licenciement

Organisation du télétravail : comment doivent faire les sociétés ?

L’état d’urgence sanitaire a été décrété par la loi du 23 mars 2020 (L. n° 2020-290 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, 23 mars 2020, JO 24 mars) pour une durée de deux mois.

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En conséquence, l’employeur doit mettre en place des mesures de prévention adaptées aux métiers de l’entreprise et adapter l’organisation de travail de ses salariés.

Ainsi, l’utilisation du télétravail devient la règle impérative pour tous les postes qui le permettent et les règles de distanciation pour les emplois non éligibles au télétravail doivent impérativement être respectées.

En 2022, une recherche menée par l’institut Montaigne relève que même après la disparition de la pandémie, le télétravail demeure fortement soutenu par les employeurs. Aujourd’hui, environ un quart des actifs affirme travailler à distance au moins deux jours par semaine.

 

I-              Les obligations de prévention et d’information dans l’entreprise

A) L’obligation de prévention de l’employeur

L’employeur est tenu par la loi de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés (article L. 4121-1 du Code du travail).

L’employeur ne doit pas seulement diminuer le risque, mais l’empêcher. Cette obligation est une obligation de résultat (Cour de cassation, chambre sociale, 22 février 2002, pourvoi n° 99-18389), c’est-à-dire qu’en cas d’accident ou de maladie liée aux conditions de travail, la responsabilité civile et pénale de l’employeur pourra être engagée.


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Cet arrêt de la chambre sociale spécifie également que l’obligation de sécurité découle du contrat de travail liant le salarié à son employeur. Par trois arrêts en date du 8 octobre 2020, 18 mars 2021 et 8 avril 2021, (Cass. 2e civ., 8 oct. 2020, n° 18-25021 ; Cass. 2e civ., 18 mars 2021, n° 19-24284 ; Cass. 2e civ., 8 avr. 2021, n° 20-11951), la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a modifié cette jurisprudence.

Cette dernière a exclu de la sphère contractuelle cette obligation de sécurité de l’employeur, en affirmant qu’elle était une obligation légale. Ces arrêts ont par ailleurs supprimé toute mention de l’obligation de résultat. La cour souligne en effet que la faute inexcusable de l’employeur est caractérisée lorsque ce dernier « avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et quil na pas pris les mesures nécessaires pour len préserver ».

A ce titre, l’employeur doit procéder à une évaluation du risque professionnel afin de réduire au maximum les risques de contagion sur le lieu de travail ou à l’occasion du travail (article R.4121-2 du Code du travail).

Un décret daté du 18 mars 2022 (n°2022-395) énonce les modalités de création du document relatif à l’évaluation des risques. Celui-ci doit être mis en œuvre au moins une fois par an dans les entreprises comptant au moins onze salariés.  De plus, il doit être élaboré à chaque fois qu’une décision d’aménagement importante modifie les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ainsi que lorsqu’une information supplémentaire pertinente pour l’évaluation d’un risque est portée à la connaissance de l’employeur.

Les mesures qui doivent être prises s’organisent autour de trois axes :

  • Les actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité : adaptation des postes de travail, évaluation des risques, etc.;
  • Les actions d’information et de formation : présence de panneaux sur les lieux dangereux, inscription des salariés à des formations sur la sécurité au travail, etc. ;
  • La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés : installation de machines adaptées, retrait des produits dangereux, etc.

La nouvelle évaluation des risques doit être retranscrite dans le document unique d’évaluation des risques et actualisée pour tenir compte des changements de circonstances. Les mesures de prévention qui en découlent doivent être portées à la connaissance des salariés selon des modalités adaptées afin de permettre leur pleine application.

Dans le cadre de l’épidémie de Coronavirus, l’employeur doit ainsi, quelle que soit la situation de l’entreprise :

  • Informer les salariés sur les mesures de prévention à respecter conformément aux recommandations officielles ;
  • Mettre à disposition des salariés les moyens nécessaires pour éviter la propagation du virus : savon, solution hydroalcoolique, fourniture de masques de protection ;
  • Mettre en place de mesures de distanciation sociale ;

Les mesures individuelles et organisationnelles d’hygiène en situation de pandémie ne doivent pas être considérées comme de simples recommandations, mais bien comme des exigences et des consignes que les salariés ont l’obligation d’appliquer au même titre que les autres règles de sécurité édictées par l’employeur.

Par conséquent, le fait de ne pas respecter les consignes d’hygiène peut être considéré comme une faute disciplinaire, car cela peut mettre en danger la vie des autres salariés (C. trav., art. L. 4122-1).

L’information des salariés sur les mesures prises par la hiérarchie, le service de santé au travail et le CSE doit être précise et pertinente (campagne d’affichage, distribution de consignes écrites par tracts et/ou emails, etc.). Le médecin du travail, avec le CSE, conseille l’employeur sur les actions à mettre en œuvre et sur l’information à donner aux salariés afin d’éviter la contamination dans l’entreprise.

La première mesure à prendre est de renseigner le document unique d’évaluation des risques pour y intégrer les éléments liés à une situation de crise sanitaire majeure. Il faut notamment y prévoir une procédure rapide et efficace pour les salariés infectés ou revenant d’une zone à risque.

B) L’obligation d’information du salarié

Conformément à l’article L. 4122-1 du Code du travail, le salarié est également responsable de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles de ses collègues.

Par conséquent, un salarié revenant d’une zone à risque ou ayant côtoyé une personne susceptible de transmettre le virus, et qui n’en informe pas son employeur commet une faute et pourrait être sanctionné à ce titre. Il en va de même pour un salarié qui ne respecterait pas les mesures d’aménagement du poste de travail ou de confinement mises en place.

Ainsi, si le salarié n’informe pas volontairement son employeur d’une raison possible d’envisager qu’il soit contaminant, ce comportement pourrait être sanctionné, selon la gravité, d’un licenciement pouvant aller jusqu’à la faute grave.

La Cour de cassation a déjà eu à rappeler, pour un salarié malade qui avait mis en danger ses collègues en renversant des palettes sur un chantier après avoir refusé d’être placé en arrêt maladie. (Soc. 12 oct. 2017, n° 16-18.836).

Un protocole national visant à garantir la santé et la sécurité des salariés en entreprise face à l’épidémie de Covid-19 a été révisé le 29 octobre 2020.

Les principales modifications portaient sur l’expansion du télétravail pour les activités permettant l’organisation des réunions par audio et visioconférences, l’utilisation de l’application TousAntiCovid pour faciliter le suivi des cas contacts ainsi que la cessation des moments de convivialité dans le cadre professionnel. Ce protocole n’est plus en vigueur depuis le 14 mars 2022.

II. La mobilisation des congés payés par l’employeur

L’employeur doit aménager le poste de travail afin de limiter les risques de propagation du Covid-19. Depuis l’ordonnance du 26 mars 2020, l’employeur peut mobiliser une partie des congés et/ ou repos de ses salariés.

Sous réserve de la signature préalable d’un accord d’entreprise, d’établissement ou de branche, l’employeur pourra imposer jusqu’à 6 jours de congés payés à ses salariés en respectant un délai de prévenance d’un jour franc au moins ;

L’employeur peut sans attendre, et ce avant le 31 décembre 2020 imposer unilatéralement jusqu’à 10 jours de congés en respectant un délai de prévenance d’un jour franc au moins. (Repos, RTT, jours portés sur un compte épargne temps, à l’exception des congés pour événements familiaux)

Par ailleurs, dans les entreprises relevant de secteurs d’activités particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale, les modalités de travail seront déterminées par décret.

III. L’adaptation de l’activité des salariés en cas de poursuite de l’activité de l’entreprise

A) Mise en place du télétravail

L’employeur doit demander au salarié, dont le poste le permet et qui dispose du matériel nécessaire pour le faire, de recourir au télétravail.

Conformément à l’article L. 1222-11 du Code du travail « en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection du salarié ». 

Ainsi, l’aménagement du poste peut être imposé par l’employeur. Celui-ci peut exiger du salarié de télétravailler jusqu’à la fin de la période d’incubation (soit 14 jours) afin d’éviter le risque de propagation du coronavirus au sein de l’entreprise.

