Création

Mémoire cache et responsabilité

Les outils de recherche constituent des éléments essentiels pour le développement d’internet. Mais ceux-ci sont soumis au respect des règles de droit. Ainsi, lorsqu’un document indexé par le moteur de recherche est couvert par le droit d’auteur, il doit alors demander l’autorisation des titulaires de droits.

Google, dans ses résultats, propose (lien [Archivé en mémoire]) un lien vers la version du document telle qu’elle existe dans son index (telle qu’elle existait, donc, au moment de son indexation), afin d’éviter les erreurs 404 (document ayant disparu entre l’indexation et le jour de la recherche par l’internaute). Google – qui est le seul moteur à fournir cette info – ne viole-t-il pas les lois sur la protection intellectuelle en proposant de visualiser une *copie* de la page telle qu’elle était au moment du passage de son spider ? Il y a en effet reproduction intégrale et non plus indexation seule…

Les outils de recherche constituent l’un des éléments essentiels au développement d’ Internet, mais ils sont aussi soumis au respect des lois.

Si le document indexé était couvert, à l’époque, à la législation sur le droit d’auteur, un moteur, qui comprend dans sa base de données des pages HTML in extenso, consultables « en ligne« , devrait demander l’autorisation des titulaires des droits d’auteur, et leur verser le cas échéant une rémunération.

Tel ne serait pas le cas si cette page était dénuée de toute originalité. (par exemple: les discours destinés au public prononcés dans les assemblées politiques, administratives, judiciaires ou académiques, ainsi que dans les réunions publiques d’ordre politique (L.122-5 du Code de Propriété intellectuelle) ou encore lorsque l’œuvre est tombée dans le domaine public, 70 ans après le décès de son auteur (article 2 de la loi).

Lorsque la page ainsi indexée émanerait d’un journaliste, qui aurait cédé ses droits à un éditeur, autorisant la diffusion « en ligne » par un moteurs des articles en question, sans que le contrat initial entre l’auteur et l’éditeur ne vise expressément un tel mode d’exploitation, l’accord de l’auteur devrait être également demandé.

De plus, quid si la page présentait des informations litigieuses au moment du passage du robot ? Qui serait responsable de la diffusion de ce contenu ? Google ? L’auteur ?…

Aucune loi, actuellement, n’oblige les moteurs de recherche à proposer des systèmes de filtrage fiables. On peut faire un raisonnement par analogie avec la tendance qui se dégage actuellement en ce qui concerne les textes (la directive européenne sur le commerce électronique) et la jurisprudence sur la responsabilité des fournisseurs d’accès et de d’hébergement.

Un fournisseur d’accès ou d’hébergement ne sera tenu pour co-responsable des contenus immoraux ou illicites que s’il avait ou devait avoir connaissance de la présence de tels contenus sur son réseau ou son serveur.

Quand il apprend l’existence de tels contenus, il doit faire le nécessaire pour y mettre fin, dans la mesure de ses moyens, sous peine d’engager sa responsabilité.

En Inde, des poursuites pénales ont été engagées à l’encontre des dirigeants d’une société propriétaire d’un moteur de recherche  pour complicité de diffusion de « matériel pornographique » mettant en scène des mineurs.

En France, une décision a été prononcée dans un cas qui ressemble à la question posée.( Ordonnance de référé du 31 juillet 2000 du Tribunal de Grande Instance de Paris)

Monsieur Bertrand Delanoé, avait assigné les exploitants et l’hébergeur d’un site à caractère érotique dont l’adresse comportait ses noms et prénoms, ainsi que la société Altavista, en sa qualité de moteur de recherche, pour avoir référencé ce site.

Selon lui, l’utilisation de son nom pour désigner un site contraire aux bonnes moeurs, ainsi que leréférencement de ce site par le moteur de recherche de la société Altavista portaient gravement atteinte à sa dignité, son honorabilité et sa réputation.

Il reprochait à la société Altavista un manque de contrôle sur son moteur de recherche et prétendait que cette société était responsable du contenu mis en ligne.

