injure

#Diffamation et Twitter

Le réseau social « Twitter » est devenu la référence en matière de médias sociaux, il est aujourd’hui le théâtre d’une multiplication d’actions en diffamation.

Twitter n’est pas une zone de non-droit et ses tweets sont, eux aussi, soumis à des règles.

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Twitter c’est la possibilité de publier gratuitement des messages courts et percutants (tweets) en temps réel (280 caractères/tweets au maximum). Par défaut, ces messages sont lisibles par tous et apparaissent même dans les moteurs de recherche, les faisant ainsi entrer dans la sphère publique. En d’autres termes, c’est une plateforme de microblogging, c’est-à-dire un journal personnel en ligne, qui fonctionne comme un réseau social.

À ce titre, il est soumis aux mêmes règles que les autres acteurs d’internet.

La Loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 n’est pas seulement applicable à la communication par support papier, mais également à celle diffusée sur internet. Cette loi permet de rendre publiques, des informations ou des opinions tout en réprimant les abus, comme celui de la diffamation.

En effet, l’article 1er du texte actuellement en vigueur, précise de manière assez symbolique que « l’imprimerie et la librairie sont libres ». Cette liberté, que l’on retrouve aujourd’hui à travers la libre expression sur les réseaux, n’est néanmoins pas totale et la diffamation constitue effectivement un des actes prohibés par la loi.

Il faut savoir qu’il s’agit d’un régime spécifique, différent du droit commun de la responsabilité prévue à l’article 1382 ancien (nouveau 1240) du Code civil. Ce régime spécifique prévoit une responsabilité dite en « cascade ».


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La loi considère que dans les milieux particuliers de la presse plusieurs personnes sont responsables avant l’auteur même des propos litigieux. Ces personnes identifiées comme responsables varient en fonction du type de médias visés.

La diffamation représente le fait de porter atteinte à la réputation et à l’honneur d’une personne publiquement par des écrits, des paroles ou des gestes. Si l’allégation, le reproche, ne contient aucune accusation précise à la personne, il s’agit seulement d’une injure.

Le propos pourra donc être condamné s’il répond aux conditions suivantes :

– Alléguer un fait précis et déterminé (l’expression d’une opinion subjective relevant du débat d’idée ne constitue pas des propos diffamatoires),

-Alléguer ce fait publiquement,

– Porter atteinte à l’honneur ou à la considération de celui ou ceux qu’il vise (il faut démonter que les propos causent un dommage à la victime),

– Énoncer ce fait en étant de mauvaise foi (en sachant que c’était faux, ou en devant savoir que c’est faux, ou sans motif valable sans considération de la véracité des propos)

– Viser une personne déterminée physique ou morale (il faut pouvoir l’identifier à travers les propos, cela peut être insinué, déguisé ou direct).

À l’heure où le web 2.0 place au centre de ses services l’interaction sociale, la liberté d’expression se doit d’être d’autant plus conciliée avec le respect des droits d’autrui, y compris sur internet.

Dès lors, sur Twitter, peut-on se rendre coupable de diffamation en 280 caractères seulement ?

Twitter c’est la possibilité de publier gratuitement des messages courts et percutants (tweets) en temps réel (280 caractères/tweets au maximum).Par défaut, ces messages sont lisibles par tous et apparaissent même dans les moteurs de recherche, les faisant ainsi entrer dans la sphère publique. En d’autres termes, c’est une plateforme de microblogging, c’est-à-dire un journal personnel en ligne, qui fonctionne comme un réseau social.

À ce titre, Twitter est soumis aux mêmes règles de diffamation que les autres acteurs d’internet.

La Loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 n’est pas seulement applicable à la communication par support papier, mais également à celle diffusée sur internet. Cette loi permet de rendre publiques des informations ou des opinions tout en réprimant les abus, comme celui de la diffamation. Il s’agit d’un régime spécifique, différent du droit commun de la responsabilité prévue à l’article 1240 du Code civil. Ce régime spécifique prévoit une responsabilité dite en « cascade ».