À l’origine, entre le 26 mars 2020 et le 30 juin 2021 l’employeur avait la possibilité d’imposer jusqu’à six jours de congés payés à ses salariés. La loi sur la gestion de la sortie de crise sanitaire (loi n°2021-689 du 31 mai 2021) a prolongé cette mesure jusqu’au 30 septembre 2021 permettant à l’employeur d’imposer jusqu’à huit jours de congés payés. Désormais, l’employeur ne peut plus dicter ces dates de congés mis à part en cas de fermeture temporaire de l’établissement.

B) Postes pour lesquels le télétravail n’est pas possible

Lorsque les contacts sont brefs, les mesures barrières permettent de préserver la santé des salariés et celle de leur entourage.

Lorsque les contacts sont prolongés et proches, l’employeur devra compléter les mesures barrières.

Dans ces conditions, la seule circonstance que le salarié soit affecté à l’accueil du public pour des contacts proches ou prolongés ne suffit pas, sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, à considérer qu’il justifie d’un motif raisonnable pour exercer son droit de retrait.

Il incombe au salarié de suivre les instructions qui lui sont données par l’employeur en matière de prévention, à défaut sa responsabilité pourrait être engagée.

Le télétravail peut également être sollicité par le salarié. Si ce dernier est une personne en situation d’handicap ou un salarié prenant soin d’un enfant, d’un parent ou d’un proche, l’employeur est tenu d’expliquer, le cas échéant, les raisons de son refus. (L. no 2023-622 du 19 juill. 2023, art. 3).

C) Que faire en cas de contamination du salarié au Covid-19 ?

En cas de contamination d’un salarié, l’employeur devra prendre des mesures particulières telles que :

  • L’équipement des personnes en charge du nettoyage des sols et surfaces avec port d’une blouse à usage unique et de gants de ménage ;
  • L’entretien des sols et des surfaces en privilégiant une stratégie de lavage-désinfection humide ;
  • Le nettoyage avec un bandeau de lavage unique imprégné d’un produit détergent ;
  • Le rinçage à l’eau potable avec un autre bandeau de lavage à usage unique ;
  • Laisser un temps de séchage suffisant ;
  • La désinfection avec de l’eau de javel diluée avec un bandeau de lavage à usage unique ;

Là encore, dès lors que ces mesures sont mises correctement en œuvre par l’employeur, la seule circonstance qu’un salarié a été contaminé ne suffit pas à considérer qu’il justifie d’un motif raisonnable pour exercer son droit de retrait, sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux.

Le décret n°2023-37 du 27 janvier 2023 relatif aux arrêts de travail dérogatoires délivrés aux personnes contaminées par le Covid-19 dispose que l’isolement n’est plus obligatoire même en cas de test positif, bien qu’il reste recommandé. Les dispositions permettant aux salariés testés positifs au Covid-19 de bénéficier d’un arrêt de travail automatique ne sont plus en vigueur : désormais, c’est au médecin de décider s’il convient d’arrêter le patient en fonction de son état de santé. Si le médecin décide de ne pas prescrire d’arrêt, le salarié peut retourner au travail bien que le télétravail soit fortement recommandé. La suppression du jour de carence n’est également plus en vigueur.

D) Que faire si le salarié est confiné à titre individuel pour cause de maladie ?

Dans ce contexte, le salarié est placé en confinement pendant une durée maximale de 20 jours par décision d’un médecin de l’Agence régionale de santé. Dans ce cas, le salarié bénéficie d’une indemnité journalière de sécurité sociale d’un montant de 50 % de son salaire journalier de base, sans que ne lui soit appliqué un délai de carence.

Si un accord d’entreprise ou de branche le prévoit, l’entreprise doit compléter cette indemnisation à hauteur du salaire. En tout état de cause, le contrat de travail du salarié est suspendu et l’employeur ne peut pas le solliciter.

Le décret du 27 janvier 2023 concernant les arrêts de travail dérogatoires, pour les personnes contaminées par le Covid-19 prévoit, à partir du 1er février 2023, la suppression des arrêts de travail dérogatoires, sans jour de carence, pour les personnes testées positives au Covid-19.

De plus, le ministère de la Santé a annoncé que l’isolement systématique des personnes testées positives au Covid-19 et le dépistage des cas contact au bout de deux jours ne sont plus obligatoires à partir du 1er février 2023.

E) Que faire si le salarié est tenu de garder à leur domicile un enfant de moins de 16 ans ?

Le salarié doit contacter son employeur pour l’informer de sa situation dans les plus brefs délais.

La première mesure envisagée sera celle de la mise en place du télétravail si cela est possible.

Pour tous les actifs n’ayant pas de solution, pas de télétravail pour s’occuper des enfants, le recours à l’arrêt maladie sera automatique et de plein droit. Il n’est pas nécessaire d’aller voir le médecin traitant, c’est l’employeur qui fera la démarche auprès de l’Assurance maladie via le service dédié https://declare.ameli.fr/. 

L’arrêt de travail est indemnisé, sans délai de carence, et valable le temps que durera la fermeture de la structure d’accueil de l’enfant.

L’employeur ne peut pas refuser cet arrêt.

Ce dispositif d’arrêt maladie dérogatoire était en vigueur jusqu’au 31 juillet 2022. En effet, le législateur de la loi du 10 novembre 2021 portant diverses dispositions de vigilance sanitaire (loi n°2021-1465) avait décidé de supprimer le jour de carence à partir du 1er août 2022 suite à la levée de l’état d’urgence sanitaire. À présent, les arrêts de travail dérogatoire pour les salariés ne sont plus possibles.

Cependant, le droit commun propose une alternative pour bénéficier de jours de congés : le congé enfant malade. Ce congé permet aux parents qui sont contraints de rester à la maison pour s’occuper de leur enfant de moins de 16 ans de ne pas travailler.  Pour bénéficier de ce congé spécial, les parents doivent être contraints d’interrompre leur activité professionnelle pour garder leur enfant dont il assure la charge. La durée maximale de ce congé est de trois jours par an, mais elle est portée à cinq jours si l’enfant a au moins un an ou si le parent assume la charge d’au moins trois enfants âgés de moins de seize ans (Art L1225-61 du Code du travail).

F) Que faire si le salarié présente un risque de développer une forme sévère de la maladie ?

L’Assurance Maladie a décidé d’étendre, à compter du 18 mars 2020 avec effet rétroactif au 13 mars, le droit à un arrêt de travail via son télé service de déclaration en ligne aux personnes dont l’état de santé conduit à les considérer comme présentant un risque de développer une forme sévère de la maladie et devant de ce fait impérativement rester à leur domicile sans possibilité mettre en place l’utilisation du télétravail.

Ces salariés pourront ainsi se connecter directement sur ce site, sans passer par leur employeur ni par leur médecin traitant, pour demander à être mis en arrêt de travail pour une durée initiale de 21 jours. L’arrêt sera éventuellement renouvelable en fonction de l’évolution des recommandations des autorités sanitaires.

Pour les travailleurs indépendants ou auto-entrepreneurs, l’Assurance maladie procédera automatiquement au versement des indemnités journalières sur la base des revenus déclarés.

