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Se défendre face à une saisie douanière de marchandises pour contrefaçon

La saisie douanière est l’acte par lequel, à l’occasion notamment d’une opération de contrôle douanier ou d’enquête douanière, un objet (moyen de transport, marchandise, fonds, etc.) en relation avec une infraction est placé sous-main de justice par les agents de l’autorité publique, en vue d’une confiscation ultérieure ou de l’administration de la preuve. La saisie s’accompagne du pouvoir de retenir les expéditions et tous autres documents relatifs aux objets saisis (C. douanes, art. 323, § 2).

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La saisie est régie par les dispositions générales des articles 323, § 2, et 324 et suivants du code des douanes, sous réserve de l’application de dispositions spéciales, telles que celles de l’article 64.

La saisie douanière peut porter sur « tous objets passibles de confiscation » (C. douanes, art. 323, § 2), quelle qu’en soit la nature : moyen de transport, marchandises, fonds.

La saisie douanière intervient essentiellement dans les domaines suivants :

  • la non-conformité des produits à la règlementation en vigueur,
  • la contrefaçon,
  • l’infraction aux taxes douanières,
  • le trafic illégal des espèces animales et végétales sauvages et des biens culturels,
  • le trafic de stupéfiants,
  • la contrebande de tabacs,
  • le trafic d’armes,
  • et le blanchiment de capitaux.

Cependant, il arrive parfois que la saisie soit infondée et le propriétaire des biens veuille demander réparation. Si vous êtes propriétaire des biens destinés à être détruits et que vous contestez leur caractère contrefaisant, nous vous assistons et vous représentons dans le cadre de procédures d’opposition à la destruction.


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I. Saisie « non fondée »

La jurisprudence précise la notion de saisie « non fondée » au sens de l’article 402 ci-dessus :

— visant le « propriétaire des marchandises », cet article n’est pas être invoqué par une société en l’espèce italienne qui fabrique et commercialise des marchandises qui ont été saisies chez ses distributeurs en France qui en sont propriétaires (CA Paris, 18 mars 2019, no 18/04800, A au nom de l’administration des douanes et droits indirects c/ Chiappa Firearms) ;

l’annulation d’une saisie en raison d’une irrégularité de procédure (en l’espèce, une saisie opérée hors la présence d’un OPJ) n’implique pas que celle-ci soit non fondée ;

— la restitution de biens au seul bénéfice de motifs d’opportunité diffère d’une restitution en raison du caractère non fondé de la saisie (CA Amiens, 23 mai 2013, no 12/03445, X c/ Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières) ;

— l’article 402 n’étant destiné qu’à réparer la retenue momentanée de marchandises lorsqu’elle résulte d’une saisie non fondée, il ne s’applique pas à une inscription d’hypothèque provisoire sur un bien immobilier, hypothèque inscrite par la Douane en vertu d’une ordonnance d’autorisation rendue sur sa demande par le juge compétent (CA Paris, 13 mai 2014, no 2013/13824, X et a. c/ Ministère de l’Économie, des Finances et du Commerce extérieur) ;

et « seul a droit à un intérêt d’indemnité le propriétaire des marchandises lorsque leur saisie, non fondée, a été opérée en vertu de l’article 323, paragraphe 2 », ce qui n’est pas le cas en l’espèce, la consignation de sommes transportées ayant été opérée sur le fondement de l’article 465 du Code des douanes.

II. Indemnité/indemnisation

L’indemnité forfaitaire de l’article 402 ci-dessus vise à réparer la retenue mais ne prive pas le propriétaire saisi du droit de demander la réparation de l’intégralité de son préjudice sur le fondement de l’article 401 du Code des douanes qui dispose notamment que la Douane est responsable du fait de ses employés, dans l’exercice et pour raison de leurs fonctions seulement.

S’agissant de la réparation de la réduction du prix de revente d’un bateau ainsi que des frais d’entretien. Le propriétaire doit apporter la preuve de ce préjudice.

