Droit moral des photographes et bases de données de photos

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L’œuvre relève du domaine de la propriété intellectuelle, elle doit résulter d’un effort ou du moins de, l’intervention de l’homme. En effet la protection par le droit d’auteur ne pourra être consacrée si la « création » n’est que le fruit hasard, exception faite lorsque le hasard est maîtrisé par l’homme.

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Pour qu’il y ait œuvre de l’esprit, il ne faut pas seulement un esprit, il faut que l’œuvre se concrétise dans une forme, qu’il ne faut pas confondre avec le support. On présente souvent l’originalité de l’œuvre comme essentielle au droit d’auteur. Il existe deux conceptions concernant « l’originalité de l’œuvre », l’une objective et l’autre subjective.

Subjectivement l’originalité de l’œuvre peut se définir comme la marque de la personnalité de l’auteur sur son œuvre, la conception objective a été précisée par la Cour de cassation plénière le 7 mars, dans cette décision la haute juridiction rapproche l’originalité de l’apport intellectuel de l’auteur.


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L’article L112-1 du Code de la propriété intellectuelle protège les droits des auteurs sur toutes les œuvres de l’esprit, quel qu’en soit le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination. (1)

Le numérique a permis l’avènement de nombreux problèmes concernant les droits d’auteur notamment en matière de contrefaçon relative à la photographie et au droit moral du photographe. La contrefaçon a facilité par le numérique, il est aisé de trouver, acheter une photographie, sur une base de données photographique le réel problème n’est pas l’achat, mais la contrefaçon de l’œuvre, est elle réellement la plateforme dispose-t-elle des droits d’auteurs ? L’auteur photographe voit son droit moral être mis à l’épreuve à la fois par la contrefaçon de son œuvre, mais aussi par l’essor des bases de données photographiques en ligne.

Ces bases de données de peuvent ainsi causer problème quant à la contrefaçon et la violation des droits moraux accordés à l’auteur photographe en ne lui accordant pas le crédit dû à son œuvre et le spoliant ainsi dans ses droits.

Ainsi, dans notre présent article, il sera judicieux d’observer dans quelle mesure la contrefaçon via les bases de données photographiques peut-elle atteindre aux droits morals du photographe ?

Afin de répondre à notre interrogation, il sera intéressant d’observer la protection et droit accordé à l’auteur dans la protection intellectuelle (I) afin de démontrer la nécessaire sanction de la contrefaçon (II).

 

I. LA PROTECTION ACCORDE L’AUTEUR DANS LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE

Afin d’être protégé, il est nécessaire d’identifier l’auteur de l’œuvre (A) afin d’observer les droits moraux garantis (B)

A) Identification de l’auteur de l’œuvre

La notion d’auteur n’est pas définie expressément par la loi, ainsi un essai de Michel Foucault définit la notion d’auteur comme « celui qui crée l’œuvre susceptible de faire l’objet du droit d’auteur ». On peut en tirer plusieurs conséquences : la qualité d’auteur ne dépend que de la loi et pas de la qualité des parties ; celui ayant réalisé une création de forme peut se prévaloir de la qualité d’auteur et le droit d’auteur ne peut faire l’objet d’une attribution que pour la personne physique.

L’article L111-1 du Code de la propriété intellectuelle précise que « l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit du seul fait de sa création de propriétés incorporelle et opposable à tous », cet article distingue l’auteur de l’œuvre du « façonnier ». La qualité d’auteur nécessite un effort intellectuel émanant du créateur de l’œuvre, l’anonymat d’une œuvre ne retire néanmoins pas la protection accordée à l’œuvre. (2)

L’article L113-1 et suivant du Code de la propriété intellectuelle permet la détermination de la qualité d’auteur en prenant en compte les situations impliquant plusieurs personnes. (3)

Il existe une présomption posé à l’article L113-1 du code de propriété intellectuelle précisant que la qualité d’auteur appartient sauf preuve contraire à celles ou ceux qui le nom de l’œuvre est divulguée, c’est une présomption simple portant sur la qualité d’auteur et non la titularité du droit d’auteur.