Le haut conseil de la santé publique (HCSP) considère que les personnes « à risque » pouvant développer une forme grave d’infection au Covid-19 sont les suivantes :

  • les personnes âgées de 70 ans et plus (même si les patients entre 50 ans et 70 ans doivent être surveillés de façon plus rapprochée)
  • les femmes enceintes
  • les personnes présentant une obésité morbide (indice de masse corporelle > 40 kg/m² : par analogie avec la grippe A(H1N1)
  • les patients présentant une insuffisance rénale chronique dialysée, insuffisance cardiaque stade NYHA III ou IV
  • les malades atteints de cirrhose au stade B au moins
  • les patients aux antécédents (ATCD) cardiovasculaires : hypertension artérielle, ATCD d’accident vasculaire cérébral ou de coronaropathie, chirurgie cardiaque
  • les diabétiques insulinodépendants ou présentant des complications secondaires à leur pathologie (micro ou macro-angiopathie)
  • les insuffisants respiratoires chroniques sous oxygénothérapie ou asthme ou mucoviscidose ou toute pathologie chronique respiratoire susceptible de décompenser lors d’une infection virale
  • les personnes avec une immunodépression
  • médicamenteuses : chimiothérapie anti cancéreuse, immunosuppresseur, biothérapie et/ou une corticothérapie à dose immunosuppressive
  • infection à VIH non contrôlé avec des CD4 <200/mn
  • consécutive à une greffe d’organe solide ou de cellules souches hématopoïétiques
  • atteint d’hémopathie maligne en cours de traitement
  • présentant un cancer métastasé

L’arrêt de travail sera délivré sur cette base, une fois effectuées les vérifications nécessaires par le service médical de l’Assurance Maladie à savoir que l’assuré bénéficie bien d’une prise en charge au titre d’une affection de longue durée.

Depuis le 1er février 2023, ce dispositif d’indemnisation dérogatoire des arrêts de travail a été aboli. Par conséquent, il n’est plus possible de demander un arrêt de travail dérogatoire sur le site dédié de l’Assurance Maladie. Seul le médecin est habilité à prescrire un arrêt de travail. (Loi n°2022-1089 du 30 juillet 2022 mettant fin aux régimes d’exception créés pour lutter contre l’épidémie liée à la Covid-19).

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SOURCES :
https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041755644&categorieLien=id
https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus
https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2020/1/31/SSAS2002571D/jo/texte
https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000007046006
https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/new_hcsp-sars-cov-2_patients_fragiles_v3.pdf
https://www-dalloz-fr.ezpum.scdi-montpellier.fr/documentation/Document?ctxt=0_YSR0MD10w6lsw6l0cmF2YWlsIMKneCRzZj1zaW1wbGUtc2VhcmNo&ctxtl=0_cyRwYWdlTnVtPTHCp3MkdHJpZGF0ZT1GYWxzZcKncyRzb3J0PSNkZWZhdWx0X0Rlc2PCp3Mkc2xOYlBhZz0yMMKncyRpc2Fibz1UcnVlwqdzJHBhZ2luZz1UcnVlwqdzJG9uZ2xldD3Cp3MkZnJlZXNjb3BlPUZhbHNlwqdzJHdvSVM9RmFsc2XCp3Mkd29TUENIPUZhbHNlwqdzJGZsb3dNb2RlPUZhbHNlwqdzJGJxPcKncyRzZWFyY2hMYWJlbD3Cp3Mkc2VhcmNoQ2xhc3M9&id=DZ%2FOASIS%2F001672
https://www-labase-lextenso-fr.ezpum.scdi-montpellier.fr/gazette-du-palais/GPL423v4?em=%20%C2%A099-18389%20
https://www-labase-lextenso-fr.ezpum.scdi-montpellier.fr/bulletin-joly-travail/BJT114j0?em=salari%C3%A9%20s%C3%A9curit%C3%A9
https://www.juritravail.com/Actualite/conges-payes-imposes-covid-point-sur-les-evolutions-depuis-le-1er-octobre-2021/Id/327814
https://www.editions-tissot.fr/actualite/sante-securite/covid-19-un-point-simpose-a-lapproche-de-lhiver-et-des-fetes-de-fin-dannee
https://www.service-public.fr/particuliers/actualites/A16340 https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043567200
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047068565#:~:text=Notice%20%3A%20le%20d%C3%A9cret%20met%20un,nomenclature%20des%20actes%20de%20biologie
https://sante.gouv.fr/actualites/presse/communiques-de-presse/article/lutte-contre-l-epidemie-de-covid-19-entree-en-vigueur-de-plusieurs-evolutions#:~:text=Enfin%2C%20%C3%A0%20compter%20du%201er,contact%20pour%20les%20personnes%20contact

Liberté d’expression : pas de licenciement sans un abus établi

Les salariés bénéficient d’un droit à l’expression directe et collective sur le contenu, les conditions d’exercice et l’organisation de leur travail. Sauf abus, les opinions que le salarié émet dans l’exercice de ce droit, ne peuvent motiver une sanction ou un licenciement.

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La liberté d’expression du salarié trouve sa limite dans « l’abus ». Si le salarié qui abuse de sa liberté d’expression peut être frappé de diverses sanctions, à la fois pénales, civiles et disciplinaires, l’employeur qui licencie un collaborateur pour un usage de la liberté d’expression dont l’abus n’est pas constitué voit la rupture annulée (C. trav., art. L. 1235-3-1, v. déjà, antérieurement à la rédaction de l’article en jurisprudence, Soc. 21 nov. 2018, n° 17-11.122). D’où la nécessité de bien identifier où l’on peut fixer la limite du permissible et les contours juridiques de l’abus. C’est sur ce terrain que l’arrêt du 21 septembre 2022 rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation nous livre des éléments de réponse.

I. Que recouvre le droit d’expression prévu par le Code du travail ?

Droit d’expression collective. — Aux termes de l’article L. 2281-1 du Code du travail, les salariés bénéficient « d’un droit à l’expression directe et collective sur le contenu, les conditions d’exercice et l’organisation de leur travail ». L’expression des salariés doit permettre de rechercher et de mettre en œuvre des actions concrètes, dont les effets seront perceptibles par les salariés concernés (Circ. DRT no 1986/03, 4 mars 1986). L’accès de chacun au droit d’expression collective peut être assuré par le recours aux outils numériques, sans que l’exercice de ce droit ne puisse méconnaître les droits et obligations des salariés dans l’entreprise (C. trav., art. L. 2281-1).

Les modalités d’exercice du droit d’expression sont définies dans le cadre de la négociation portant sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie et des conditions de travail prévue à l’article L. 2242-1 du Code du travail, (C. trav., art. L 2281-5 et s.).


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Le droit d’expression s’exerce dans le cadre de réunions organisées « sur les lieux et pendant le temps de travail » (C. trav., art. L. 2281-4). Il s’agit donc d’une protection restreinte, puisqu’elle ne s’applique qu’aux propos tenus pendant ces réunions. En d’autres termes, le salarié qui émet une opinion personnelle en dehors de ce type de réunion n’est pas protégé par le Code du travail. Par ailleurs, l’exercice de ce droit d’expression trouve sa limite dans un éventuel abus du salarié.

Exemple :

un salarié alerte, au cours d’une réunion au cours de laquelle étaient présents la direction et plusieurs salariés, sur la façon dont sa supérieure hiérarchique lui demandait d’effectuer son travail, qui allait selon lui à l’encontre du bon sens et lui faisait perdre beaucoup de temps et d’énergie, ce qui avait pour effet d’entrainer un retard dans ses autres tâches et celles du service comptabilité fournisseurs pour le règlement des factures. L’abus par le salarié dans l’exercice de son droit d’expression directe et collective n’était pas caractérisé en l’espèce.

Droit d’expression en tant que liberté fondamentale. — En tant que citoyen, le salarié bénéficie toutefois d’une liberté d’expression entendue comme liberté fondamentale, qui est beaucoup plus large. En effet, le salarié jouit d’une liberté d’expression et celle-ci peut s’exprimer aussi bien dans l’entreprise que hors de celle-ci, notamment au travers de la presse.

La seule limite est de ne pas commettre d’abus. L’abus dans la liberté d’expression se matérialise par des propos injurieux, diffamatoires, excessifs, des dénigrements ou des accusations non fondées.

Remarque :

pour caractériser un abus dans l’exercice du droit d’expression, les juges se fondent sur la teneur des propos, le contexte dans lequel ils ont été tenus et la publicité qu’en a fait le salarié. Les juges doivent également tenir compte de l’activité de l’entreprise et des fonctions exercées par le salarié.

II. Les critiques à l’encontre d’un supérieur hiérarchique justifient-elles un licenciement ?

Si elles sont mesurées et relativement confidentielles, les critiques ne justifient pas en principe un licenciement.