La loi considère que dans les milieux particuliers de la presse plusieurs personnes sont responsables avant l’auteur même des propos litigieux. Ces personnes identifiées comme responsables varient en fonction du type de médias visés.

La diffamation représente le fait de porter atteinte à la réputation et à l’honneur d’une personne publiquement par des écrits, des paroles ou des gestes. Si l’allégation, le reproche, ne contient aucune accusation précise à la personne, il s’agit seulement d’une injure.

La diffamation sur Twitter pourra être condamnée s’il répond aux conditions suivantes :

  • Alléguer un fait précis et déterminé (l’expression d’une opinion subjective relevant du débat d’idée ne constitue pas des propos diffamatoires)
  • Alléguer ce fait publiquement
  • Porter atteinte à l’honneur ou à la considération de celui ou ceux qu’il vise (il faut démontrer que les propos causent un dommage à la victime)
  • Énoncer ce fait en étant de mauvaise foi (en sachant que c’était faux, ou en devant savoir que c’est faux, ou sans motif valable sans considération de la véracité des propos)
  • Viser une personne déterminée physique ou morale (il faut pouvoir l’identifier à travers les propos, cela peut être insinué, déguisé ou direct)

Sur Twitter, peut-on se rendre coupable de diffamation en 280 caractères seulement ?

I/ Qui est responsable des tweets à caractère diffamatoire ?

La loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) soumet les publications sur internet à loi de la presse de 1881. Cette loi met en place un système de responsabilité en cascade par rapport aux fonctions des différentes personnes visées.

En d’autres termes, si la première personne désignée n’est pas identifiable la deuxième sera responsable et ainsi de suite. La loi LCEN adapte cette responsabilité à l’univers d’internet et donc à la « communication au public en ligne ». Le responsable est celui dont « l’activité est d’offrir un accès à des services de communication au public en ligne ».

Celui qui publie et gère le site, qui a le plein contrôle de la mise en ligne des contenus du site (Articles, photos, vidéos) est appelé l’éditeur. Pour limiter le risque d’être responsable, l’éditeur peut adopter le statut d’hébergeur. Les plateformes de réseaux sociaux, de forums ou de blog ne peuvent être assimilées à des sites classiques. Il existe une responsabilité spéciale applicable aux personnes gérant les réseaux sociaux. La loi de 2004 définit le rôle et la responsabilité d’une personne qui a la qualité d’hébergeur. L’hébergeur assure, gratuitement ou non, un service de stockage d’informations fournies par ses utilisateurs.

Les réseaux sociaux, les forums ou les blogs, parce qu’ils stockent des textes, photos et vidéos sont considérés comme des hébergeurs. L’arrêt de la CJUE Google Adwords du 23 mars 2010, dispose qu’est hébergeur celui dont l’activité « revêt un caractère purement technique, automatique et passif, qui implique que le prestataire de services de la société de l’information n’a pas la connaissance ni le contrôle des informations transmises ou stockées. » Twitter est donc l’hébergeur des tweets.  L’hébergeur a une qualité et un rôle particulier. De ce fait, il se voit attribuer un statut hybride et une responsabilité atténuée.

Il est responsable des contenus stockés, si et seulement si :

  • Il a eu connaissance de l’existence des contenus
  • Les contenus présentent un caractère manifestement illicite (violation évidente d’une règle de droit)
  • Après en avoir eu connaissance, il n’a pas retiré rapidement ces contenus (le jour même

Twitter est une entreprise américaine, mais cela ne l’exonère pas de cette obligation.

Puisque Twitter, en tant qu’hébergeur n’est pas responsable, l’auteur des propos diffamatoires l’est. Une fois le responsable identifié, il est possible d’agir en justice contre lui afin d’obtenir réparation de son préjudice.

Une action contre Twitter n’est possible que si ce dernier n’a pas supprimé ou bloquer le contenu qui lui a été notifié, quand il a manqué à son obligation de déréférencement.

