement s’effectue auprès de tout bureau d’enregistrement accrédité.

3) Paiement

Sauf convention particulière, l’AFNIC facture au prestataire qui répercute le coût au client.

Le nom de domaine est attribué à l’entreprise et non au fournisseur d’accès.

 

II. Les conflits relatifs aux noms de domaine

A) Les procédures administratives

1) L’AFNIC ne gère pas les contestations.

Les contestations sont résolues entre les parties concernées, l’AFNIC n’ayant qu’un rôle d’enregistrement.

Recours contre l’AFNIC : Un société a déposé un recours contre l’Afnic qui lui refusait l’enregistrement de . Elle se basait sur le fait que cela constituait un abus de position dominante. Le recours a été rejetté.

2) L’interNIC et les autres registrants

Ils ne peuvent agir ni comme arbitres ni trancher les litiges.

L’OMPI a développé une procédure de médiation et d’arbitrage concernant les litiges relatifs aux noms de domaine. Les décisions rendues par l’Ompi ne sont pas des jugements .

Au-delà de cette procédure de médiation, il faudra agir en justice en respectant les règles classiques de compétence territoriale.

B) Les contentieux liés à l’usage de nom de domaine

Force est de constater que ce genre de contentieux est marqué par ce que l’on appelle le « cybersquatting ». Cette technique d’enregistrement frauduleux des noms de domaines permet de les revendre, d’empêcher le titulaire d’une marque de les réserver ou de tirer profit de la notoriété de la marque.

Notons que les actions en contrefaçons exercées à l’encontre d’un nom de domaine se fondent sur le droit de la propriété intellectuelle. De surplus, en droit commun, une action pour concurrence déloyale peut également être exercée sur le fondement de l’article 1240 du Code civil.

C) La jurisprudence en France

Le nom de domaine n’est pas reconnu en tant que tel par la loi. Il s’est donc posé la question de sa qualification notamment au regard d’autres noms comme le nom de marque ou bien le nom commercial. La jurisprudence ne donne pas la même qualification au nom de domaine et à la marque. Selon la jurisprudence, on observe que le nom de domaine a quasiment la même force juridique qu’une marque déposée.

Par conséquent l’utilisation d’un nom de domaine qui porterait atteinte au propriétaire d’une marque peut être sanctionnée soit pour contrefaçon (Article L335-2 du code de la propriété intellectuelle) soit pour agissement parasitaire (Articles 1382 et suivants du code civil relatifs à la responsabilité civile).

La jurisprudence est très fournie et sanctionne le dépôt frauduleux de nom de domaine s’ il existe un risque de confusion dans l’esprit du public. On peut aussi noter que le nom de domaine, s’il ne doit pas porter atteinte à une marque déposée, ne doit pas non plus utiliser le nom d’une ville, d’une marque notoire, d’une appellation d’origine contrôlée ou d’une personne s’il existe un risque de confusion. Les propriétaires du nom (la commune ou la personne concernée) sont fondées à réclamer la cessation de l’utilisation du nom de domaine .

La réservation d’un nom de domaine en .com n’empêche pas l’application de cette jurisprudence.

Dans l’hypothèse où le nom de domaine est déposé antérieurement à la marque, le propriétaire du nom de domaine peut s’opposer à l’enregistrement de la marque. La jurisprudence n’a admis cette opposition que dans des affaires ou la mauvaise foi du dépositaire de la marque était démontrée.

Par un arrêt rendu le 5 juin 2019, la Cour de cassation est venue réaffirmer que : « les règles gouvernant l’attribution des noms de domaine sur internet, qui respectent tant les principes de liberté de communication et de liberté d’entreprendre que les droits de propriété intellectuelle, n’ont ni pour objet ni pour effet de restreindre le droit du titulaire de marque d’interdire l’usage sans son consentement, dans la vie des affaires, d’un signe identique ou similaire à la marque, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux pour lesquels elle est enregistrée, si cet usage porte atteinte à la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir aux consommateurs la provenance des produits ou des services, en raison d’un risque de confusion dans l’esprit du public, sauf les effets de l’intérêt légitime et de la bonne foi quant au renouvellement de l’enregistrement de noms de domaine sur internet ».

