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Droit d’auteur et partage

L’arrivée d’internet a bouleversé le droit d’auteur, notamment grâce à la fluidité des échanges que permet internet. En effet, est apparue depuis quelques années « les boutons de partage » particulièrement mise en place sur les réseaux sociaux ceux-ci permettant la transmission de données par les internautes.

Les fonctionnalités des sites internet n’ont cessé de s’accroitre au fil des années.

Or l’ouverture au numérique de la publication d’œuvresprotégées par le droit d’auteur a rendu nécessaire une confrontation entre les droits de propriété intellectuelle et la possibilité d’échanger des données via internet.

En effet la fluidité résultant de la dématérialisation pousse à se poser la question de savoir comment adapter le droit d’auteur à ces nouveaux moyens de communication et de transmission.

Dans les pays de copyright et notamment aux États-Unis les exceptions aux droits des auteurs sont, par le biais de la notion defair use, traditionnellement entendues de manière large par faveur pour les utilisateurs.

A l’inverse en droit français ce sont les prérogatives des auteurs qui sont définies de manière large. L’essor de l’internet a ainsi suscité des pressions dans le sens d’une augmentation des droits des usagers au détriment de ceux des auteurs.

Nous n’analyserons pas ici le cas d’œuvres numérisées mises en ligne sans le consentement de leur auteur, qui a fait l’objet d’une jurisprudence ayant précisé les règles applicables.

Toutefois le problème reste posé concernant l’utilisation des boutons de partage présents sur de nombreux sites internet.

 

I. Le partage confronté au droit d’auteur

A ) Le mécanisme du bouton de partage

Un bouton de partage a pour but de faciliter le « bookmarquage » ou le « sharing » des articles, ou plus généralement de toute sorte de donnée, sur les réseaux sociaux.

C’est ainsi une façon d’améliorer la visibilité de ces articles et d’augmenter leur influence.

Le bouton de partage est une fonctionnalité d’un site internet, mis en place par le titulaire du site lui-même, vous permettant de partager les informations contenues dans le site sur les réseaux sociaux.

Ainsi c’est l’auteur lui-même qui rend possible, en mettant à disposition ce bouton de partage, la transmission des données sur les réseaux sociaux.

C’est sur Facebook qu’ont été lancés les boutons liés à la recommandation sociale tels que « J’aime » ou« Je partage ». Aujourd’hui, ces boutons sont présents sur un grand nombre de sites, de blog ou de plateformes interactives.

Les deux réseaux sociaux les plus utilisateurs de ce type de mécanisme sont Facebook et Twitter.

B) Confrontation avec le droit d’auteur

L’auteur d’une œuvre de l’esprit dispose en premier lieu de droits patrimoniaux sur son œuvre, il s’agit des droits de représentation, de reproduction et du droit de suite.

Il est admis que la mise à disposition en ligne des œuvres de l’esprit est soumise aux règles régissant les droits de l’auteur sur son œuvre.

Or en vertu de l’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droits est illicite ».

Le droit de reproduction de l’auteur lui permet ainsi de s’opposer à « toute fixation matérielle de l’œuvre par tout procédés qui permettent de la communiquer au public de manière indirecte » (article L122-3 alinéa 1 CPI).

En outre l’acte de reproduction peut se réaliser y compris en cas de changement de support.

Ainsi dès 1985 la Cour de cassation a reconnu par exemple que l’apparition d’un tableau dans une publicité constitue une reproduction illicite et donc une contrefaçon du droit d’auteur (Cour cass, 15 octobre 1985).

Il est donc clair que si vous reproduisez sur un site internet une œuvre sans le consentement de l’auteur, cette reproduction sera jugée illicite et vous serez donc contrefacteur.

La réponse est clairement posée par la jurisprudence depuis 1985dans cette hypothèse, mais lorsque la reproduction a été consentie par le mécanisme du bouton de partage l’analyse se fonde non plus sur le droit de reproduction mais sur la titularité des droits d’auteur.

 

II. Application des principes classiques du droit d’auteur

A) Référence aux droits moraux de l’auteur et à la titularité de l’œuvre

Lorsqu’un média en ligne intègre à son site un bouton de partage, non seulement il consent à la diffusion de l’article mais en plus il l’encourage.

On ne peut cependant pas parler de cession de droit d’auteur car une cession nécessite un formalisme particulier et notamment la rédaction d’un contrat.

Malgré le fait qu’il rende possible le partage l’article, et donc que le consentement à la reproduction soit avéré, l’auteur demeure titulaire des droits moraux sur son œuvre (article L121-1 CPI).