Il existe des règles spéciales concernant la qualité d’auteur notamment concernant l’auteur marié à l’article L121-9 du Code de la protection intellectuelle. (4)

L’auteur salarié est prévu à l’article L111-1 alinéa 3 prévoit « L’existence ou la conclusion d’un contrat de louage d’ouvrage ou de service par l’auteur d’une œuvre de l’esprit n’emporte pas dérogation à la jouissance du droit reconnu par le premier alinéa, sous réserve des exceptions prévues par le présent code. Sous les mêmes réserves, il n’est pas non plus dérogé à la jouissance de ce même droit lorsque l’auteur de l’œuvre de l’esprit est un agent de l’État, d’une collectivité territoriale, d’un établissement public à caractère administratif, d’une autorité administrative indépendante dotée de la personnalité morale ou de la Banque de France. ». L’article L611-7 du Code de la propriété intellectuelle est consacré à l’invention du salarié. (5)

Il existe des cas où il y a une pluralité d’auteurs, cette éventualité est comprise à l’article L113-2 du Code de la propriété intellectuelle. (6)

Dans l’œuvre de collaboration, on constate une participation réelle de plusieurs personnes, chaque contribution doit être originale et dénoter une activité créatrice, elle nécessite une participation concertée ou « communauté d’inspiration ». Chacun des auteurs disposes d’un droit particulier sur leur propre contribution à l’article L113-3 alinéa 4 : « Lorsque la participation de chacun des coauteurs relève de genres différents, chacun peut, sauf convention contraire, exploiter séparément sa contribution personnelle, sans toutefois porter préjudice à l’exploitation de l’œuvre commune. »

En matière d’audiovisuel, il existe des règles spéciales prévues à l’article L113-7 du Code de la propriété intellectuelle prévoyant la qualité d’auteur dans le cadre d’une œuvre audiovisuelle. Cette œuvre de collaboration prévoit un rôle exceptionnel pour le réalisateur et une hiérarchie des droits prévus à l’article L121-5 du Code de la propriété intellectuelle.(7)

B) Les composantes du droit moral

Le droit moral se définit comme le lien juridiquement protégé, unissant le créateur à son œuvre et lui conférant des prérogatives souveraines à l’égard des usagers, l’œuvre fut- elle entrée dans le circuit économique. Le code de la propriété intellectuelle décline le droit moral en quatre prérogatives : le droit de divulgation, le droit de repentir, le droit à la paternité, le droit au respect de l’œuvre. Le code de la propriété intellectuelle précise le droit moral à l’article L111-1 dans lequel il est précisé qu’outre la partie du droit du créateur et les droits patrimoniaux «  comportent des attributs d’ordre intellectuel et moral »

  • Droit de divulgation

Le droit de divulgation correspond à la phase de mise en contact de l’œuvre avec le public, celle-ci ne peut être décidée que par l’auteur « seul » sauf cas des œuvres collectives ou œuvre participative dans lesquelles les règles sont différentes. Le droit de divulgation se consomme dès son premier usage. Les conditions et les procédés choisis pour la divulgation sont aux seuls choix de l’auteur, un créancier de l’auteur ne peut pas exercer ce droit de divulgation en lieu et place de l’auteur débiteur, la divulgation de l’œuvre ne peut pas être contrainte par exécution forcée. Ainsi, le droit de divulgation correspond à un droit personnel, tous les actes postérieurs à la divulgation relèveront du droit patrimonial de l’œuvre.

Il est nécessaire lors de la divulgation d’un fait matériel de publication et un critère intentionnel démontrant la volonté de l’auteur de communiquer son œuvre au public, la remise à un tiers n’entraîne pas la divulgation. Ces deux critères sont cumulatifs pour intenter une action en divulgation.