Pour lire une version plus complète de cet article sur les noms de domaine, cliquez

Sources :

Le positionnement publicitaire

La méthode du référencement payant consiste,  à offrir, moyennant finance, au site référencé une position en tête des résultats d’une recherche sur certains mots-clés prédéfinis. La rémunération se calcule soit par nombre de clic (Pay-Per-Clic), dans le cas du positionnement par enchères, soit par CPM (coût par milles pages vues), dans le cas du positionnement publicitaire par achat du lien.

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Le « Pay for Placement » et son corollaire, le nouveau marché de mots-clés, constituent, sans doute, des techniques de web marketing fort puissantes, qui servent, notamment, des moyens pour accroître la visibilité des sites Internet et augmenter leur notoriété.

Face au succès que la technique du référencement promotionnel est censée avoir auprès des principaux acteurs de la Net économie, il convient d’examiner son niveau de conformité aux règles de droit existantes. Trois séries de questions se posent à l’égard du positionnement publicitaire :

Tout d’abord, l’éventuelle appropriation des mots-clés par les sites les plus riches et l’exclusion, sur certains engins de recherche, des sites moins dépensiers, ne constituent-elles une entorse à la libre concurrence ?

Deuxièmement, la vente des mots clés par les moteurs de recherche est-elle une publicité clandestine ?

Enfin, comment peut-on protéger les titulaires des marques victimes de la pratique de  » position squatting  » ?


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I. Le positionnement publicitaire face aux règles du droit de la concurrence

En vertu de l’article 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) : « Est incompatible avec le marché commun et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d’en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d’exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché commun ou dans une partie substantielle de celui-ci ».

Selon l’article 86 du Traité CE  » Est incompatible avec le marché commun et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d’en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d’exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché commun ou dans une partie substantielle de celui-ci « . Qu’en est il donc du positionnement publicitaire ?

Le référencement payant et la vente des mots-clés est susceptible d’aboutir à des situations anti-concurrentielles, dans la mesure où l’appropriation des mots-clés par certaines entreprises peut empêcher les acteurs du même secteur d’être visibles sur le Net. Le dernier chapitre du rapport de l’OMPI, relatif à la  » gestion des noms et adresses de l’Internet : Questions de propriété intellectuelle « , évoque ce même problème :

 » Plusieurs sociétés, sises dans plusieurs régions du monde, ont enregistré des noms de domaine comprenant tous l’élément  » Télécom « . Ce sont Symmetricom,Inc , Telecom UK ltd (, TWX Telecommunications gmbh (www.telecom.de), Telecom s.r.l. , Telstra Corporation Ltd. et Swisscom .

Néanmoins, certains des systèmes à mots clés existant actuellement ne renvoient l’utilisateur qui saisit le mot clé  » telecom  » qu’au site de Symmetricom, inc., sans rien dire des autres.(…)

En saisissant le mot clé  » golf « , l’utilisateur est dirigé d’une société sise aux États-Unis ( alors que d’autres utilisent le mot golf comme nom de domaine, en particulier une société du Royaume Uni , une société allemande, une société néerlandaise, une société australienne , etc.

Dans sa décision du 9 juin 2000, le Conseil de la concurrence a considéré, de sa part, que lorsqu’il s’agit d’opérateurs exerçant leur activité sur le même marché, il est difficile de soutenir que chacun d’entre eux détient individuellement une position dominante, sauf s’il s’agissait d’une position dominante collective, ce qui n’était pas allégué. En l’espèce, n’était prouvés ni la position dominante collective ni l’abus, il n’en reste pas moins que ces deux conditions puissent être réunies à l’avenir.

En effet, la position dominante collective pourrait être établie avec la généralisation des accords conclus entre les prestataires de positionnement payant et les outils de recherche, de telle sorte que les résultats des premiers occupent les premières places de toute recherche effectuée.

En France, par exemple, deux spécialistes en la matière, Ouverture et Espotting, ont déjà signé des accords avec, respectivement, AOL et Yahoo! Europe, par lesquels ces portails s’engagent à faire figurer les résultats fournis par les prestataires de positionnement payant partenaires en tête de liste.

