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Diffamation sur une page Facebook et sur twitter : qui est l’auteur principal ?

Comme chacun le sait, les réseaux sociaux sont le théâtre de vifs échanges fondés sur la liberté d’expression. Cette liberté de communication n’est cependant pas absolue et le délit de diffamation peut être retenu à l’encontre d’un utilisateur. Cependant, il est parfois difficile de déterminer qui est l’utilisateur, auteur des propos diffamatoires.

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Il est alors intéressant de revenir sur le régime de responsabilité applicable au délit de diffamation sur une page Facebook ou sur un compte Twitter et plus particulièrement à la détermination du responsable.

L’émergence des réseaux sociaux a en effet permis à chacun de se saisir de l’actualité et d’exprimer son point de vue de manière directe. Mais cette nouvelle voie d’expression dénuée d’intermédiation peut également favoriser des propos qualifiables de diffamatoires.


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Les victimes de propos diffamatoires sur une page Facebook ou sur un compte Twitter ne sont pas démunies face à cette situation et la loi permet de réagir face à ces comportements délictueux.

Ainsi, en se fondant sur la loi de 1881 (loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse) réprimant les propos diffamatoires (I), la loi de 1982 (loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle) et la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) prévoient un régime de responsabilité en cascade (II) fondé sur la détermination de l’auteur principal.

I – APPLICABILITÉ DE LA LOI DE 1881 POUR DES PROPOS TENUS SUR UNE PAGE FACEBOOK OU UN COMPTE TWITTER

A – L’APPLICABILITÉ DE LA LOI DE 1881

Lors de l’émergence d’Internet, s’est posée la question du régime de responsabilité applicable à des propos répréhensibles. En effet, face à l’augmentation du nombre de connexions et d’échange de messages via l’Internet, un nombre croissant de contentieux est apparu. La solution est venue de la loi du 29 juillet 1982 (loi n° 82652) dite loi sur la communication audiovisuelle (Cour de cassation – Chambre criminelle 16 octobre 2018 in fine).

Par cette loi, le législateur de l’époque crée un régime de responsabilité spécial, directement fondé sur la loi du 29 juillet 1881 et notamment son article 29 qui consacre la diffamation. Ce renvoi permet d’écarter le fondement classique de la responsabilité civile fondé sur l’article 1240 du Code civil (anciennement 1382 du Code civil) qui prévoit que « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Cette responsabilité spéciale permet une meilleure adaptation des recours face aux réalités de l’Internet, notamment sur les difficultés probatoires que peuvent rencontrer les victimes.

L’article 1240 du Code civil requiert en effet classiquement trois critères pour retenir la responsabilité d’une personne : une faute, un lien de causalité et un dommage. Par cette loi, le législateur reconnaît donc la spécificité des cas de responsabilités sur l’Internet.

L’assimilation faite en 1982 pour l’Internet à la loi de 1881 sur la liberté de la presse vaut aujourd’hui pour les réseaux sociaux. C’est ce que prévoit la loi de 2004 dite LCEN (Tribunal correctionnel Pau, 12 nov. 2018). La loi de 1881 réprimant les propos diffamatoires par voie de presse est donc applicable aux messages postés sur une page Facebook ou un compte Twitter (Cour d’appel de de Paris – 17 déc. 2014 n° 12/20 756).

La Cour d’appel de Pau, dans un arrêt du 16 janvier 2024, a rappelé l’article 29 de la loi de 1881 et le fait que les abus de la liberté d’expression prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881 ne peuvent être réparés sur le fondement de 1240 du Code civil, l’objectif étant d’interdire aux parties de contourner, en se fondant sur le droit commun, les dispositions protectrices de la liberté d’information et d’expression de la loi de 1881.