II/ La jurisprudence

Sur Twitter, comme sur tout autre réseau social, toute personne est responsable des propos qu’elle tient publiquement. En France, la diffamation est une infraction qui peut entraîner une amende de 12 000€.  Pour que la diffamation soit avérée, le propos doit remplir plusieurs conditions.

Sur Twitter, le premier critère à déterminer est celui de la publicité des propos tenus. En reprenant la loi de 1881, un propos est public s’il est tenu devant un groupement de personnes qui ne constituent pas une communauté d’intérêts. La diffamation étant sanctionnée, que le propos soit public ou privé, mais l’amende est moindre en cas de propos privés (38€).

La jurisprudence constante considère que « la diffusion litigieuse sur le réseau internet, à destination d’un nombre illimité de personnes nullement liées par une communauté d’intérêts, constitue un acte de publicité commis dès que l’information a été mise à la disposition des utilisateurs éventuels du site ». Ainsi, si la personne qui a publié les propos, n’a pas fait l’effort de limiter l’accès à son tweet à un nombre très limité de personne, alors on va considérer que le tweet est public. Par ailleurs, le tribunal de Pau a considéré dans sa décision du 12 novembre 2018 que le créateur du compte, qui possède les codes d’accès, « ne saurait dénier sa responsabilité au seul motif qu’il aurait donné les codes à des personnes dont il refuse de donner le nom. ». Il y a donc une présomption de responsabilité à l’égard du créateur du compte.

De plus, pour déterminer la diffamation il doit y avoir l’allégation d’un fait précis et déterminé.

En février 2015, une décision en matière de diffamation sur Twitter a été rendue par la cour d’appel de Paris .

Ramzi Khiroun a porté plainte en 2011 contre Arnaud Dassier pour avoir tweeté :

« Ramzi Khiroun est à la limite de l’abus de bien social avec ses jobs Lagardère ou EuroRSCG (on ne sait plus trop) tout en bossant pour #DSK ».

Les 140 caractères maximums imposés par Twitter jusqu’en 2017, ont permis de protéger le défendeur.

En effet, la cour a  considéré que cette brièveté rendait imprécise l’allégation et empêchait tout débat : le fait imputé doit être suffisamment précis et des éléments doivent le corroborer.

De plus, l’expression « est à la limite de » a permis d’écarter la qualification de diffamation.

La cour d’appel  a jugé que cela reflétait l’expression d’une opinion subjective qui pouvait être soumise à débat au titre de la liberté d’expression et qu’il n’y avait donc pas diffamation. Arnaud Dassier a été relaxé.

La jurisprudence a également refusé de qualifier de diffamatoires des propos tenus sur Twitter à l’occasion d’un débat d’intérêt général. Dans cet arrêt du 8 janvier 2019, la chambre criminelle tient à rappeler que le principe est celui de la liberté d’expression et qu’en l’espèce les propos tenus n’excédaient pas les limites de la liberté d’expression.

Attention, l’action de republier comme telle une information diffamatoire d’un autre utilisateur (retweeter) est condamnable (même si cela est difficile en pratique) ! Bien qu’il n’y ait pas de condamnation pour la reproduction d’un tweet, cette dernière reste possible. Il vient donc à se protéger par l’exception de bonne foi ou en démontrant la vérité des propos.

La Licra et SOS Racisme ont obtenu la condamnation à une peine de deux mois de prison ferme de l’auteur de propos antisémites tenus dans deux messages postés sur Twitter. Dans son jugement du 9 mars 2016, le TGI de Paris a estimé que le titulaire du compte en question s’était rendu coupable d’incitation à la haine raciale et de diffamation publique à caractère racial. Cette solution sera réitérée dans un jugement du 11 septembre 2020, où la Licra a obtenu la condamnation de l’auteur d’une diffamation publique envers un groupe de personnes en raison de leur appartenance à une religion déterminée, en l’espèce la religion juive.