Il a été jugé d’abord que, lorsqu’un juge ordonne la restitution de marchandises saisies (des objets de collection) par la Douane, leur propriétaire peut, sur le fondement de l’article 401, obtenir réparation, d’une part, de leur détérioration lors des opérations de saisie ou lors de leur conservation (les fonctionnaires ne leur ayant pas porté le soin utile pour permettre leur restitution en bon état si la confiscation était annulée), ce qui comprend les frais de réparation, les frais pour faire constater les dégradations et une part de la perte de valeur de la marchandise et, d’autre part, de leur disparition (CA Amiens, 23 mai 2013, no 12/03445, X c/ Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières).

Mais lorsque cette affaire-ci arrive devant la Cour de cassation, il est précisé que le particulier « ne saurait toutefois reprocher au service des douanes l’intégralité de son préjudice, dès lors que les dégradations et dépréciations dont il est demandé réparation ont pour origine non seulement ces manipulations sans la moindre précaution lors de la saisie mais aussi la durée pendant laquelle les marchandises saisies ont été entreposées, sans entretien, et ont subi les effets délétères de la corrosion pendant l’examen de la procédure engagée en raison des infractions douanières dont [il] a été reconnu coupable ».

Il faut donc distinguer selon les préjudices : la Douane doit réparation de celui directement imputable aux conditions de la saisie douanière, mais cette administration ne doit pas réparation des dégradations et dépréciations consécutives à la durée pendant laquelle les marchandises saisies ont été entreposées, sans entretien, et ont subi les effets délétères de la corrosion, cette situation étant la conséquence de la procédure engagée en raison des infractions douanières dont le particulier a été reconnu coupable, jusqu’à la décision définitive (qui n’a pas prononcé de confiscation des armes pour des motifs d’opportunité seulement). A contrario, si le particulier n’avait pas été reconnu coupable de l’infraction, la Douane aurait dû réparer le préjudice consécutif à la dégradation des marchandises ensuite de leur entreposage, sans entretien.

Au sens de l’article 401 précité, la responsabilité de la Douane n’est pas une responsabilité sans faute mais une responsabilité pour faute, l’opérateur devant rapporter la preuve d’une faute ou d’un fait générateur, d’un préjudice réel et certain et d’un lien de causalité direct entre la faute ou le fait générateur et le ou les dommages allégués (CA Paris, 18 mars 2019, no 18/04800, A au nom de l’administration des douanes et droits indirects c/ Chiappa Firearms).

Dans cette affaire-ci, la saisie non fondée de marchandises chez deux distributeurs en France (propriétaires des biens saisis) fabriquées et commercialisées par une société italienne a, pour le juge, « directement et immédiatement » empêché la vente en France des produits de la société italienne et eu une incidence directe sur le développement de ses produits et obligé cette société à mettre en œuvre une stratégie pour compenser les pertes en attendant la levée du risque de saisie résultant de la position erronée de la Douane quant à la conformité du modèle.

III. Que peut-on faire lorsque de la marchandise est saisie ?

En cas de saisie de marchandises, le titulaire de la décision doit se manifester auprès des autorités douanières dans les délais impartis. S’il ne souhaite pas engager des poursuites alors la douane établira un procès-verbal de main levée sur les marchandises en question. Autrement dit, elles peuvent être réacheminées.

En revanche, si le titulaire de la décision ouvre une procédure, avec preuves à l’appui et dans les délais prédéfinis, alors il vous faudra faire appel à un avocat compétent en propriété intellectuelle. En effet, vous devrez pouvoir vous défendre dès le lancement des procédures telles que les mesures conservatoires, l’assignation en contrefaçon ou le dépôt d’une plainte pénale.

A. Les voies de recours en matière de retenue douanière

La compétence douanière pour les aspects non répressifs est fixée par l’article 357 bis du Code des douanes : « Les tribunaux d’instance connaissent des contestations concernant le paiement, la garantie ou le remboursement des créances de toute nature recouvrées par l’administration des douanes et des autres affaires de douane n’entrant pas dans la compétence des juridictions répressives ». On peut ranger parmi ces dernières l’éventuel contentieux concernant les retenues et les saisies douanières. La Cour d’appel a pu refuser d’examiner la régularité d’une retenue douanière, estimant que « le juge civil n’est pas compétent pour apprécier la régularité des actes accomplis par l’administration des douanes sauf s’ils sont constitutifs d’une voie de fait, ce que la société P. n’a pas invoqué devant la juridiction compétente ».