Le Tribunal de Grande Instance de Paris a condamné les exploitants du site litigieux mais a refusé de condamner la société Altavista considérant que :

 » la responsabilité du moteur de recherche relève à l’évidence dans le cas d’espèce d’un débat au fond, étant observé, et en tout état de cause, que la société Altavista qui d’initiative a mis en place une procédure d’alerte, a réagi très rapidement pour déférencé le site litigieux « .

L’absence de contrôle humain au niveau de la phase d’indexation est inhérente au fonctionnement même du moteur de recherche dont la vocation est l’indexation exhaustive et non sélective de l’information.

Les obligations d’un moteur de recherche semblent donc, pour le moment, devoir être limitées à une procédure d’alerte et de « déréférencement ». Faire supporter au moteur de recherche une responsabilité a priori consisterait à faire prendre le risque d’un tri, plus ou moins subjectif, dans l’information.

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Metas

La présence des moteurs de recherche est aujourd’hui essentielle pour assurer une navigation efficace et rapide sur le net. La présence des métas est alors indispensable pour les moteurs de recherche puisqu’ils permettent de définir des mots clés pour l’indexation. Cependant les métas peuvent permettre par exemple qu’une recherche sur le nom d’une société dirige le visiteur sur la page web d’un concurrent. C’est alors toute une série de problèmes liés aux métas que la jurisprudence a dû résoudre.

Définitions

Les métas sont des informations inclus dans une page web, invisible pour l’utilisateur mais qui permettent de définir des mots clés pour l’indexation dans les moteurs de recherche. Quand un internaute fait une recherche avec un mot clé , la page d’un site web, qui contient ce mot clés dans ses métas, apparaîtra en tête dans les réponses, même si le site ne présente aucun rapport avec ce mot.

D’ou de multiples problèmes: les métas permettent par exemple qu’une recherche sur le nom d’une société emmène le visiteur sur la page web d’un concurrent qui aura placé comme méta le nom de la société.

I. Des solutions françaises

A) Affaire Citycom, CA Paris, 3 mars 2000

Dans cette affaire, la société Citycom vendait des produits Chanel sans faire partie du réseau de détaillants agréés de la marque, et avait inclus dans le code html des pages web du site, les mots clés « Chanel » et « Coco » dans les balises métas .

Le litige avant dans un premier temps échappé à une décision juridictionnelle, puisque les deux sociétés avaient transigé.

Un arret de la 14ème chambre de la cour d’appel de Paris du 3 mars 2000 a condamné la société Citycom pour contrefaçon.

La Cour a considéré que l’emploi des mots  » Chanel  » et  » coco  » dans les métas constituait unecontrefaçon et une utilisation abusive des marques de Chanel.

B) TGI Paris, 29 octobre 2002, ODIN c/ SARL LE LUDION

Dans cette affaire, un fabriquant et réparateur d’orgues de barbarie propriétaire de la marque « orgues Odin » a vu un de ses concurrents (la société LE LUDION),  utiliser le nom de « Odin » à titre de méta tags sur la page source de son site Internet conduisant automatiquement l’internaute qui tapait ce mot clé dans le moteur de recherches sur le site du concurrent.

Le TGI décide que «l’utilisation par la société Le Ludion du terme « Odin » comme mot-clé sur les pages de son site Internet www.leludion.com, sans l’autorisation de M. Odin, constitue une contrefaçon de la marque « Orgues Odin », au détriment de celui-ci et une atteinte au nom commercial ».

C) TGI de Paris, 26 janvier 2012, Webangelis c/ Laurent I.

Ici encore, un site (hotmessenger.com) avait utilisé la marque d’un concurrent (la société WEBANGELIS titulaire de la marque « cokincokine » et du nom de domaine www.cokincokine.com)  à titre de balises méta pour être mieux référencé.

Le TGI précise que « la visualisation concomitante de la requête cokincokine et du résultat hotmessenger.com dans le référencement naturel crée un risque d’association entre les deux sites qui porte atteinte à la fonction d’identification d’origine de la marque. Il y a donc lieu de retenir que l’utilisation des mots « cokin cokine » dans le code source du site Internet du défendeur constitue un acte de contrefaçon de la marque de la demanderesse ».