Quant à l’abus de position dominante, le Conseil de la concurrence a rejeté l’argument de la société Concurrence en a affirmant que  » la fonction d’annuaire ou moteur de recherche sur Internet ne peut être tenue pour indispensable à la rencontre de la demande émanant du consommateur et l’offre de produits et services vendus sur Internet « .

Ceci signifie, a contrario, que si l’apparition dans la liste des résultats des outils de recherche était nécessaire pour accéder au marché, en exclure un opérateur serait une entrave à la libre concurrence. Or, comme on l’a déjà montré dans une étude antérieure (cf. La responsabilité des outils de recherche), la croissance exponentielle du volume des données mises en ligne rend aujourd’hui nécessaire l’utilisation d’outils de recherche pour pouvoir accéder aux informations ou aux sites s’y trouvant.

Certes, les outils de recherche peuvent choisir librement leur politique commerciale. La vente des mots clés ne paraît illicite face au droit de la concurrence, que si elle est réservée de manière exclusive à un numerus clausus d’opérateurs du marché électronique.

II. Le positionnement payant : quelle protection pour les consommateurs ?

Les moteurs de recherche  » traditionnels  » affichent les résultats d’une requête selon un algorithme qui permet de classer les sites par ordre de pertinence. L’internaute présume, donc, que les sites se trouvant en tête de liste sont ceux qui correspondent mieux à sa demande et c’est pour cette raison qu’il n’ira, très probablement, pas consulter la deuxième page.

Lors d’un positionnement payant, se pose, alors, la question suivante : dans la mesure où la liste retournée à l’internaute suite à sa requête semble objective, n’est-il pas induit en erreur s’il ignore que la présentation des résultats n’est pas seulement gouvernée par la pertinence, mais aussi dirigée par le prestataire de référencement ?

A) L’interdiction de la publicité clandestine ou trompeuse

L’article 2 du décret du 27 mars 1992 relatif à la publicité et au parrainage audiovisuel prévoit que :  » constitue une publicité toute forme de message télévisé diffusé contre rémunération ou autre contrepartie en vue de promouvoir la fourniture de biens ou de services « .

Par ailleurs, la directive  » Commerce Electronique  » du 8 juin 2000 énonce dans son article 2 que constitue une communication commerciale  » toute forme de communication destinée à promouvoir, directement ou indirectement, des biens, des services, ou l’image d’une entreprise, d’une organisation ou d’une personne ayant une activité commerciale, industrielle, artisanale ou exerçant une profession réglementée  »

Les moteurs de recherche sont des supports de publicité, puisqu’ils font la promotion des biens ou des services en échange d’une rémunération fournie par le site positionné. La jurisprudence, d’ailleurs, retient une conception large de la publicité :  » le critère essentiel de la publicité réside dans le fait qu’il puisse véhiculer un message commercial, qu’elle qu’en soit la forme « .

Le positionnement payant étant une publicité, il doit se conformer aux règles existantes en la matière. Le décret de 1992 précité dispose que  » la publicité clandestine est interdite « . Par ailleurs, la loi de 1986 sur l’audiovisuel énonce dans son article 43 al.2 que  » les messages publicitaires doivent être mentionnés comme tels « . L’article 6a de la Directive  » Commerce Electronique « , enfin, prévoit que  » la communication commerciale doit être clairement identifiable comme telle « .

Par conséquent, les engins de recherche doivent indiquer de manière claire la nature commerciale des liens figurant dans la liste des résultats, afin que l’internaute puisse savoir si un site a payé pour y figurer ou si sa présence sur la liste est le résultat d’une recherche réelle et objective.

Le Code de la consommation interdit de même  » toute publicité comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations de nature à induire en erreur, lorsque celles-ci portent sur la nature des biens ou services qui font l’objet de la publicité « .

Au délit de publicité clandestine s’ajoutera, donc, celui de publicité trompeuse, lorsque l’annonceur a acheté un ou plusieurs mots clés qui ne correspondent pas à son activité commerciale réelle.

