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CORONAVIRUS ET DROIT DE RETRAIT DU SALARIÉ

L’état d’urgence sanitaire a été décrété par la loi du 23 mars 2020 (L. n° 2020-290 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, 23 mars 2020, JO 24 mars) pour une durée de deux mois. Durée qui pourrait être prolongée en fonction de l’évolution de la situation sanitaire en France.

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 Alors que l’épidémie de coronavirus continue de se propager en France, des salariés sont tentés d’exercer leur droit de retrait pour se protéger.

 

     I.         Les conditions d’exercice du droit de retrait

Prévu dans l’article L4131-3 du Code du travail , le droit de retrait permet à un salarié de quitter son poste de travail ou de refuser de s’y installer sans l’accord de son employeur.

Le droit de retrait permet au salarié ou à l’agent public de quitter son poste de travail ou de refuser de s’y installer sans l’accord de son employeur.

Il peut s’exercer à deux conditions :

  • Si la situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ;

OU

  • S’il constate une défectuosité dans les systèmes de protection.
  • L’information de l’employeur

Pour l’exercer, il doit d’abord avoir alerté son employeur « de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection ».


 

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Même si cela n’est pas obligatoire, un écrit (courriel, courrier remis en main propre contre signature ou encore lettre recommandée avec avis de réception) est toujours préférable. Si c’est plus simple pour lui, le salarié peut aussi s’adresser aux représentants du personnel de son entreprise via le comité économique et social (CSE). Quel que soit son choix, il n’a pas à prouver l’existence du danger (il s’agit simplement de son ressenti) ni à obtenir l’autorisation de son employeur.

Étant donné la nature du risque que représente le virus Covid-19, il est possible d’alerter depuis le domicile sans se rendre sur le lieu de travail.

Un simple courrier électronique depuis la messagerie professionnelle au supérieur hiérarchique peut donc suffire.

  • Le danger grave et imminent

Le danger est « grave » s’il représente une menace pour la vie ou la santé du travailleur (une maladie ou un accident grave, voire mortel). Le danger est imminent si le risque peut survenir immédiatement ou dans un délai proche.

Mais il peut causer un trouble instantané ou progressif. Il n’est pas nécessaire que le salarié attende d’être confronté à un danger devenu inévitable, car il serait alors bien sûr trop tard pour l’éviter. Mais attention, le droit de retrait ne se fonde pas sur l’existence effective, objective et réelle d’un danger grave et imminent, mais sur le fait que le salarié croyait à un motif raisonnable de penser qu’il y avait danger. C’est donc une croyance par le salarié raisonnable d’un danger et non un danger prouvé qui permet le droit de retrait. Si le salarié s’est trompé et s’il n’y a pas de danger, mais s’il était de bonne foi et si le motif était raisonnable, le droit de retrait est valide.

  • La défectuosité des mesures de protection

L’employeur à l’obligation d’appliquer toutes les mesures de prévention et de précaution recommandées par le gouvernement (limitation des déplacements professionnels dans les zones à risques, aménagement des postes de travail en cas de retour d’un salarié d’une zone à risque, etc.)

  • Le droit de retrait des personnes fragiles

Concernant les personnes fragiles, les règles doivent être adaptées. Les personnes classées « à risque » par le haut conseil de la santé publique (HCSP), peuvent donc bénéficier d’un arrêt de travail.

Elles n’ont donc pas la nécessité d’user de leur droit de retrait.

En revanche, les conjoints de personnes à risque ne peuvent pas non plus faire valoir le droit de retrait, puisque celui-ci ne s’applique qu’en cas de « danger grave et imminent » pour leur propre santé ; la santé du conjoint ne rentre donc pas en compte.

  • L’exercice collectif du droit de retrait

Le droit de retrait peut être exercé collectivement. Dans un tel cas, chaque salarié informe individuellement son employeur qu’il se retire de la situation de travail dangereuse, ce qui suppose que chacun ait un motif raisonnable de penser qu’il existe un risque grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

II. Les conséquences de l’exercice du droit de retrait du salarié

Les effets du recours au droit de retrait sont lourds pour l’employeur, car il doit continuer à rémunérer le salarié.

Lorsque le droit de retrait est correctement exercé, l’employeur ne peut prendre aucune sanction ou retenue de salaire à l’encontre du travailleur qui a exercé légitimement son droit de retrait.

Le droit de retrait se distingue du droit de la grève, qui n’induit en principe aucune obligation de maintien de la rémunération. La Cour de cassation définit la grève comme une cessation concertée et collective du travail en vue d’appuyer des revendications professionnelles.

En revanche, l’employeur risque quant à lui des procédures pénale, sociale en faute inexcusable, prud’homale pour non-respect de l’obligation de sécurité.

III.         Le recours abusif au droit de retrait

L’existence même de l’épidémie du Covid-19 ne suffit pas en elle-même à justifier l’exercice du droit de retrait par le salarié.