En l’espèce, il est constant que les appelants fondent leur action sur les dispositions des articles 1240 et 1241 du Code civil. Par conséquent, la cour estime que c’est donc justement que le premier juge, retenant que les dispositions des articles 1240 et 1241 du Code civil ne permettaient pas de sanctionner les abus à la liberté d’expression, a débouté les demandeurs de l’intégralité de leurs demandes

B – LE DÉLIT DE DIFFAMATION DANS LA LOI DE 1881           

La loi du 29 juillet 1881, dispositif cardinal de la liberté d’expression dans le corpus juridique français prévoit en son article 29 un délit : la diffamation.

Cet article dispose : « toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l’identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés ».

La diffamation requiert donc la réunion de cinq éléments : une allégation ou imputation, un fait déterminé, une atteinte à l’honneur ou à la considération, une personne ou un corps identifié, une publicité des propos.

Un arrêt du 26 février 2020 rendu par la Cour d’appel de Paris (Cour d’appel de Paris, 26 févr. 2020, 10/2020) précise cette notion de diffamation : « la diffamation, qui peut se présenter sous forme d’allusion ou d’insinuation, doit être appréciée en tenant compte des éléments intrinsèques et extrinsèques au support en cause, а savoir tant du contenu même des propos que du contexte dans lequel ils s’inscrivent ».

La publicité est le caractère le plus discuté en matière de diffamation, la Cour de cassation procédant à une différence d’analyse entre les pages publiques et privées. Plusieurs affaires concernant des insultes proférées par des salariés à propos de leurs employeurs ont en effet été rejetées par la Cour.

La haute juridiction a plusieurs fois procédé à une analyse du nombre d’amis de l’intéressé : si ce nombre dépasse celui du cercle d’amis restreint, alors le message litigieux pourra être considéré comme étant public (Civ. 1re, 10 avr. 2013, n° 11–19.530). À l’inverse, si le nombre d’amis demeure comparable à un cercle d’amis restreint, le caractère public n’est pas retenu et l’auteur pourra être exonéré. Dans le cas de Twitter, l’analyse diffère : pour les comptes privés, les juges pourront procéder à une évaluation du nombre de personnes suivant le compte. Pour le cas des comptes publics, la publicité est présumée (Cass. Crim, 11 décembre 2018, 17-85.159, Inédit)

La question du caractère public ou non d’un message Facebook peut s’avérer épineuse. La Cour de cassation semble s’attacher à un autre critère : celui de la communauté d’intérêts. Elle a ainsi pu retenir le caractère public d’un message publié au sein d’un groupe partageant une « communauté d’intérêts » (Civ. 1re, 10 avr. 2013, n° 11-19.530).

Dans le cas d’une page Facebook, la question est différente puisque le caractère public est plus aisé à caractériser : n’importe quel utilisateur peut avoir accès à cette page (CAA Nantes, 21 janv. 2016, n° 14NT02263).

S’ajoute à ces éléments dits « matériels » de l’infraction, un élément moral : l’intention de porter atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne ou d’un corps déterminé. Ce deuxième élément est le plus souvent présumé. C’est ce que juge la Cour de cassation dans un arrêt du 19 juin 2012  : (Cour de cassation, chambre criminelle, 19 juin 2012, n° 11-84.235) : « les imputations diffamatoires sont réputées, de droit, faites avec intention de nuire, mais elles peuvent être justifiées lorsque leur auteur établit sa bonne foi, en prouvant qu’il a poursuivi un but légitime, étranger а toute animosité personnelle, et qu’il s’est conformé à un certain nombre d’exigences, en particulier de sérieux de l’enquête, ainsi que de prudence dans l’expression, étant précisé que la bonne foi ne peut être déduite de faits postérieurs à la diffusion des propos ».

II – UN RÉGIME DE RESPONSABILITÉ EN CASCADE

A – LA RESPONSABILITÉ EN CASCADE : DÉTERMINATION DE L’AUTEUR PRINCIPAL

Déterminer qui est le responsable d’un acte de diffamation peut s’avérer complexe, surtout lorsque l’acte a été commis par l’intermédiaire d’un ordinateur.