B) L’application de la loi Sapin aux intermédiaires de positionnement payant

La loi du 29 janvier 1993, dite loi Sapin s’applique au support Internet, qu’il s’agisse d’espaces dans les bandeaux, icônes ou liens, dès lors qu’ils passent par l’intermédiaire des serveurs ou vendeurs d’espaces ou bien encore d’agences de publicité.

Le positionnement payant passe par l’intermédiaire d’un tiers, lorsque le responsable du site intéressé s’adresse non pas directement à l’outil de recherche, mais à un prestataire de référencement, qui lui se met en contact avec ce dernier.

Ces prestataires de référencement apparaissent, alors, comme des intermédiaires dans l’achat d’espace publicitaire, ce qui implique l’application de la loi Sapin. Ainsi, un contrat de mandat devra être établi par écrit entre le prestataire de positionnement et le site annonceur.

Il est encore prévu que l’intermédiaire ne pourra percevoir d’autres rémunérations que celles figurant au contrat de mandat, ce qui signifie que le prestataire ne peut être rémunéré que par l’annonceur et non pas par l’outil de recherche.

Il en va, pourtant, autrement, lorsqu’on est en présence d’un contrat de partenariat entre différents outils de recherche ou entre un outil de recherche et un site portail.

Dans ce dernier cas, le contrat n’a pas pour objet l’achat d’espace publicitaire, mais la diffusion des résultats d’un outil de recherche par un autre outil partenaire ou par un site, en échange, bien sûr d’une rémunération. Ainsi, la loi Sapin ne semble pas devoir s’appliquer en l’espèce.

III. Le  » position squatting  » et la protection des marques

Le position squatting est  » le fait de payer pour apparaître dans les premiers résultats, lors d’une recherche sur un mot clé représentant une marque, dont on détient pas les droits « . Selon une étude réalisée récemment par une société de référencement, 60% des entreprises du CAC 40 en sont victimes.

Le titulaire d’une marque peut-il s’opposer à ce que d’autres personnes utilisent celle-ci en tant que mot-clé pour acheter une position privilégiée sur les résultats des recherches des internautes ? Quels sont les recours dont celui-ci dispose vis à vis tant du squatteur que de l’outil de recherche ?

A) La responsabilité du squatteur

1) L’action en contrefaçon de marque

L’article L.713-2 du Code de la propriété intellectuelle prévoit une interdiction de l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services, sans l’autorisation préalable du titulaire de la marque: “1° D’un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée ;

2° D’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque.” (2)

L’achat, auprès d’un outil de recherche, d’une position sur un mot-clé constituant un signe protégé peut-il être considéré comme un usage de marque au sens de l’article 713-2 du CPI, même si, comme c’est le cas très souvent, le signe en cause n’est pas visiblement utilisé ?

La réponse semble être positive, compte tenu, notamment, de la jurisprudence relative à la protection des marques face à leur reproduction en tant que méta-tags dans le code source d’un site. Celle-ci considère, en effet, que l’insertion par un tiers d’un signe distinctif déposé à titre de marque dans les balises méta d’une page web peut être qualifiée de contrefaçon.

Cette solution a été confirmée récemment dans une affaire opposant deux sociétés concurrentes dans le commerce des orgues de barbarie. En l’espèce, le TGI de Paris a considéré que  » la reproduction sans autorisation par une société de la marque d’en de ses concurrents sur la page source de son site Internet était constitutive de contrefaçon et d’atteint au nom commercial de la société concurrente « .

Dans le cas du position squatting l’effet escompté est identique : faire apparaître son site dans les résultats des recherches sur les mots-clés choisis.

Le fondement  de la contrefaçon a, d’ailleurs, été utilisé de manière reconventionnelle dans une affaire opposant aux Etats-Unis deux sociétés titulaires de la marque Nissan ( Nissan motor co., ltd et Nissan computer corporation), dont l’une se plaignait du fait que l’autre apparaissait avant elle dans les résultats des recherches sur le mot-clé  » Nissan  » et  » Nissan.com « . Le tribunal américain a, pourtant, rejeté la demande.

Qu’en est-il, pourtant, si l’acheteur du mot-clé, protégé à titre de marque, est en droit d’utiliser cette dernière pour annoncer la vente des produits qu’il a acquis licitement ?