  • Droit de repentir

Le droit de repentir correspond au droit de revenir sur son œuvre, il arrive pour un auteur de regretter une œuvre ou même de la trouvé imparfaite peu de temps après sa divulgation, ce droit de repentir prévu à l’article L121-4 du Code de la propriété intellectuelle , cet article prévoit que l’auteur a un droit de repentir même après la divulgation de son œuvre et non le support de celle-ci. Ce droit porte sur toutes les œuvres à l’exception de celles exclues expressément par certains textes spéciaux tels que pour le logiciel. (8)

Le droit de repentir ne s’applique que dans le cadre contractuel, tel que le contrat de cession ou de licence. Afin de mettre en œuvre le droit de repentir, cela nécessite une indemnisation du cessionnaire par l’auteur les conditions relatives à l’indemnisation son prévu à l’article L121-4 du code la propriété intellectuelle.

  • Droit à la paternité

Le droit à la paternité est une faculté accordée à l’auteur de revendiquer sa qualité d’auteur et d’exiger la figuration de son nom à côté de l’œuvre. L’auteur de l’œuvre jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre. Ce droit à la paternité de l’auteur est lié à la divulgation de l’œuvre.

  • Droit au respect de l’œuvre

L’article L121-1 précise que l’auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre. Ce droit est attaché à sa personne. Il est perpétuel, inaliénable et imprescriptible. Il est transmissible à cause de mort aux héritiers de l’auteur. L’exercice peut être conféré à un tiers en vertu de dispositions testamentaires. »

II. LA CONTREFAÇON ET LE PROBLÈME ENGENDRE PAR LES BASES DE DONNÉES

La contrefaçon des œuvres est vécue comme un fléau pour l’auteur d’une œuvre (A), plus récemment des problèmes liés aux bases de données ont pu faire l’objet d’un arrêt de jurisprudence (B)

A) La contrefaçon une atteinte directe au droit d’auteur

La contrefaçon correspond à une atteinte à un droit de propriété intellectuelle à l’encontre de l’auteur ou du cessionnaire de ses droits. Elle est caractérisée par l’article L335-2 du code de la propriété intellectuelle qui précise :

La contrefaçon est à la fois un délit civil, mais aussi un délit pénal, le titulaire des droits d’auteurs ou ayant droit ont ainsi la liberté de choisir le recours le plus approprié à leurs situations, entre juridiction civile ou juridictions pénales.

  • L’action civile

L’action civile en matière de contrefaçon est directement reliée avec la concurrence déloyale, bien que celle-ci ne concerne pas des droits similaires et une finalité commune, la cour d’appel de paris «  la première a pour fondement l’atteinte à un droit privatif tandis que la seconde sanctionne une faute commise à l’encontre d’une personne qui ne peut justifier d’un droit privatif ou en tout cas qui peut justifier d’une faute distincte de l’atteinte portée à un tel droit ». Le choix de la juridiction civile permettra l’obtention d’une attribution de dommages et intérêts plus importants qu’au pénal.

Le recours à la responsabilité civile est admis lorsqu’il s’agit de sanctionner des comportements caractérisés à l’égard d’un licencié qui ne dispose pas de l’action en contrefaçon. Il est possible d’utiliser le parasitisme à titre subsidiaire dans le cas où la contrefaçon ne serait pas reconnue.

  • Le délit de contrefaçon

La voie pénale permettra d’obtenir des condamnations emblématiques à l’encontre des contrefacteurs afin de permettre une mise en lumière ces actes délictueux.