Conscient de cette problématique, le législateur a instauré un système de responsabilité en cascade, permettant dans la plupart des cas, de déterminer un responsable. Ainsi, l’article 93-3 de la loi du 29 juillet 1982 prévoit que « l’auteur, et à défaut de l’auteur, le producteur seront poursuivis comme auteur principal ».

Appliqué à une page Facebook ou à un compte Twitter et à défaut d’auteur identifiable, il s’agira du producteur. Producteur au sens de celui « ayant pris linitiative de créer un service de communication au public » (Cass. crim., 16 févr. 2010 n°09-81.064) c’est-à-dire la personne physique qui fournit le service. Sachant que la jurisprudence considère que « le titulaire dun compte Facebook en est en conséquence le directeur de la publication » (Tribunal correctionnel de Pau, 12 nov. 2018). Cela vaut aussi pour un compte Twitter dont l’auteur n’est pas identifiable.

Cependant, le créateur ou animateur d’un site de communication au public, en tant que producteur, pourra se voir exonérer de toute responsabilité vis-à-vis du contenu du message adressé par un utilisateur s’il n’avait pas connaissance du message avant sa mise en ligne (Conseil constitutionnel, 16 sept. 2011, n° 2011-164 QPC). Pour une page Facebook.

Dans un arrêt rendu le 13 novembre 2020 par la Cour Administrative d’Appel de Paris (4e chambre de l’instruction), la personne mise en cause, animatrice d’une page Facebook contestait sa responsabilité, arguant que l’ordinateur utilisé pour administrer sa page se trouvait dans un lieu accessible au public et que plusieurs personnes pouvaient de fait, y avoir eu accès, sans son contrôle (la personne ne s’étant pas déconnectée de son compte personnel).

Elle cherchait ainsi à s’exonérer de sa responsabilité. La Cour a cependant refusé ce raisonnement en se fondant sur le fait qu’elle ne pouvait nier sa responsabilité. Le message litigieux provenant de son compte personnel et non d’un compte tiers : l’auteur avait utilisé les codes d’accès de l’administrateur de la page, sans que cette dernière ne puisse démontrer qui était cette personne. L’administrateur a donc était désigné comme responsable.

Ainsi, peut-être retenu comme auteur principal et donc responsable au sens de la loi du 29 juillet 1881, l’auteur du texte litigieux et à défaut l’administrateur de la page Facebook ou du compte Twitter (pour Facebook : Cour de cassation – Chambre criminelle, 1 septembre 2020, n° 19-84.505 – pour Twitter : Cour de cassation – Chambre criminelle, 10 mai 2017, 16.81-555)

Dans le cas précis de Twitter, il faut noter une spécificité : les membres apparaissent souvent sous pseudonyme, rendant l’exercice d’identification encore plus complexe (Cass. Crim. 8 janv. 2019). Afin de lutter plus efficacement contre les agissements de personnes non identifiables, la loi pour la confiance dans l’économie (loi du 21 juin 2004, précitée) a mis en place un régime de responsabilité spécifique. Ainsi, les hébergeurs ont l’obligation de supprimer les tweets illicites qui leur ont été signalés. Et ceux dans les plus brefs délais.

Dans un arrêt du 16 février 2023, la Cour d’appel de Versailles a établi que que la demande formulée par l’appelant n’a pas pour objet l’engagement de la responsabilité des sociétés Google Ireland Limited et Google LLC sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881, aucune des infractions de presse prévues par ce texte ne leur étant reprochée et aucune des qualités mentionnées ne pouvant leur être appliquées, seul demeure au débat à hauteur de la cour, le respect de leurs obligations en matière de traitement de données personnelles. Par conséquent, la cour considère que la fin de non-recevoir tirée de ce moyen sera rejetée.

