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Conditions générales d’utilisation : quel droit applicable ?

Dans une volonté de plus en plus marquée de protéger les consommateurs, la Cour de justice de l’Union Européenne a empêché Amazon d’imposer l’application de la loi luxembourgeoise dans ses conditions générales de vente.

La loi applicable aux situations internationales est un des problèmes fondamentaux du droit international privé. Cependant, l’insertion de certaines clauses dans les  conditions générales  permet de éluder le droit.

Celles-ci permettent en effet qu’en cas de litige, c’est la loi désignée par le contrat qui s’appliquera. Il arrive cependant que des dispositions d’ordre public international, ou  » lois de police « , s’appliquent malgré ces clauses.

La cour de cassation définit l’ordre public international comme la situation où  » le juge français applique directement une loi étrangère ou une loi de police française. Dans ce cas, celle-ci s’impose en dehors de tout raisonnement de droit international privé, et donc sans référence à la conception française de l’ordre public. « . L’ordre public international est généralement d’origine nationale, française donc, mais certaines dispositions de droit européen constituent aussi des lois de police.

Néanmoins, le géant américain Amazon stipule à l’article 12 de ses conditions générales d’utilisation que  » le droit luxembourgeois s’applique à l’exclusion de la Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises (CVIM). « . Ainsi, elles ne font pas mention des lois impératives s’appliquant en toutes circonstances.

L’association de consommateurs autrichienne VKI a ainsi assigné Amazon devant les juridictions autrichiennes. La cour suprême a donc adressé des questions préjudicielles à la CJUE pour savoir quel était le droit applicable à ces conditions de vente, mais aussi quel était le droit applicable au traitement de données effectuées par cette société. La cour a répondu à ces questions le 28 juillet 2016.

Après l’analyse de cette décision (I.), on verra qu’elle s’inscrit dans un mouvement de protection du consommateur (II.).

I. Analyse de l’arrêt de la CJUE

A. Quant au traitement de données

Le traitement de données  renvoie à une série de processus permettant d’extraire de l’information ou de produire du savoir à partir de données brutes.

La Cour autrichienne pose à la CJUE la question de savoir si  » le traitement de données par une entreprise de commerce électroniques commerçant avec des consommateurs d’autres Etats membres est soumis à la directive 95/46  exclusivement, ou au droit de l’Etat où l’entreprise a son établissement qui procède au traitement, ou bien si celle-ci est tenue de respecter le droit des Etats vers lesquels elle dirige son activité ? « .

Ainsi, la directive 95/46 de l’Union Européenne, dans son article 4, dispose que :
 » Chaque État membre applique les dispositions nationales qu’il arrête en vertu de la présente directive aux traitements de données à caractère personnel lorsque :
a) le traitement est effectué dans le cadre des activités d’un établissement du responsable du traitement sur le territoire de l’État membre; si un même responsable du traitement est établi sur le territoire de plusieurs États membres, il doit prendre les mesures nécessaires pour assurer le respect, par chacun de ses établissements, des obligations prévues par le droit national applicable; « .

La Cour laisse à la juridiction nationale le soin d’apprécier si l’entreprise dirige son activité vers un Etat, et si elle traite les données en question dans le cadre des activités d’un établissement situé dans cet Etat. Ca sera alors le droit de ce dernier qui s’appliquera.

Ici, l’établissement doit être compris au sens de l’arrêt Weltimmo du 1er octobre 2015 , à savoir un établissement stable et un exercice d’activités réelles.
En l’espèce, tant la CJUE que l’avocat général considèrent que le droit allemand est applicable.

B. Quant à la loi applicable aux conditions d’utilisation d’Amazon

Ici, la juridiction autrichienne demande quelle est la loi applicable aux conditions générales de vente d’Amazon, mais aussi la méthode pour déterminer la loi applicable.

La CJUE répond que  » La loi applicable à l’appréciation d’une clause contractuelle donnée doit toujours être déterminée en application du règlement Rome I, que cette appréciation soit effectuée dans le cadre d’une action individuelle ou dans celui d’une action collective « .

Ainsi, cette clause  n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle sera abusive si elle induit le consommateur en erreur en lui donnant l’impression que seule la loi de cet Etat membre s’applique. Elle créera alors un déséquilibre significatif au détriment du consommateur.