Les droits moraux de l’auteur implique notamment le droit au respect de l’œuvre et le droit à la paternité.

En vertu de ces droits moraux l’auteur pourra, malgré le fait qu’il ait consenti à la reproduction grâce au bouton de partage, agir sur le fondement d’une atteinte à son droit moral.

Concernant le droit au respect de l’œuvre cela permet à l’auteur de s’opposer à une utilisation de son œuvre dans un contexte qui porte atteinte à son esprit même en l’absence de toute modification de l’œuvre (CA Paris, 7 avril 1994).

A titre d’exemple de méconnaissance au droit au respect de l’œuvre on peut citer le fait d’inclure l’œuvre sur une page contenant d’autres œuvres de moins bonne qualité, ou provenant d’auteurs différents aux opinions radicalement opposées.

Si l’auteur estime que le contexte dans lequel vous intégrer son œuvre grâce au partage la déprécie, il peut exiger la fin de l’atteinte portée à l’esprit de son œuvre par un retrait de la publication.

De plus le droit à la paternité permet à l’auteur de revendiquer à tout moment la mention de son nom et de ses qualités dans le cadre de votre publication.

Ainsi le meilleur moyen d’éviter une action sur le fondement d’une atteinte au droit à la paternité de l’œuvre est de toujours préciser le nom de l’auteur lorsque vous partager un article sur les réseaux sociaux.

Concernant l’hypothèse où vous rajoutez un contenu original à l’œuvre première dont vous avez bénéficié du partage.

Dans ce cas ce sont les règles classiques de titularité des droits d’auteurs qui s’appliquent.

En vertu de l’article L 113-2 CPI on parle d’œuvre composite lorsqu’une œuvre nouvelle a été créée par l’incorporation d’une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de l’œuvre première.

Certes vous serez alors l’auteur de l’œuvre composite mais sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre préexistante (article L 113-4 CPI).

L’autorisation de l’auteur de l’œuvre originaire est donc obligatoire, sauf si cette dernière est tombée dans le domaine public.

Si vous souhaiter rajouter un contenu original et ainsi être l’auteur d’une œuvre composite, il vous faudra donc impérativement obtenir le consentement de l’auteur premier, à défaut vous risquerez des poursuites.

En outre, sachez que dans ce cas aussi vous devez respecter le droit moral de l’auteur de l’œuvre première.

B) une vigilance nécessaire de la part des internautes

Beaucoup d’internautes pensent être à l’abri de poursuite du fait de la notoriété et de l’utilisation mondiale des divers réseaux sociaux.

Cependant sachez que ces réseaux sociaux, dans le but d’échapper aux poursuites, ont habilement prévu des limitations de leur responsabilité dans leurs conditions générales d’utilisation.

Il est ainsi stipulé dans la plupart des conditions d’utilisations des réseaux sociaux que les internautes sont seuls responsables des atteintes portées aux droits de propriété intellectuelle.

Comme vous avez adhéré aux conditions générales d’utilisations lors de votre inscription à ces réseaux, vous ne pourrez pas invoquer votre bonne foi consistant en la méconnaissance de ces conditions.

Les réseaux n’ont, eux, qu’une obligation de contrôle du contenu, facilement respectée.

A titre d’exemple voici un extrait des conditions générales d’utilisation du réseau social Facebook : « Vous ne publierez pas de contenu et vous n’entreprendrez rien sur Facebook qui pourrait enfreindre les droits d’autrui ou autrement enfreindre la loi… Pour le contenu protégé par les droits de propriété intellectuelle, comme les photos ou vidéos (« propriété intellectuelle »), vous nous donnez spécifiquement la permission suivante, conformément à vos paramètres de confidentialité et paramètres d’applications : vous nous accordez une licence non-exclusive, transférable, sous-licenciable, sans redevance et mondiale ».

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Enchères en ligne et photos

Dans un arrêt du 26 juin 2013, la Cour d’appel de Paris a sanctionné un site d’enchères en ligne dans le marché de l’art pour contrefaçon et parasitisme de catalogues et de photographies. Elle retient notamment des éléments de preuves informatiques pour prouver la titularité des droits et l’originalité des photographies (CA Paris, pôle 5, chambre 1, 26 juin 2013, M.B c/ SA Camard et associés, n° RG 10/24329).

La Cour d’appel de Paris considère qu’en reproduisant sans autorisation sur son site internet « artprice.com » les catalogues de la société requérante protégeables au titre du droit d’auteur, la société défenderesse s’est rendue coupable d’actes de contrefaçon.