Il n’est pas fait de différence entre les œuvres dans les atteintes au droit de propriété littéraire et artistique, en effet juridiquement toutes personnes instigatrice dans la création ou utilisatrice ou d’une œuvre en frauduleuse est considérés des auteurs sont considérés comme contrefacteurs, ils ne sont néanmoins pas traités à l’identique, en effet un particulier téléchargeant un logiciel contrefait ne serait pas sanctionné de la même manière que les professionnels de la contrefaçon (arrêt de la Cour de cassation rendu en chambre criminelle du 14 juin 2016). (8)

Le délit de contrefaçon nécessite la preuve d’un élément matériel tel que l’atteinte aux droits patrimoniaux qui se distinguent de l’atteinte des droits moraux. Les atteintes aux droits patrimoniaux concerneront principalement le droit de reproduction et le droit de représentation, deux prérogatives propres aux droits patrimoniaux.

Les articles L335-2 du Code de la propriété intellectuelle évoquent les actes répréhensibles et ces sanctions à l’encontre de la contrefaçon « Toute édition d’écrits, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs, est une contrefaçon et toute contrefaçon est un délit.

La contrefaçon en France d’ouvrages publiés en France ou à l’étranger est punie de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende.

Seront punis des mêmes peines le débit, l’exportation, l’importation, le transbordement ou la détention aux fins précitées des ouvrages contrefaisants.
Lorsque les délits prévus par le présent article ont été commis en bande organisée, les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 750 000 euros d’amende. » (9)

La contrefaçon existe que la reproduction soit totale ou partielle, qu’elle procède à des reproductions en grand nombre ou en nombre limité.

En matière de contrefaçon, au plan pénal la mauvaise foi est présumée, c’est donc à celui qui est soupçonné d’apporter la preuve qu’il est de bonne foi pour ce, faire il lui faut démontrer une erreur excusable ou une « rencontre fortuite » entre les œuvres en cause.

B) Le parasitisme des bases de données photographique

Dans un arrêt le 1er octobre 2019 par la Cour d’appel de Paris, la maison de ventes aux enchères Camard et un photographe ont obtenu la condamnation d’Artprice.com suite à la cassation partielle de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 26 juin 2013. (10)

La Cour d’appel a estimé qu’Artprice avait porté atteinte au droit de paternité du photographe en reproduisant ses photos sans son autorisation, y compris lorsque le nom du photographe était cité avec celui d’autre confrère.

La Cour a également reconnu que le site internet avait porté atteinte à l’intégrité de ses œuvres en recadrant certaines photos et en y apposant la mention « Artprice Catalogs Library ». La cour a, par ailleurs, estimé qu’Artprice avait commis des actes de parasitisme en reproduisant des clichés du photographe pour lesquels il ne réclamait pas de droit d’auteur, mais dont il avait ainsi perdu la possibilité de les faire connaître auprès d’autres clients.

Enfin, la Cour a jugé qu’Artprice avait commis un acte de contrefaçon en reproduisant la marque Camard. Il existe un risque de confusion dans l’esprit du public ne permettant pas de différencier les services des deux entreprises.

Cet arrêt complexe équivoque de part sa chronologie, mais quelque peu équivoque quant à la situation afférente aux bases de données photographiques, en effet celle-ci, peuvent se procuré les œuvres de photographie avec une facilité déconcertante et sans le consentement de son auteur, les divers réseaux sociaux et publications numériques n’offrent pas une pleine protection pour les auteurs.

La décision de la Cour d’appel révèle deux intérêts ici la première la reconnaissance de l’atteinte à l’intégrité de l’œuvre malgré le recadrage de celle-ci et l’application d’une mention faisant référence à la galerie numérique, il possible d’y voir une appréciation large de la paternité de l’œuvre et de la protection de celle-ci.

Le deuxième intérêt concerne la reconnaissance de la notion de parasitisme par la Cour d’appel, la notion de parasitisme s’apprécie comme un acte de concurrence déloyale part un acteur économique tentant de s’approprier l’effort d’un concurrent, grâce à la confusion dans l’esprit de la clientèle entre son produit ou sa marque et celui de son concurrent. L’appréciation de cette notion permet une extension de la protection accordée à la protection des droits d’auteur sur le plan commercial.

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SOURCES

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