La compétence rationae loci est donnée par l’article 358 du Code des douanes. C’est ainsi qu’il a été jugé que le tribunal d’instance est compétent pour juger d’une voie de fait alléguée dans le cadre d’une saisie.

Encore faut-il préciser qu’en matière de retenue douanière française, le législateur a semble-t-il oublié de prévoir une procédure de mainlevée, de sorte que les difficultés y relatives relèvent soit de la voie de fait, soit du trouble manifestement illicite.

La notion de trouble manifestement illicite apparaît toutefois de peu de secours en matière de lutte des douanes contre la contrefaçon : elle n’est pas retenue par la Cour de cassation lorsqu’il s’agit de contester la validité d’une retenue de produits soupçonnés de contrefaire une marque transformée en saisie douanière, en vertu d’un procès-verbal rédigé par les services des douanes sur la base de leurs propres constatations et des indications du seul titulaire de la marque.

Il ne nous semble pas raisonnable de confier ce contentieux à des juges d’instance alors que le contentieux civil des droits de propriété intellectuelle se trouve systématiquement attribué à des juridictions spécialisées : la généralité de cette dernière règle doit l’emporter, ce que reconnaît majoritairement la jurisprudence citée. L’idée qui avait prévalu à l’origine pour donner compétence aux tribunaux d’instance pour le contentieux douanier était de privilégier la proximité et la simplicité de la procédure. Ces deux avantages, s’ils existent encore, ce dont on peut douter, ne pèsent guère pour des dossiers souvent complexes et dont l’enjeu financier peut être très important. Le particularisme historique du droit douanier ne se justifie plus à l’heure actuelle et pour la lutte anti-contrefaçon.

D’ailleurs, même en cas de poursuite combinée devant le tribunal correctionnel sur le fondement du droit douanier et en contrefaçon, les textes du Code de la propriété intellectuelle ne dérogent pas aux règles de compétence édictées par les articles 3 et 382 du Code de procédure pénale et par les articles 357 et 358 du Code des douanes.

B. Procédure de mainlevée de saisis contrefaçon : comment faire cette main -levée ? Devant quel tribunal ?

Selon l’article L. 332-2 du Code de la propriété intellectuelle «Dans un délai fixé par voie réglementaire, le saisi» ou le tiers saisi peuvent demander au président du  (Ord. no 2019-964 du 18 sept. 2019, art. 35, en vigueur au 1er janv. 2020)  «tribunal judiciaire » compétent territorialement de prononcer la mainlevée de la saisie ou d’en cantonner les effets, ou encore d’autoriser la reprise de la fabrication ou celle des représentations ou exécutions publiques, sous l’autorité d’un administrateur constitué séquestre, pour le compte de qui il appartiendra, des produits de cette fabrication ou de cette exploitation.

La demande de mainlevée pourra se faire soit par assignation ou requête soit par référé en saisissant le juge des référés.

Le président du  (Ord. no 2019-964 du 18 sept. 2019, art. 35, en vigueur au 1er janv. 2020)  «tribunal judiciaire» statuant en référé peut, s’il fait droit à la demande du saisi ou du tiers saisi, ordonner à la charge du demandeur la consignation d’une somme affectée à la garantie des dommages et intérêts auxquels l’auteur pourrait prétendre.