De même, le seul fait d’avoir un collègue de travail revenant d’une zone à risque ou qui a été en contact avec une personne contaminée ne permet pas à lui seul l’exercice du droit de retrait par le salarié dès lors que les recommandations sanitaires ont bien été respectées par l’entreprise.

Le salarié ne peut pas non plus faire usage de son droit de retrait si l’école de son enfant ferme. En revanche, si l’enfant d’un salarié est placé à l’isolement, et que ce salarié ne dispose pas de mode de garde, il doit contacter son employeur afin d’envisager avec lui les modalités de télétravail qui pourraient être mises en place. Si cette première démarche ne peut aboutir, le salarié sera en droit de bénéficier d’un arrêt de travail indemnisé.

Dès lors que dans une entreprise, l’employeur a pris toutes les mesures de sécurité, telles que la fourniture du gel Hydro alcoolique, des masques de protection et mis, le cas échéant, en quarantaine le(s) salarié(s) infectés, le travailleur n’a pas vraiment de motif raisonnable de penser qu’il est en danger.

Si le salarié exerce tout de même son droit de retrait, l’employeur pourra saisir le juge des référés.

En pratique, les conflits seront réglés a posteriori. En effet, il est possible que l’employeur fasse une retenue sur salaire et que le salarié agisse en justice devant le tribunal prud’hommal. Il reviendra alors au juge de vérifier que le droit de retrait répondait bien à un danger grave et imminent.

L’évaluation par le juge se fera ce au cas par cas (quel poste occupe le salarié, a-t-il eut contact avec le public ou la clientèle, y a-t-il soupçon de collègues positifs…) au regard de la croyance raisonnable de danger par le salarié.

En cas de recours abusif, le salarié s’expose à des retenues sur salaire et à des sanctions disciplinaires allant jusqu’au licenciement. Avant d’exercer son droit de retrait, il est donc recommandé d’être prudent.

Pour lire une version plus longue de l’article sur le droit de retrait et le coronavirus, cliquez

SOURCES :

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041755644&categorieLien=id
https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus
https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/new_hcsp-sars-cov-2_patients_fragiles_v3.pdf

Le pacte d’associés

Le modèle de la société à responsabilité limitée (« SARL ») s’est largement imposé en France, constituant aujourd’hui la forme d’entreprise la plus répandue. Le succès de ce type de société est notamment justifié par des règles peu contraignantes. Le pacte d’associés, permettant une gestion des plus adaptées de l’entreprise pour les parties signataires, est un atout qui contribue à cette souplesse.

Le pacte d’associés est un document juridique qui va permettre de réguler de manière souple l’organisation de la société, son fonctionnement, ou encore les prérogatives dont dispose chacun des signataires.

En effet, le pacte a pour objectif de définir « les relations entre les associés et permet de résoudre les conflits et de protéger les intérêts communs » .

De même que le pacte d’actionnaires pour les sociétés anonymes, le pacte d’associés offre une marge de manœuvre favorable à de telles entreprises, et compte « parmi les solutions les plus simples pour démarrer et se structurer de façon optimale » .

Il convient donc, pour saisir tout l’intérêt du pacte d’associés (I), de se pencher sur les règles permissives constituant son cadre légal (II).

I. L’intérêt du pacte d’associés

Le pacte d’associés permettra aux parties de diriger de façon précise certains aspects de la société, sans se soucier des éventuelles contraintes formelles (A) et juridiques (B) liées aux statuts.

A) Une gestion sans la contrainte formelle des statuts

Le pacte d’associés est un document ayant, par nature, une fonction complémentaire aux statuts d’une SARL.

On parle ici d’acte extra-statutaire : les parties au pacte ne sont pas soumises à l’obligation de publication qui concerne les statuts. En effet, le pacte d’associés est un document confidentiel, seulement connu de ses signataires.

Dès lors, les parties ne seront tenues d’aucune démarche administrative particulière relative à la publication du document, qui n’a pas vocation à être consulté par les tiers.

Il convient également de préciser que le pacte d’associés, contrairement aux statuts, n’a pas à être signé par l’intégralité des associés : il peut lier certains d’entre eux, et n’aura pas à être porté à la connaissance des autres.

Les possibilités qu’offre le pacte d’associés vont permettre, pour les parties signataires, d’encadrer la direction, l’organisation et le contrôle de la société  d’une manière qui n’aurait pu être expressément prévue par les statuts.

Le pacte d’associés, à la manière d’un règlement, sera d’ailleurs souvent doté d’un préambule exprimant la volonté poursuivie par les rédacteurs du texte.

Tout l’intérêt d’un tel acte, de fait, réside dans les possibilités offertes quant à son contenu.

B) Une gestion sans la rigidité juridique des statuts

Le pacte d’associés, à la différence des statuts, va être modulable à travers l’insertion de différentes clauses.