La brièveté des tweets ne protège donc pas indéfiniment les auteurs, et ce, justement parce qu’elle exclut toute nuance.  Le concept de Twitter est de réagir rapidement, ce qui pousse à l’imprudence et au franc-parler.

Par ailleurs, la brièveté des propos retenue par la cour d’appel, est un concept assez flou. En effet, en passant de 140 à 280 caractères, peut-on toujours considérer qu’il y a une brièveté qui rend l’allégation imprécise ? De même, nombreuses sont les personnes qui font plus d’un tweet pour détailler une pensée, une opinion. Il convient alors à se demander où est la limite à ce concept de brièveté des propos tenus sur Twitter.

Pour lire une version plus complète de cet article sur la diffamation et twitter, cliquez

SOURCES :
http://www.lepoint.fr/invites-du-point/gaspard-koenig/koenig-diffamation-twitter-libertedexpression-04-03-2014-1797408_2002.php
http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F32079.xhtml
Cass. ch. crim. 16 octobre 2001, 00-85.728
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007070613
CJUE 23 mars 2010 Google Adwords C-236/08 à C-238/08.
https://curia.europa.eu/juris/liste.jsf?language=fr&num=C-236/08
TGI Pau, ch. corr., jugement correctionnel du 12 novembre 2018
https://www.legalis.net/jurisprudences/tgi-de-pau-ch-corr-jugement-correctionnel-du-12-novembre-2018/
Tribunal judiciaire de Paris, 17e ch. correctionnelle, jugement du 11 septembre 2020
https://www.legalis.net/jurisprudences/tribunal-judiciaire-de-paris-17e-ch-correctionnelle-jugement-du-11-septembre-2020/Crim. 8 janvier 2019, 17-81.396
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000038069831?dateDecision=&init=true&page=1&query=17-81.396&searchField=ALL&tab_selection=juri

REFERE FAKE NEWS

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Dans le droit commun français, la diffusion de fausse nouvelle est une infraction pénale, elle se caractérise par la publication, diffusion ou reproduction par n’importe quel moyen, des informations fausses, mais aussi des pièces fabriquées, falsifiées, voire mensongères et basées sur la mauvaise foi de l’éditeur.

Afin d’observer une fausse nouvelle, il est nécessaire que celle-ci soit reconnue comme de nature à troubler l’ordre public. L’appréciation de la fausse nouvelle est différente de la diffamation en droit pénal.

Cette infraction n’est pas nouvelle, elle est en effet prévue par plusieurs textes de loi tels que l’article 27 de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse ; l’article 322-14 du Code pénal, l’article L97 du Code électoral. (1)

Le terme anglophone « fake news » est un terme de plus en plus courant, en effet il fait quasiment désormais partie du vocabulaire employé couramment en politique. On ne compte plus les fois où le président des États-Unis d’Amérique, Donald Trump a pu utiliser le terme « Fake news » à l’occasion de Locution publique.


 

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En janvier 2018, le président de la République française Emmanuel Macron, lors de ses vœux à la presse avait annoncé un projet de loi visant à lutter contre les « fake news ».
La loi contre la manipulation de l’information a été votée en novembre 2018 et validée par le Conseil constitutionnel en décembre 2018.

Dans sa décision du 20 décembre 2018, le Conseil constitutionnel a précisé que le juge ne pouvait faire cesser la diffusion d’une information que si le caractère inexact ou trompeur de l’information était manifeste et que le risque d’altération de la sincérité du scrutin était également manifeste.

La période électorale qui s’ouvre inaugure la nouvelle procédure de référé instaurée par la loi du 22 décembre 2018, visant à faire cesser la diffusion de fausses informations de « nature à altérer la sincérité du scrutin ». La procédure de référé de la loi du 22 décembre 2018 à pour objectif : la à lutter contre la manipulation de l’information à l’heure numérique et de permettre d’endiguer la diffusion de fausses informations pendant les périodes de campagne électorale. (2)

Afin de comprendre l’articulation de la procédure de référé issue de la loi du 22 décembre 2018 et son impacte, il est nécessaire d’analyser les conditions de mise en œuvre de la procédure (I), ainsi que les interrogations que pose se dispositif quant à son application (II).