En outre, l’article L. 332-3 du Code de la propriété intellectuelle dispose encore que « faute par le saisissant de saisir la juridiction » dans le délai prévu à l’article R 332-3 du même code, pour faire constater l’atteinte à ses droits, le saisi ou le tiers saisi pourra demander au juge des référés du Tribunal de grande instance, d’ordonner la mainlevée de la saisie-contrefaçon. Il convient de souligner que le défaut de saisine de la juridiction dans le délai de 20 jours ouvrables ou de 31 jours civils (si le décompte en jours civils est plus favorable qu’en jours ouvrables) à compter soit de la signature du procès-verbal de saisie, soit de la date de l’ordonnance sur requête, n’emporte ni la nullité, ni la caducité de la saisie-contrefaçon (en ce sens, Cass. 1re civ., 23 janv. 1996, Société Marki c/ Bruce d’Andrade, RIDA 1996, no 3, p. 345).

Cette inaction de l’auteur lésé ou de ses ayants droit permet simplement au saisi ou au tiers saisi de solliciter du juge des référés la mainlevée de la saisie (sur le pouvoir discrétionnaire du juge des référés d’ordonner ou non la mainlevée de la saisie-contrefaçon en cas de défaut de saisine du juge du fond dans le délai imparti : CA Versailles, 6 nov. 1998, Société Marc Dorcel c/ Sté Edgar Rice Burroughs, RIDA 1999, no 3, p. 314, obs. Kerever, p. 297).

C. Comment éviter la destruction des biens saisis ?

Plusieurs choses :

La retenue court à compter cette notification des douanes de leurs signalements, le demandeur disposant d’un délai de dix jours pour réagir alors que les marchandises sont toujours retenues ; schématiquement, on peut alors distinguer trois hypothèses :

— le demandeur de l’intervention peut d’abord confirmer la contrefaçon, mais solliciter seulement la destruction simplifiée des marchandises (pour les droits d’auteur et les dessins ou modèles, cf. : Règl. (UE) no 608/2013, 12 juin 2013, art. 23 et 26 ; CPI, art. L. 335-14 et CPI, art. L. 521-17-1), ce qui provoquera une transaction des douanes avec règlement de l’amende douanière et destruction des produits, sauf bien rares contestations ;

— le demandeur peut aussi confirmer la contrefaçon et justifier son action au fond dans les délais (sans solliciter de destruction), auquel cas la retenue sera maintenue jusqu’à ce qu’il soit statué définitivement sur son action ;

— le demandeur peut, au contraire, dénier ou ne pas confirmer dans les délais la contrefaçon, ou la confirmer mais sans solliciter la destruction simplifiée ni justifier de son action dans les délais, auxquels cas la retenue sera levée.

Autrement dit, ce délai de dix jours ouvrables (3 jours pour les denrées périssables) permet au titulaire de droits :

de mettre en œuvre une procédure de destruction simplifiée (PDS), sous le contrôle de la douane et sous sa responsabilité, dès lors que trois conditions sont réunies :

le déclarant/détenteur des marchandises a donné son accord à PDS ou ne s’y est pas opposé ;

le titulaire de droit a sollicité la PDS ;

le titulaire de droit a rapporté, par une expertise détaillée, sa conviction qu’il était porté atteinte à son droit de propriété intellectuelle ;

à défaut, de saisir la justice en la personne du Président du Tribunal de grande instance territorialement compétent pour obtenir l’autorisation de prendre des mesures conservatoires ou de se pourvoir en justice par la voie civile ou correctionnelle. En outre, le Procureur de la République, tenu informé par la douane, peut engager des poursuites.

Si, à l’expiration du délai de dix jours, le déclarant/détenteur et le titulaire de droit ne sont pas d’accord à la PDS et que le titulaire de droit n’a pas apporté la preuve qu’il a obtenu l’autorisation de prendre des mesures conservatoires ou qu’il a entrepris les démarches nécessaires auprès de l’autorité judiciaire, il est mis fin à la retenue.

Pendant toute la durée de la retenue, les marchandises restent placées sous surveillance douanière.