En effet, rien ne s’oppose a priori à ce qu’un vendeur membre d’un réseau de distribution utilise la marque comme élément de référencement de son site. La jurisprudence reconnaît au distributeur des produits authentiques le droit d’utilisation de la marque pour la publicité de ses produits.

La CJCE a été amené à la même conclusion par le biais de la règle de l’épuisement des droits. Dans l’affaire opposant la société BMW à un garagiste indépendant, la CJCE a, par ailleurs, jugé que le titulaire d’une marque ne pouvait  » interdire à un tiers l’usage de sa marque en vue d’annoncer au public qu’il effectue la réparation et l’entretien des produits de cette marque…  » .

Selon cette décision, la liberté du revendeur d’utiliser la marque dans la promotion a une limite, lorsque la marque est utilisée d’une  » manière telle qu’elle peut donner l’impression qu’il existe un lien commercial entre le revendeur et le titulaire de la marque et notamment l’entreprise du revendeur appartient au réseau de distribution et qu’il existe une relation spéciale entre eux « .

En revanche, dans l’affaire Citycom c. Chanel, la Cour d’appel de Paris a condamné pour contrefaçon de marque un distributeur parallèle qui revendait des produits Channel en ligne, au motif qu’il avait utilisé la marque dans le code source de son site. Elle a souligné que  » ce code permettait aux internautes, par le biais des annuaires et des moteurs de recherche d’accéder directement au site susceptible de les intéresser par la simple opposition de la marque comme mot-clé « .

Le titulaire de la marque victime de position squatting pourra, donc, intenter une action pénale en contrefaçon et se porter partie civile, devant le tribunal correctionnel. Il peut également intenter une action en référé spécifique au droit des marques sur la base de l’article L.716-6 du Code de la propriété intellectuelle, afin que le juge ordonne au contrefaçeur de ne plus utiliser la marque en tant que mot-clé pour occuper une position privilégiée dans les résultats des outils de recherche.

2) L’action en concurrence déloyale

Selon le principe de spécialité, le titulaire de la marque ne peut empêcher l’usage de celle-ci pour désigner des produits et services différents de ceux visés dans l’enregistrement. Ainsi, lorsque le site positionné n’est pas concurrent du titulaire de la marque, ce dernier ne peut pas intenter une action en contrefaçon de marque.

Cependant, le titulaire de la marque victime de position squatting peut toujours intenter une action en concurrence déloyale contre le squatteur, si celui-ci ne cherche qu’à  » profiter du travail d’autrui sans bourse délier  » et notamment lorsque les mots-clés réservés n’ont aucun rapport avec l’activité commerciale de ce dernier.

Pour cela il faut établir qu’il y une faute, un dommage et un lien de causalité entre les deux. La faute résultant du comportement déloyal, le préjudice consistera en la perte de clientèle, l’atteinte à l’image ou à la valeur de la marque.

Il en va autrement, lorsque la marque squattée est notoire et que le squatteur cherche à profiter du renommé de celle-ci pour augmenter sa visibilité. Selon l’article 713-5 du Code de la propriété intellectuelle, « L’emploi d’une marque jouissant d’une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l’enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur s’il est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cet emploi constitue une exploitation injustifiée de cette dernière« .

L’article 713-5 du Code de la propriété intellectuelle dispose que : « Ne constitue pas une contrefaçon, mais engage la responsabilité civile de son auteur l’usage dans la vie des affaires, pour des produits ou des services, non autorisé par le titulaire d’une marque notoirement connue au sens de l’article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle :

1° D’un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identique à ceux pour lesquels la marque est notoirement connue ;

2° D’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est notoirement connue, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque ;

3° D’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque est notoirement connue, si cet usage du signe, sans juste motif, tire indûment profit du caractère distinctif ou de la notoriété de la marque, ou leur porte préjudice. »

B) La responsabilité de l’outil de recherche

L’outil de recherche qui vend des mots-clés peut-il voir sa responsabilité engagée au même titre que le squatteur ?