Ainsi, il faut préciser que des dispositions impératives pourraient s’appliquer, au risque d’être considéré comme une clause abusive, ce qui a été le cas pour les conditions générales de vente d’Amazon.

II. La protection croissante des consommateurs

A. La protection du consommateur par le droit européen

L’Union Européenne a une tendance forte à vouloir protéger les consommateurs  contre les professionnels. Cet arrêt concernant les conditions générales d’Amazon n’en est qu’une illustration supplémentaire.

En effet, les géants du web (les  » GAFA « ) ont une volonté prononcée de se protéger au maximum, mais souvent au détriment du consommateur. Les exemples les plus explicites sont ceux concernant leurs montages fiscaux, notamment en utilisant le droit irlandais, ou bien, comme l’illustre l’arrêt précédent, en soumettant leurs contrats d’adhésion à un droit les favorisant, ou encore à obliger les consommateurs à devoir saisir des juridictions spécifiques, souvent californiennes.

C’est pourquoi  » la politique de l’UE vise à garantir la sécurité des consommateurs (…) à préserver leurs intérêts dans de nombreux domaines comme (…) les clauses contractuelles abusives « .

Ainsi, pour les problèmes inhérents au droit international privé, l’Union Européenne a pris le parti d’adopter deux règlements. Le premier est le règlement «  Rome I  » , du 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obligations contractuelles, et le second est le règlement  » Bruxelles I  » , complété par le règlement  » Bruxelles I bis « , relatifs à la compétence judiciaire en matière civile et commerciale.

Ces règlements considèrent en terme général que peut-être applicable la loi de l’Etat vers laquelle  » l’activité de l’entreprise est dirigée « , c’est à dire souvent la loi de l’Etat de résidence du consommateur. Aussi, la plupart du temps, le consommateur pourra saisir les juridictions de son Etat de résidence.

Le but de ces lois est évidemment non seulement d’éviter des frais de déplacement importants au consommateur, qui sont assumables plus aisément pour l’entreprise, mais aussi de faire en sorte que le consommateur ait une connaissance ainsi qu’une maitrise suffisante de la loi qu’on lui applique. En effet, le ressortissant autrichien ne connaitra que très rarement la loi luxembourgeoise en matière de contrat commercial électronique.

Enfin, l’Union Européenne tend à favoriser les actions des groupes de consommateurs, les  » class-action « , pour mutualiser les demandes et faire en sorte qu’au moins sur le terrain contentieux, les parties soient sur un pied d’égalité.

B. La protection du consommateur en droit français

Le droit français, lui aussi, a une tendance de plus en plus nette favorisant les consommateurs.

D’abord, ces mêmes règlements européens précédemment cités sont applicables en France, ainsi tous les mécanismes précédemment cités sont disponibles pour le consommateur français.

Cependant, la France a tenu à aller plus loin. Avec la réforme du droit des contrats entrée en vigueur le 1er octobre 2016 , le code civil a été modifié. Ainsi, un nouvel article 1171 dispose que  » Dans un contrat d’adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.  » .

Or, les contrats qui nous intéressent ici (Conditions générales d’utilisation ou de vente), sont des contrats d’adhésion. Les contrats d’adhésion sont en effet les contrats dont les termes sont imposés par une partie à l’autre, c’est à dire que l’autre partie doit y consentir ou y renoncer. Aucune clause n’est négociable.

Ainsi, avant même l’entrée en vigueur de la réforme, le tribunal de la mise en l’état avait considéré que la clause attributive de compétence renvoyant aux juridictions californiennes contenues dans les conditions générales de Facebook était une clause abusive, et que l’utilisateur de Facebook, s’il crée un compte pour ses activités personnelles, était bien un consommateur.

Telle solution est transposable aux contrats d’adhésion proposés par Google ou Amazon, et double la protection du consommateur.

Articles en relation :

Sources
http://www.legalis.net
http://www.usine-digitale.fr/article/l-europe-dans-la-jungle-d-amazon.N438197
http://www.net-iris.fr/veille-juridique/actualite/34344/les-conditions-generales-de-facebook-sanctionnees.php
https://europa.eu/european-union/topics/consumers_fr

Pour lire l’article sur Conditions générales d’utilisation : quel droit applicable ?, de façon plus complète, cliquez

 

Les consommateurs et la loi Hamon

La loi Hamon, du 17 mars 2014, relative à la consommation rééquilibre les pouvoirs entre consommateurs et entreprises. Pour certains, cette loi est une véritable innovation qui vise à rendre «1,5 milliard d’euros de pouvoir d’achat aux Français, mais contribuera aussi à créer plus de 10 000 emplois dans les années à venir ».