B –  LE RÉGIME D’EXONÉRATION

Il existe en finalité peu de cas d’exonération de responsabilité pour des propos diffamatoires sur une page Facebook ou un compte Twitter. Le principal cas pour l’auteur n’en est pas réellement un : cela recouvre la situation dans laquelle il n’est pas identifiable. Un autre cas d’exonération pour l’auteur peut être celui d’arguer la non-publicité de la diffamation ou le manque d’un critère constitutif de la diffamation. Mais encore une fois ce il ne s’agit pas d’un réel cas d’exonération.

Pour l’administrateur, l’exonération peut venir de la démonstration que les propos diffamatoires publiés sur sa page n’avaient pas été portés à sa connaissance avant publication. Dans le cas où son identité a été usurpée et qu’un usage malveillant de son compte Facebook ou Twitter a été perpétré, l’administrateur pourra se voir exonérer de toute responsabilité pour des propos diffamatoires. Il devra pour cela rapporter la preuve de l’usurpation (en lien : Tribunal correctionnel de Paris 18 avril 2019).

Tel ne fut pas le cas dans l’affaire précitée du 13 novembre 2020 (Cour Administrative d’Appel de Paris, 4e chambre de l’instruction).

Dans le cas où une personne publie un message à caractère diffamatoire sur une page Facebook ou un compte Twitter qu’elle n’administre pas et si l’administrateur intervient promptement pour supprimer le commentaire, alors sa responsabilité pourra être écartée. C’est le même mécanisme que celui prévu par la LCEN (Loi sur la Confiance dans l’Économie Numérique du 21 juin 2004), pour les hébergeurs.

En somme, la responsabilité en cascade prévue par la loi du 29 juillet 1982 réduit considérablement les cas d’exonérations pour des cas de diffamation.

Pour lire cet article sur la diffamation sur les réseaux sociaux, Facebook et Twitter en version plus détaillée, cliquez

SOURCES :

#Diffamation et Twitter

Le réseau social « Twitter » est devenu la référence en matière de médias sociaux, il est aujourd’hui le théâtre d’une multiplication d’actions en diffamation.

Twitter n’est pas une zone de non-droit et ses tweets sont, eux aussi, soumis à des règles.

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Twitter c’est la possibilité de publier gratuitement des messages courts et percutants (tweets) en temps réel (280 caractères/tweets au maximum). Par défaut, ces messages sont lisibles par tous et apparaissent même dans les moteurs de recherche, les faisant ainsi entrer dans la sphère publique. En d’autres termes, c’est une plateforme de microblogging, c’est-à-dire un journal personnel en ligne, qui fonctionne comme un réseau social.

À ce titre, il est soumis aux mêmes règles que les autres acteurs d’internet.

La Loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 n’est pas seulement applicable à la communication par support papier, mais également à celle diffusée sur internet. Cette loi permet de rendre publiques, des informations ou des opinions tout en réprimant les abus, comme celui de la diffamation.

En effet, l’article 1er du texte actuellement en vigueur, précise de manière assez symbolique que « l’imprimerie et la librairie sont libres ». Cette liberté, que l’on retrouve aujourd’hui à travers la libre expression sur les réseaux, n’est néanmoins pas totale et la diffamation constitue effectivement un des actes prohibés par la loi.

Il faut savoir qu’il s’agit d’un régime spécifique, différent du droit commun de la responsabilité prévue à l’article 1382 ancien (nouveau 1240) du Code civil. Ce régime spécifique prévoit une responsabilité dite en « cascade ».


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La loi considère que dans les milieux particuliers de la presse plusieurs personnes sont responsables avant l’auteur même des propos litigieux. Ces personnes identifiées comme responsables varient en fonction du type de médias visés.

La diffamation représente le fait de porter atteinte à la réputation et à l’honneur d’une personne publiquement par des écrits, des paroles ou des gestes. Si l’allégation, le reproche, ne contient aucune accusation précise à la personne, il s’agit seulement d’une injure.