La responsabilité des fournisseurs des outils de recherche n’est traitée ni dans la Directive Commerce Electronique 200/31/CE ni dans la loi du 1 août 2000 concernant les intermédiaires de l’Internet. Toutefois, le législateur européen a chargé la Commission de présenter un rapport, avant le 17 juillet 2003, sur la nécessité de présenter des propositions relatives à la responsabilité des  » services de moteurs de recherche « .

La directive  » commerce électronique  » précitée, ne retient la responsabilité du prestataire d’hébergement que s’il est prouvé que celui-ci a eu connaissance de l’activité illicite et n’a rien entrepris pour la faire cesser.

Dans une étude antérieure, on a proposé de faire le même raisonnement pour les outils de recherche. En effet, étant donné le rôle joué par ceux-ci dans la société de l’information, leur responsabilité ne peut être plus étendue que celle des fournisseurs d’accès et d’hébergement. Ainsi, le TGI de Paris n’a pas retenu la responsabilité du moteur de recherche Alta Vista, car il avait retiré le site qui portait atteinte aux droits de la personnalité de M. Délanoe dès qu’il en avait eu connaissance.

Doit-on mener le même raisonnement à propos des outils qui propose un service de positionnement payant ? La réponse semble être plutôt négative, compte tenu du fait que, dans ce cas précis, l’outil de recherche se présente non pas comme un prestataire technique, mais en tant que support de publicité qui vend son espace.

En droit civil, le fournisseur du positionnement payant peut être tenu responsable, sur le fondement de l’article 1240 du Code civil, si en connaissance de cause il a vendu des mots-clés déposés à titre de marques.

En droit pénal, l’outil de recherche pourrait voir sa responsabilité engagée, soit comme auteur direct d’une infraction, soit, plus probablement, comme complice, sur le fondement de l’article 121-7 du Code pénal, pour avoir fourni en connaissance de cause une aide à la commission de l’infraction.

C) La responsabilité civile délictuelle du prestataire de positionnement payant

Le droit commun de la responsabilité est fondée sur la notion de faute au sens de l’article 1240 du Code civil. Ainsi, le fournisseur d’un outil de recherche peut être tenu responsable civilement des dommages causés, du fait de la vente d’un mot-clé, à une tierce personne. Dans ce cas, cette dernière devra prouver la réalité du dommage subi, la faute du fournisseur de l’outil de recherche et un lien de causalité entre les deux.

Or, la faute de l’outil de recherche sera, le plus souvent, difficile à démontrer. Certes, dans le cas où la marque serait notoire, la responsabilité de l’outil pourrait être engagée en raison de sa connaissance du signe squatté. Quid, pourtant, s’il s’agit d’une marque non connue ?

La jurisprudence, quant à elle, se montre hésitante. En effet, si le moteur de recherche Excite a été condamné en Allemagne pour avoir vendu à la société Fragrance Counter des mots-clés déposés à titre de marques par la société Estée Lauder, sa responsabilité n’a pas été retenue par le tribunal américain, dans l’affaire Playboy, au motif que  » Playboy  » était devenu un terme générique sur Internet. Actuellement est en cours aux Etats-Unis une nouvelle affaire, opposant la société Mark Nutitionals Incorporation, titulaire de la marque Body Solutions à quatre outils de recherche (AltaVista, FindWhat, Kanoodle et Overture), qui, eux, risquent de voir leur responsabilité engagée pour avoir vendu la marque en cause à des concurrents de la société demanderesse.

Certains auteurs envisagent, même, la possibilité d’engager la responsabilité pour risque des moteurs de recherche, afin de permettre au titulaire d’une marque victime de position squatting de réparer le préjudice subi du fait de l’utilisation de celle-ci, à titre de mot-clé, dans les moteurs de recherche par une tierce personne.

Toutefois, dans un arrêt rendu le 9 avril 2014, la Cour d’appel de Paris avait reconnu à Google le statut d’hébergeur pour son service Adwords (désormais Google Ads) tel que prévu par l’article 6.I.2 de la loi du 21 juin 2004 sur la confiance pour l’économie numérique (LCEN).