Pour lire une version plus complète de cet article sur la saisie-douanière et les contrefaçons, cliquer

Sources :

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000035147470?init=true&page=1&query=16-13.698&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007051072?init=true&page=1&query=03-20.307&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000035612827?init=true&page=1&query=14-17.541&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007040497?init=true&page=1&query=95-20.640&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007042697?init=true&page=1&query=97-20.281&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000031990971?init=true&page=1&query=13-22.706&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.valeurscorporate.fr/saisie-marchandises-defendre-interets/
Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 31 mars 2004, 00-10.901, Publié au bulletin – Légifrance (legifrance.gouv.fr)
Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 13 janvier 1998, 95-21.490, Inédit – Légifrance (legifrance.gouv.fr)
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 4 décembre 2012, 11-26.752, Inédit – Légifrance (legifrance.gouv.fr)
Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 5 décembre 2012, 12-80.156, Inédit – Légifrance (legifrance.gouv.fr)

La protection du design

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Les arts appliqués sont l’équivalent français du design. Ils œuvrent à la conception de la forme d’un objet de l’industrie. La forme d’un tel objet peut être protégée, sous certaines conditions. Deux systèmes de protection, aux conditions et régimes distincts, existent : celui du droit d’auteur et celui des dessins et modèles, dit régime de protection spécifique.

Les conditions de la protection des créations des arts appliqués par le droit des dessins et modèles (I) sont satisfaites plus aisément que celles fixées par le droit d’auteur (II).

I. Les conditions de la protection des créations des arts appliqués par le droit des dessins et modèles

B) Les conditions de fond

  1. Les conditions positives

  1. Visibilité de la création

La protection porte sur l’apparence d’un produit ou d’une partie de produit. C’est la forme extérieure qui est prise en compte et non les constituants du produit. Seuls les éléments visibles de l’objet industriel sont protégeables.

Dans un produit complexe, composé de pièces multiples qui peuvent être remplacées, seules les pièces visibles lors d’une utilisation normale dudit produit par l’utilisateur final sont protégeables. Les éléments intégrés invisibles, aussi importants soient-ils dans le fonctionnement du produit, ne sont pas pris en compte.

L’utilisation normale exclut les manipulations de l’objet lors de son entretien ou réparation.

L’utilisateur final peut être un consommateur comme un professionnel.

2. Nouveauté de la création

  1. Définition

L’article L. 511-3 du CPI pose une définition objective de la nouveauté : « Un dessin ou modèle est regardé comme nouveau si, à la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou à la date de la priorité revendiquée,  aucun dessin ou modèle identique n’a été divulgué. »

  1. Le produit identique

 

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Le produit identique est celui dont les caractéristiques visibles ne diffèrent du produit à protéger que par des détails insignifiants.

Selon l’interprétation du Tribunal de l’Union européenne, les détails insignifiants sont ceux qui ne sont pas immédiatement perceptibles. Les différences perceptibles immédiatement, mêmes faibles, suffisent à établir la nouveauté du produit à protéger (Trib. UE, 6 juin 2013, aff. T-68/11 [1]).

Un produit combinant des éléments connus est nouveau si une telle combinaison n’avait jamais été faite. L’identité doit porter sur tous les éléments du produit pris dans leur combinaison et non séparément (Com., 20 septembre 2016, n° 15-10.939, [2]). L’antériorité détruisant la nouveauté du produit à protéger doit être de toute pièce.

iii. L’art antérieur

L’art antérieur comprend tous les produits divulgués avant la date de dépôt de la demande ou la date de priorité.

La divulgation consiste à rendre le produit accessible au public par une publication, un usage ou tout autre moyen (une commercialisation par exemple).

L’antériorité constituée par le produit même divulgué par son créateur ne sera pas opposée à la nouveauté dudit produit si le dépôt est fait dans un délai de grâce de 12 mois suivant la divulgation.

  1. Caractère propre de la création
  2. Définition

L’article L. 511-4 du CPI donne une définition du caractère propre. « Un dessin ou modèle a un caractère propre lorsque l’impression visuelle d’ensemble qu’il suscite chez l’observateur averti diffère de celle produite par tout dessin ou modèle divulgué avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou avant la date de priorité revendiquée. »

Cette condition complète celle de nouveauté d’une exigence supplémentaire.