Le propos pourra donc être condamné s’il répond aux conditions suivantes :

– Alléguer un fait précis et déterminé (l’expression d’une opinion subjective relevant du débat d’idée ne constitue pas des propos diffamatoires),

-Alléguer ce fait publiquement,

– Porter atteinte à l’honneur ou à la considération de celui ou ceux qu’il vise (il faut démonter que les propos causent un dommage à la victime),

– Énoncer ce fait en étant de mauvaise foi (en sachant que c’était faux, ou en devant savoir que c’est faux, ou sans motif valable sans considération de la véracité des propos)

– Viser une personne déterminée physique ou morale (il faut pouvoir l’identifier à travers les propos, cela peut être insinué, déguisé ou direct).

À l’heure où le web 2.0 place au centre de ses services l’interaction sociale, la liberté d’expression se doit d’être d’autant plus conciliée avec le respect des droits d’autrui, y compris sur internet.

Dès lors, sur Twitter, peut-on se rendre coupable de diffamation en 280 caractères seulement ?

Twitter c’est la possibilité de publier gratuitement des messages courts et percutants (tweets) en temps réel (280 caractères/tweets au maximum).Par défaut, ces messages sont lisibles par tous et apparaissent même dans les moteurs de recherche, les faisant ainsi entrer dans la sphère publique. En d’autres termes, c’est une plateforme de microblogging, c’est-à-dire un journal personnel en ligne, qui fonctionne comme un réseau social.

À ce titre, Twitter est soumis aux mêmes règles de diffamation que les autres acteurs d’internet.

La Loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 n’est pas seulement applicable à la communication par support papier, mais également à celle diffusée sur internet. Cette loi permet de rendre publiques des informations ou des opinions tout en réprimant les abus, comme celui de la diffamation. Il s’agit d’un régime spécifique, différent du droit commun de la responsabilité prévue à l’article 1240 du Code civil. Ce régime spécifique prévoit une responsabilité dite en « cascade ».

La loi considère que dans les milieux particuliers de la presse plusieurs personnes sont responsables avant l’auteur même des propos litigieux. Ces personnes identifiées comme responsables varient en fonction du type de médias visés.

La diffamation représente le fait de porter atteinte à la réputation et à l’honneur d’une personne publiquement par des écrits, des paroles ou des gestes. Si l’allégation, le reproche, ne contient aucune accusation précise à la personne, il s’agit seulement d’une injure.

La diffamation sur Twitter pourra être condamnée s’il répond aux conditions suivantes :

  • Alléguer un fait précis et déterminé (l’expression d’une opinion subjective relevant du débat d’idée ne constitue pas des propos diffamatoires)
  • Alléguer ce fait publiquement
  • Porter atteinte à l’honneur ou à la considération de celui ou ceux qu’il vise (il faut démontrer que les propos causent un dommage à la victime)
  • Énoncer ce fait en étant de mauvaise foi (en sachant que c’était faux, ou en devant savoir que c’est faux, ou sans motif valable sans considération de la véracité des propos)
  • Viser une personne déterminée physique ou morale (il faut pouvoir l’identifier à travers les propos, cela peut être insinué, déguisé ou direct)

Sur Twitter, peut-on se rendre coupable de diffamation en 280 caractères seulement ?

I/ Qui est responsable des tweets à caractère diffamatoire ?

La loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) soumet les publications sur internet à loi de la presse de 1881. Cette loi met en place un système de responsabilité en cascade par rapport aux fonctions des différentes personnes visées.

En d’autres termes, si la première personne désignée n’est pas identifiable la deuxième sera responsable et ainsi de suite. La loi LCEN adapte cette responsabilité à l’univers d’internet et donc à la « communication au public en ligne ». Le responsable est celui dont « l’activité est d’offrir un accès à des services de communication au public en ligne ».