Les sanctions de la contrefaçon sont : 3 ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende.

II. Des exemples etrangers

A) La jurisprudence américaine

Les affaires Playboy

– Contre une société :

Une société avait utilisé comme métas les mots  » Playboy  » et  » Playmate « . La société Playboy a réagi en intentant une action en contrefaçon et concurrence déloyale. Les tribunaux ont donné raison à la société Playboy, considérant qu’il y avait en l’espèce un véritable détournement de clientèle.

– Contre une ancienne playmate

L’hypothèse était exactement la même. Mais une playmate avait utilisé dans les métas les mots  » Playboy  » et  » Playmate « . Le juge a ici refusé l’interdiction demandée par la société Playboy en considérant que l’utilisation était légitime ( l’arrêt retient la notion de  » fair use  » ). Le tribunal a retenu que l’ancienne playmate ne laissait en rien croire eux visiteurs qu’ils étaient sur un site de la société Playboy.

Dans l’affaire Eli Lilly Co v/ Natural Answers, Inc. du 21 nov. 2000( Cour d’appel fédérale), la société pharmaceutique Eli Lilly, propriétaire du médicament Prozac, reprochait à la société Natural Aswers la distribution sur Internet d’un produit euphorisant à base de plantes appelé « Herbrozac « .

Cette société avait inséré dans le code source de son site le mot clé (meta-tag) « Prozac « .

La Cour a jugé qu' » utiliser la marque d’un tiers dans ses meta-tags équivaut à installer un panneau comportant la marque d’un autre devant son magasin » et qu’un tel comportement « constitue une preuve suffisante de l’intention de confondre et de tromper ».

B) La jurisprudence belge

Tribunal de commerce de Bruxelles : Affaire Belgacom

Dans cette affaire, la société Intouch avait utilisé comme metatags le nom de son concurrent  » Belgacom « . Le tribunal de commerce de Bruxelles, fondant sa décision sur le droit des marques belge, a condamné la société Intouch à cesser d’utiliser les termes incriminés sous astreinte.

CONCLUSIONS :

Sous prétexte que les metas sont invisibles à l’oeil nu, ne pensez pas que le droit ne peut s’y imiscer ! Utilisez les à bon escient et pensez aux conséquences juridiques potentielles….

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Responsabilité du fait des moteurs de recherche

Les moteurs de recherche :

Les moteurs de recherche utilisent un ou des logiciels qui visitent les pages web et leurs liens de manière. Le contenu est indexé de façon automatique, en résumant de manière automatique le contenu de la page,en utilisant l’indice de popularité des sites, leurs url, les metas s’y trouvant etc …

 

Les annuaires de sites :

Les annuaires sont très différents. L’auteur d’un site demande son inscription dans l’annuaire. Il choisit les mots clés qui sont attribués au site et éventuellement la catégorie dans laquelle il figurera dans l’annuaire. L’annuaire, en tant qu’éditeur, a la possibilité de modifier parfois ces choix.

 

I. Responsabilité des moteurs de recherche

A) La question des droits de propriété intellectuelle

Les règles de la propriété intellectuelle s’appliquent aux moteurs de recherche, en fonction de l’étendue de la reproduction effectuée par le moteur de recherche : mots clés, titres, extraits et/ou œuvre intégrale.

1) Les mots clés :

Les mots clés relatifs à un site peuvent-ils être protégés par les droits de propriété intellectuelle ?

La réponse est négative si on s’inspire d’une jurisprudence « le monde c/ Microfor » qui ne s’appliquait, pas à l’époque, aux moteurs de recherche.

La Cour de cassation avait décidé dans cette affaire, que la protection du droit d’auteur ne s’appliquait pas à l’édition d’un index d’œuvres permettant de les identifier par des mots clés.

L’auteur peut-il contester l’utilisation de mots clés par le moteur de recherche ou des rubriques choisies par l’annuaire ?