En effet, M. B. est un photographe professionnel travaillant notamment pour des maisons de ventes aux enchères dans le but de confectionner des catalogues de vente. La société Camard et associés est une maison de ventes organisant des ventes volontaires aux enchères publiques. La société Artprice.com exploite une base de données en ligne de 25 millions d’indices accessible en cinq langues, laquelle contient de nombreux catalogues de maisons de ventes qui lui sont adressés par ces dernières et qui ont été intégralement numérisés. Revendiquant 1,3 million d’abonnés, elle a développé un service « artprice images ».

M. B. et la société Camard et associés, estimant que la société Artprice.com portait atteinte à leurs droits d’auteur et commettait des actes de concurrence déloyale et parasitaire à leur encontre, ont fait assigner cette dernière en référé devant le Tribunal de grande instance de Paris du fait de la reproduction sans autorisation des catalogues et des photographies les illustrant. Cependant, cette action a été déclarée irrecevable faute d’avoir démontré l’originalité des catalogues en cause. Son jugement est infirmé pour une large part par les juges d’appel.

Ainsi qu’il est rappelé, la société Camard et associés fait valoir que la société Artprice.com a procédé à la numérisation et à la mise à disposition du public de plus de 71 de ses catalogues (années 2004 à 2009) en violation de ses droits d’auteur sur lesdits catalogues.

I- Le débat sur l’originalité des catalogues de vente de la société Camard et associés

La société Camard et associés énonce qu’un catalogue est protégé par le droit d’auteur s’il est suffisamment original et qu’en l’espèce l’originalité résulte des compositions, mises en forme, textes d’accompagnement des objets présentés, présentation des sommaires, positionnement et dimensions des titres, choix des couleurs, choix des typographies utilisées, mise en page de la couverture, etc.

De son côté, la société Artprice.com invoque l’absence d’originalité des éléments informationnels contenus dans les catalogues et, plus généralement, l’absence d’originalité des catalogues pris dans leur ensemble.

Ce n’est donc pas la position de la Cour d’appel de Paris qui rappelle à cette fin que « si toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination sont protégeables au titre du droit d’auteur, elles doivent cependant révéler un effort de création de la part de leur auteur sans lequel la conception matérialisée de sa production intellectuelle ne caractérise pas l’apport original indispensable, seul susceptible de leur conférer le droit de prétendre à la qualification d’œuvre de l’esprit, mais les laisse demeurer dans la catégorie des réalisations banales qui, dépourvues de l’empreinte ou du reflet de la personnalité de l’auteur ou de ses choix créatifs, ne peuvent bénéficier de la protection ».

Elle relève, ensuite, que la société Artprice.com ne revendique pas de droits d’auteur sur les photographies publiées dans ses catalogues mais sur les catalogues eux-mêmes. Ainsi, la Cour d’appel énonce qu’« un catalogue ne peut se voir conférer le caractère d’œuvre protégeable au sens de l’article L. 112-3 du Code de la propriété intellectuelle qu’autant que le travail de sélection, de classement et de présentation reflète la personnalité de l’auteur ».

Or, il s’avère qu’à la suite de l’examen par la Cour de chacun des catalogues litigieux produits aux débats, il apparaît que pour un certain nombre « [ils] présentent des caractéristiques propres à leur accorder la protection au titre du droit d’auteur ».

Elle en conclut que « ces catalogues dont l’originalité se manifeste dans leur composition, la mise en œuvre des lots présentés selon un certain ordre et de façon méthodique, dans le choix des citations, des notices biographiques et leur rédaction, présentent une physionomie propre qui les distingue des autres catalogues de ventes aux enchères et qui traduit un parti pris esthétique empreint de la personnalité de leur auteur ».

Aussi, en reproduisant sans autorisation sur son site internet « artprice.com » les catalogues de la société Camard et associés protégeables au titre du droit d’auteur, la société Artprice.com s’est rendue coupable d’actes de contrefaçon de droit d’auteur à son préjudice.

II- Le débat sur l’originalité des photographies de M. B.

La société Artprice.com soutient que M. B. a cédé ses droits d’auteur de manière exclusive aux différentes maisons de vente éditrices des catalogues mis en ligne, ne rapportant pas la preuve contraire ; qu’en outre il ne démontre pas ne pas avoir apporté ses droits à la société de gestion collective ADAGP. Or, la société Camard et associés ne revendique pas de droits patrimoniaux sur les photographies de M. B. figurant dans ces catalogues, son action en contrefaçon ne portant que sur les catalogues eux-mêmes ainsi qu’analysé précédemment.