Celui qui publie et gère le site, qui a le plein contrôle de la mise en ligne des contenus du site (Articles, photos, vidéos) est appelé l’éditeur. Pour limiter le risque d’être responsable, l’éditeur peut adopter le statut d’hébergeur. Les plateformes de réseaux sociaux, de forums ou de blog ne peuvent être assimilées à des sites classiques. Il existe une responsabilité spéciale applicable aux personnes gérant les réseaux sociaux. La loi de 2004 définit le rôle et la responsabilité d’une personne qui a la qualité d’hébergeur. L’hébergeur assure, gratuitement ou non, un service de stockage d’informations fournies par ses utilisateurs.

Les réseaux sociaux, les forums ou les blogs, parce qu’ils stockent des textes, photos et vidéos sont considérés comme des hébergeurs. L’arrêt de la CJUE Google Adwords du 23 mars 2010, dispose qu’est hébergeur celui dont l’activité « revêt un caractère purement technique, automatique et passif, qui implique que le prestataire de services de la société de l’information n’a pas la connaissance ni le contrôle des informations transmises ou stockées. » Twitter est donc l’hébergeur des tweets.  L’hébergeur a une qualité et un rôle particulier. De ce fait, il se voit attribuer un statut hybride et une responsabilité atténuée.

Il est responsable des contenus stockés, si et seulement si :

  • Il a eu connaissance de l’existence des contenus
  • Les contenus présentent un caractère manifestement illicite (violation évidente d’une règle de droit)
  • Après en avoir eu connaissance, il n’a pas retiré rapidement ces contenus (le jour même

Twitter est une entreprise américaine, mais cela ne l’exonère pas de cette obligation.

Puisque Twitter, en tant qu’hébergeur n’est pas responsable, l’auteur des propos diffamatoires l’est. Une fois le responsable identifié, il est possible d’agir en justice contre lui afin d’obtenir réparation de son préjudice.

Une action contre Twitter n’est possible que si ce dernier n’a pas supprimé ou bloquer le contenu qui lui a été notifié, quand il a manqué à son obligation de déréférencement.

II/ La jurisprudence

Sur Twitter, comme sur tout autre réseau social, toute personne est responsable des propos qu’elle tient publiquement. En France, la diffamation est une infraction qui peut entraîner une amende de 12 000€.  Pour que la diffamation soit avérée, le propos doit remplir plusieurs conditions.

Sur Twitter, le premier critère à déterminer est celui de la publicité des propos tenus. En reprenant la loi de 1881, un propos est public s’il est tenu devant un groupement de personnes qui ne constituent pas une communauté d’intérêts. La diffamation étant sanctionnée, que le propos soit public ou privé, mais l’amende est moindre en cas de propos privés (38€).

La jurisprudence constante considère que « la diffusion litigieuse sur le réseau internet, à destination d’un nombre illimité de personnes nullement liées par une communauté d’intérêts, constitue un acte de publicité commis dès que l’information a été mise à la disposition des utilisateurs éventuels du site ». Ainsi, si la personne qui a publié les propos, n’a pas fait l’effort de limiter l’accès à son tweet à un nombre très limité de personne, alors on va considérer que le tweet est public. Par ailleurs, le tribunal de Pau a considéré dans sa décision du 12 novembre 2018 que le créateur du compte, qui possède les codes d’accès, « ne saurait dénier sa responsabilité au seul motif qu’il aurait donné les codes à des personnes dont il refuse de donner le nom. ». Il y a donc une présomption de responsabilité à l’égard du créateur du compte.

De plus, pour déterminer la diffamation il doit y avoir l’allégation d’un fait précis et déterminé.

En février 2015, une décision en matière de diffamation sur Twitter a été rendue par la cour d’appel de Paris .

Ramzi Khiroun a porté plainte en 2011 contre Arnaud Dassier pour avoir tweeté :

« Ramzi Khiroun est à la limite de l’abus de bien social avec ses jobs Lagardère ou EuroRSCG (on ne sait plus trop) tout en bossant pour #DSK ».