I. Les conditions de mise en œuvre de la procédure

Dans un premier temps il sera nécessaire d’observer la procédure de référé (A) et dans un second temps la mise en œuvre du référé (B)

 

A) La procédure de référé

Le Code de procédure civil à l’article 484 définit l’ordonnance de référé comme une décision provisoire rendue à la demande d’une partie, l’autre présente ou appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n’est pas saisi du principal le pouvoir d’ordonner immédiatement les mesures nécessaires. (3)

Les mesures de référé ne permettent pas de régler définitivement le litige. En effet un procès dit principal par la suite. Ce procès principal portera sur la totalité des problèmes à résoudre. Les mesures ordonnées par une décision rendue en référé peuvent être contredites lors du procès principal.

L’article L. 163-2 du Code électoral instaure une procédure de référé permettant d’obtenir, pendant les trois mois précédant une élection générale, la cessation de la diffusion de fausses informations sur les services de communication au public en ligne lorsque ces fausses informations sont de nature à altérer la sincérité du scrutin.

Le Conseil constitutionnel a précisé que les allégations ou imputations mises en cause, tout comme le risque d’altération de la sincérité du scrutin, devaient avoir un caractère inexact ou trompeur manifeste. (4)

La création de cette action en référé a été mise en place afin de permettre la cessation rapide et efficace de la circulation de fausses nouvelles. La qualification de fausse nouvelle sera donnée par le juge des référés conformément à la définition de la loi de 1881 sur la liberté de la presse. (5)

Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. La décision est appliquée immédiatement, même en cas d’appel. On dit qu’elle est appliquée à titre provisoire, dans l’attente de la décision d’appel ou du jugement sur le fond du litige. Le délai d’appel est de 15 jours francs et non de jours ouvrés après la notification de l’ordonnance.

B) Les conditions de mise en oeuvre du référé

La mise en œuvre du référé peut se faire par la demande de plusieurs acteurs, le ministère public, mais aussi tout candidat, parti ou groupement politique ou tout autre intéressé.

Les défendeurs peuvent être les hébergeurs ou les fournisseurs d’accès Internet, c’est-à-dire ceux qui peuvent concrètement et techniquement assurer une mesure de blocage ou de déréférencement du compte ou du site ou toute autre mesure provisoire « proportionnée et nécessaire ».

Le ou les demandeurs doivent saisir exclusivement la formation de référé du tribunal de grande instance de Paris,

Le tribunal de grande instance se devra de rendre sa décision dans un délai de 48 heures à compter de la saisine.

La Juridiction tranchera sur l’apparence et l’incontestable de leur mesure. Le rôle du juge des référés ne sera pas de trancher le vrai du faux, sa vocation n’est en effet pas d’être juge électoral ou de trancher les différentes polémiques politiques. Le juge des référés prendra des mesures dans l’urgence de la situation de nature à faire cesser la diffusion de la fausse nouvelle.

Plusieurs conditions cumulatives nécessitent malgré tout d’être réunis, il faut :

  • La présence d’« allégations ou imputations inexactes ou trompeuses ».
  • Un fait de nature à altérer la sincérité du scrutin à venir
  • Une diffusion de l’information pendant les trois mois de campagne électorale de certaines élections nationales générales de manière délivrée, artificielle ou automatisée et massive par le biais d’un service de communication au public en ligne. 