  1. Observateur averti

Pour la CJUE, l’observateur averti pris pour référence lors de l’examen du caractère propre est « une notion intermédiaire entre celle de consommateur moyen applicable en matière de marques, auquel il n’est demandé aucune connaissance spécifique et qui en général n’effectue pas de rapprochement direct entre les marques en conflit, et celle de l’homme de l’art, expert doté de compétences techniques approfondies. » (CJUE, 20 oct. 2011, aff. C-281/10 [3]). La Cour de cassation reprend cette définition à son compte : « l’observateur averti se définit comme un observateur doté d’une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré  » (Com., 29 mars 2017, 15-20.785 [4]).

iii. Impression visuelle d’ensemble

L’impression visuelle d’ensemble naît d’une comparaison entre le produit à protéger et des produits antérieurs. Elle aboutit au caractère propre du produit en cause lorsqu’elle diffère de celle produite par toutes les antériorités invoquées, prises individuellement.

L’appréciation du caractère propre doit être pondérée par l’existence de contraintes qui s’imposent au créateur en fonction de la nature du produit, de son utilisation ou de la réglementation. Selon la jurisprudence du Tribunal de l’Union, « plus la liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est grande, moins des différences mineures entre les dessins ou modèles en conflit suffisent à produire des impressions globales différentes sur l’utilisateur averti. À l’inverse, plus la liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est restreinte, plus les différences mineures entre les dessins ou modèles en conflit suffisent à produire des impressions globales différentes sur l’utilisateur averti ».  (TUE, 21 juin 2018, aff. T‑227/16 [5])

  1. Les conditions négatives
  1. Exclusion des formes exclusivement imposées par la technique

L’apparence dont les caractéristiques sont exclusivement imposées par la fonction technique du produit n’est pas protégée par le droit des dessins et modèles, mais par le droit des brevets.

On utilise le critère de la multiplicité des formes pour juger de l’indépendance de la forme d’un produit par rapport à la fonction technique. Si plusieurs formes étaient possibles, l’apparence du produit n’était pas imposée exclusivement par la technique.

  1. Exclusion des éléments d’interconnexion
  2. Principe

Les pièces d’interconnexion n’ont pas droit à la protection du droit des dessins et modèles, même si elles demeurent visibles dans le cadre d’une utilisation normale par l’utilisateur final du produit auquel elles sont intégrées.

  1. Inclusion des produits modulaires

Cependant, l’apparence des produits modulables pouvant être assemblés entre eux de diverses façons est protégeable. Il peut s’agir des pièces d’un jeu de construction, par exemple.

B) Les conditions de forme

Les conditions de la protection des créations des arts appliqués au titre du droit des dessins et modèles imposent une procédure d’enregistrement de la création. Trois types de dépôts de la demande d’enregistrement sont possibles.

  1. Dépôt national

Il permet d’obtenir un titre national à la suite d’un dépôt dans un pays où l’on cherche à obtenir la protection de sa création. Chaque État organise la procédure de dépôt comme il l’entend.

En France, le dépôt se fait à l’INPI (l’Institut national de la propriété industrielle). La demande doit comporter l’identification du déposant, une repoduction du produit (graphique ou photographique), l’indication de la classe du produit selon la classification de Locarno [6], et une redevance (tarifs accessibles sur le site de l’INPI [7]).

Il n’est pas fait d’examen des conditions de fond de la protection. Les dépôts conformes aux formes prescrites sont publiés au BOPI (Bulletin officiel de la propriété industrielle).

L’enregistrement est constitutif de droit, le produit enregistré étant présumé valable au regard du droit des dessins et modèles. Ce n’est qu’en cas de contentieux en contrefaçon, devant un tribunal, que les conditions de fond de validité seront examinées.