Les 140 caractères maximums imposés par Twitter jusqu’en 2017, ont permis de protéger le défendeur.

En effet, la cour a  considéré que cette brièveté rendait imprécise l’allégation et empêchait tout débat : le fait imputé doit être suffisamment précis et des éléments doivent le corroborer.

De plus, l’expression « est à la limite de » a permis d’écarter la qualification de diffamation.

La cour d’appel  a jugé que cela reflétait l’expression d’une opinion subjective qui pouvait être soumise à débat au titre de la liberté d’expression et qu’il n’y avait donc pas diffamation. Arnaud Dassier a été relaxé.

La jurisprudence a également refusé de qualifier de diffamatoires des propos tenus sur Twitter à l’occasion d’un débat d’intérêt général. Dans cet arrêt du 8 janvier 2019, la chambre criminelle tient à rappeler que le principe est celui de la liberté d’expression et qu’en l’espèce les propos tenus n’excédaient pas les limites de la liberté d’expression.

Attention, l’action de republier comme telle une information diffamatoire d’un autre utilisateur (retweeter) est condamnable (même si cela est difficile en pratique) ! Bien qu’il n’y ait pas de condamnation pour la reproduction d’un tweet, cette dernière reste possible. Il vient donc à se protéger par l’exception de bonne foi ou en démontrant la vérité des propos.

La Licra et SOS Racisme ont obtenu la condamnation à une peine de deux mois de prison ferme de l’auteur de propos antisémites tenus dans deux messages postés sur Twitter. Dans son jugement du 9 mars 2016, le TGI de Paris a estimé que le titulaire du compte en question s’était rendu coupable d’incitation à la haine raciale et de diffamation publique à caractère racial. Cette solution sera réitérée dans un jugement du 11 septembre 2020, où la Licra a obtenu la condamnation de l’auteur d’une diffamation publique envers un groupe de personnes en raison de leur appartenance à une religion déterminée, en l’espèce la religion juive.

La brièveté des tweets ne protège donc pas indéfiniment les auteurs, et ce, justement parce qu’elle exclut toute nuance.  Le concept de Twitter est de réagir rapidement, ce qui pousse à l’imprudence et au franc-parler.

Par ailleurs, la brièveté des propos retenue par la cour d’appel, est un concept assez flou. En effet, en passant de 140 à 280 caractères, peut-on toujours considérer qu’il y a une brièveté qui rend l’allégation imprécise ? De même, nombreuses sont les personnes qui font plus d’un tweet pour détailler une pensée, une opinion. Il convient alors à se demander où est la limite à ce concept de brièveté des propos tenus sur Twitter.

Pour lire une version plus complète de cet article sur la diffamation et twitter, cliquez

SOURCES :
http://www.lepoint.fr/invites-du-point/gaspard-koenig/koenig-diffamation-twitter-libertedexpression-04-03-2014-1797408_2002.php
http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F32079.xhtml
Cass. ch. crim. 16 octobre 2001, 00-85.728
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007070613
CJUE 23 mars 2010 Google Adwords C-236/08 à C-238/08.
https://curia.europa.eu/juris/liste.jsf?language=fr&num=C-236/08
TGI Pau, ch. corr., jugement correctionnel du 12 novembre 2018
https://www.legalis.net/jurisprudences/tgi-de-pau-ch-corr-jugement-correctionnel-du-12-novembre-2018/
Tribunal judiciaire de Paris, 17e ch. correctionnelle, jugement du 11 septembre 2020
https://www.legalis.net/jurisprudences/tribunal-judiciaire-de-paris-17e-ch-correctionnelle-jugement-du-11-septembre-2020/Crim. 8 janvier 2019, 17-81.396
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000038069831?dateDecision=&init=true&page=1&query=17-81.396&searchField=ALL&tab_selection=juri