II. Application et conséquence de la loi du 22 décembre 2018

Il est possible d’observer une première application de la loi (A) et des conséquences notables sur le travail journalistique (B)

A) Une interprétation stricte par les juges des référés

Une députée européenne, ainsi qu’un sénateur contestaient un tweet diffusé par le ministre de l’Intérieur à l’occasion des mouvements de grèves datant du 1er mai 2019 : « Ici, à la Pitié-Salpêtrière, on a attaqué un hôpital. On a agressé son personnel soignant. Et on a blessé un policier mobilisé pour le protéger. Indéfectible soutien à nos forces de l’ordre : elles sont la fierté de la République ». (6)

Les deux élus ont saisi le 10 mai 2019 le tribunal de grande instance de Paris en référé pour demander à Twitter France le retrait de ce tweet en s’appuyant sur la loi fausse information.  L’audience a eu lieu six jours plus tard et la décision a été rendue le 17 mai 2019. Le caractère d’urgence ici peut être considéré comme relatif dans cet arrêt.

Sur le fond, le tribunal a rappelé le caractère très restrictif de l’article L. 163-2 du Code électoral. Pour permettre le retrait d’un contenu en période électorale, l’assignation doit viser des « allégations ou imputations inexactes ou trompeuses » d’un « fait de nature à altérer la sincérité du scrutin à venir » et diffusées « de manière délibérée, artificielle ou automatisée et massive par le biais d’un service de communication au public en ligne.

Sur le fond, le tribunal a tenté d’établir en premier lieu le caractère inexact ou trompeur des allégations contenues dans le tweet. En s’appuyant sur plusieurs articles de presse produits par les parties, le tribunal a considéré que l’information n’est pas dénuée de tout lien avec des faits réels et l’allégation n’est pas “manifestement inexacte ou trompeuse”.

Pour le juge des référés, la diffusion doit également être cumulativement “massive, artificielle ou automatisée, et délibérée, et opérer sur un service de communication au public en ligne”. Selon l’exposé des motifs de la proposition de loi, le caractère “artificiel ou automatisé” cela se caractérise donc par le paiement de tiers chargés d’étendre artificiellement la diffusion de l’information ou le recours à des bots. En l’espèce le second critère est manquant.

En dernier lieu, le juge des référés apprécie le caractère manifeste du risque d’altération de la sincérité du scrutin. Pour le tribunal, “si le tweet a pu employer des termes exagérés, il n’a pas occulté le débat, puisqu’il a été immédiatement contesté”, “permettant à chaque électeur de se faire une opinion éclairée, sans risque manifeste de manipulation”.

En conséquence, les conditions posées par l’article L. 163-2 du Code électoral ne sont pas remplies et il n’y avait pas lieu de faire droit à la demande de retrait. Les deux élus ont donc été condamnés aux dépens. Cette décision démontre le caractère très restrictif du référé créé par la loi et une appréciation stricte par le juge des référés.

B) Les conséquences de la loi nouvelle

Le numérique a permis l’abondance des contenus, il est nécessaire d’opéré à une distinction plus marquée entre l’information professionnelle celle-ci étant régis par des standards journalistiques exigeants, et les autres contenus informatifs.

Le texte vise les tentatives volontaires de manipulation de l’information et n’aura aucun impact sur le travail journalistique qui peut consister à révéler, à tout moment, des informations sur des questions d’intérêt public.

Il est possible de penser que l’impact de cette loi sera directement sur la liberté d’expression, il convient toutefois de différencier la liberté d’expression dans un cadre restrictif de la diffusion d’information à un large public. Bien que le texte paraisse restrictif il n’apparaît pas liberticide, car la diffusion de l’information se doit d’être massive, une diffusion isolée pourrait être considéré comme hors pas la présente loi, cela laisse à penser qu’il sera difficile de sanctionner des comportements isolés.

La loi nouvelle crée un cadre juridique plus protecteur qu’une situation non encadrée par la loi, où les plateformes censurent d’elles-mêmes les contenus, sans même être tenues d’expliquer les critères de cette censure, elle crée aussi un devoir de coopération des plateformes numériques, en dehors des périodes électorales. Ce devoir de coopération impose une obligation de mise en place de mesure afin de lutter contre les fausses nouvelles et la transparence au niveau du public concernant la prise de ces mesures.