Elle a affirmé que Google n’a qu’un « caractère purement technique, automatique et passif, qui implique que le prestataire de services de la société de l’information n’a pas la connaissance ni le contrôle des informations transmises ou stockées ». En effet, selon les juges, la responsabilité de Google ne peut pas être engagée puisqu’il n’a pas un rôle actif dans la sélection des mots-clés par les annonceurs.

D) La responsabilité pénale du prestataire de positionnement payant

En matière pénale, l’outil de recherche, s’il ne peut pas être considéré comme auteur de contrefaçon de marque, il peut être condamné pour complicité, s’il a facilité la commission du délit, en vendant, en connaissance de cause, à un tiers non-titulaire un mot-clé protégé par le droit des marques. Il en va de même s’il a été prévenu par le titulaire de la marque de la contrefaçon et, malgré cela, il n’a pas enlevé le positionnement en cause.

En conclusion,

on s’aperçoit que la technique du positionnement payant et de la vente des mots clés est loin d’être à l’abri des procédures judiciaires : abus de position dominante de la part des outils de recherche, publicité clandestine et/ou trompeuse, contrefaçon de marque et parasitisme sont des allégations qui, une fois invoquées, constituent une véritable menace pour les engins de recherche. De plus, intenter une action contre ceux derniers pour acquérir réparation du préjudice subi présente un avantage, lorsque l’acheteur du positionnement se prouve insolvable. Tout cela rend nécessaire d’effectuer un contrôle a priori sur les mots-clés en vente et sur la qualité des futurs acheteurs, afin d’assurer que ceux-ci sont en droit d’utiliser la marque qui se cache souvent derrière les mots-clés choisis.

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Sources :

Valeur patrimoniale d’un nom de domaine

Le nom de domaine est une succession de noms alphanumériques servant à identifier la page d’un site Internet. Pour en être propriétaire, quelques clics suffisent. En effet, une simple réservation sur le site d’un  » registrar  » est nécessaire. Depuis peu, les tribunaux lui accordent une protection quasi-équivalente à celle de la marque. Dès lors, le nom de domaine constitue un actif immatériel qu’il convient d’intégrer aux stratégies de défense de propriété intellectuelle.

Le nom de domaine peut être opposé à une marque postérieure s’il est exploité et devient, à l’instar de la marque, un actif immatériel voir un droit de propriété industrielle.

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La valeur patrimoniale d’un nom de domaine est donc très importante.

I. Le nom de domaine, nouveau signe distinctif jurisprudentiel

Le nom de domaine est attribué selon la règle du  » Premier arrivé, Premier servi « , règle indépendante de toute considération juridique tenant à la protection des droits antérieurs. En conséquence, les contentieux se sont multipliés de façon exponentielle entre les propriétaires de droit de propriété intellectuelle (principalement de marque) et les réservataires de noms de domaine.


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À l’origine, les juridictions nationales considéraient que le nom de domaine n’était soumis à aucun principe de spécialité. Ainsi, le nom de domaine portait atteinte à des droits de propriété intellectuelle antérieurs dès lors qu’il les reproduisait.

Cette jurisprudence est totalement abandonnée en 2005 grâce à un arrêt de la cour de cassation (arrêt Locatour).
 » Un nom de domaine ne peut contrefaire par reproduction ou par imitation une marque antérieure (…) que si les produits ou services offerts sur ce site sont soit identiques soit similaires à ceux visés dans l’enregistrement de la marque et de nature à entraîner un risque de confusion dans l’esprit du public « .

La cour de cassation réaffirme le principe de spécialité des signes distinctifs et dessine ses contours sur Internet.
Le nom de domaine devient alors un signe distinctif qui permet, tout comme la marque, de désigner des produits ou services et de les différencier d’autres produits ou services concurrents.

La Cour d’appel de Paris, le 26 mai 2017, affirme que « Considérant que se fondant sur les dispositions de l’article L 713-3 du Code de la propriété intellectuelle et sur la base de la marque antérieure VELTB’ n° 073529711 déposée le 19 février 2007 notamment en classes 12, 36 et 39, la Ville de Paris poursuit l’infirmation du jugement en ce qu’il a déclaré l’irrecevabilité comme forcloses de ses demandes en nullité de la marque verbale française Scootlib n° 073529711 et en contrefaçon de sa marque Velib’ du fait du dépôt et de l’exploitation de la marque Scootlib, de la réservation des noms de domaine scootlib.com et scootlib.org,, de l’usage de la dénomination sociale Scootlib France et du sigle Scootlib ; »

Les titulaires de noms de domaine ne sont donc plus seulement de simples réservataires, mais des titulaires d’un véritable droit patrimonial  sur leurs noms de domaine leur conférant un droit exclusif d’exploitation.