Exemples :

un salarié, membre du comité de direction d’un casino, avait adressé à son supérieur hiérarchique un courrier qui s’était borné à contester en termes mesurés l’autorité du directeur des jeux : le licenciement était injustifié.

Il n’y a pas d’abus d’expression lorsque le salarié critique dans une lettre la gestion de la coopération par son président et fait part du climat insoutenable dans l’entreprise, dans la mesure où ses propos n’étaient ni excessifs, ni injurieux, ni diffamatoires.

Idem pour l’envoi d’une lettre au seul employeur, répondant à un avertissement que le salarié estimait injustifié et qui ne contenait aucun propos injurieux, diffamatoires ou excessifs.

Il en va de même pour un salarié ayant distribué aux usagers de la déchetterie dans laquelle il travaillait une pétition dont il n’était ni l’instigateur ni le rédacteur, portant sur l’organisation du travail et le fonctionnement de l’entreprise et qui ne contenait aucun propos excessifs, injurieux, ou diffamatoires envers l’employeur. Cette pétition n’avait, de surcroît, eu aucune conséquence sur les relations entre la société et son donneur d’ordre, à l’origine de la nouvelle organisation contestée.

Ne commet pas non plus d’abus le salarié qui adresse un courriel à son employeur après son entretien préalable au licenciement, dans lequel il laisse entendre qu’il a été exploité, met en cause les compétences et l’autorité de son employeur et l’accuse de tout planifier pour « détruire, pour rabaisser ». La Cour de cassation a estimé que les termes employés n’étaient pas susceptibles de nuire à l’employeur et qu’ils « traduisaient la réaction d’un homme blessé par l’annonce d’un licenciement dont il ne percevait pas les motifs ».

Enfin, n’est pas justifié le licenciement d’un directeur général qui a, lors de comités de direction et de comités exécutifs, affiché une divergence fréquente avec les enjeux stratégiques et a exprimé sa position dans un document de travail remis au consultant désigné par la direction pour mener un séminaire de réflexion stratégique. En effet, le document en question ne comportait aucun terme injurieux, diffamatoire ou excessif. D’autres documents contenant des critiques plus vives avaient également été retrouvés dans son ordinateur mais ils n’avaient pas fait l’objet d’une diffusion publique.

Compte tenu de sa valeur constitutionnelle, la Cour de cassation sanctionne la violation du droit d’expression par la nullité du licenciement. Le licenciement est nul même s’il repose également sur d’autres motifs invoqués dans la lettre de licenciement. En outre, cette sanction ne peut pas être minimisée par le juge au profit d’un simple licenciement sans cause réelle et sérieuse.

À l’inverse, la faute grave est retenue :

si les termes employés par le salarié sont excessifs, injurieux, diffamatoires ou de nature à gravement déconsidérer la personne concernée ;

– si les critiques virulentes font l’objet d’une large diffusion dans l’entreprise ou auprès de tiers ;

ou si les critiques, à propos d’une situation qui ne concerne pas le salarié, sont exprimées de façon brutale et agressive devant des clients.

Exemples :

une salariée d’une fondation hospitalière avait adressé à tout le personnel une note dans laquelle elle s’insurgeait contre les circonstances du départ du directeur auquel elle exprimait son soutien, tout en désavouant le président du conseil d’administration avec la volonté affichée de soulever l’opinion générale contre ce dernier en dénigrant sa gestion. La faute grave a été retenue.

Repose sur une faute grave, le licenciement d’un salarié qui avait mis en cause, dans un courrier électronique adressé à son chef des ventes, la moralité de ce dernier pour lui imputer l’échec d’une ou plusieurs ventes.

La faute grave a également été retenue pour un salarié qui, lors d’une réunion régionale a qualifié son directeur d’agence de « nul et incompétent » et les chargés de gestion de « bœufs ».

Enfin, a été valablement licenciée pour faute grave, l’adjointe de direction qui, en présence du personnel et à plusieurs reprises, a traité ouvertement son supérieur hiérarchique et directeur de l’établissement de « bordélique qui perd tous ses papiers », de « tronche de cake », qu’il n’est pas « apte à être directeur » et qu’il n’est rien d’autre qu’un « gestionnaire comptable ».

III. La faute lourde peut-elle être caractérisée par des dénigrements ou des accusations non fondées ?

La plupart du temps, le dénigrement ou les accusations non fondées sont considérées comme une faute grave justifiant un licenciement immédiat sans préavis.

Exemples :

abuse de sa liberté d’expression et commet une faute grave, le salarié qui tient des propos calomnieux et malveillants à l’égard d’un membre de la direction au sujet de son patrimoine immobilier. Le salarié avait jeté la suspicion sur ce directeur en insinuant qu’il avait forcément abusé de sa fonction en confondant son intérêt personnel et celui de l’entreprise.

Il en est de même pour le salarié qui envoie une lettre et un courriel accessible à tous les salariés, dans lesquels il dénonce l’incompétence de son employeur et lui conseille de changer de métier.

La faute grave est généralement retenue lorsque le salarié dénigre l’entreprise auprès de ses clients et, de manière plus générale, auprès de tiers.

Exemples :

commet une faute grave l’égoutier-chauffeur (17 ans d’ancienneté) qui émet des critiques virulentes auprès d’un client important sur la qualité du travail accompli par le persnnel et sur la compétence des dirigeants de la société dans laquelle il travaillait.

Constitue également une faute grave, le fait pour un salarié de publier anonymement sur un site Internet de notation des entreprises, accessible à tous, un commentaire dénigrant l’entreprise qui l’emploie..

Le salarié peut être licencié pour faute lourde. La faute lourde est subordonnée à l’intention de nuire du salarié et ne résulte donc pas de la seule commission d’un acte préjudiciable à l’entreprise.

Exemples :

une salariée, mandataire dans une agence immobilière, avait adressé aux clients de la société une lettre dans laquelle elle s’était livrée à une véritable entreprise de dénigrement, jetant le discrédit sur la compétence et le professionnalisme de l’employeur et contestant ses directives. Les juges ont considéré qu’il y avait intention de nuire à l’employeur et que le licenciement pour faute lourde était justifié.

Au contraire, la faute lourde n’a pas été retenue pour un directeur d’agence et expert-comptable qui avait dénigré la politique tarifaire de l’entreprise devant des clients. En effet, la circonstance que le salarié ne pouvait ignorer l’impact de ses propos et leur caractère préjudiciable, compte tenu de son niveau de responsabilité et de sa qualification, ne suffit pas à démontrer que le salarié avait la volonté de porter préjudice à l’entreprise.

IV. Un cadre peut-il manifester son désaccord sur la politique de l’entreprise ou a-t-il une obligation de réserve ?

Un cadre peut et doit s’exprimer dans le cadre de ses fonctions. Sauf abus, il bénéficie de la liberté d’expression. Il peut donc manifester son désaccord et émettre des critiques, sous réserve qu’elles soient mesurées et ne s’accompagnent pas de propos injurieux ou diffamatoires.

Exemples :

un directeur administratif et financier est licencié pour avoir remis au comité de direction un document contenant de vives critiques sur la nouvelle organisation et pour avoir ainsi

manqué à son obligation de réserve. Or, selon les juges, ce cadre investi d’une mission de haut niveau, dans des circonstances difficiles (restructuration) pouvait, dans l’exercice de ses fonctions et du cercle restreint du comité directeur dont il était membre, formuler des critiques même vives sur la nouvelle organisation. Les juges, dans cette affaire, ont pris soin de souligner que le document litigieux ne comportait pas de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs avant de décider que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Un cadre est licencié pour avoir déclaré, devant l’ensemble de ses collègues, qu’il contestait le choix de la direction et refusait de l’accompagner dans la mise en oeuvre de la nouvelle organisation proposée. L’abus dans la liberté d’expression du salarié n’a pas non plus été retenu, les termes employés n’étant ni injurieux, ni diffamatoires ou excessifs.

Toutefois, un désaccord profond et persistant, des critiques répétées ou systématiques peuvent justifier un licenciement.