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Absence de responsabilité des hébergeurs en cas d’injures postés sur des forums

La Cour européenne des droits de l’homme s’est prononcée le 2 février 2016 sur le sort des propos injurieux ou grossiers laissés sur un forum. La CEDH a jugé que les hébergeurs de forum sur internet n’étaient pas responsables de tels propos s’ils ne contenaient pas de discours de haine ou d’appel à la violence, alors même que le site en question avait été condamné par la juridiction nationale hongroise. Par cette affaire, la CEDH précise sa jurisprudence établie en juin dernier sur le sort de commentaires injurieux laissés sur le forum d’un site internet. 

Le web 2.0 a permis aux internautes de contribuer à l’échange d’informations et d’interagir facilement. Depuis le début des années 2000, les forums fleurissent sur la toile et n’importe quel internaute peut contribuer à leur contenu de façon injurieuse ou non . En effet, internet est un outil favorisant la liberté d’expression et la communication.
Face à ces nouvelles possibilités d’expression, de nombreux pays ont introduit de nouvelles dispositions dans leur législation pour tenir compte du développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication et définir un régime de responsabilité adéquat en cas de contenu inapproprié.

Dès l’année 2000, l’Union européenne à travers la directive  » Commerce Electronique  » a adopté un certain nombre de mesures adaptées au développement des nouvelles technologies. Cette directive qui a été transposée en France en 2004 par la loi sur la confiance en l’économie numérique (LCEN) a notamment mis en place un régime de responsabilité atténué des hébergeurs de sites internet. Les hébergeurs ne sont ainsi pas responsables des informations stockées par un utilisateur lorsqu’ils n’ont pas eu connaissance de l’activité ou de l’information en cause. S’il s’avère qu’ils en ont eu connaissance, ils doivent alors agir promptement afin de retirer ou de rendre inaccessible le contenu litigieux (injurieux par exemple).

Confrontées à ces situations, les juridictions nationales doivent opérer un juste équilibre entre la protection de la liberté d’expression qui est appréciée différemment selon les pays, et la sanction relative au contenu litigieux.

Dans l’Union Européenne, la liberté d’expression est régie par l’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’homme et des libertés fondamentales. Alors que le 1er paragraphe énonce les principes généraux, le second prévoit certaines restrictions :

1.  » Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n’empêche pas les États de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d’autorisations « .

2.  » L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire « .
Par un arrêt du 2 février 2016, la Cour européenne des droits de l’homme, à l’appui de l’article 10 du CEDH, est venue préciser sa jurisprudence concernant les commentaires injurieux postés sur internet.

 

I – L’analyse des faits principaux

L’affaire soumise à la CEDH concerne les responsabilités de l’organe d’autorégulation des fournisseurs hongrois (MTE) et de la société Index, propriétaire de l’un des principaux portails d’information de Hongrie à la suite des commentaires grossiers et choquants postés sur leurs sites web.

En 2010, MTE avait publié sur sa page web un avis critiquant la pratique commerciale de deux sites web immobiliers. Dans cet avis, elle faisait part des pratiques trompeuses exercées par les deux sites web et dénonçait leur offre  » gratuite pendant 30 jours « , qui ne précisait pas que l’inscription devenait automatiquement payante ensuite. Le portail d’information hongrois s’est par la suite exprimé au sujet de cet avis et l’avait publié dans son intégralité sur son site web, ce qui suscita des commentaires choquants et grossiers sur les sites de MTE et d’Index.
Considérant que la publication de l’avis et les commentaires qu’il avait engendrés avaient porté atteinte à sa réputation commerciale , la société responsable de la gestion des deux sites web immobiliers avait engagé une procédure civile à l’encontre des deux organismes. L’ouverture de cette procédure avait conduit MTE et Index à retirer immédiatement les commentaires litigieux.
Pour leur défense les requérantes avançaient que de par leur qualité d’éditrices intermédiaires, elles ne pouvaient être tenues responsables du contenu des commentaires postés par les internautes. Elles arguaient également que les critiques émises dans l’avis étaient justifiées au vu du nombre de plaintes et d’actions d’usagers déclenchées par les pratiques commerciales de la société gestionnaire des deux sites web immobiliers.