Dans un arrêt du 5 juin 2019, la Cour de cassation a rappelé le principe de primauté de la marque antérieur sur le nom de domaine, et inversement. Il s’agit en l’espèce d’une marque d’une collectivité territoriale, or, les conditions de l’exploitation du nom de domaine sont qu’il y ait une utilisation réelle de ce nom de domaine et qu’il y ait un intérêt légitime à l’utilisation du nom de domaine.

D’après la Cour de cassation, l’intérêt légitime est justifié que si l’offre de service est proposée sur le territoire de la collectivité dont le nom est celui du domaine, sinon il y a un risque de confusion dans l’esprit du consommateur. Cet arrêt vient renforcer un précédent arrêt du 4 octobre 2016 qui affirmait déjà une protection des marques de collectivités territoriales.

II. Le nom de domaine, véritable droit patrimonial

Le nom de domaine en tant qu’actif immatériel, doit être protégé et valorisé.

Le titulaire d’un nom de domaine a la possibilité de le commercialiser, de le vendre ou de le louer.
Afin de déterminer la valeur patrimoniale d’un nom de domaine, il est nécessaire d’utiliser des méthodes de valorisation patrimoniale.
La valorisation patrimoniale est une méthode de définition de la valeur liquidative d’une entreprise lors de sa vente.

Celle-ci s’avère, pour les noms de domaine, de plus en plus importante et d’actualité depuis l’arrivée de nouvelles extensions ouvertes à la réservation.
Pour rappel, l’extension, ou suffixe (TLD), est la partie située à droite du point. Deux grandes catégories d’extension coexistent : les gTLD (.com, .net, .org, .info…) et les ccTLD ( .fr, .de, .es, .cn…).

L’extension est un critère de référence, si ce n’est celui le plus important, pour définir la valeur d’un site internet.

Le .com a généralement le plus de valeur. En France, le .fr s’échange en général à la moitié de la valeur du .com.

En 2008, face à la vague exponentielle d’enregistrement, l’ICANN (entité gérant le système des noms de domaine) modifie le nommage sur Internet et décide d’offrir l’opportunité pour un opérateur privé de créer sa propre extension.
Cette modification transforme considérablement la dynamique des noms de domaine et permet une logique de communication ciblée et de diversification.

Lors de la première phase de lancement, il fallait envisager entre 300 et 500 000 euros afin de se procurer ces extensions. 1930 candidatures avaient été enregistrées auprès de l’ICANN. Parmi elles, Google avait candidaté pour une centaine d’extensions, Microsoft pour onze tandis que Facebook n’avait déposé aucun dossier.
Les titulaires de telles extensions seront en mesure de recevoir des annuités dues par les propriétaires des noms de domaines y étant rattachés.

Cette modification du nommage est la preuve de l’existence d’une réelle stratégie économique entourant les noms de domaine.
Pour lire l’article sur la valeur patrimoniale d’un nom de domaine en version plus complète, cliquez sur ce lien

SOURCES

http://www.entreprises.gouv.fr/propriete-intellectuelle/la-strategie-protection-la-propriete-intellectuelle-au-sein-des-poles-compe
http://eduscol.education.fr/chrgt/marques-et-nom-de-domaine.pdf
http://www.droit-technologie.org/upload/dossier/doc/2-1.pdf
Cour d’appel de Paris, 26 mai 2017, n° 16/06791
Com. 5 juin 2019, 17-22.132
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000039307014
Com. 4 octobre 2016, 14-22.245
https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/arrets_publies_2986/chambre_commerciale_financiere_economique_3172/2016_7408/octobre_7799/832_4_35228.html
Civ. 2 février 2016, no 14-20.486
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000031991291/