Exemple :

un chef des ventes ayant 13 ans d’ancienneté a pu être licencié pour cause réelle et sérieuse en raison de ses critiques répétées de la politique commerciale menée par la direction en ce qui concerne les produits, la gestion des stocks, et les délais de livraison.

Enfin, un cadre se doit d’être discret. Les critiques diffusées dans l’entreprise – ce qui a priori ne se justifie, pas sauf à vouloir créer un climat conflictuel – l’exposent à un licenciement.

Exemples :

un directeur commercial, dans une lettre adressée aux membres du conseil d’administration et diffusée dans l’entreprise, avait critiqué la gestion de l’entreprise et l’action du PDG, en invoquant un manque d’organisation, un laxisme vis-à-vis des fournisseurs et des clients et un manque de communication. La faute grave a été retenue.

De même, le fait, pour un directeur d’usine, de s’opposer à la mise en œuvre d’une politique commerciale décidée par la nouvelle direction de la société et destinée à réduire les risques de gestion ne relevait pas de l’exercice normal de la liberté d’expression.

Il en est de même pour un directeur technique ayant manifesté publiquement au sein de l’entreprise et de manière systématique, son désaccord avec les décisions prise par le gérant et ayant délibérément adopté une attitude négative et d’opposition.

En résumé, de par leurs fonctions, les cadres, et notamment les cadres dirigeants, se voient imposer une obligation de réserve renforcée.

À noter que, si le dénigrement de l’entreprise a été fait dans le cadre d’une conversation privée, d’une réunion privée et amicale, ou encore d’une lettre adressée uniquement aux membres du conseil d’administration et aux dirigeants de la société mère, le licenciement a toutes les chances d’être jugé sans cause réelle et sérieuse, tant que les propos tenus ne sont pas injurieux, diffamatoires ou excessifs.

V. L’employeur peut-il sanctionner les propos tenus par les salariés sur les réseaux sociaux ?

Oui, dès lors que l’abus de la liberté d’expression est caractérisé. Ainsi, des propos excessifs d’un salarié, publiés sur un site accessible à tout public et dont les termes sont déloyaux et malveillants à l’égard de l’employeur, caractérisent un abus de la liberté d’expression justifiant le licenciement pour faute grave de l’intéressé.

À l’inverse, dès lors que les propos tenus sur un site internet ne sont ni injurieux, ni diffamatoires, ou excessifs, l’abus n’est pas caractérisé et ne peut être sanctionné.

Au-delà de la caractérisation de l’abus, les propos tenus doivent également avoir un caractère public. Ainsi, dès lors que le salarié publie sur un compte à caractère restreint, dont l’accès est limité à des personnes autorisées et peu nombreuses, ses propos relèvent d’une conversation de nature privée et ne peuvent être qualifiés de faute grave

À l’inverse, un salarié qui publie sur son mur Facebook accessible à tous des critiques à l’égard de son entreprise et de sa hiérarchie, excède son droit à la liberté d’expression et peut être licencié pour cause réelle et sérieuse (CA Lyon, ch. soc., 24 mars 2014, no 13/03463).

Qu’en est-il d’une page dont l’accès est restreint du fait de l’activation des paramètres de confidentialité, mais à laquelle de nombreux « amis » ont accès ? La Cour de cassation a retenu, dans l’arrêt précité du 12 septembre 2018, que le groupe de discussion était limité à des personnes peu nombreuses (14 en l’occurrence) : cela laisse donc à penser que, dès lors que le nombre de personnes pouvant accéder aux contenus est plus important, la conversation peut reprendre un caractère public. La cour d’appel d’Aix-en-Provence a par exemple retenu qu’un profil accessible à 179 « amis » ne pouvait être assimilé à une sphère d’échanges privée (CA Aix-en-Provence, 5 févr. 2016, no 14/13717).

Remarque :

le seul fait de « liker » le commentaire d’une autre personne, quand bien même ce commentaire serait constitutif d’un abus de la liberté d’expression, ne peut être sanctionné dans la mesure où les propos ne sont pas attribuables à celui qui a utilisé la fonction « j’aime » (CA Douai, 24 avr. 2015, no 14/000842).

VI. La dénonciation par un salarié de faits de nature à caractériser une infraction pénale justifie-elle un licenciement ?

Non. L’article L. 1132-3-3 du Code du travail protège :

– les salariés ayant relaté ou témoigné de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont ils auraient eu connaissance dans l’exercice de leurs fonctions ;

– ainsi que les salariés ayant signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (L. no 2016-1691, 9 déc. 2016, JO 10 déc.).

Le lanceur d’alerte doit avoir eu personnellement connaissance des faits allégués et doit agir de manière désintéressée et de bonne foi.

Le lanceur d’alerte ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de tels faits. Tout acte pris à l’égard du lanceur d’alerte en méconnaissance de ces dispositions est nul (C. trav., art. L. 1132-4).

Remarque :

aucune personne ne peut non plus être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de tels faits (C. trav., art. L. 1132-3-3).

Le lanceur d’alerte bénéficie également d’un principe d’irresponsabilité pénale lorsqu’il révèle des informations couvertes par un secret (excepté pour le secret de la défense nationale, le secret médical ou le secret des relations entre un avocat et son client).

Remarque :

les entreprises d’au moins 50 salariés doivent se doter de procédures de recueil des signalements émis par les salariés ou par des collaborateurs extérieurs et occasionnels. Celles-ci doivent garantir une stricte confidentialité de l’identité des auteurs du signalement, des personnes visées par celui-ci, ainsi que des informations recueillies par l’ensemble des destinataires du signalement (L. no 2016-1691, 9 déc. 2016, JO 10 déc., art. 8 ; D. no 2017-564, 19 avr. 2017, JO 20 avr.).

Pour pouvoir bénéficier de la protection des lanceurs d’alerte, les faits dénoncés par le salarié doivent être susceptibles de constituer un crime ou un délit, c’est-à-dire qu’ils doivent paraître potentiellement criminels ou délictuels. Ainsi, le salarié qui a dénoncé une atteinte à la liberté d’expression ne peut pas bénéficier de la protection des lanceurs d’alerte.

À noter que seule la mauvaise foi avérée du salarié, qui dénoncerait des faits qu’il sait inexacts et mensongers, permet d’écarter la protection du lanceur d’alerte et de retenir l’existence d’une faute à l’encontre du salarié. La mauvaise foi ne peut résulter de la seule circonstance que la plainte du salarié n’a pas entraîné de poursuites pénales.

Pour lire une version plus complète de cet article sur le salarié et la liberté d’expression, cliquez

Sources :

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000046330491?init=true&page=1&query=21-13.045&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000041490507?init=true&page=1&query=18-14.177&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000046330491?init=true&page=1&query=21-13.045&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007047340?init=true&page=1&query=02-42.446&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007178079?init=true&page=1&query=90-45.893&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000031227912?init=true&page=1&query=14-14.021&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000042746682?init=true&page=1&query=19-20.394&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000030569929?init=true&page=1&query=14-10.781&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000036829777?init=true&page=1&query=16-18.590&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007410024?init=true&page=1&query=97-45.368&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000026065140?init=true&page=1&query=11-17.362&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000028917621?init=true&page=1&query=12-29.458&searchField=ALL&tab_selection=all
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000028209964?init=true&page=1&query=12-10.082&searchField=ALL&tab_selection=all
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https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000043782031?init=true&page=1&query=19-25.754&searchField=ALL&tab_selection=all
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https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000038674788?init=true&page=1&query=17-24.589&searchField=ALL&tab_selection=all

LE LICENCIEMENT SANS CAUSE RÉELLE ET SÉRIEUSE

Dès lors qu’un employeur décide de mettre fin au contrat de travail à durée indéterminée de son salarié, on parle alors de licenciement. . Néanmoins, il arrive que cette décision puisse être infondée et donner lieu à des dommages et intérêts.

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 La loi du 19 juillet 1928 qui a instauré le licenciement abusif, prévoyait en son article 23, alinéa 6 que « le jugement devra, en tout cas, mentionner expressément le motif allégué par l’auteur de la rupture » du contrat de travail. Ainsi, la Cour de cassation avait interprété ce texte comme énonçant que le licenciement du salarié par l’employeur était licite dès lors que ce dernier le faisait pour le bon fonctionnement de son entreprise.