L’idée de protection du consommateur née avec la volonté d’établir un véritable marché unique européen. C’est en 1992, lors du traité de Maastricht que les Etats de l’Union Européenne en font une politique à part entière. La garantie « d’un niveau élevé de protection des consommateurs » est, alors, inscrite au sein même du TFUE.

Depuis ce jour, cette garantie ne fait que croître avec la mise en place de protections spécifiques et déterminées.

La protection des consommateur est, pour l’Union européenne, le moyen d’exploiter au mieux le potentiel du marché unique. En effet, le bon fonctionnement du marché est conditionné à une libre concurrence (entraînant des prix bas et permettant l’innovation) et aux mesures de protection des consommateurs (garantissant une qualité et une sureté des produits ou services proposés).

Néanmoins, le droit de la consommation est un droit partagé entre l’Union et les Etats membres. Ce partage entraine de grandes disparités de protection.

Alors même que la libre circulation des biens et services exige l’adoption de règles communes, ou du moins similaires, une grande disparité au sein des différentes législations étatiques persiste.

En 2011, les institutions européennes ont souhaité une harmonisation en matière de protection des consommateurs. La directive 2011/83/UE ne pourra faire l’objet de transpositions nationales plus strictes ou plus souples.

En France, c’est la loi Hamon  protégeant les consommateurs qui transpose, quasi mot pour mot, cette directive. De nombreux volets étaient très attendus dont la vente à distance, le démarchage, les assurances et les garanties favorisant la durabilité des produits.

Loi Hamon et vente à distance

 Afin de sécuriser les ventes par internet la loi Hamon prévoit de nouvelles mesures pour protéger les consommateurs.

Les cybercommerçant devront mettre en œuvre une meilleure information pour le client avant la passation de commande, rendre effectif et renforcer le droit de rétractation, et enfin protéger les clients contre les ventes forcées.

Toutes ces nouvelles mesures vont entraîner des modifications importantes de rédaction des CGV des e-commerces.

Une information claire et précise des clients est indispensable pour accroître la confiance des cyber-acheteurs dans les nouveaux modes de consommation.

Dès lors, les professionnels de la vente en ligne devront afficher les caractéristiques essentielles du bien ou service proposé, le prix total TTC et les frais supplémentaires éventuels ainsi que l’existence de garanties légales et d’un éventuel SAV.

Le consommateur pourra, à présent, exercer son droit de rétractation dans un délai de 14 jours (contre 7 avant la loi) sans avoir à justifier de motifs ni à payer de pénalités (exception faite des frais de retour).

De plus, la politique de rétractation est formalisée et doit faire l’objet d’un formulaire type de rétractation accessible directement sur le site.

L’exercice de ce droit de rétractation met fin à l’obligation des parties d’exécuter le contrat, le consommateur est donc tenu de restituer le bien et le professionnel de rembourser la totalité des sommes versées, tout ça dans un délai de 14 jours.

Les sanctions à l’égard du professionnel sont beaucoup plus dissuasives qu’auparavant.

La pénalité peut aller jusqu’à 50% dès le 60ème jours de retard contre une simple majoration au taux d’intérêt légal avant l’adoption de la loi (taux de 0,04% en 2014).

La dernière principale modification des e-commerces concerne la vente forcée.

Certains sites utilisent la méthode du « pré-cochage » automatique pour vendre des options supplémentaires aux internautes.

Cette méthode est donc, le plus souvent, le moyen de vendre des produits ou services sans réel consentement de l’internaute.

Le pré-cochage est désormais interdit pour tous les sites de commerce en ligne.

Le démarchage à domicile ou « hors établissement » pâtit des mêmes modifications.

Ces ventes « hors établissement » consistent à proposer un contrat de vente, de location ou de prestation de service directement au domicile du consommateur ou sur son lieu de travail.

Toutefois, les ventes en foires, salons ou manifestations commerciales n’ont pas fait l’objet d’une modification de régime et n’ouvrent pas droit à un délai de rétractation. Le professionnel devra, néanmoins, informer le consommateur, par écrit et avant la signature du contrat, de cette absence de droit à rétractation.