  1. Dépôt international

Il permet d’obtenir, à la suite d’un seul dépôt, plusieurs titres nationaux, dans les pays signataires de l’arrangement de La Haye (liste des 70 pays membres sur le site de l’OMPI [8]). Le dépôt se fait au Bureau international de l’OMPI (à Genève), par courrier postal ou par la voie électronique [9]. Il faut désigner les pays dans lesquels la protection est recherchée. Chaque office national examinera la demande, selon sa propre législation nationale. En l’absence de refus, l’OMPI procède à l’enregistrement du produit pour tous les pays désignés. L’enregistrement est valable 5 ans, son renouvellement pour des durées successives de 5 ans est possible jusqu’à concurrence de la durée maximale de protection prévue par la législation nationale.

  1. Dépôt communautaire

Il permet d’obtenir un titre communautaire, dont les conditions de validité de fond sont les mêmes que pour le titre français. Le titre communautaire est valable sur tous les territoires de l’UE, pour une durée de 5 ans, avec un renouvellement possible jusqu’à une durée maximale de 25 ans. Il se fait à l’EUIPO (Office de l’UE pour la propriété industrielle dont le siège est à Alicante), la voie électronique étant possible. La seule condition de fond de protection examinée est la visibilité. Le titre est enregistré au registre des dessins et modèles communautaires; son opposabilité aux tiers est effective dès la publication de l’enregistrement au Bulletin des dessins et modèles communautaires.

II. L’originalité des créations des arts appliqués, condition de la protection par le droit d’auteur

 

La seule condition de la protection des créations des arts appliqués au titre du droit d’auteur est l’originalité

A) Différence de l’originalité d’avec les conditions positives de la protection spécifique

Un cumul des protections du droit des dessins et modèles et du droit d’auteur n’est possible que sous condition de respect des exigences propres à chaque système (Crim., 13 décembre 2011, 10-80.623 [10]).

  1. Différence d’avec la nouveauté

De faibles différences avec l’état de l’art, pourvues qu’elles ne soient pas insignifiantes, sont suffisantes pour obtenir la nouveauté, mais non l’originalité.

Par exemple, la nouveauté est acquise en absence d’une antériorité de toutes pièces, alors que la présence des caractéritiques d’un produit dans des produits antérieurs peut ruiner la qualité d’originalité si leur rassemblement dans un seul produit manque d’originalité (Civ. 1, 5 avril 2012, n°10-27.373 [11]).

De plus, les antériorités prises en compte dans l’examen de l’originalité sont constituées dès la date de création et non à partir de la date de divulgation.

  1. Différence d’avec le caractère propre

L’originalité n’est pas appréciée selon le point de vue d’un observateur averti mais du point de vue du juge. De plus, l’exigence d’originalité n’est pas pondérée par l’impression visuelle d’ensemble. De même, l’antériorité n’a pas à être de toute pièce, comme pour l’appréciation du caractère propre.

L’originalité d’un modèle ne se déduit pas de l’impression différente que peuvent produire les modèles qui lui sont antérieurs; plutôt, elle découle de l’empreinte personnelle de l’auteur donnée au produit au regard des antériorités (CA Paris, pôle 5, 2e ch., 24 juin 2011, n° 10/16349).

Une création industrielle peut très bien avoir un caractère propre sans avoir pour autant d’originalité.

L’originalité exige davantage que des caractéristiques qui seraient propres à donner au produit une individualité; il lui en faut de celles qui le réhausseraient d’un éclat particulier.

Ainsi, un moulinet de canne à pêche paraissant avoir une physionomie propre au regard d’autres moulinets manque néanmoins d’originalité en ce que la combinaison de ses caractéristiques, quoique procédant de choix pour partie arbitraires, « ne s’avère pas de nature à traduire un réel parti-pris esthétique empreint de la personnalité de son auteur » (Com., 10 février 2015, n°13-27.225 [12]).

B) L’appréciation de l’originalité des créations des arts appliqués

  1. Les indices d’originalité

L’originalité est comprise dans le domaine des œuvres des arts appliqués comme l’empreinte de la personnalité de l’auteur, mais la jurisprudence qualifie parfois l’originalité des œuvres des arts appliqués comme étant la marque d’un effort créatif (Com., 26 février 2008, n°05-13.860 [13]). L’effort créatif et l’effet esthétique servent d’indices d’originalité.