Anciennement, le salarié devait rapporter la preuve du licenciement abusif. Depuis une loi du 13 juillet 1973, complétée par la loi du 2 août 1989, la position a radicalement changé. Désormais, pour que le licenciement puisse être considéré comme licite, il doit se voir justifié par l’existence d’une cause réelle et sérieuse.


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Par conséquent, dès lors que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, alors ce dernier devra être considéré comme irrégulier. Cette évolution a été apportée dans l’intérêt d’une meilleure protection du salarié. Le Code du travail prévoit l’existence d’une cause réelle et sérieuse en son article L.1231-1 du Code du travail.

La sanction pour l’employeur en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse sera différente selon les situations. L’ancienneté du salarié ainsi que le nombre de salariés au sein de l’entreprise font varier le montant de l’indemnité à verser. Sur proposition du juge, le salarié pourra réintégrer l’entreprise, néanmoins une des deux parties peut refuser cette réintégration. Le plus souvent la réparation passe par l’octroi d’une indemnité.

Le 24 septembre 2017 est entrée en vigueur l’ordonnance « Macron » n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales. Ce nouveau texte permet notamment à un salarié en contrat à durée indéterminée de bénéficier d’une indemnité de licenciement au bout de 8 mois d’ancienneté dans l’entreprise.

Également, un licenciement pourra avoir lieu en raison d’un motif économique ou encore personnel. Cependant, l’existence d’une cause réelle et sérieuse devra toujours exister.

Par conséquent, les choses ont bien changé, l’employeur doit disposer d’un motif pour rompre un contrat de travail. Cela permet de limiter les licenciements abusifs.

Une cause réelle et sérieuse sera toujours nécessaire pour le licenciement (I) l’appréciation de cette dernière est faite par les juges (II)

 

I. L’exigence d’une cause réelle et sérieuse dans le licenciement

La cause réelle et sérieuse est citée dans plusieurs articles du Code du travail. Toutefois, celui-ci ne définit pas cette notion. Ce qui pose problème, car en cas d’absence de celle-ci le licenciement sera injustifié.

Également, il est prévu dans le Code du travail un entretien préalable au licenciement dans lequel les motifs doivent être exprimés. Par la suite, ils devront apparaître dans la lettre de notification de licenciement, s’ils ne sont pas suffisants à caractériser une cause réelle et sérieuse, alors le licenciement pourra être contesté.

Afin d’obtenir un début de définition, il faut rechercher dans les débats parlementaires occasionnés par l’adoption de la loi du 13 juillet 1973.

A) La cause réelle

Pour que la cause soit réelle, elle doit être : objective, existante et exacte.

  • Une cause objective

Au cours des débats parlementaires, le ministre du Travail avait énoncé que la cause réelle

« si elle présente un caractère d’objectivité, ce qui exclut les préjugés et les convenances personnelles. La cause réelle peut être, par exemple, une faute, une inaptitude professionnelle ou une réorganisation professionnelle ».

Ainsi, l’objectivité de cette cause doit reposer sur des éléments extérieurs vérifiables.

La cause doit donc porter sur des faits précis, qui ne sont pas imaginaires et seulement exister dans l’esprit de l’employeur, elle doit reposer sur des faits concrets. La chambre sociale de la Cour de cassation a énoncé dans un arrêt rendu le 29 novembre 1990 « qu’un licenciement pour une cause inhérente à la personne doit être fondé sur des éléments objectifs ; que la perte de confiance alléguée par l’employeur ne constitue pas en soi un motif de licenciement ».

La chambre sociale de la Cour de cassation a eu l’occasion de confirmer cette jurisprudence (Soc., 16 juin 1993) et de la préciser (Soc., 29 mai 2001). Ce dernier arrêt énonce que « la perte de confiance ne peut jamais constituer en tant que telle une cause de licenciement même quand elle repose sur des éléments objectifs ; et que seuls ces éléments objectifs peuvent le cas échéant, constituer une cause de licenciement, mais non la perte de confiance qui a pu en résulter pour l’employeur ».

Enfin, le licenciement ne doit pas être discriminatoire, comme le rappelle l’article L.1132-1 du Code du travail. Les causes de discriminations sont nombreuses : à cause de son âge, d’une discrimination raciale, ethnique, religieuse, politique, en raison de l’orientation sexuelle, de l’exercice du droit de grève, d’une activité syndicale …

  • Une cause existante et exacte

Il a notamment été précisé que la cause réelle devait s’entendre comme existante et exacte. Les faits qui ont causé le licenciement doivent avoir véritablement existé et être la cause exacte du licenciement.

Auparavant, l’employeur pouvait invoquer une insuffisance professionnelle sans avoir réellement à la prouver (1973). Aujourd’hui cela n’est plus admis plus (Soc., 5 février 2002) ; les faits allégués doivent pouvoir être constatés et vérifiables (Soc., 17 janvier 2001).

L’absence de précision dans les motifs équivaut depuis la jurisprudence Janousek de 1976, à un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Soc., 29 novembre et 18 avril 1991 ; Ass. Plén., 27 novembre 1998).

Pour préparer sa défense au fond, le salarié doit avoir connaissance des faits précis ayant amené au licenciement.

Il convient tout de même de préciser que désormais le salarié doit avoir demandé dans un délai de 15 jours à compter de la réception de la lettre de notification, des précisions quant aux motifs de licenciement, sans cette demande, il ne pourra se prévaloir de licenciement abusif pour motif insuffisant.

Enfin, les faits doivent être exacts et à l’origine du licenciement. Même si le motif apparent est réel, c’est-à-dire qu’il existe (insubordination, négligences, insuffisance de travail…), mais qu’il ne constitue pas le motif exact – qui est dissimulé – (participation à une grève, activités syndicales…), le licenciement n’aura pas de cause réelle et sérieuse (Soc., 28 avril 1994).

  • La cause sérieuse

Toujours dans les débats parlementaires de 1973 à l’Assemblée nationale, le ministre du Travail énonçait qu’une « cause sérieuse est une cause revêtant une certaine gravité, qui rend impossible sans dommages pour l’entreprise, la continuation du travail et qui rend nécessaire le licenciement ».

Par conséquent la cause sérieuse pourra résulter de : Faits, fautifs ou non, inhérents au salarié et liés à son activité professionnelle: La faute du salarié doit être sérieuse, c’est-à-dire présenter une certaine gravité. Un licenciement ne pourra plus être justifié par une faute légère (arriver quelquefois en retard à son travail : Soc., 1er déc. 1976).

Il convient également d’opérer une distinction entre la faute sérieuse et la faute grave. La faute grave fera perdre l’indemnité de licenciement et de préavis.  (Soc., 10 juin 1976 ; Soc., 20 juillet 1987).

Également, une cause réelle et sérieuse pourra exister alors même que le salarié n’a pas commis de faute. L’arrêt de principe nommé « Ronssard » rendu le 22 janvier 1992 précise que la cause ne doit pas porter sur un fait de la vie privée du salarié. Cependant, il y a des exceptions. À titre d’exemple, dès lors que cela cause un trouble caractérisé dans l’entreprise alors le licenciement en raison d’un fait de la vie personnelle pourra être retenu.  (Cour de cassation le 14 septembre 2010, Soc, n° 09-65.675).

Le juge a notamment considéré comme causes réelle et sérieuse de licenciement : licenciement : l’absence pour maladie (Soc., 31 octobre 1989), l’inaptitude au travail pour lequel la personne a été embauchée (Soc., 25 février 1985), le refus d’une mutation justifiée par l’intérêt du service (Soc., 14 mai 1987), l’insuffisance de résultats fautive ou non (Soc., 3 et 11 juillet 2001) expressément imputable au salarié.