Cette demande semble recevable, mais limitée à l’hypothèse ou ce classement porte atteinte à son honneur, ce qui constitue un droit moral attaché à l’œuvre. L’action engagée devant les tribunaux compétents pourra donc être une action dans le but de voir modifier la donnée litigieuse et de se voir attribuer éventuellement des dommages et intérêts.

2) Les titres

La plupart des moteurs de recherche présentent dans le résultat de leur recherche, le titre des sites.

Or la jurisprudence classique du droit de la propriété intellectuelle admet que le titre, s’il a un caractère suffisamment original, peut faire l’objet d’une protection.

On peut donc se demander si l’utilisation de ces titres par les moteurs de recherche constitue une violation des règles de la propriété intellectuelle.

La doctrine était majoritairement favorable à un assouplissement de ces règles, afin des les considérer au même titre que des références bibliographiques dans un catalogue, index, … La jurisprudence a validé cette position dans l’affaire « Le Monde contre Microfor » :  » si le titre d’un journal ou d’un des ses articles est protégé comme l’œuvre elle-même, l’édition à des fins documentaires, par quelque moyen que se soit, d’un index comportant la mention de ces titres en vue d’identifier les œuvres répertoriées ne porte pas atteinte au droit exclusif d’exploitation de l’auteur « .

3) Les extraits

Certains moteurs de recherche, pour faciliter à l’utilisateur la recherche de sites pertinents, proposent un extrait de la page web( en général les premières phrases).

Ceci constitue une reproduction partielle de l’œuvre.

La loi française autorise le droit de citation. Il s’agit de savoir, si en l’espèce ce droit est utilisable par les moteurs de recherche. La cour de cassation dans l’affaire « Le Monde contre Microfor » a reconnu un droit de citation des producteurs de base de données.

Elle a considéré comme licite au regard de l’article 42 de la loi du 11 mars 1957 le fait de constituer une base de données à partir de court extraits d’œuvres d’autrui et de les référencer à l’intérieur d’un index, sous réserve que soient mentionnés le nom de l’auteur et la source utilisée, et que les informations rassemblées ne dispensent pas le lecteur de lire l’œuvre elle-même.

4) La reproduction d’œuvres intégrales

Les moteurs de recherche qui reprennent intégralement des œuvres protégées par la propriété intellectuelle doivent obligatoirement obtenir l’autorisation des auteurs.

Bon nombre de journaux se sont vu condamnés pour avoir mis en ligne des articles déjà parus dans le journal papier, la représentation sur un support différent impose une autorisation différente.

Pour les œuvres visuelles, la reproduction sous formes de  » vignettes  » ne peut pas être assimilée à un droit de citation qui ne s’applique pas selon la jurisprudence aux œuvres plastiques.

B) La responsabilité pénale :

Un lien vers un site illicite peut engager la responsabilité de son auteur, les moteurs de recherche n’échappent pas à la règle. Cependant on peut noter un régime différent selon qu’il s’agit de moteur de recherche ou d’annuaires

1) Les moteurs de recherche

L’indexation étant automatique, il est évident que des sites illicites peuvent être indexés, d’où la mise en place de divers contrôles : dénonciations en ligne, possibilités de filtrage des mots clés définis sur une liste noire, …

Cependant s’agissant de professionnels, on pourrait faire un parallèle avec les règles concernant les fournisseurs d’hébergement qui ont une obligation de moyen. On pourrait penser qu’un moteur de recherche qui met en place différents moyens de contrôle ne verrait pas sa responsabilité engagée.

2) Les annuaires

La situation est ici beaucoup plus claire, la responsabilité en cause est une responsabilité éditoriale. Lors de la demande d’inscription d’un site, les annuaires doivent avoir une connaissance suffisante de celui-ci pour se voir reconnu responsables s’ils ont accepté de répertorier un site illégal. On pourra leur appliquer les mêmes règles de responsabilité que celle des liens vers des sites illicites. ( cf. mon article sur les liens hypertextes)

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Droit d’auteur et partage

L’arrivée d’internet a bouleversé le droit d’auteur, notamment grâce à la fluidité des échanges que permet internet. En effet, est apparue depuis quelques années « les boutons de partage » particulièrement mise en place sur les réseaux sociaux ceux-ci permettant la transmission de données par les internautes.