  1. L’effort créatif

L’effort créatif est recherché en amont de l’œuvre, lors du processus de création. L’auteur devra avoir fait montre de créativité et non de l’application d’un simple savoir-faire.

Ainsi, la Cour de cassation a estimé au sujet d’un modèle de chaussures qui « présentait la combinaison de l’essentiel des caractéristiques » d’un modèle antérieur que « l’ajout de semelles à picots qui s’inscrivait dans une tendance de la mode était insuffisant pour témoigner de l’empreinte de la personnalité de son auteur et que le modèle revendiqué n’était dès lors pas éligible à la protection conférée par le droit d’auteur » (Civ. 1, 20 mars 2014, n°12-18.518 [14]).

L’effort créatif peut être reconnu en présence d’un réel parti-pris esthétique qui dépasse les simples choix arbitraires (Com., 10 février 2015, n°13-27.225, précité). Ce parti-pris esthétique s’exerce au moment de la conception, dans les choix particuliers faits par l’auteur.

  1. L’effet esthétique

L’effet produit par l’œuvre sur le consommateur peut être pris comme indice d’originalité.  Les caractéristiques de l’objet doivent produire un résultat susceptible d’appeler un jugement esthétique de la part du consommateur apte à déterminer partiellement son choix. Ainsi, une mini poêle à frire a été reconnue originale parce qu’elle était « susceptible de rencontrer son public non simplement comme une marchandise mais aussi au travers d’un jugement esthétique » (Tribunal de grande instance de Paris, CT0087, du 15 novembre 2006 [15]).

  1. La charge de la preuve

En cas de contestation de l’originalité de l’œuvre d’art appliqué, c’est à l’auteur de l’œuvre mise en cause, souvent dans le cadre d’une action en contrefaçon initiée par lui, de démontrer l’originalité en identifiant les caractéritiques qui la soutiennent.

Ainsi, ne démontre pas être titulaire de droit d’auteur, celui qui revendique des droits sur une couture dorsale ornementale, « sans l’identifier avec précision ni en caractériser les détails, condition première du droit d’auteur » (Civ. 1, 15 janvier 2015, n°13-22.798 [16]).

L’originalité d’une œuvre doit être explicitée par celui qui s’en prétend auteur, seul ce dernier étant à même d’identifier les éléments traduisant sa personnalité. Cette explicitation ne doit pas être une description purement technique, faute de révéler les choix exprimant un parti-pris esthétique et traduisant la personnalité de son auteur. (TGI Paris, 3e ch., 15 sept. 2016, n° 14/10978)

En conclusion, nous pouvons dire que les conditions de la protection des créations des arts appliqués favorisent le choix de la protection des dessins et modèles. La protection du droit d’auteur ne devant être normalement choisie qu’à défaut, à l’expiration de la protection spécifique ou lorsqu’aucun dépôt n’a été fait à temps et que l’on souhaite agir en contrefaçon.

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Sources

[1] http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf;jsessionid=7971BDF114AC443A8A63135152674CCC?text=&docid=138101&pageIndex=0&doclang=fr&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=4847368[
2]
https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000033150751
[3] http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?docid=111581&doclang=FR
[4] https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000034345310&fastReqId=1083604450&fastPos=1
[5] http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf;jsessionid=9ea7d2dc30dd17fff359672b40219606d344a8851e46.e34KaxiLc3qMb40Rch0SaxyOahf0?text=&docid=203219&pageIndex=0&doclang=FR&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=1152238
[6] https://www.wipo.int/classifications/locarno/fr
[7] https://www.inpi.fr/fr/comprendre-la-propriete-intellectuelle/les-dessins-modeles/combien-coute-un
[8] https://www.wipo.int/treaties/fr/ShowResults.jsp?lang=fr&treaty_id=9
[9] https://www.wipo.int/hague/fr/how_to/file/
[10] https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000025215194
[11] https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000025663613
[12] https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000030243653
[13] https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000018204439
[14] https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000028759799&fastReqId=774593448&fastPos=5
[15] https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000006951521
[16] https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000030115626