B) Circonstances économiques

Dans un arrêt rendu par la Cour de cassation le 8 décembre 2000, cette dernière a estimé qu’il y avait bien une cause réelle et sérieuse lorsque le licenciement intervenait si « la réorganisation de l’entreprise est impérative pour la sauvegarde de sa compétitivité ou du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient. L’importance du chiffre d’affaires et les objectifs de la société ne signifient pas que la société est dite en « bonne santé ».

C’est alors au juge du fond d’interpréter le caractère sérieux lié à «  la sauvegarde de sa compétitivité ou du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient »

Cependant, comme on a pu le voir, il n’existe pas de définition claire et précise de la cause réelle et sérieuse dans le licenciement. Le juge doit donc apprécier les situations au cas par cas. C’est ce dernier qui estimera ou non la nécessité de sanctionner l’employeur

II. Le contrôle de la Cour de cassation

La Cour de cassation n’est pas venue apporter une définition claire de la notion. Elle vient simplement qualifier les faits, et ce, au cas par cas. La Cour de cassation opérait même un contrôle disproportionné, car rappelons-le ; la Cour de cassation ne s’occupe, en principe, que des questions de droit et non de fait, comme l’a réaffirmée la loi du 25 juin 2001.

Elle est donc venue restreindre son contrôle en précisant que « le juge du fond, par une décision motivée, n’a fait qu’user des pouvoirs qu’il tient de l’article L122-14 du Code du travail (ancien) en décidant que le licenciement procédait d’une cause répondant aux exigences de ce texte ». (Soc., 10 décembre et 12 décembre 1985)

Par la suite, la Cour de cassation s’est limitée à un contrôle de motivation des juges du fond : « en l’état de ces énonciations, la Cour d’appel a décidé, dans l’exercice du pouvoir qu’elle tient de l’article L122-14-3 (ancien) du Code du travail, par une décision motivée que le licenciement procédait d’une cause réelle et sérieuse ».

Cependant, on remarque que la Cour de cassation a parfois réalisé un contrôle large de qualification en dépit de la règle énoncée ci-dessus. Elle est notamment intervenue sur la licéité même de la cause du licenciement.

Le rôle du juge est très important et permet d’apporter des précisions. Les juges du fond apprécient librement le caractère sérieux et réel de la cause.

A) La preuve de la cause réelle et sérieuse dans le licenciement appréciée par le juge

Le caractère réel et sérieux du licenciement sera donc apprécié par le juge. Pour cela, les deux parties devront fournir des preuves comme le prévoit l’article L.1235-1 alinéa 3 du Code du travail. De plus, le juge pourra ordonner toute mesure qu’il estime nécessaire pour éclairer le débat.

La charge de la preuve incombe désormais non pas au salarié, mais à l’employeur. C’est une modification qui a été apportée par la loi de 1973. Néanmoins cela n’était pas vraiment respecté, en effet, dans un arrêt en date du 19 janvier 1977 la chambre sociale de la Cour de cassation avait estimé que L’allégation d’un motif en apparence réel et sérieux suffisait pour permettre à l’employeur de ne pas être condamné pour licenciement abusif.

Ainsi, le risque de la preuve pesait toujours sur le salarié. Depuis une loi du 2 août 1989, celui-ci n’incombe définitivement plus au salarié. L’employeur doit pouvoir prouver la cause réelle et sérieuse. Également l’article L.1235-1 alinéa 4 du Code du travail précise que « si un doute subsiste, il profite au salarié »

L’apparence de la cause réelle et sérieuse n’est donc plus suffisante. Des éléments de preuve apportés par l’employeur doivent corroborer les faits allégués. Dans le cas contraire, le licenciement sera jugé abusif et donc sanctionnable.

Les évolutions sont à l’avantage du salarié.

B) La sanction décidée par le juge en l’absence de cause réelle et sérieuse

L’article L122-14-4 du Code du travail précise que dès lors qu’il y a une absence de cause réelle et sérieuse dans le licenciement, alors l’employeur s’expose à des sanctions.

L’article L.1235-3 du Code du travail prévoit une distinction entre le salarié travaillant dans une entreprise de moins de onze salariés ou plus. Également, les indemnisations varient en fonction de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise.

Également, l’article L.1235-2 du Code du travail prévoit que si la cause est réelle et sérieuse, mais le licenciement est irrégulier : le Code du travail prévoit comme sanction l’obligation d’accomplir la procédure de licenciement, l’allocation d’une indemnité d’1 mois de salaire, la condamnation de l’employeur au remboursement des allocations de chômage.

Les deux sanctions sont prévues en l’absence de cause réelle et sérieuse :

– la réintégration (mesure rarement prise, car il apparaît difficile de réintégrer une entreprise dans laquelle son employeur ne veut plus de soi),

– une indemnité

Les salariés qui ne peuvent bénéficier de l’application de l’article L122-14-4 du Code du travail ont droit à une indemnité calculée en fonction du préjudice subi à cause du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Depuis l’ordonnance Macron du 22 septembre 2017 des nombreux changements sont intervenus. Notamment concernant l’indemnité de licenciement, l’ordonnance est venue instaurer le barème Macron. Celui-ci instaure des planchers et des plafonds. Ces plafonds sont prévus à l’article L 1235-3 alinéa 2 du Code du travail. Et diffère selon la taille de l’entreprise et l’ancienneté du salarié.

Le montant sera donc fixé en fonction de ce barème qui prévoit donc une indemnité minimale et maximale. Toutefois, l’ordonnance permet de cumuler dans la limite des montants maximaux l’indemnité reçue à cause de la rupture du contrat et les indemnités prud’homales. Cependant, ce cumul ne sera possible que dans trois conditions, l’employeur n’a pas respecté les procédures de consultation des représentants du personnel, il ne respecte pas la priorité de réembauche ou si la mise en place d’un comité social et économique fait défaut.

Enfin, l’article L1235-3 prévoit que l’indemnité ne soit pas inférieure aux salaires des six derniers moins, néanmoins pour en bénéficier le juge doit prononcer que le licenciement est nul. Pour que le licenciement soit nul, il doit porter sur : violation d’une liberté fondamentale, harcèlement moral ou sexuel, application d’une mesure discriminatoire ou action en justice engagée par le salarié pour condamner une mesure discriminatoire ou contraire à l’égalité professionnelle entre hommes et femmes, dénonciation d’un crime ou d’un délit…

Le Conseil Constitutionnel dans une décision du 7 septembre 2017 a validé le barème Macron.

Cependant, il convient de rappeler que ce dernier n’a pas fait l’unanimité auprès des juridictions. Les conseils des prud’hommes estiment que ce dernier n’est pas applicable conformément à l’article 10 de la convention n° 158 de l’organisation internationale du travail qui imposait le versement d’une «  indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée » en cas de licenciement injustifié

Le 17 juillet 2019, la Cour de cassation avait eu l’occasion quant à elle de confirmer l’applicabilité du barème, écarté peu de temps avant par le conseil de prud’hommes de Grenoble le 22 juin 2019.

Le barème est au cœur de nombreux débats. La Cour de cassation a très récemment eu l’occasion de se prononcer à nouveau en faveur du barème Macron. En effet dans un arrêt rendu le 11 mai 2022, elle a énoncé que le barème Macron n’était pas contraire à l’article 10 de la convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail. Elle a également précisé que le juge français ne pouvait écarter, même au cas par cas, l’application du barème au regard de cette convention internationale. Et finalement, que la loi française ne peut faire l’objet d’un contrôle de conformité à l’article 24 de la Charte sociale européenne, qui n’est pas d’effet direct.

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LA RESPONSABILITÉ DE L’EMPLOYEUR DU FAIT DE L’USAGE DES MAILS PAR SES SALARIES

Aujourd’hui, l’utilisation d’internet par les salariés est essentielle pour de nombreuses entreprises. Néanmoins, l’usage que peut faire le salarié de la connexion internet de l’entreprise pourrait amener à engager la responsabilité de l’employeur. Mais alors, quelle est la responsabilité de l’employeur du fait de l’usage des mails par ses salariés ?

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Classiquement, la responsabilité de l’employeur vis-à-vis des faits de son salarié correspond à la responsabilité délictuelle prévue dans le Code civil.