Les fonctionnalités des sites internet n’ont cessé de s’accroitre au fil des années.

Or l’ouverture au numérique de la publication d’œuvresprotégées par le droit d’auteur a rendu nécessaire une confrontation entre les droits de propriété intellectuelle et la possibilité d’échanger des données via internet.

En effet la fluidité résultant de la dématérialisation pousse à se poser la question de savoir comment adapter le droit d’auteur à ces nouveaux moyens de communication et de transmission.

Dans les pays de copyright et notamment aux États-Unis les exceptions aux droits des auteurs sont, par le biais de la notion defair use, traditionnellement entendues de manière large par faveur pour les utilisateurs.

A l’inverse en droit français ce sont les prérogatives des auteurs qui sont définies de manière large. L’essor de l’internet a ainsi suscité des pressions dans le sens d’une augmentation des droits des usagers au détriment de ceux des auteurs.

Nous n’analyserons pas ici le cas d’œuvres numérisées mises en ligne sans le consentement de leur auteur, qui a fait l’objet d’une jurisprudence ayant précisé les règles applicables.

Toutefois le problème reste posé concernant l’utilisation des boutons de partage présents sur de nombreux sites internet.

 

I. Le partage confronté au droit d’auteur

A ) Le mécanisme du bouton de partage

Un bouton de partage a pour but de faciliter le « bookmarquage » ou le « sharing » des articles, ou plus généralement de toute sorte de donnée, sur les réseaux sociaux.

C’est ainsi une façon d’améliorer la visibilité de ces articles et d’augmenter leur influence.

Le bouton de partage est une fonctionnalité d’un site internet, mis en place par le titulaire du site lui-même, vous permettant de partager les informations contenues dans le site sur les réseaux sociaux.

Ainsi c’est l’auteur lui-même qui rend possible, en mettant à disposition ce bouton de partage, la transmission des données sur les réseaux sociaux.

C’est sur Facebook qu’ont été lancés les boutons liés à la recommandation sociale tels que « J’aime » ou« Je partage ». Aujourd’hui, ces boutons sont présents sur un grand nombre de sites, de blog ou de plateformes interactives.

Les deux réseaux sociaux les plus utilisateurs de ce type de mécanisme sont Facebook et Twitter.

B) Confrontation avec le droit d’auteur

L’auteur d’une œuvre de l’esprit dispose en premier lieu de droits patrimoniaux sur son œuvre, il s’agit des droits de représentation, de reproduction et du droit de suite.

Il est admis que la mise à disposition en ligne des œuvres de l’esprit est soumise aux règles régissant les droits de l’auteur sur son œuvre.

Or en vertu de l’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droits est illicite ».

Le droit de reproduction de l’auteur lui permet ainsi de s’opposer à « toute fixation matérielle de l’œuvre par tout procédés qui permettent de la communiquer au public de manière indirecte » (article L122-3 alinéa 1 CPI).

En outre l’acte de reproduction peut se réaliser y compris en cas de changement de support.

Ainsi dès 1985 la Cour de cassation a reconnu par exemple que l’apparition d’un tableau dans une publicité constitue une reproduction illicite et donc une contrefaçon du droit d’auteur (Cour cass, 15 octobre 1985).

Il est donc clair que si vous reproduisez sur un site internet une œuvre sans le consentement de l’auteur, cette reproduction sera jugée illicite et vous serez donc contrefacteur.

La réponse est clairement posée par la jurisprudence depuis 1985dans cette hypothèse, mais lorsque la reproduction a été consentie par le mécanisme du bouton de partage l’analyse se fonde non plus sur le droit de reproduction mais sur la titularité des droits d’auteur.

 

II. Application des principes classiques du droit d’auteur

A) Référence aux droits moraux de l’auteur et à la titularité de l’œuvre

Lorsqu’un média en ligne intègre à son site un bouton de partage, non seulement il consent à la diffusion de l’article mais en plus il l’encourage.