Ces clauses peuvent porter sur plusieurs points, aussi bien concernant le fonctionnement de la société à proprement parler, que la gestion du capital et des droits des associés.

Ainsi, des clauses relatives au droit de vote vont par exemple permettre d’accorder un droit de veto à un ou plusieurs associés, une obligation d’accord unanime concernant certaines décisions et même la possibilité d’une renonciation à l’exercice d’un tel droit, chose qui n’est pas permise à travers les statuts.

De même, peuvent être prévues les obligations de consultation et de concertation de certains associés préalablement à des décisions importantes. Ces décisions peuvent également tenues par des clauses d’accord unanime.

Concernant le capital et l’actionnariat, les clauses de répartition du résultat, de préemption et d’agrément comptent parmi les principaux exemples de gestion des titres que l’on peut trouver au sein des pactes d’associés : la première permet notamment « d’assurer aux minoritaires une rémunération convenable »  quand les deux autres encadrent la cession d’actions dans le cas d’une sortie d’un associé, ou de l’arrivée d’un nouveau signataire.

De nombreuses clauses supplémentaires peuvent être prévues, comme la clause de contrôle des cessions, la clause d’inaliénabilité, la clause de limitation des participations, la clause de « buy or sell », la clause de non-concurrence.

La liste n’est pas limitative, et les possibilités tiennent de la volonté des parties : c’est là tout l’intérêt d’un cadre aussi souple que celui du pacte d’associés.

 

II. Le cadre du pacte d’associés

Le pacte d’associés, malgré toute sa souplesse, répond quand même à certains standards, aussi bien quant à sa création et sa modification (A) que quant à sa rupture (B).

A) Les règles relatives à sa création et sa modification

Pour rappel, le pacte d’associés est un document contractuel. Par définition, il lie donc les parties signataires, et ne peut être opposable en principe aux tiers non-signataires, en vertu de l’effet relatif des contrats.

L’article 1199 du Code civil prévoit en effet expressément que « le contrat ne crée d’obligations qu’entre les parties. Les tiers ne peuvent ni demander l’exécution du contrat ni se voir contraints de l’exécuter » .

De même, la modification d’un tel contrat peut être effectuée par avenant, contrairement à la modification des statuts soumise à un formalisme strict et coûteux. L’avenant permettra aux associés signataires de prendre rapidement les mesures qu’ils jugent nécessaires à la bonne gestion de la société, le pacte d’associé ayant cet avantage « de pouvoir être amendé de façon simple et rapide » .

Néanmoins il convient de souligner qu’à la différence des statuts, dont la modification nécessite seulement la majorité qualifiée, le pacte d’associés est régi en ce sens à l’unanimité des signataires.

B) Les règles relatives à sa rupture

Les associés peuvent convenir d’une durée limitée pour le pacte.

En effet, et comme pour tous les contrats, la durée de celui-ci pourra être prévue de manière précise dans le temps ou conditionnée à la survenance d’un événement.

A l’inverse, le pacte peut également être à durée indéterminée. Dans ce cas, tout signataire dispose du droit de le rompre  unilatéralement, à tout moment.

De même, en vertu de la souplesse de ce pacte, les associés signataires pourront prévoir que la violation d’une disposition (comme tout autre motif d’ailleurs) entraîne la rupture de celui-ci.

Néanmoins, il convient de souligner qu’une décision non conforme au pacte, mais conforme aux statuts ne peut être annulée, le pacte ayant « une force juridique inférieure aux statuts ».

Toutefois, une telle violation peut conduire à la réparation du préjudice subit, aussi bien envers les parties qu’envers tout tiers ayant subi un dommage, pourvu que les conditions de la responsabilité du fait personnel soient réunies.

L’article 1240 du Code civil rappelle effectivement que « tout fait quelconque de l’homme, qui cause un dommage à autrui, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Une faute, un dommage et le lien de causalité devront donc être établis.

Si le pacte d’associés est donc juridiquement moins contraignant que les statuts au regard des obligations des associés, il n’en demeure pas moins un outil efficace permettant une gestion rationnelle et méticuleuse de la société.

Pour une version plus détaillée de cet article cliquer sur pacte d’associé

SOURCES :
(1) http://www.journaldunet.com/management/guide-du-management/1201277-le-pacte-d-associes/
(2) https://www.village-justice.com/articles/pacte-associes-une-mise-plat-%20tous-les-enjeux,23458.html
(3) https://www.captaincontrat.com/articles-creation-entreprise/clauses-pacte-associes
(4) https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006070721&idArticle=LEGIARTI000006436739
(5) https://www.l-expert-comptable.com/dossiers/le-pacte-d-associes.html
(6) https://www.lecoindesentrepreneurs.fr/le-pacte-dassocie/
(7) https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006070721&idArticle=LEGIARTI000006437044