Cependant, bien que l’employeur puisse être tenu responsable des actes de ses salariés, la responsabilité de ces derniers n’est pas totalement exclue.

Nous verrons dans le cadre de la responsabilité de l’employeur du fait de l’usage des mails par ses salariés que pour certains, la sévérité vis-à-vis de l’employeur est justifiée par la nécessité de protéger les victimes. Mais dans certains cas, d’autres estiment que cela est particulièrement difficile pour l’employeur.

De nos jours, l’utilisation des mails est quotidienne dans l’entreprise, par conséquent, la responsabilité de l’employeur devrait peut-être se voir limitée.

I. La responsabilité civile des commettants du fait de leurs préposés

L’article 1242 alinéa premier du Code civil dispose que  “on est responsable non seulement du dommage que lon cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que lon a sous sa garde”.

Également, l’article 1242 alinéa 5 du Code civil énonce que “les maîtres et les commettants …sont responsables… du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés.


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Par conséquent, l’employeur est responsable des activités de ses salariés. Il s’agit d’une responsabilité de plein droit. Aucune faute de l’employeur n’est nécessaire pour que sa responsabilité puisse être engagée.

Dans un arrêt rendu le 19 mai 1988 en assemblée plénière, la Cour de cassation a eu l’occasion de définir les contours et les limites de cette responsabilité. La Cour a dégagé trois conditions pour exonérer l’employeur de sa responsabilité, ces dernières doivent toutes être remplies. Tout d’abord, il faut que le salarié ait agi hors de ses fonctions, ensuite qu’il ait agi dans l’autorisation de l’employeur et enfin que le salarié ait agis à des fins étrangères à ses attributions. Si toutes ses conditions sont remplies, alors, l’employeur se verra exonéré de sa responsabilité et le salarié sera seul responsable de ses actes.

La jurisprudence n’admet cependant que rarement l’exonération de la responsabilité de l’employeur.

Dès lors que l’infraction est commise sur le lieu de travail du salarié et pendant son temps de travail, la jurisprudence estime que le salarié n’a pas agi à des fins étrangères à ses attributions.

Dans un arrêt rendu par la Cour de cassation le 17 mars 2011, la cour n’a justement pas retenu l’exonération de la responsabilité de l’employeur alors qu’au vu des faits, on aurait pu s’attendre à une décision contraire. En effet, plusieurs élèves avaient été victimes d’agressions sexuelles par leur professeur de musique. Ce dernier avait agi pendant son temps de travail et sur son lieu de travail. Cet arrêt illustre la difficulté pour l’employeur de réunir les conditions d’exonération de responsabilité.

II. La responsabilité de l’employeur du fait de l’activité de ses salariés sur internet

L’émergence d’internet dans le monde du travail a amené au développement de la responsabilité de l’employeur du fait des activités de ses salariés. En effet, internet a étendu le champ ces activités.

Dans un arrêt rendu par la cour d’appel d’AIX le 13 mars 2006 a eu l’occasion de se prononcer sur la question de la responsabilité de l’employeur du fait de l’activité de ses salariés sur internet. En l’espèce, un employé d’une entreprise de nouvelles technologies avait sur son lieu de travail confectionné un site internet ayant pour objectif de critiquer de manière agressive une grande société d’autoroutes. Pour réaliser ce site internet, il avait en grande partie utilisé les ressources de son entreprise. La société d’autoroute a alors porté plainte contre l’employeur du salarié.

Le salarié a été condamné sur différents fondements au regard de son activité délictuelle et dommageable (contrefaçon …).

De manière plus étonnante, La Cour de cassation a également retenu la responsabilité de l’employeur en vertu de l’article 1242 alinéa premier du Code civil. Il s’agit du premier cas où un employeur voit sa responsabilité retenue du fait de l’activité de l’un de ses salariés sur internet. Il convient de comprendre pourquoi les juges n’ont pas retenu, les critères d’exonération de la responsabilité de l’employeur dégagé par la jurisprudence, en l’espèce.

Concernant le premier critère, à savoir si l’employé a agi ou non dans le cadre de ses fonctions, la cour considère que le salarié avait bien agi dans le cadre de ses fonctions. Ce dernier était un technicien et utilisait par conséquent un ordinaire et disposait d’une connexion à internet quotidienne pour remplir ses fonctions.

Sur le second critère, la cour estime que le salarié n’a pas agi sans autorisation. En effet, son employeur lui avait même laissé une note indiquant qu’il pouvait utiliser d’autre site internet si ces derniers présentaient un intérêt direct avec son activité.

Néanmoins, il est courant dans les entreprises que les salariés puissent consulter des sites qui ne seraient même pas en relation avec leur activité sans pour autant qu’une note les y autorisent. Par conséquent, dans des cas d’espèce similaires d’autres salariés n’ayant pas cette autorisation express auraient donc agi sans l’autorisation de l’employeur.

Le dernier critère, portant sur le fait que l’employé est agi à des fins étrangères à ses attributions, pour les juges, ce n’est pas le cas. Ils ont estimé que le salarié ayant été autorisé à utiliser l’accès à internet, et ce, même en dehors de ses heures de travail n’avait donc pas agi à des fins étrangères à ses fonctions. Ici aussi, de nombreux salariés auraient pu se retrouver dans cette situation.

Ainsi, la solution retenue en l’espèce est particulièrement sévère pour l’employeur, cette situation pouvant arriver fréquemment avec l’omniprésence d’internet dans les entreprises.

Tous les salariés peuvent publier facilement sur des forums, réseaux sociaux ou encore des blogs. On pourrait donc facilement y retrouver de la diffamation ou de la contrefaçon.

Il apparaît donc important que les employeurs puissent agir contre l’engagement de leur responsabilité du fait des activités de leur salarié sur internet. Cela pourrait amener à un refus d’utilisation d’internet (inscrit au règlement intérieur) pour des utilisations autres que celles en rapport direct avec l’activité du salarié.

Cependant, il est nécessaire de rappeler que cette responsabilité a pour objectif d’assurer à la victime une protection bien supérieure, en effet, l’employeur étant généralement plus solvable que le salarié. Également, empêcher ses salariés d’avoir accès à internet apparaît aujourd’hui comme bien trop radicale, voire impossible selon le métier.

III. Le pouvoir de surveillance et de contrôle de l’employeur

Les employeurs peuvent contrôler et limiter l’utilisation d’Internet pour empêcher une utilisation abusive des outils informatiques dans leurs entreprises. Pour ce faire, l’employeur dispose d’un pouvoir de surveillance et de contrôle. Ces pouvoirs peuvent donc révéler des manquements éventuels de la part de ses salariés, assurer la sécurité du réseau de l’entreprise et limiter les utilisations à des fins personnelles d’internet par les salariés.

L’employeur pourra à ce titre avoir accès aux fichiers créés sur le temps de travail, aux courriels issus de la boîte mail professionnelle ainsi qu’aux sites internet visités par le salarié.

Cependant, les pouvoirs de l’employeur ne doivent pas être exercés de manière excessive. Le salarié bénéficie du droit au respect de sa vie privée, principe découlant de l’article 9 du Code civil. Le salarié doit avoir connaissance de la possible surveillance de l’employeur. Également, si un fichier est identifié comme strictement personnel par le salarié avec la mention “PERSONNEL” ou “STRICTEMENT PERSONNEL” alors l’employeur ne pourra avoir accès à ces fichiers qu’en présence du salarié. Concernant les courriels, le principe est similaire, si le salarié les identifie comme strictement personnels alors l’employeur ne pourra y avoir accès.

Enfin, la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 9 juillet 2008 a eu l’occasion de se prononcer sur les connexions internet réalisées via la connexion mise à disposition du salarié par l’entreprise. La cour juge que l’employeur doit pouvoir avoir accès aux sites consultés par son salarié. Également, il a été précisé que même si les sites ont été mis en favoris, cela ne leur confère pas un caractère privé.

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Source :
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000023742368/
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000019166094/
https://www.cnil.fr/fr/les-outils-informatiques-au-travail