 

Loi Hamon et démarchage téléphonique

 Le démarchage téléphonique est un sujet d’actualité essentiel.

En effet, certaines pratiques à vocations commerciales non souhaitées sont de plus en plus agressives et de nombreuses personnes contractes des engagements sans s’en apercevoir.

Avant l’entrée en vigueur de la loi de consommation, des listes « orange » existaient afin de ne plus recevoir d’appels de prospection commerciale.

Cependant, cette inscription n’était pas effective, les professionnels n’étaient pas tenus de consulter ces listes « anti-prospection ».

Aujourd’hui, une nouvelle liste d’opposition est créée interdisant tout professionnel de démarcher les consommateurs y étant inscrits sous peine d’amende.

 

Loi Hamon et assurance

 Un des volets très attendu de la loi Hamon est la résiliation infra-annuelle des contrats d’assurance (multi risque habitation, automobile) sans frais ni pénalités.

La plupart des contrats d’assurance sont annuels et tacitement reconductibles. La liberté des consommateurs d’en changer est restreinte (une fois par an) à un laps de temps très court.

Or, une telle situation porte atteinte à la libre concurrence, entraîne une hausse anormale des prix (hausse des primes d’assurance 2 à 3 fois supérieure à l’inflation) et augmente le risque de non-assurance.

L’objectif de la nouvelle loi est de permettre à l’assuré de mieux faire jouer la concurrence et la compétitivité afin aboutir, in fine, à la baisse des prix du marché.

Pour résilier son contrat, le client doit prévenir son assureur par courrier simple ou par mail. Il n’est redevable que de la fraction de la cotisation d’assurance à la période couvrant le risque jusqu’à la date de prise d’effet de la résiliation.

Pour les assurances automobiles, le droit de résiliation est plus encadré afin d’éviter tout risque de non-assurance.

L’assuré ne pourra l’exercer que s’il fournit la preuve d’une souscription à une nouvelle assurance.

Une nouveauté touche également les cas de multi-assurances. De plus en plus de produits offrent aux consommateurs des assurances contre des risques pour lesquels ils se trouvent déjà couvert.

La loi Hamon permet de restreindre ces cas. Dès lors que le client souscrit un nouveau contrat qui couvre un risque pour lequel il est déjà assuré, la résiliation est possible dans les 14 jours.

 

Loi Hamon et garantie pour la durabilité de produits

Les garanties légales sur les produits achetés sont allongées à 2 ans (contre 6 mois avant la loi).

À l’achat d’un produit, le vendeur doit garantir le client contre ses défauts de conformités (défaut d’usage, défaut de qualité…). Le bien livré doit être identique à celui prévu par le contrat.

Cette garantie est une garantie légale qui existe et peut être mise en œuvre pour tous les produits achetés. Elle s’applique indépendamment de toutes garanties commerciales spécifiques.

Elle comprend la garantie contre les vices cachés et le défaut de conformité.

En d’autres termes, tout défaut qui apparaît dans un délai de 2 ans sera considéré comme existant au moment de la vente et sera donc soumis à la garantie légale.

Le consommateur n’a pas à apporter la preuve de l’existence du défaut au moment de la livraison.

«Le consommateur n’aura pas à souscrire une garantie payante complémentaire pour se voir protégé des éventuelles défaillances du produit qu’il aura acheté».

De surcroît, avant tout achat, le consommateur doit connaître la durée de disponibilité des pièces détachées nécessaires au bon fonctionnement du bien.

En pratique, le fabriquant doit informer les consommateurs sur la durée de fabrication et de commercialisation de ces pièces. Cette information est ensuite transmise au client par le vendeur et confirmée par écrit au moment de la conclusion du contrat.

SOURCES

http://www.lesnumeriques.com/l-etonnante-loi-hamon-consequences-sur-nos-achats-high-tech-a1816.html
http://www.economie.gouv.fr/dgccrf/Publications/Vie-pratique/Fiches-pratiques/Les-Garanties
http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F11094.xhtml
http://www.economie.gouv.fr/files/DP-pdl-conso-web.pdf
http://www.economie.gouv.fr/loi-consommation/mesure/e-commerce
http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F11094.xhtml