Les juridictions hongroises ont considéré que les commentaires en cause étaient choquants, injurieux, humiliants et dépassaient les limites de la liberté d’expression. MTE et d’Index ont été tenus pour responsables du seul fait qu’elles avaient permis aux internautes de réagir.
La décision de la juridiction nationale particulièrement protectrice des destinataires des contenus injurieux, fait écho à une récente décision de la Cour de cassation  concernant le site lefigaro.fr. La Haute juridiction avait alors tenu pour responsable le directeur de publication concernant la publication des propos diffamatoires qui n’avaient pas été promptement retirés alors même que le service de modération avait été externalisé.

Dans cette affaire, pour les requérantes la décision de la juridiction nationale portait atteinte à la substance même de la liberté d’expression puisqu’elle les obligeait de facto à modérer la teneur des commentaires laissés par les internautes. Invoquant l’article 10 du CEDH, les requérantes saisirent la Cour européenne qui leur a donné raison en considérant qu’elles n’étaient pas responsables des propos injurieux laissés sur le forum.
Pour autant, comme nous allons le voir, la récente décision de la CEDH démontre qu’en matière de responsabilité des commentaires postés sur internet, la réponse de la juridiction européenne n’est pas automatique et dépend essentiellement des faits.

 

II – L’analyse de la décision de la Cour : La primauté de la liberté d’expression

S’agissant d’une liberté fondamentale, la Cour européenne opère un contrôle de proportionnalité classique pour rendre sa décision et met en balance les deux intérêts pour savoir si une restriction de la liberté d’expression pouvait être justifiée.
Pour la Cour européenne, les juges hongrois n’ont pas mis en balance l’intérêt à préserver la liberté d’expression sur Internet d’une part et le droit au respect de leur réputation commerciale des sites immobiliers d’autre part.

En effet par leur décision les juges hongrois ont imposé aux requérantes des responsabilités qui auraient pu les pousser à supprimer complètement la possibilité pour les internautes de laisser des commentaires en ligne.

De plus la Cour a considéré que « bien qu’injurieux et même tout à fait grossiers « , ces commentaires « n’étaient pas des déclarations de fait diffamatoires, mais l’expression de jugements de valeur ou d’opinions « , et ne constituaient donc pas « des propos clairement illicites ».
A l’appui de leur décision, les magistrats européens ont également signalé que les requérantes avaient mis en place une procédure destinée à modérer le contenu des commentaires déplacés grâce au signalement des internautes, ce qui était suffisant pour protéger les intérêts des destinataires de commentaires litigieux.

Cette décision vient préciser la jurisprudence de la Cour européenne DELFI, le principal portail d’information estonien. En effet, dans l’affaire DELFI de 2015, très critiquée par les défenseurs de la liberté d’expression, les magistrats européens avaient considéré que la condamnation en Estonie d’un site de presse en ligne à raison de commentaires postés par les internautes ne constituait pas une violation du droit à la liberté d’expression.

La différence entre les deux décisions peut s’expliquer par le fait que dans l’affaire DELFI, les propos litigieux contenaient des discours de haine et des appels à la violence. Les magistrats européens ont également pu prendre en compte pour rendre leur décision le fait que MTE était une association à but non lucratif.
Les défenseurs de la liberté d’expression, et en particulier de la liberté d’expression sur internet seront sûrement rassurés par cette décision de la Cour européenne favorable aux hébergeurs de forum qui pourront ainsi laisser les lecteurs s’exprimer librement sans la crainte d’une sanction automatique.

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SOURCES :

http://www.droit-technologie.org/actuality-1766/responsabilite-d-un-forum-de-discussion-sur-internet-la-cedh-relativ.html
Communiqué de presse de la CEDH du 27/01/2016
AFP