On ne peut cependant pas parler de cession de droit d’auteur car une cession nécessite un formalisme particulier et notamment la rédaction d’un contrat.

Malgré le fait qu’il rende possible le partage l’article, et donc que le consentement à la reproduction soit avéré, l’auteur demeure titulaire des droits moraux sur son œuvre (article L121-1 CPI).

Les droits moraux de l’auteur implique notamment le droit au respect de l’œuvre et le droit à la paternité.

En vertu de ces droits moraux l’auteur pourra, malgré le fait qu’il ait consenti à la reproduction grâce au bouton de partage, agir sur le fondement d’une atteinte à son droit moral.

Concernant le droit au respect de l’œuvre cela permet à l’auteur de s’opposer à une utilisation de son œuvre dans un contexte qui porte atteinte à son esprit même en l’absence de toute modification de l’œuvre (CA Paris, 7 avril 1994).

A titre d’exemple de méconnaissance au droit au respect de l’œuvre on peut citer le fait d’inclure l’œuvre sur une page contenant d’autres œuvres de moins bonne qualité, ou provenant d’auteurs différents aux opinions radicalement opposées.

Si l’auteur estime que le contexte dans lequel vous intégrer son œuvre grâce au partage la déprécie, il peut exiger la fin de l’atteinte portée à l’esprit de son œuvre par un retrait de la publication.

De plus le droit à la paternité permet à l’auteur de revendiquer à tout moment la mention de son nom et de ses qualités dans le cadre de votre publication.

Ainsi le meilleur moyen d’éviter une action sur le fondement d’une atteinte au droit à la paternité de l’œuvre est de toujours préciser le nom de l’auteur lorsque vous partager un article sur les réseaux sociaux.

Concernant l’hypothèse où vous rajoutez un contenu original à l’œuvre première dont vous avez bénéficié du partage.

Dans ce cas ce sont les règles classiques de titularité des droits d’auteurs qui s’appliquent.

En vertu de l’article L 113-2 CPI on parle d’œuvre composite lorsqu’une œuvre nouvelle a été créée par l’incorporation d’une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de l’œuvre première.

Certes vous serez alors l’auteur de l’œuvre composite mais sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre préexistante (article L 113-4 CPI).

L’autorisation de l’auteur de l’œuvre originaire est donc obligatoire, sauf si cette dernière est tombée dans le domaine public.

Si vous souhaiter rajouter un contenu original et ainsi être l’auteur d’une œuvre composite, il vous faudra donc impérativement obtenir le consentement de l’auteur premier, à défaut vous risquerez des poursuites.

En outre, sachez que dans ce cas aussi vous devez respecter le droit moral de l’auteur de l’œuvre première.

B) une vigilance nécessaire de la part des internautes

Beaucoup d’internautes pensent être à l’abri de poursuite du fait de la notoriété et de l’utilisation mondiale des divers réseaux sociaux.

Cependant sachez que ces réseaux sociaux, dans le but d’échapper aux poursuites, ont habilement prévu des limitations de leur responsabilité dans leurs conditions générales d’utilisation.

Il est ainsi stipulé dans la plupart des conditions d’utilisations des réseaux sociaux que les internautes sont seuls responsables des atteintes portées aux droits de propriété intellectuelle.

Comme vous avez adhéré aux conditions générales d’utilisations lors de votre inscription à ces réseaux, vous ne pourrez pas invoquer votre bonne foi consistant en la méconnaissance de ces conditions.

Les réseaux n’ont, eux, qu’une obligation de contrôle du contenu, facilement respectée.

A titre d’exemple voici un extrait des conditions générales d’utilisation du réseau social Facebook : « Vous ne publierez pas de contenu et vous n’entreprendrez rien sur Facebook qui pourrait enfreindre les droits d’autrui ou autrement enfreindre la loi… Pour le contenu protégé par les droits de propriété intellectuelle, comme les photos ou vidéos (« propriété intellectuelle »), vous nous donnez spécifiquement la permission suivante, conformément à vos paramètres de confidentialité et paramètres d’applications : vous nous accordez une licence non-exclusive, transférable, sous-licenciable, sans redevance et mondiale ».

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