Il n’est donc pas établi que M. B. ait cédé ses droits patrimoniaux aux maisons de vente éditrices des catalogues en cause. Ainsi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a rejeté la fin de non recevoir soulevée par la société Artprice.com pour absence de qualité pour agir de M. B. Par ailleurs, la société Artprice.com soutient que M. B. n’est pas cité seul en qualité de photographe dans un certain nombre de catalogues et ne justifie pas être l’auteur des photographies y figurant.

Or, M. B. justifie être l’auteur des 12 168 photographies non seulement par la copie informatique de ses factures mais aussi par le fait qu’il est nommément cité comme auteur des photographies revendiquées dans la plupart des catalogues faisant l’objet du litige.

Considérant que pour les photographies où il n’est pas cité comme auteur, M.B. justifie avoir adressé des photographies aux sociétés de ventes volontaires aux enchères pour constituer les catalogues ; qu’il détient en outre non seulement les fichiers numériques JPEG de ces photographies (les dates figurant sur ces fichiers n’étant pas celles de leur création mais de leur dernière modification) mais également les fichiers originaux au format RAW et TIF avant leur transformation en fichiers JPEG.

Sur l’originalité à proprement parler, la société Artprice.com invoque le défaut d’originalité des photographies litigieuses en précisant que le photographe s’était contenté de reproduire les objets d’art de la manière la plus banale possible en respectant uniquement les contraintes techniques imposées par les maisons de vente nécessaires à l’uniformisation de leurs catalogues.

Considérant que M. Stéphane B. réplique qu’une partie importante de ses photographies sont originales et protégées au titre du droit, précisant qu’il ne revendique pas une telle protection pour les photographies essentiellement techniques qu’il fait valoir les choix opérés sur le travail de la lumière et des ombres, la disposition des objets, la lumière, le positionnement des meubles, le fond des photographies, le travail effectué a posteriori sur les photographies.

La Cour rappelle que pour « bénéficier de la protection au titre du droit d’auteur une photographie doit être une création intellectuelle propre à son auteur, reflétant sa personnalité par ses choix dans la pose du sujet et son environnement, l’angle de prise de vue, le jeu des ombres et de la lumière, le cadrage et l’instant convenable de la prise de vue ». Elle considère ainsi que le photographe « a effectué une recherche particulière non seulement du positionnement de chacun des objets mais également pour certains d’entre eux de son cadrage en retenant arbitrairement un détail particulier de l’objet (notamment pour les objets d’art tels que les sculptures), que le positionnement des objets a fait l’objet de choix esthétiques particuliers, plusieurs objets pouvant figurer sur la même photographie en opposition ou en complémentarité les uns par rapport aux autres (notamment pour des meubles ou des ensembles de table), créant ainsi une dynamique particulière ».

C’est par conséquent une condamnation record contre Artprice pour contrefaçon que prononce la Cour d’appel de Paris. De fait, à la suivre, le préjudice moral subi par la maison de ventes « résulte de la vulgarisation et de la banalisation des catalogues (…) du fait de leur mise en ligne sur internet ». La société Artprice.com s’est d’ores et déjà pourvue en cassation, estimant qu’il serait « inimaginable que la Cour de cassation remette en cause près de cent ans de jurisprudence ».

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Travail : contrefaçon

Je travaille depuis deux ans en tant que co-fondateur et salarié au sein d’une société afin de mettre au point un progiciel. Etant en désaccord total avec les nouvelles orientations stratégiques de la société, je pense quitter la société en emportant avec moi mon savoir-faire et… les codes sources que j’ai produits. A qui appartiennent les codes sources ? A l’entreprise ou à la personne physique qui les a créés ? Mon contrat de travail ne comporte aucune clause à ce sujet et le code source a été produit à mon initiative .
Le régime des droits patrimoniaux attachés à une création logicielle est une sorte d’exception au régime général du droit de la propriété intellectuelle.
L’article L 113-9 du code de propriété intellectuelle dispose en effet que sauf dispositions statutaires ou dispositions contraires, les droits patrimoniaux sur les logiciels et leur documentation créés par un ou plusieurs employés dans l’exercice de leurs fonctions ou d’après les instructions de leur employeur sont dévolus à ce dernier qui est seul habilité à les exercer.
Vous ne pourrez pas en conséquence utiliser les codes développés durant votre contrat au sein de cette entreprise si vous la quittez sans vous attirer des ennuis car il y aura bel et bien contrefaçon.

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